Jardot BastienLaece Ryef Tome 2 Take Your Chance
© Take Your Chance – Pau 2015 – ISBN 978-2-37351-003-4Toute représentation, traduction, adaptation ou reproduction, même partielle, par tousprocédés en tous pays, faite sans autorisation préalable est illicite et exposerait lecontrevenant à des poursuites judiciaires. Réf. : loi du 11 mars 1957, alinéas 2 et 3 del’article 41.Une représentation ou reproduction sans autorisation de l’éditeur ou duCentre français d’exploitation du droit de copie (20 rue des Grands-Augustins, 75006Paris) constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code.
Prélude : La légendeLa lame passa à un rien de mon visage, mais le tranchants’abattit là où je n’étais désormais plus. D’instinct, je meretournai, sentant à raison le danger dans mon dos : par unréflexe inespéré, je pus bloquer le pied qui aurait pu m’atteindreen plein visage, mais qui ne manqua pas de me projeter à terre,un peu plus loin. Me relevant, je fus heureux de voir que Naxilaet Falguy prenaient l’entraînement au sérieux.Dès notre retour du Corpus, je leur avais demandé de prendresur leur temps pour s’exercer avec moi, mais ils ne se doutaientpas une seconde que l’intérêt, pour moi, était de réussir àmaîtriser mes Armes. Mais, après des semaines de travail, je nepensais toujours pas être capable d’y parvenir… Me tirant demes pensées, Falguy reprit l’assaut, talonné de près par Naxila.Une épée passa trop à droite, l’autre ne frappa que le sol. Afinde progresser davantage, j’avais choisi de me battre à mainsnues, mais je ne portais qu’exceptionnellement des coups, tropoccupé à éviter les interminables attaques. Alors que mon plusvieil ami sautait vers moi, une sonnerie bruyante se fit entendre,le stoppant dans sa nouvelle tentative : l’entraînement étaitterminé, et après l’effort, le réconfort ! Comme tous les autresjours, nous partîmes nous reposer autour d’un verre dans unpetit bar de quartier non loin du Château où nous nouscombattions. Les deux étaient de fameux compagnons, aussidangereux dans le combat que prompts à rire en dehors. Defrancs rieurs qu’il faisait bon de côtoyer, hélas trop souventsérieux. Il était agréable de se retrouver calmement, loin de
l’agitation et des conflits que nous ne connaissions que tropbien. Il était agréable de goûter à la douceur de la vie qu’onpouvait mener, parfois. Mais sans la femme qui la rendait sibelle à mes côtés, ce plaisir aurait été incomplet. Depuisplusieurs mois, nous partagions nos vies et notre relation n’avaitrien à craindre. Lorsqu’elle arriva à la terrasse du bar, je meperdis – une fois de plus – dans son regard bleu gris. Ce regardporteur d’une flamme que je n’avais jamais vue avant de larencontrer. C’était une femme dont le savoir me surprenaitchaque jour, mais dont le caractère m’éblouissait davantageencore. Toujours optimiste, elle n’avait jamais montré lamoindre crainte et avançait avec confiance en elle, et surtout enceux qu’elle aimait. Je me levais pour la rejoindre et profiterd’un nouveau de ses baisers, rapides, semblant si futiles, maispourtant porteurs d’un sens infini. La conversation changealorsqu’elle arriva, mais ne perdit pas pour autant son entrain etsa bonne humeur :« Heureusement que tu n’es pas là pendant qu’on s’entraîneMarie, lui fit Falguy, sinon il ne saurait se concentrer… - Reste à voir s’il sait se concentrer en temps normal, surenchérit Naxila. - Mais, qui a dit qu’il y avait besoin de ça pour vous affronter ?, me défendis-je. - Du calme, vous trois ! Je suis venue pour vous annoncer la nouvelle de ce matin, que vous avez sûrement ratée avec vos combats. Elle n’est pas vraiment bonne, à vrai dire… Plusieurs empires conquérants se sont rapprochés, et on parle d’une coalition à venir. La
montée de la Coalition des Mondes Libres en rend certains jaloux, apparemment… »En effet, depuis que nous étions revenus de Première, les chosess’étaient améliorées, à la surprise générale. La situation étaitdéjà meilleure que tout ce que nous avions espéré, mais notrearrivée en tant que Coalition la transforma en une situation derêve. De tout l’univers, âmes et marchandises affluaient surMuchonie et Frilyin, mais également sur les autres colonies quiconfirmèrent leur soutien total, ayant pour la première foisl’opportunité de se développer honorablement. Quant à nous,nous nageâmes sur la vague de popularité que nous suscitions.Les investisseurs se faisaient légions, les touristes tout autant,et de nombreux mondes admiraient ouvertement la Coalition.Après trois mois de vie, nous avions déjà reçu plusieurscandidatures, plusieurs demandes d’aide de la part de planètesindépendantes ne voulant pas se soumettre et rester libres. Nousétions un rêve pour certains… Et apparemment, une ombre unpeu trop envahissante pour d’autres. Marie confirma macrainte : l’information venait de Folan, qui suivait pour noustout ce qui se disait dans l’Auditoire, et nous tenait au courantde toutes les grandes nouvelles. Chacun se tut, plongé dans lespensées que lui inspirait l’annonce. Je fus le seul à le rompre,m’excusant de m’en aller, mais devant contacter Astiraw auplus vite. Marie m’accompagna, me calmant simplement entenant ma main dans la sienne. Au Palais, la communication netarda pas à être lancée.« Bryx, j’ai eu vent d’une mauvaise nouvelle, et je crois qu’ilfaut qu’on en parle…
- J’en ai entendu parler. Cette histoire de regroupement belliciste m’inquiète. Il n’y a aucun doute sur leurs intentions, c’est nous qu’ils veulent. Il faut s’y préparer… - Je vois. Je contacte les autres et… - Sois discret, surtout, il ne faut pas que nous paraissions agressifs ! Il faut juste que tous les hommes s’attendent au branle-bas de combat. »Son visage disparut, mais sa voix vibrait encore en moi. Il étaitinquiet, je le ressentais… Pendant des années, nous avionscombattu côte à côte, et chacun de nous pouvait deviner ce quepensait l’autre. Seul Falguy me connaissait et me comprenaitmieux qu’Astiraw, mais le savoir dans cet état n’augurait riende positif. Les colonies s’étaient honorablement développées,mais une guerre ouverte face à de nombreux mondes prêts ethabitués risquait d’apporter la mort plus qu’autre chose. Je fisdonc la seule chose à faire ; en moins d’une heure, Lucia, Naxilaet Falguy m’avaient rejoint en salle de réunion, et n’eurent pasà attendre : « Vous êtes déjà au courant, alors je ne vais pas vousrappeler pourquoi vous êtes là. Vous êtes en charge du militaire,et il va falloir le mobiliser. Astiraw est du même avis que Folan,ce qui doit nous alerter. D’après lui, il faut que les armées soientprêtes. Naxila, je veux une organisation parfaite, et le calme doitperdurer, aucune information ne doit filtrer. Falguy, Lucia, lesflottes militaires doivent être prêtes au plus vite. Faisons au plusvite… »Ils hochèrent tous la tête, puis se dirigèrent vers la sortie. MaisLucia ne la passa pas, et fit demi-tour pour revenir vers moi.
« Laece, depuis le temps, on n’a jamais vraiment pris le tempsde parler. J’ai pu suivre ce que tu avais vécu par les récitsmilitaires, mais que t’est-il vraiment arrivé ? - La guerre m’est arrivée. Je ne me battrai pas pour les mêmes raisons cette fois. Mais si tu sais où je suis passé, je ne sais rien de ce que tu es devenue… - Ton départ a été difficile, répondit-elle en s’asseyant. Et j’ai surtout compris qu’il fallait que je me débrouille par moi-même. Je n’ai jamais été douée pour me battre, mais j’ai trouvé le moyen d’aider de mon mieux, c’est pour ça que je me suis dirigé vers les machines et la mécanique. Tu ne m’as pas offert mon poste par hasard, tu as lu mon dossier, tu sais que j’ai été diplômée avec les honneurs. Après ça… Il y a eu la rébellion. »Nous nous tûmes un instant, revivant d’anciens souvenirs. Ilsfaisaient partie d’un passé révolu, et elle ne tarda pas à reprendrela parole :« Il y a un vaisseau qui n’est pas compté dans nos effectifs etqui pourrait pourtant donner un beau coup de main… - On a des tas de transporteurs, de chasseurs, de croiseurs, et j’en passe. Qu’est-ce qui peut être un atout comparé à ça ? - Le premier dans lequel tu as voyagé. L’Ombre de Puissance Laece. Contrairement à ce qui s’est dit, il n’a pas été démantelé, et il n’attend que de redécoller. Il est extrêmement résistant, peut transporter des centaines de milliers de troupes ou être modifié pour devenir une
puissance de frappe des plus importantes. C’est un véritable bijou, et il y a un coup à jouer grâce à lui. Il lui manque juste un petit coup de jeune, mais le remettre d’aplomb et au goût du jour risque de prendre un petit temps, et surtout de coûter une petite fortune. - Crois-tu vraiment que ça en vaut la peine ? - Oui. »Sa dernière réponse, laconique, fut plus percutante que sesarguments. Elle était clairement sûre d’elle et savait ce qu’ellefaisait. Dans de pareilles conditions, refuser aurait été idiot.J’acquiesçai d’un hochement de tête, avant de la voir partir,satisfaite d’elle-même. Elle n’avait pas changé…Après elle, je fis venir Peart, Marie et Traflana. Cette dernièreétait la plus jeune au gouvernement, mais elle remplissait satâche à merveille, et nul n’avait pu lui adresser le moindrereproche durant ses mois d’activité. Je l’avais fait venir pour laprévenir de l’état de guerre qui s’amorçait, et auquel il faudraitqu’elle se prépare afin de rester irréprochable quant àl’approvisionnement. Aucune famine ne devait arriver. Ellecomprit son rôle et comprit qu’elle n’avait besoin d’assister à laconversation qui s’amorçait, et que Marie entama avant que jen’en aie l’opportunité :« J’ai vu sortir plusieurs responsables de différents ministères,et tu nous convoques nous. J’en conclus que ta conversationavec Astiraw n’a rien apporté de bon. La menace est donc réelle,et je présume que mon travail est d’informer la population ?
- Au moins, je n’aurai pas eu à m’expliquer ! Mais attends, il ne faut pas affoler le… - Je sais, ne t’inquiète pas, j’ai déjà prévu le coup. Dès demain matin, le journal numérique officiel portera une mention spéciale. - Merci Marie. Peart, tu auras un travail assez similaire, disons. Sauf que ce sont tes sous-ministères qu’il faut que tu informes, et plus que jamais, il faut que les informations circulent avec fluidité entre eux. Des fonds vont être nécessaires et Elrik devra donner un coup de main, pour un projet sur un vaisseau qui pourrait être essentiel pour le conflit qui s’annonce. Il faut qu’avant ce soir les réparations aient commencé. Contacte Lucia pour plus de détails, elle est responsable du projet. - Ça sera fait Laece. La priorité ira sur ces travaux. »Il ne me restait rien à leur dire, et, comme leurs prédécesseurs,ils repartirent. Il ne me restait que deux responsables à quim’adresser, et c’est après une demi-heure d’attente que Mirkenet Alrik se présentèrent devant moi. Ils partageaient lecommandement du réseau d’espionnage et d’informationsmuchonien. Ils avaient également entendu parler de la coalitionennemie qui s’annonçait, et m’affirmèrent que leurs hommesprenaient l’histoire à cœur et s’investissaient dans la récolte dedonnées comme jamais. L’entretien ne dura donc que quelquesminutes, et je fus finalement seul au milieu de la ville agitée.Encore une fois, la guerre se présentait à moi, et encore une foisj’allais devoir prendre les armes. Combien de vies allais-je
encore prendre ? Mais cette fois, je n’étais pas aveugle, je necombattrais pas pour ma colère. Pour la première fois de monexistence, le combat auquel j’allais prendre part permettrait laliberté de plusieurs et non l’emprisonnement de beaucoup.Le lendemain, comme promis, la planète entière put lire lamenace qui se dessinait. Mais ce que je lus était d’une autreimportance : la menace était née, et avait un nom. Quelquesheures avant le lever des Soleils, la Coalition des ConquérantsColonisateurs avait été officiellement créée. Elle comptait troisempires, chacun appartenant à une espèce réputée belliqueuse.Les Diolastis, les Nissians, et surtout, les Raenuths. Les derniersétaient réputés pour être les plus grands conquérants del’univers, mais le visage de leur diplomate ne m’était pasinconnu. Un visage reptilien, long et allongé, doté de grandesdents meurtrières entre lesquelles logeait une longue langueinsidieuse. Pour finir le portrait, deux petits yeux dont lespupilles ne cessaient jamais leur mouvement donnaient à cetêtre une aura profondément noire. Mais la noirceur d’âmen’aurait pas été si terrible, si elle n’avait été accompagnée d’uncorps de guerrier. Haut de près de deux mètres cinquante, cedernier était recouvert des mêmes écailles que je devinaisterriblement résistantes. La position des membres était la mêmeque celle d’un humain, mais ils n’étaient pas les mêmes. Lesbras, et les jambes, dans les mêmes proportions que chez nous,se terminaient par des mains dotées de seulement trois doigts.Enfin, une queue large et d’une taille honorable accompagnaitles mouvements précis et puissants de celui qui semblait être unvéritable chef. Une sonnerie me tira de mes observations de laretransmission du discours de création : « Laece, c’est Mirken.On a pas mal de données sur la CCC, je t’envoie ça. Ca s’avère
pas simple, mais largement à notre portée. ». Un des nombreuxécrans du Palais s’éveilla, prêt à délivrer les renseignements queje n’attendis pas une seconde pour lire : « Raenuths : ils , sansdoute aucun ,les chefs officieux de la coalition. Ils ont une forteréputation, et sont de farouches combattants. Leur société estentièrement dévouée à la guerre et au combat, et se découpe endifférentes castes. Les Sages sont les plus âgés, ils ontprobablement connu de nombreuses batailles, et sont en chargede la politique. Leur nombre et leurs caractéristiques nous sontinconnus. Les Gurineks, destructeurs dans leur langue, sontceux dont nous devrons le plus nous méfier. Ils sont les soldatsd’élite, les meilleurs des meilleurs. Le plus célèbre était présentlors de la création de notre édifice politique : Gre’n’ghut. Ilssont tous plus ou moins de son gabarit, physiquement parlant.Viennent ensuite les Tarops, géants en Raenuth. Ils sont,comme les Gurineks, peu nombreux, et c’est tant mieux : ilsfont tous de trois à quatre mètres cinquante. Leur force estcolossale, mais leur vitesse en est réduite. Les Krathors,assassins, sont des troupes d’infiltration. Hauts d’environ unmètre cinquante, ce sont les rapides et non les forts, mais ils sontplus nombreux que les Gurineks. Enfin, la caste la plus basseest celle des Atranns, les tueurs : ce sont les soldats de base.Campés à, en moyenne, un peu moins de deux mètres, ils sontrelativement polyvalents et sont le gros de l’armée. Ils sont lesRaenuths dits normaux. Je souris. Intéressant, des adversairestotalement différents de tout ce que j’avais déjà affronté !« Diolastis : les moins connus du groupe, et considérés commeles moins dangereux. Leur physionomie est absolumentunique : un tronc campé sur cinq pattes, duquel dépassent troisbras et une tête possédant, de manière visible, uniquement une
bouche et quatre yeux. À chaque naissance, chaque membre estmodifié, souvent partiellement remplacé par un substitutmétallique plus résistant, pouvant accueillir diverses armes parla suite. Leurs sens sont particulièrement développés, et leurcorps n’est pas sans rappeler celui d’un insecte. Leurs bras seterminent par des mandibules extrêmement coupantes, ce qui enfait des ennemis dangereux au corps à corps. Leur taille varie,car leurs pattes peuvent s’étendre où se raccourcir, se placer demanière ronde ou alignée. Mais en général, on estime qu’ilsrestent près de deux mètres de hauteur. Ils utilisent des armesénergétiques qui nous sont inconnues, passant à travers nosarmures. Heureusement, elles ont une portée limitée, et laconstitution des Diolastis est faible. Mais ils sont experts entechnologie, et c’est pourquoi il faut particulièrement s’enméfier.Nissians : nous n’en savons que peu de choses. Chaque individuest, à la naissance, attribué à un corps mécanique qui le suivrajusqu’à sa mort. Si la machine meurt, l’être à l’intérieur meurt.Mais le problème se situe ici : il est impossible de tuer unNissian sans détruire son enveloppe, qui est faite d’un alliageinconnu extrêmement résistant. La grande force des Nissiansn’est donc pas la puissance, la vitesse ou la tactique. Leur atoutprincipal est leur résistance et leur endurance. Ils peuvent tenirdes heures en combat en encaissant des dommagesinimaginables. Leur espèce est en crise et leur nombre vadécroissant, mais il en reste suffisamment pour donner du fil àretordre à nos troupes. »
Mise en page et édition Take Your ChanceAchevé d’imprimer par : I.C.N SARL, Orthez – FranceDépôt légal : mars 2015ISBN 978-2-37351-003-4
Search
Read the Text Version
- 1 - 16
Pages: