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No 136 Acteurs de l/'économie

Published by AGEFI, 2017-07-12 02:31:28

Description: Juillet 2017

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BRICE HORTEFEUX EntreprendreMais dans les couloirs du conseil régio- LE « VICE-ROI » RONGE SON FREIN Wauquiez. «  Le président, c’est Wauquiez,nal, d’aucuns y voient un marché de Au sein de la commission d’aména- personne ne le conteste. Il tranche. Hortefeuxdupes. « Le seul « Monsieur Auvergne », c’est gement du territoire, qu’il préside, sa est plus sur une thématique  », conclut leLaurent Wauquiez », estime, en off, un élu manière de faire rebute certains élus. « Il président de l’Agence Auvergne de déve-de la majorité. « À l’hôtel de région de Cler- a une conception complètement rétrograde loppement économique. Pour l’heure,mont, Hortefeux espérait s’installer dans le de la politique. C’est le monarque, comme Brice Hortefeux jure ne pas penser àbureau de René Souchon, l’ancien président Laurent Wauquiez, regrette Jean-Charles la présidence en se rasant. Après avoird’Auvergne. Mais Wauquiez l’a confiné dans Kohlhaas, porte-parole du Rassemble- laissé plané le doute, Laurent Wauquiezcelui de l’ancien directeur de cabinet. C’est une ment citoyen écologiste et solidaire (EELV a finalement renoncé à se présenter auxmanière de lui faire comprendre qu’il occupe – PG). À la commission d’aménagement, on législatives, fermant la porte d’un rema-un strapontin  ». Anecdotique, coupe Brice ne nous transmet pas les informations. » Au niement à la tête de la région. Mais enHortefeux. « Ç’eût été un mauvais signal. Il point d’envisager de saisir la Commission coulisses, l’affrontement entre Étienneaurait été dit que Laurent Wauquiez délais- d’accès aux documents administratifs Blanc et Brice Hortefeux est invoqué poursait la Région.  » Avait-il l’illusion d’impo- (Cada) afin d’obtenir la liste des élus réfé- expliquer cette décision. « Brice Hortefeuxser sa carrure à l’autoritaire président  ? rents par territoire, fait savoir l’élu. « Avec s’inscrit davantage sur la ligne de Laurent«  Comme tous les vice-présidents, il fait ce Étienne Blanc, nous arrivons à discuter, mais Wauquiez qu’Étienne Blanc, plus progres-que Laurent Wauquiez lui dit de faire, rien de Brice Hortefeux considère que le délibératif siste. Néanmoins, il n’est pas certain qu’ilplus », tranche Jean-François Debat. « Entre ne sert à rien. » aurait eu la majorité pour tenir la Région »,eux, ce n’est pas une amitié, c’est une alliance. La régence de l’Auvergne, bout du che- analyse un élu d’opposition. Alors enQuelque part, Hortefeux est « vice-roi » d’Au- min pour Brice Hortefeux ? « En tout cas, attendant une opportunité inopinée, levergne. C’était son objectif. » je ne vois pas chez lui de volonté d’imprimer «  vice-roi  » ronge son frein. Et un élu sa marque sur la politique régionale. Il suit proche de commenter : « Je n’ai pas le sen- la ligne Wauquiez  », poursuit Jean-Fran- timent qu’il ait renoncé à quoi que ce soit. » çois Debat. « Je ne sens pas qu’il guette le coup d’après », estime le maire de Bourg- en-Bresse. «  Si je compare à un club de rugby, vous avez le président et le mana- ger général  », illustre Frédéric Bonichon, conseiller régional LR, fidèle de Laurent Tous les Vendredis à 19h15En direct des Nuits de Fourvière et jusqu’au 28 juillet 2017« Vendredi aux Nuits » © Nuits de Fourvière - Loll Willems. Une émission animée par Lucie Baverel LYON / 88.4 BOURGOIN-JALLIEU / 95.9 ROANNE / 88.3 Acteurs de l’économie1-7/L0a5/2T0r1ib7un08e:2251 SAINTE-FOY-L’ARGENTIÈRE / 101.7 TARARE / 95.1 VIENNE / 94.7 VILLEFRANCHE / 91.7N°1½36pagJueilAlecttE-cAoo_ûNtu2its0d1e7 Fourver̀ e 2017.indd 1

Entreprendre RUBRIQUE DE NOM Michel Troisgros confirme son ancrage en terre roannaise puisqu’il vient d’installer son établissement sur la petite commune de Ouches, en investissant huit millions d’euros.ROANNE Située au nord du département de la Loire, à moins d’une heureFUTUR ELDORADO de route de Lyon, Roanne entendENTREPRENEURIAL se positionner comme un territoire agile propiceREPORTAGE, YANN PETITEAUX à l’initiative entrepreneuriale.PHOTOGRAPHIES, LAURENT CERINO / ADE Plus de 100 millions d’euros devraient être injectés par des52 Acteurs de l’économie - La Tribune entreprises sur ce territoire. Pour casser une image surannée, contribuer à renforcer son attractivité et attirer les porteurs de projet, l’agglomération insiste sur la rapidité des circuits de décision, le faible coût et la disponibilité du foncier. Un futur eldorado pour entrepreneurs. N°136 Juillet-Août 2017

ROANNE EntreprendreL’endroit est élégant et envoûtant. Un PNEUMATIQUES ULTRA HAUTE PERFORMANCE magnifique corps de ferme au pied Le choix de la famille Troisgros d’investir à Roanne n’est pas une de la côte roannaise, entouré de bois, exception. Cette année, plus de cent millions d’euros devraient de prairies et jouxtant un étang. Dans être injectés par des entreprises sur le territoire. Michelin est ce décor paisible et rural, à huit kilo- l’artisan principal de cette performance. Le groupe clermontois mètres à l’ouest de Roanne, dans la prévoit en effet d’investir quatre-vingt millions d’euros d’ici à petite commune d’Ouches, Michel 2019 sur son unité roannaise. En 2015, celle-ci a échappé de Troisgros a décidé d’assurer l’avenir de justesse à une lourde restructuration en raison d’un déficit de l’entreprise ligérienne fondée en 1930. compétitivité. Finalement, la direction et les représentants du Le chef étoilé y a investi huit millions personnel ont signé un «  pacte d’avenir  » qui a repositionné d’euros pour ouvrir, le 18 février, son l’unité de 850 salariés sur le segment des pneumatiques ultra- navire amiral  : un restaurant d’une haute performance, un créneau de pointe qui progresse de 10 % capacité de soixante couverts, le Bois sans feuilles, et la Grande chaque année au niveau mondial. Autre poids lourd du terri- maison, qui abrite quinze chambres de luxe. Dans cet ensemble toire  : Delipapier (groupe Sofidel) a investi quarante millions d’exception, 55 salariés s’affairent. Implantée depuis son origine d’euros sur le territoire depuis 2010. L’an dernier, le fabricant à côté de la gare de Roanne, la Maison Troisgros devient enfin d’articles à usage sanitaire (papier-toilette, essuie-tout, etc.) s’est propriétaire de ses murs. Un nouveau départ. « À la gare, nous offert une extension de 15 000 m² de son site de Roanne pour le avions tout expérimenté, tant en termes de cuisine que d’aménagement stockage des produits finis. de l’espace, estime Michel Troisgros. Nous avions atteint une limite. À une autre échelle, des PME telles que Barriquand échangeurs Aujourd’hui, ce nouvel environnement va contribuer à faire évoluer – Steriflow (équipements frigorifiques industriels) ou BCGE notre cuisine, à exciter notre imagination.  » Un endettement sur (emballages plastiques) vont chacune consacrer 2,5 millions d’eu- vingt ans doit assurer la relève pour César (30 ans) et Léo (24 ros à la modernisation de leur outil de production. D’autres inves- ans), les deux fils de Michel et Marie-Pierre Troisgros, la qua- tissent dans le foncier, à l’image de Téléflow qui fait construire trième génération à la tête du restaurant familial. un nouveau siège (deux millions d’euros), ou Côté ouverture qui Tandis que des étoilés comme Pierre Gagnaire ou Christophe se dote d’un nouvel atelier (un million d’euros). Côté textile, Fre- Roure (Neuvième art) ont quitté la Loire pour Paris ou Lyon, maux Delorme (Nord) a ouvert une nouvelle usine à Sevelinges. Michel et Marie-Pierre Troisgros confirment leur ancrage en terre Un investissement de 1,8 million d’euros dédié à la production roannaise. « Il pourrait être tentant d’aller sur Lyon, mais ce serait de serviettes-éponges jacquard. « Ce sont les compétences humaines une erreur, car l’existence de la Maison Troisgros est intimement liée qui nous font rester dans le Roannais », témoigne Philippe Delfosse, à Roanne, affirme le chef. Partir d’ici reviendrait à se tirer une balle directeur industriel du groupe. dans le pied. D’ailleurs, la question ne se pose même, car l’activité est rentable. » La clientèle, issue d’un rayon de 150 kilomètres aux ÊTRE IDENTIFIÉ alentours (Lyon, Clermont-Ferrand, Mâcon, Moulins, etc.), est Historiquement porté sur l’industrie (textile, défense, papeterie, résolument fidèle à l’établissement dont les trois étoiles rayonnent métallurgie), le Roannais a conservé l’image d’une terre marquée depuis bientôt cinquante ans. par la crise économique des années 1970. Une épopée dont les derniers grands chocs sont les liquidations de grands noms tels « Plutôt que de parler de notre tissu que Bel maille ou Ultranova. Aujourd’hui encore, les fers de lance industriel fort, nous avons choisi du territoire sont des industriels (Michelin, Nexter systems), des de mettre en avant la qualité entreprises agroalimentaires (Valentin traiteur, Révillon, Mons, de vie, la proximité entre les Pralus) ou du textile-habillement (Devernois, Carré blanc). acteurs économiques et la Pour casser une image datée et contribuer à renforcer son attrac- rapidité des circuits de décision » tivité, le territoire roannais a lancé fin 2014 sa marque « Roanne tout & simplement ». « Nous avons constaté que les chefs d’entreprise N°136 Juillet-Août 2017 roannais recevaient moins de candidatures à leurs offres d’emploi lors- qu’ils indiquaient Roanne plutôt que Rhône-Alpes sur leurs annonces », souligne Elsa Oblette, chargée de mission chez Roanne territoire. Portée par la chambre de commerce et les institutions locales, la petite marque ne dispose que d’un budget de 150 000 euros. Hors de question, donc, d’entrer en concurrence frontale avec des acteurs comme Only Lyon ou Auvergne nouveau monde. Roanne tout & simplement a choisi un autre angle d’attaque, délivrant un message axé sur les facilités offertes par le cadre de vie de la région roannaise. Un argumentaire qui transite notamment par un réseau de plus de 600 ambassadeurs, principalement des cadres et des dirigeants. L’un des enjeux du territoire est d’abord d’être identifié sur une carte de France. «  Notre candidature a été retenue pour accueillir le barrage de la Fed cup en avril. À cette occasion, le journaliste d’une radio lyonnaise nous a situés en Haute- Loire », soupire Elsa Oblette. Acteurs de l’économie - La Tribune 53

Entreprendre ROANNE« Se positionner comme ELDORADO DE L’OUEST LYONNAISle faubourg de Lyon nous donne Dans un contexte global de rareté des espaces, l’autre grand argu-accès à la véritable métropole » ment du territoire, c’est la disponibilité et le coût du foncier, le tout à moins d’une heure de route de Lyon. « Le grand avantage duAux yeux des Roannais, Saint-Étienne est davantage perçue Roannais, c’est que l’on peut faire construire un bâtiment de 1 500 m²comme un chef-lieu administratif que comme une capitale écono- à des prix raisonnables », résume le directeur général de Téléflow,mique. Roanne est donc naturellement tournée vers la métropole Guillaume Fazékas. Pour accompagner sa forte croissance (+ 75 %lyonnaise, cœur de cible de la marque territoriale. En particulier, en 2016), la PME spécialisée dans les systèmes de télégonflage deles cadres et porteurs de projets dans la tranche 25-45 ans qu’elle pneumatiques a investi dans un édifice deux fois plus grand quetente de séduire avec l’argument de l’agilité. « Plutôt que de parler l’actuel. Celui-ci sera basé sur l’écoparc de Bonvert, à Mably.de notre tissu industriel fort, nous avons choisi de mettre en avant la « Les entreprises qui veulent se développer sur Lyon n’ont pas toujoursqualité de vie, la proximité entre les acteurs économiques et la rapidité la place nécessaire et doivent le faire à des coûts prohibitifs, tandis quedes circuits de décision. Un porteur de projet qui s’installe ici peut nous disposons de foncier libre à des prix attractifs. Nous voulons êtrerencontrer du jour au lendemain le président de la CCI et celui de la l’eldorado de l’ouest lyonnais », clame Yves Nicolin. Actuellement,communauté d’agglomération », assure le député-maire de Roanne, 88 hectares sont disponibles dans les différentes zones d’activitéYves Nicolin. Un atout qui a convaincu le groupe polonais Eagle de l’agglomération.(machines de découpe laser pour l’industrie) d’implanter à « Se positionner comme le faubourg de Lyon nous donne accès à la véri-Roanne sa filiale française. «  Ici, les gens ont été attentifs à nos table métropole », estime le président de la délégation roannaise debesoins, affirme le dirigeant d’Eagle France, José Manuel Menar- la CCI Lyon métropole, Guy Delorme. Reste la question de l’en-gues. Nous avons eu droit à un accompagnement que nous n’avons clavement relatif de l’agglomération roannaise et de ses 100  000pas ressenti ailleurs, notamment à Chalon-sur-Saône et à Mâcon. » habitants. « Tous les hommes politiques de Roanne ont fait leur carrièreLa filiale envisage d’ouvrir un show-room sur Roanne puis, d’ici politique sur cette question », constate Guy Delorme. Le principal ver-cinq ans, de disposer d’une unité de fabrication. « Nous sommes rou est situé en amont du tronçon de l’A89 reliant Balbigny à ladéjà à la recherche de locaux plus grands », anticipe le dirigeant. Tour-de-Salvagny ainsi qu’au niveau du raccordement à l’A6 au nord de Lyon. « Ces deux problèmes seront résolus au printemps 2018 », se réjouit-il. À l’horizon 2035, l’élu espère également voir s’arrêter le TGV en gare de Roanne. « A priori, quel que soit le tracé retenu, la ligne Paris-Orléans-Clermont-Lyon devrait passer par Roanne. » Le territoire n’a pas le choix. Le train de sa transformation n’attendra pas.54 Acteurs de l’économie - La Tribune Pralus est l’un des 600 ambassadeurs du Roannais. L’université Jean-Monnet de Saint-Étienne dispose d’un campus à Roanne fréquenté par 1 000 étudiants. Il participe aussi à l’attractivité du territoire. N°136 Juillet-Août 2017

ROANNE Entreprendre Souvent associée aux « petits vins de pays », l’appella- tion côte-roannaise entend bien être visible sur la carte de France et les cartes des vins. Pour y parvenir, elle associe ses efforts à ceux des petits vignobles voisins. Ainsi, en 2012, les structures gérant les deux AOC ligé- riennes côte-roannaise et côtes-du-Forez ont fusionné en une seule : l’Association des vignobles Forez-Roannais (AVFR), qui recouvre 330 hectares de vignobles, 35 exploitations indivi- duelles et une cave coopérative. L’AVFR se rapproche désormais des AOC saint-pourçain (Allier) et côtes-d’Auvergne (Puy-de- Dôme). «  Nous sommes situés en amont de la Vallée de la Loire et nous travaillons ensemble pour revêtir une identité commune  », explique Stéphane Sérol, viticulteur à Renaison et président de l’association.VINLa côte-roannaise cultive son identité« L’objectif est de savoir qui nous© StockSnap L’enjeu pour ces petites appellations est d’être lisibles et visiblessommes, connaître notre histoire du grand public et des journalistes spécialisés. Dans cettecommune et notre géographie » optique, elles ont engagé un cabinet qui mène actuellement une étude de positionnement. « L’objectif est de savoir qui nous sommes,N°136 Juillet-Août 2017 connaître notre histoire commune et notre géographie  », souligne Stéphane Sérol. Les quatre AOC devraient disposer d’une ban- nière commune d’ici à la fin de l’année afin de pouvoir mener de concert des actions de communication. Elles se retrouvent déjà chaque année, depuis quatre ans, pour organiser un salon professionnel : « Ici commence la Loire ». Afin de doper l’image et la notoriété de ses appellations, l’AVFR met en œuvre des actions auprès de la presse spécialisée pari- sienne. « Nous développons les relations presse depuis 2008, précise Stéphane Sérol. En l’espace de neuf ans, nous avons vraiment pro- gressé dans les guides des vins et la presse spécialisée. » Les efforts de communication portent également au niveau local, où l’image de la côte-roannaise n’est pas toujours flatteuse. L’AVFR travaille notamment sur un projet de rallye touristique dans le vignoble roannais qui devrait être opérationnel à l’horizon 2018. Le vignoble de la côte-roannaise met en avant son cépage gamay. Objectif  : profiter de l’engouement actuel des consommateurs pour les vins plus frais et fruités, moins corsés et tanniques. « Pendant les années 1990 à 2010, le gamay a souffert de la « par- kerisation  » du vin, analyse Stéphane Sérol. Une tendance qui a poussé à la production de vins « bodybuildés », de bêtes à concours. Aujourd’hui, le gamay revient à la mode, car il permet de faire des vins possédant un degré alcoolique moins élevé, marqués par la finesse et l’élégance des tanins. Nos vignerons sont attentifs à leur terroir et nos vins ont une vraie identité. Ce ne sont pas des vins technologiques ni standardisés. » Les productions de la côte-roannaise séduisent désormais les cavistes parisiens et l’export commence à décoller, notamment aux États-Unis, en Europe du Nord et en Asie. Autre atout pour séduire le consommateur  : l’AOC côte-roannaise compte 40 % de production bio, soit quatre fois plus que la moyenne nationale. Acteurs de l’économie - La Tribune 55

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LE RÊVE InventerLE RÊVECHRISTOPHE GALFARD‘‘Depuis environ un siècle, le savoir scientifique et la technologie qui en découle ne sont plus intuitifs, car ils se situent souvent dans une réalité qui n’est pas accessible à nos sens. Nos yeux, par exemple, ne sont pas capables de détecter les ondes radio, les rayons X ou ultra-violets et infrarouges. C’est d’ailleurs une bonne chose, car ces ondes électromagnétiques qui circulent en permanence autour de nous, nous aveugleraient probablement. Mais depuis environ un siècle, nous avons réussi à sonder et à utiliser cette nature qu’il nous est impossible de ressentir. Il y a de quoi être fier. Ce n’était pas simple. Des découvertes récentes suggèrent que notre espèce, l’Homos Sapiens, foule le sol de la Terre depuis environ 310 000 années. 310 millénairespour que notre curiosité nous permette de regarder les étoiles lointaines, de comprendre que notre univers a une histoire, deréaliser que le monde sur lequel nous vivons abrite un entremêlement d’écosystèmes nécessaires à notre existence. Mais cesavoir est fragile. Si nous cessons d’enseigner la science pendant deux ou trois générations, la Terre redeviendra plate aux yeux des citoyensfuturs. Les connaissances cosmiques ou quantiques seront oubliées ou raillées tellement elles peuvent sembler lointaines du sens commun.Il est beaucoup plus facile de croire que le climat se réchau e car la Terre se rapproche du Soleil. Cette idée est séduisante car immédiate-ment compréhensible. On l’a entendue. Mais elle est totalement fausse. Le climat se réchau e de notre fait. Ceci n’est pasune explication, c’est une a r- mation. Là se situe le problème de la communication scientifiqueface à ceux pour qui la science est douteuse : de petites assertions pernicieuses et attrayantes par leur simplicité se propagent plus rapidement que de longues démonstrations qui reposent sur des siècles d’avancées. A rmer sans expliquer devient condescen- dance. C’est pourtant de la science que notre futur à tous dépend. Le savoir scientifique est notre héritage commun. Il est ce que nous avons découvert, en tant qu’espèce, jusqu’à présent. La technologie du futur sera, j’en suis convaincu, à même de faire face aux problèmes que nous créons nous, que nos parents ont créés, mais pour cela, il est nécessaire que cette science puisse évoluer, se trom- per, être soutenue, indépendamment de ses applications immédiates. Notre technologie actuelle représente une part colos- sale de l’économie mondiale. Elle repose sur les décou- vertes théoriques passées. Et de même qu’il y a cent ans, aucun chercheur n’imaginait ce qui découlerait de leurs travaux, il est probable qu’aucun chercheur d’aujourd’hui n’imagine avec précision ce que demain sera fait. Un jour, nous coloniserons l’espace, j’en suis certain. Une partie de notre futur est là-haut, mais pour y parvenir il faut nous en donner les moyens et le temps et, pour cela, la protection de notre habitat est nécessaire. Les challenges sont colossaux. Mais apprendre à utiliser intelligemment nos ressources est excitant, avec de fabuleuses potentielles retom- bées économiques. Cela ne fait qu’un siècle que nos techno- logies nous permettent de considérer notre planète comme une mine. Cela ne fait qu’un siècle que nous puisons sans réfléchir dans nos ressources limitées. Nous nous pensons intelligents, probable- ment avec raison. Il est loin d’être trop tard pour consolider notre avenir ’’ici, sur Terre, afin de pouvoir, ensuite, atteindre les étoiles. Nous sommes la seule espèce connue à en être capable. Christophe Galfard Physicien et auteur de E = mc2, L’équation de tous les possibles (Flammarion)N°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 57

Inventer RUBRIQUE DE NOM© Laurent Cerino / Acteurs de l’économie D5a8nsAtcretenutresadnesl’,élecocnhoemrciehe-uLranTeribseunrae probablement plus enfermé dans un laboratoire, N°136 Juillet-Août 2017 loin de l’agitation du monde et des préoccupations de la société.

GÉNÉRATION 2050 InventerGÉNÉRATION 2050LA SCIENCE ENORDRE DE MARCHEBouleversé par les avancées technologiques, bousculé par les nouveaux modes de pensée,le monde de la recherche, privée et publique, est en pleine e ervescence. Et son actuellemutation permet déjà d’esquisser le portrait du chercheur de 2050. À l’échelle de cedemi-siècle, la principale di culté pour le scientifique sera de parvenir à faire le tri entrela somme de savoirs et la quantité quasi infinie de données disponibles. De quoiinéluctablement engendrer de nouvelles façons de travailler et donc… de chercher.FEUILLETON, STÉPHANIE BORGJuin 2050. L’animal détient, outre un système neu- CHERCHEUR PLURIDISCIPLINAIRELes drones ronal très développé, un champ visuel À l’heure où l’ensemble des organisa-qui livrent hors du commun, indispensable pour évi- tions mute vers un travail collaboratif,quotidiennement ter les obstacles. Pour alimenter l’engin, la recherche n’est pas épargnée par leles magasins place à la biopile. Habituellement utilisé phénomène. En 2050, elle le sera aussis’inspirent, pour faire fonctionner les pacemakers, ce en mode collectif, dans un groupe plu-pour s’orienter, petit composant produit de l’énergie avec ridisciplinaire de préférence. «  Quanddes capacités de l’eau sucrée. Il s’auto-alimente grâce j’observe mes étudiants, je remarque que lesdirectionnelles à l’énergie produite par la synthèse du jeunes générations ont l’évidente faculté àde la mouche. glucose contenu dans le sang. Ce système travailler ensemble. J’imagine des équipes de et ses fondements ont été mis en évidence, chercheurs avec des niveaux de spécialisa-N°136 Juillet-Août 2017 près de trente ans plus tôt, par l’équipe tions et de compétences différents », indique de recherche menée par Serge Cosnier Arezki Boudaoud, enseignant-chercheur et Philippe Cinquin de l’université au laboratoire Reproduction et dévelop- Joseph-Fourier de Grenoble. Comme eux, pement des plantes (RDP) à l’ENS de 575 800 personnes participent à une acti- Lyon. Physicien de formation, il est entré vité de recherche en France, dont 161 800 de façon graduelle dans la biologie, puis chercheurs employés par les entreprises a rejoint le département de biologie de (données 2014, selon le ministère de l’En- l’École nationale supérieure. Désormais, seignement supérieur et de la Recherche) le médaillé d’argent CNRS 2016 com- contribuant ainsi à façonner le monde bine des compétences dans les deux dis- scientifique contemporain et à dessiner ciplines. Un parcours atypique, encore les contours de celui de demain. rare en France, mais qui préfigure le Acteurs de l’économie - La Tribune 59

Inventer GÉNÉRATION 2050« Dans trente ans, « Demain, il faudra CHERCHEUR-OUTILSil apparaîtra évident apprendre à demeurer Avant les années 2000, cinq annéesde croiser un au fait de la étaient nécessaires pour séquencer unduo composé connaissance face génome humain. En 2017, il faut seule-d’un informaticien, à la multiplicité des ment une journée. Et en 2050 ? «  Celad’un sociologue ou savoirs. La difficulté dépendra des algorithmes du moment et ded’un géographe » de faire le tri et de la capacité mémorielle des ordinateurs  », trouver la bonne estime Thierry Gaude. Ce qui est cer-chercheur du futur. « La biologie est, par information face tain, c’est que le chercheur du futur seraessence, une discipline qui se prête à l’inter- à la masse de confronté à une quantité de données,disciplinarité. Elle est aujourd’hui déjà tra- connaissances non-quantifiables aujourd’hui, pour unversée par les mathématiques, la physique, engendrera une seul objet étudié. « Plus de 60 % des bac-la chimie, mais aussi par la robotique, l’infor- nouvelle façon téries de la planète vivent dans les océans,matique ou les sciences cognitives et sociales. de travailler » mais nous en connaissons moins de 5 %  »,Dans les laboratoires se croisent de plus en écrit Catherine Jessus dans son ouvrage.plus de gens aux origines, aux méthodes et Si ce principe s’applique à l’ensemble desaux concepts différents. Cela était inima- sciences, les données se compteront enginable il y a cinq ans encore  », confirme milliards. Et il faudra pouvoir les stockerThierry Gaude, directeur de recherche au pour les étudier. Leur nécessaire analyse,CNRS, coordinateur de l’ouvrage collectif que l’esprit humain ne peut entièrementÉtonnant vivant : Découvertes et promesses appréhender, fera davantage appel à ladu XXIe siècle (Éd. CNRS) et dirigé par robotique et à l’intelligence artificielle.Catherine Jessus, directrice de l’Institut Une équipe de l’Institut cellule souche etdes sciences biologiques du CNRS. cerveau (Inserm/Université Claude Ber-Dans trente ans, il apparaîtra donc nard Lyon 1) a déjà démontré, en 2015,évident de croiser un duo composé d’un que le robot Nao doté d’une mémoireinformaticien, d’un sociologue ou d’un autobiographique était capable d’accumu-géographe. « Les sciences sociales s’orientent ler puis de transférer ses connaissancesvers une modélisation des comportements. acquises d’un humain à un autre humain.Elles ne sont plus seulement dans l’observa- L’interaction entre le robot et l’hommetion, mais bien dans l’analyse de multiples est en marche. «  Ces systèmes-experts,bases de données », analyse Olivier Parent, extrêmement spécialisés, commencent déjàprospectiviste et fondateur du Comptoir à donner quelques résultats. Nous pour-prospectiviste, une agence de conseil rions imaginer que les chercheurs du futurpour les entreprises. «  Mais nous n’assis- utiliseront des systèmes déjà vieux de plu-terons pas à un décloisonnement complet, sieurs générations et intégrer une forme detempère Arezki Boudaoud, plutôt à des connaissance. Un système génétique infor-complémentarités régulières, initiées par des matique dont le chercheur humain d’originechercheurs capables de faire des ponts entre serait à la fois le père et la mère », avance letoutes les disciplines. » À l’image de ce qui prospectiviste.se pratique chez Clinatec, un centre derecherche biomédicale autour de la mala- N°136 Juillet-Août 2017die de Parkinson et des stimulations céré-brales, installé à Grenoble. Une initiativequi symbolise le chercheur du futur. Sou-tenu par le CEA, au sein duquel il occupe6 500 m², Clinatec rassemble, en un seullieu, un service hospitalier doté d’un blocopératoire, de laboratoires de rechercheet d’une centaine de collaborateurs plu-ridisciplinaires. Des chercheurs, desbiologistes, des ingénieurs en micro-élec-tronique ou en microfréquence, des neu-rochirurgiens, des cogniticiens… unecommunauté scientifique largement issuedu CEA, de l’Inserm, du CHU et de l’uni-versité Grenoble-Alpes.60 Acteurs de l’économie - La Tribune

Dans le futur, « les chercheurs devront aussi « Plus que jamais GÉNÉRATION 2050 Inventerfaire avec la complexité de l’outil de recherche en 2050, la question différence de génération est déjà plus mar-lui-même  », poursuit Olivier Parent. de la médiation quée qu’à mon époque. C’est la génération«  Paradoxalement, le microscope sera tou- entre la recherche du zapping, aux capacités de concentra-jours l’outil privilégié du chercheur, notam- et le monde de tion et de focalisation moins importantes.ment en biologie, pour visualiser un objet. la consommation, En revanche, cette future génération deMais entre le premier modèle et les modèles de l’industrie et scientifiques possède clairement une meil-actuels, nous attendons un niveau inégalé de des services sera leure capacité pour sortir du monde de lamicroscopie électronique. Et les prochains au cœur des enjeux » recherche, communiquer et s’ouvrir à leurss’annoncent encore plus précis. C’est vrai- contemporains  », poursuit Arezki Bou-ment l’explosion de l’imagerie cellulaire  », daoud. Face à la complexité grandissanteconfirme Thierry Gaude. Le chercheur de la recherche aux théories difficile-vivra dans un monde où la connaissance ment compréhensibles, et notammentsera encore plus accessible et ouverte celles régissant la physique quantique,qu’aujourd’hui. «  Cinq siècles en arrière, cette faculté de demeurer connecté avecun érudit pouvait tout connaître dans son ses contemporains sera primordiale. « Ildomaine. Demain, il faudra apprendre à est important de rappeler que la recherchedemeurer au fait de la connaissance face à ne cherche pas à résoudre. Elle est infinie.la multiplicité des savoirs. La difficulté de Et dans cet émerveillement permanent, ellefaire le tri et de trouver la bonne information devient de plus en plus spécialisée, difficile àface à la masse de connaissances engendrera comprendre. Le chercheur devra prendre surclairement une nouvelle façon de travailler », son temps de recherche pour rester acces-reconnaît Arezki Boudaoud. sible, au risque d’un trop fort décalage entre lui et le grand public », poursuit le prospec-CHERCHEUR-COMMUNICANT tiviste. Le CEA multiplie ainsi les inter-Dans trente ans, le chercheur ne sera ventions pour vulgariser et expliquer laprobablement plus enfermé dans un nécessité de la fusion nucléaire au pluslaboratoire, loin de l’agitation du monde grand nombre. Plus que jamais, la ques-et des préoccupations de la société. « La tion de la médiation entre la recherche et le monde de la consommation, de l’in- dustrie et des services sera au cœur des enjeux de 2050. Elle induira la place que compte prendre le chercheur, aux capaci- tés de recherche augmentées par l’apport bénéfique de l’interdisciplinarité et des machines, dans la société. Chercheurs, biologistes, ingénieurs, neurochirurgiens, cogniticiens la pluridisciplinarité caractérise le centre de recherche biomédicale, spécialisé dans la maladie de Parkinson et des stimulations cérébrales, Clinatec, et dessine les contours de la recherche de demain. © ClinatecN°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 61

Inventer CHRONIQUESSCIENCE ET RECHERCHE : quelles évolutions ? Pascal Gustin rapidement au fil des innovations et des avancées qui Qu’en sera-t-il dans le futur ? Président d’Algoé ne sont plus séquentielles. Il apparaît que la genèse Une grande évolution sera certainement le décloi- des idées n’est pas linéaire, mais le résultat d’un sonnement des sciences entre elles, cette fameuseLa dichotomie recherche fondamentale et enchevêtrement et d’une fertilisation croisée. Le pas transdisciplinarité, devenue une voie majeure dans recherche appliquée a vécu. Elle aura struc- a donc été rapidement franchi, conduisant à évaluer le développement des sciences. Il ne s’agira pas de turé, pendant plus de cinquante ans, l’orga- la qualité et l’intérêt de la recherche à l’aune de son réduire la complexité, mais de mieux savoir l’accepter et nisation et le fonctionnement de la recherche impact sociétal ou de sa valorisation économique. la travailler. Les bases de l’évaluation seront amenées, publique et privée. La séparation par les fina- Les technosciences ont pris le pas sur la recherche elles aussi, à fortement évoluer. Car on s’aperçoit que la lités d’un côté l’élargissement des connaissances, pure. mesure réelle des impacts des avancées en recherche de l’autre la réponse à un besoin existant ou révélé Cette tendance de fond a été encouragée et appuyée fondamentale est impossible à prévoir à courte vue. s’estompe. Cette frontière conceptuelle disparaît par les pouvoirs publics, au nom de l’efficacité et de Mais on peut surtout prédire le retour en force la baisse des finances publiques. de la recherche fondamentale. L’amorce donc Bien des oppositions se sont levées dans la commu- d’un mouvement inverse à la tendance actuelle, basée nauté scientifique et le débat qui continue de faire sur les fondements de la créativité : « sortir du cadre ». rage a pris une dimension très politique. N’a-t-on La diffusion mondiale des technosciences et leur mise pas été trop loin dans cette mise en compétition en compétition s’avèrent peu productives. La recherche de la recherche à un échelon mondial ? Certes, la de finalités, de réponses à des besoins ou des attentes recherche a besoin de justifier de son utilité au regard peut constituer un stimulus, mais aussi une limite forte de la société, mais doit-on de ce fait contraindre les à l’idéation. Car la découverte de l’inconnu passe avant scientifiques, pour obtenir des subsides, à justifier de tout par de l’intuition de l’opportunité, du hasard. D’où l’utilité et des retombées de leur recherche ? Com- le retour à la recherche pure, en reconnaissant et valo- ment, par ailleurs, évaluer l’impact scientifique sur risant ces scientifiques qui avancent en vrais explora- des horizons court-termistes, alors que foisonnent les teurs. La quête de la connaissance ne doit pas avoir de exemples démontrant le contraire. finalité, elle a surtout besoin d’inutile.QUALITÉ DE L’EMPLOI,un levier insu samment exploréLa France a des problèmes d’emploi auxquels Michel Tavernier comportent une part de pénibilité difficilement com- © DR elle a du mal à trouver des solutions satis- Directeur de l’Aract pressible ? A niveau équivalent de contraintes, cer- faisantes : offres sans réponse malgré un Auvergne-Rhône-Alpes taines entreprises font cependant la différence. chômage de masse, importance des emplois Conscientes que créer de l’emploi de qualité est béné- non durables (seuls 9 % des emplois en sécurité au travail et permettent de concilier au mieux fique pour elles comme pour le salarié, elles innovent Auvergne-Rhône-Alpes sont d’une durée de plus de vie professionnelle et vie personnelle. dans l’accueil des nouveaux embauchés, la construc- six mois), difficultés à développer l’apprentissage (près tion des parcours mais aussi dans la prise en compte d’un contrat d’apprentissage sur trois s’arrête avant Un levier pour les entreprises des environnements de travail et des conditions effec- son terme), fort turn-over, absentéisme récurrent dans et les territoires tives de réalisation du travail. certains secteurs d’activité, etc. Pourtant beaucoup Pas facile de créer de tels emplois dans des sec- Si c’est d’abord au sein de l’entreprise et des équipes a été entrepris pour rapprocher l’offre et la demande teurs soumis à des variations d’activité ou des acti- que la qualité de l’emploi peut être concrètement d’emplois, changer l’image de métiers ou de secteurs vités hyperconcurrentielles ? Impossible de miser sur améliorée, le territoire de proximité peut aussi consti- d’activité mal valorisés, permettre une meilleure adé- la qualité de l’emploi quand les métiers concernés tuer une ressource. En Auvergne-Rhône-Alpes, des quation entre besoins des entreprises et compétences expériences intéressantes sont menées comme par des salariés via la formation. Mais comment faire exemple, celle des entreprises du secteur de la logis- mieux ? Les expériences montrent qu’on peut aller tique en Nord-Isère, de la plasturgie dans le Haut-Bu- plus loin en s’intéressant à la qualité des emplois créés gey ou dans l’Yssingelais… Autour des questions de et existants et en renforçant ainsi leur attractivité et recrutement, de parcours professionnels, de maintien leur pérennité. de l’emploi, de renouvellement des compétences, les Des emplois de qualité, de quoi s’agit-il ? Ce sont PME trouvent ensemble des solutions locales en utili- des emplois qui, au-delà des conditions de rémuné- sant le levier de l’amélioration de la qualité de l’emploi. ration satisfaisantes, permettent aux salariés d’être Au final, le développement de la qualité des intégrés, formés dans la durée afin de pouvoir évo- emplois est une condition importante de luer professionnellement et s’adapter aux évolutions l’amélioration du marché du travail. C’est de l’entreprise. Ce sont des emplois dans lesquels également pour les entreprises un levier afin de les coopérations entre les salariés sont facilitées répondre aux défis économiques, technologiques et et une part d’autonomie laissée à chacun. Ce sont sociaux auxquelles elles sont confrontées. Un choix des emplois qui permettent de protéger la santé, la gagnant-gagnant à tous les niveaux.62 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

CHRONIQUES InventerDONNER LE MEILLEUR DE SOI-MÊMEdans une entreprise qui se libère Isaac Getz résultante de l’épanouissement des salariés. D’ailleurs, contaminent les dirigeants, avec la notion de l’entreprise Expert APM, professeur à l’ESCP cet indice se mesure : de nombreuses entreprises qui ont libérée. Malgré tout, la seule personne qui peut Europe et auteur des ouvrages libéré toute ou partie de leur entreprise ont vu leur taux libérer son organisation reste le patron. Mais il Liberté & Cie et La liberté, ça marche ! d’absentéisme baisser, ainsi que le turn-over. y a plusieurs conditions préalables avant de se lancer : Une philosophie commune : une entreprise libérée est - Il doit obtenir un mandat explicite de la part de sonL’entreprise libérée n’est pas un modèle de mana- un lieu où la majorité des salariés a la liberté et la res- gement, mais une philosophie. Qu’est-ce qui ponsabilité complète pour entreprendre toute action actionnaire pour opérer cette transformation radicale. peut pousser certains dirigeants à réinterroger qu’ils jugent la meilleure pour la vision de l’entreprise. - Il doit faire un travail sur lui-même : son lâcher-prise, leur environnement organisationnel ? Bien sûr, La manière de libérer son entreprise est différente pour il y a la performance économique, mais elle ne chaque organisation. Chacune doit co-développer avec abandonner l’ego. constitue pas le vrai mobile. La véritable interrogation des ses salariés son propre mode organisationnel. Il résulte - Il doit créer (sans discours) un climat de confiance dirigeants qui ont décidé de libérer leur entreprise c’est de l’articulation de la philosophie commune. C’est ainsi de créer un environnement organisationnel dans lequel que Favi, SEW Usocome, Bretagne Atelier, Chronoflex, dans l’entreprise. Cela nécessite aux managers de les salariés ont envie de donner le meilleur d’eux-mêmes. IMA Technologies, Lippi, Biose ont procédé… Des pion- proximité de demander à leur équipe : « Qu’est-ce qui Cela rend les gens plus performants et donc, en résulte, niers français qui sont, aujourd’hui, des sources d’inspi- vous empêche de donner le meilleur de vous-même une mesure économique. Mais celle-ci est avant tout la ration pour d’autres entrepreneurs qui tentent le pari de aujourd’hui ? ». libérer leur organisation et souhaitent l’épanouissement La libération ne se décrète pas, mais se construit patiem- de leurs salariés, et comme résultante, la réussite de ment. Après avoir créé un climat de confiance, puis la l’entreprise : Jean-Louis Plot (Rampal Latour), Damien vision et les valeurs communes et partagées, le temps Aguesse (Décorec), Clémentine Alzial (Weiss), Geoffroy de la phase ouverte peut venir. Il s’agira de demander Toulemonde (Flip)... Une communauté apprenante com- aux équipes d’identifier les pratiques et symboles orga- posée d’une trentaine de dirigeants s’est constituée au nisationnels qui ne sont pas en phase avec ces valeurs. sein des clubs APM. Le rôle traditionnel des managers sera alors touché. Il conviendra de les accompagner pour qu’ils deviennent Une longue et difficile aventure des leaders au service de leurs équipes. Cette étape Il existe des exemples d’entreprises où des salariés ont peut nécessiter de la formation, du coaching… Elle peut fait connaître au dirigeant le concept de l’entreprise libé- prendre quelques années. Et ce processus n’est jamais rée. Par exemple, j’observe que de plus en plus de mes terminé. Non pas tant à cause de quelques réfractaires étudiants, une fois dans les entreprises, parlent et parfois au modèle, mais du fait de l’arrivée de nouveaux collabo- rateurs, la génération Y, le monde qui évolue autour de l’entreprise. L’organisation d’une entreprise doit évoluer constamment.MÉDIATION : des réponses adaptées et concertéesCamille Rousset Àtravers le nombre croissant de dossiers le cadre du droit d’alerte5. En dehors de ces ins- © DR - C. ViviantAvocat associé, Delsol Avocats, associés à la question des risques psycho- tances ou avec leur concours, la médiationco-responsable du département droit sociaux, l’avocat doit faire face à des pro- permet d’apporter des réponses concertéessocial et spécialisée sur la question blématiques impliquant des solutions tout à et adaptées, et ainsi, de participer à unedes risques psychosociaux la fois juridiques, managériales, psycholo- logique constructive d’accompagnement desMédiateur auprès de psychologues giques, voire sociologiques, solutions pour lesquelles salariés dans leur formation et leur progres-du travail (tel que Philippe Belpaeme une approche strictement juridique pourrait s’avérer sion. Les solutions qui en résultent évitent par ailleursdu cabinet Belpaeme Conseil) ou insuffisante. Comme d’autres structures, notre cabinet les aléas financiers et de calendrier des contentieuxde coach en gestion du personnel intervient régulièrement en amont de procédures disci- judiciaires avec des réponses sur-mesure. Cette(comme Christophe Jaouen du cabinet plinaires et/ou de réorganisations d’entreprise - impli- démarche conduit à concilier les intérêts des salariésTerrains d’évolutions) quant ou non des licenciements -, soit pour gérer des et les préoccupations financières de l’entreprise, en situations déclarées de souffrance au travail, soit pour tenant compte d’enjeux humains tels que la dimension analyser et anticiper les difficultés liées à un change- émotionnelle du conflit et le respect du travail accom- ment d’organisation. pli «  ensemble  » ; sans compter la communication positive, en interne et vis-à-vis des partenaires. Il est Réponses concertées certain que l’intervention du coach ou psychologue du Certaines crises sont de fait, dans certains cas, liées à travail aura pour intérêt premier de permettre aux sala- des difficultés strictement organisationnelles, souvent riés de s’exprimer librement sous le sceau de l’anony- dues à des situations de changements (de structure, mat et de la confidentialité, avec des préconisations de culture, de statut comme le passage d’un statut constructives au plan organisationnel et individuel, y public à un statut de droit privé1) mal accompagnés. compris pour ceux des salariés mis en cause dans La résolution des conflits internes peut supposer l’in- leur positionnement managérial. C’est en ce sens que tervention des délégués du personnel2 ou du CHSCT3, la collaboration avocat-psychologue du travail et coach notamment en matière de harcèlement moral4 dans a tout son sens.1 Article L1224-3-1 du Code du travail. - 2 Article L2313-1 du Code du travail. - 3 Article L4612-1 du Code du travail. - 4 Le harcèlement moral est défini par l’article L1152-1 du Code du travail, aux termes duquel aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlementmoral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. -5 Articles L2313-2 et L4131-2 du Code du travail.

Comprendre RUBRIQUE DE NOMthéra • Photo: N. Bouchut PIONEERING DIAGNOSTICS Avec près de 10 000 collaborateurs et une présence dans plus de 150 pays, bioMérieux offre des solutions de diagnostic qui améliorent la santé des patients et assurent la sécurité des consommateurs. www.biomerieux.com N°136 Juillet-Août 2017 * Tra6n4sfoArmcteerulersspdaertle’éncaoriantosmeniein-nLoavaTtiroibnune Pionnier du diagnostic

PERRINE RUBY, la rêveuse PORTRAIT Comprendre © Laurent Cerino / Acteurs de l’économieCOMPRENDREN°136 Juillet-Août 2017 «  À la fin de mon cursus de quatre années à l’école vétérinaire, je me suis rendu compte que ce métier, le sens même de celui-ci et le mode de vie qu’il impli- quait n’étaient pas faits pour moi. J’ai préféré m’orien- ter vers la recherche fondamentale en neurosciences chez l’Homme. En 2005, après une thèse à Lyon et un post-doctorat à Liège en Belgique, j’ai obtenu un poste de chargée de recherche Inserm et j’ai pu commencer un projet de recherche sur le rêve au Centre de recherche en neurosciences de Lyon. Cela fait douze ans que je m’engage et me passionne à en explorer le sens, à essayer de percer leurs mystères, à comprendre ce phénomène fascinant, et ses éven- tuelles fonctions. Nos résultats récents montrent que le rêve tend à atténuer l’intensité des évènements de la vie éveillée quand ils sont évoqués dans un rêve, comme s’il voulait tempérer/neutraliser nos ressentis. Ces résultats sont en faveur d’un rôle du rêve dans la régulation émotionnelle. » RÊVER «  «  Pourquoi rêvons-nous ?  », «  Le rêve a-t-il une fonction ? », « Un entrepreneur rêve-t-il de la même manière et de la même chose qu’un autre entre- preneur ?  ». Ces réflexions, chacun de nous les fait. C’est la raison pour laquelle la question générale du rêve m’interpelle. Il fait partie de notre quotidien et nous ne savons pas quoi en faire. Aujourd’hui, la recherche sur le rêve demeure essentiellement fon- damentale puisque trop peu de connaissances sur ses éventuelles fonctions sont disponibles pour envi- sager des applications. Il faut donc persévérer ! Pour cela, un saut technologique et théorique devra être e ectué. » VULGARISER « Le rêve porte en lui une dimension caricaturale forte – que la recherche a néanmoins révélée. Des travaux de psychologie expérimentale nous ont appris que les grands dormeurs, un peu artistes, avaient ten- dance à davantage se souvenir de leurs rêves que les petits dormeurs à tendance hyperactive. Beaucoup d’autres résultats ont été obtenus et ont fait avancer nos connaissances sur le rêve et les paramètres qui l’in- fluencent. Au-delà de mes travaux de recherche, mon travail consiste à apporter des réponses et à transmettre le savoir. Nos découvertes permettent de dépasser cer- taines croyances obsolètes. Malheureusement, par- fois, nous ne pouvons apporter de réponses précises. C’est aussi tout l’intérêt du rêve. Il conserve cette part de mystère qui, je l’espère, subsistera. Le rêve demeure encore cette petite partie de l’identité personnelle et en connaître chaque mécanisme serait e rayant. » Acteurs de l’économie - La Tribune 65

Comprendre RUBRIQUE DE NOM FAMILY OFFICES LES GARANTS (TRÈS DISCRETS) DES PATRIMOINES ENQUÊTE, MARIE-ANNICK DEPAGNEUX PHOTOGRAPHIES, LAURENT CERINO / ADE Vincent Labruyère, représentant la troisième génération du groupe Labruyère-Eberlé, investit notamment dans le secteur vinicole. Il possède des domaines en Beaujolais, Bourgogne, Bordelais et deux petits vignobles en Champagne.66 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

RUBRIQUE DE NOM Comprendre Les family o ces sont crédités de toutes les qualités. Ils ont pour rôle de garantir la cohésion de grandes familles dans la gestion de leur fortune avec une vision à long terme et transgénéra- tionnelle. Un univers très secret qui brasse plusieurs dizaines de millions d’euros et dont la confidentialité qui les entourent permet di cilement d’en percer les mystères. Sauf à de très rares exceptions, en déchi rer leur fonction- nement, leur rôle et leur finalité reste inhabituel.N°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 67

Comprendre FAMILY OFFICES68 Acteurs de l’économie - La Tribune ue peuvent bien avoir en commun les Peugeot, Wendel, Das- sault, Mulliez, Pinault, Dentressangle ou encore Baulé  ? Tous disposent d’une entité qui gère les intérêts patrimoniaux de ces familles fortunées, voire immensément fortunées. Suffisamment d’ailleurs pour s’offrir un family office (FO). Combien sont-elles dans ce cas en France ? Difficile de le savoir précisément, trente ou quarante. Plus nombreuses sont celles qui font appel à un multifamily office (multi FO), une profession jeune, sans sta- tut juridique précis. Tout conseiller en investissements finan- ciers peut se revendiquer comme tel, est-il courant d’entendre dans ce milieu. Reste que ces prestataires ne seraient guère plus d’une dizaine en France aujourd’hui à afficher une réelle visibi- lité. Agami Family, Sycomore FO et Intuitae constituent le trio de tête. Et sont présents, ou s’apprêtent à l’être à Lyon, «  une place culturellement très différente de Paris dans la façon d’aborder les sujets », remarque Luc Granger, cofondateur d’Intuitae. Ces multi FO gèrent la fortune de plusieurs familles. « Notre périmètre de conseils est à 360 degrés », observe Laurent de Swarte, cofondateur en 2006 d’Agami. Il revendique 150 clients – familles, entre- preneurs et autres –, mais évoque un terrain de jeu de plusieurs milliers de personnes. N°136 Juillet-Août 2017

FAMILY OFFICES Comprendre« Nous exerçons un métier de « Quand j’ai cédé mes deux plus importantes filiales, dont la dernièregrande confidentialité. Il s’agit en 2012, je me suis interrogé : « Allais-je conserver les trente per-de protéger les actionnaires sonnes employées dans les services support de mon groupe oufamiliaux et surtout allais-je les laisser partir dans la vente ? » J’ai opté pour la premièreles jeunes héritiers » solution car je ne voulais pas me séparer d’elles. J’étais alors convaincu que je trouverais facilement des clients pour amortir les coûts. Je meLes perspectives de ce marché naissant ont poussé Cyril Agi à suis trompé et j’ai même cru que j’allais devoir les licencier », se sou-franchir le pas. Ancien cadre de la Société générale banque pri- vient Michel Baulé. Mais ce scénario a été évité. Eximium, nomvée, il a pris la direction du bureau lyonnais de Sycomore, ouvert du holding qui s’est substitué en 2003 au GIE initial, ne chômeil y a six mois seulement. « La banque vit de profondes mutations. pas. « Chaque fois que nous procédons à des acquisitions, il nous fautLa gestion de fortune par les banques reste qualitative, mais davan- réaliser toutes sortes d’audits et harmoniser les systèmes informatiques.tage orientée vers une clientèle d’un certain âge, argumente-t-il. De Lorsque nous souscrivons à des fonds, nous examinons leur portefeuilleplus le cycle des entreprises s’est accéléré. La cession d’entreprise est et analysons, ligne par ligne, ce qui peut nous intéresser. Et il nousplus rapide et le cédant repart rapidement sur d’autres projets. C’est arrive de rendre des services à des entrepreneurs régionaux, en matièrela génération internet. Être reçu dans de beaux locaux ne corres- de ressources humaines, entre autres », confie-t-il. Eximium totalisepond pas à son attente. » Ces multi FO mettent aussi en avant la ainsi une trentaine de participations dans des sociétés non cotéesmutualisation possible des bonnes idées. « Nous faisons toujours et une centaine dans des compagnies qui le sont. Ces dernièresdu sur-mesure sur la base d’un cahier des charges », insiste Cyril Agi. sont sous l’œil d’Érick Blache, patron de la délégation Drôme-Ar-A fortiori lorsqu’ils vendent un positionnement haut de gamme, dèche de Bpifrance, qu’il a recruté en 2015. Les deux fils deun choix revendiqué par Intuitae. Luc Granger affirme cibler Michel Baulé, Laurent et François, sont désormais à ses côtésen priorité « des familles dont la fortune n’est pas inférieure à vingt dans les affaires. Pour sa plus grande joie. «  Eximium m’amènemillions d’euros. Dans les faits, ce peut être deux ou trois fois plus. Ce à m’intéresser à des activités qui les intéressent.  » Par exemple unmétier ne peut être démocratisé, ou alors cela signifierait que nous fabricant et distributeur d’articles de pêche pour l’aîné passionnéconsacrons moins de temps aux dossiers ». Comme ses homologues, par ce loisir. Alors que le cadet est en charge de l’activité tra-Intuitae effectue une partie de son activité en sous-traitance pour ding (achat/vente) des grosses valeurs boursières sélectionnées enles grands family offices en leur apportant des compétences spé- fonction de leur rendement et bons fondamentaux.cifiques et ultraspécialisées.« VIVONS BIEN, VIVONS CACHÉS » DENTRESSANGLE, AULAS, ET LES AUTRES« Un mono family office suppose au moins deux collaborateurs », avise Norbert Dentressangle qui, fin 2015, a cédé son groupe de trans-Jean-Marie Paluel-Marmont, président de l’Affo (Association fran- port et logistique a préparé, de façon anticipée, une mutation ençaise du family office) et, par ailleurs, président de France partici- douceur à travers son holding Dentressangle Initiatives. D’abordpations, holding de tête de la famille Paluel-Marmont. Très disert dans l’immobilier en devenant actionnaire majoritaire du pro-sur la mission dévolue au FO en général, il reste, cependant, très moteur Ogic en 2008. Puis avec Capextens, structure de capi-discret sur le fonctionnement de la structure de sa propre famille tal-investissement désormais riche de 200 millions d’euros deà la tête de la Compagnie Lebon (hospitalité, immobilier et capi- capitaux et ciblant des PME réalisant entre 15 et 100 millionstal-investissement) cotée à la Bourse de Paris depuis 1853. Ce d’euros de chiffre d’affaires. Le pilotage a été confié à Laurentculte du secret est largement de mise. « Nous exerçons un métier Javinneli, un ancien de 3i rejoint par Marc Benatar ayant fait sesde grande confidentialité. Il s’agit de protéger les actionnaires familiaux armes dans la même société de capital-investissement anglo-et surtout les jeunes héritiers qui arrivent, éclaire Xavier Gauthier, saxonne. Capextens s’est notamment offert Tessi (traitement depsychologue de formation et conseiller en gouvernance. Cela tient données), en juin 2016, et l’institut de sondage Ifop, en novembreà l’habitude de discrétion française pour tout ce qui a trait à l’argent. dernier. Pierre-Henri Dentressangle, le fils, que les camions neCes familles considèrent qu’elles n’ont de compte à rendre à personne faisaient pas rêver, satisfait son appétence et exerce son savoir-et adoptent leur devise « vivons bien, vivons cachés ». » La notion faire dans le digital à travers Hi Inov, un fonds voué aux startupsde FO est tellement protéiforme que nombreux sont ceux qui en et également logé au sein de Dentressangle Initiatives. De même,possédent un sans même le savoir et éludent le sujet. Rares ceux Alexandre Aulas a intégré ICMI comme business développeur etqui, comme Michel Baulé, ouvrent leurs portes. Cet entrepreneur au contrôle interne. Son père, Jean-Michel, fondateur de Cegidde la Drôme, docteur en chimie, a gagné ses lettres de noblesse (logiciel informatique), a constitué ce holding personnel il y aindustrielles dans le polyuréthane, en constituant un groupe dès 33 ans, aujourd’hui premier actionnaire du groupe Olympique1976 spécialisé dans la fabrication de moules, puis de machines Lyonnais. Et dont Patrick Bertrand, son fidèle directeur géné-et enfin de pièces. ral chez Cegid – cédé à deux fonds anglo-saxons mi-2016 –, va désormais s’occuper à plein temps.N°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 69

Comprendre FAMILY OFFICES Dès 1996, Bruno Rousset, PDG de l’assureur April a constitué Evolem, gérant 33 participations et employant 13 collaborateurs. « Une fois que nous avons La même année, Sophie Defforêt-Crepet, héritière de son père identifié une société nous créateur de Carrefour, lançait la société de conseil en investisse- lançons un appel de fonds ment Aquasourça. auprès des entrepreneurs Ces entrepreneurs n’hésitent pas à investir ensemble en consti- ou familles intéressés parmi les tuant des «  club deals  ». «  Il s’agit d’un concept de véhicule finan- 15 que nous avons déjà fédérés. cier créé opération par opération, avec un pacte d’actionnaires. Ils se Nous mettons des tickets connaissent bien et fixent un horizon de sortie », éclaire Emmanuel compris entre un à six millions Kaeppelin, avocat associé chez Delsol Avocats. La société Maelo d’euros », rapporte Joseph s’inscrit dans cette logique et fonctionne à rebours d’un fonds Brigneaud, associé au sein d’investissement classique. « Une fois que nous avons identifié une de Maelo, multi family office. société nous lançons un appel de fonds auprès des entrepreneurs ou familles intéressés parmi les 15 que nous avons déjà fédérés. Nous70 Acteurs de l’économie - La Tribune constituons alors une SAS ad hoc. Aujourd’hui, nous avons investi dans quatre entreprises principalement dans des PME importantes ou de la petite ETI, notre cible. Nous mettons des tickets compris entre un à six millions d’euros », rapporte Joseph Brigneaud. Cet ancien responsable région d’Euronext connaît la vie des dynasties fami- liales de l’intérieur étant vice-président du conseil de surveillance de SEEB, groupe installé à Chauffailles, en Saône-et-Loire, fondé par un de ses arrières grands-pères et spécialisé dans les biens d’équipements industriels et mécaniques. « La notion de FO est tellement protéiforme que nombreux sont ceux qui en possédent un sans même le savoir » INDISPENSABLES POCHES D’INVESTISSEMENTS L’intérêt des holdings familiaux pour l’investissement direct n’est donc pas nouveau. Toutefois, ils montent en puissance comme le confirment les données établies par l’Afic (Association fran- çaise des investisseurs) pour Capital finance. Selon cette source, les FO ont contribué pour 872 millions d’euros (versus 311 en 2011) dans les fonds institutionnels levés en 2015. « Le facteur d’accélération est le manque de rémunération du capital. Que faire de l’argent quand les taux sont inexistants ? », interroge Pierre Clocher, directeur associé Mid-Cap et M & A chez Société générale. « Ces structures familiales sont des poches d’investissements indispensables pour l’avenir de l’économie. De plus, elles font preuve d’une réelle intelli- gence dans l’accompagnement des sociétés. Toutefois, il ne faut pas être angélique : il s’agit également de l’optimisation de fortune, que celle-ci provienne des dividendes de l’entreprise historique toujours dans le giron de la famille ou du produit de la vente de cette dernière. » Cette gestion en bon père de famille pourrait freiner l’enthousiasme de ces holdings patrimoniaux à miser sur des small et mid-caps jugés trop chers. Luc Granger le constate déjà : « La tendance actuelle est à l’ouverture du champ des investissements. L’immobilier à l’étranger a le vent en poupe. » N°136 Juillet-Août 2017

Le monde vous appartient Institution financière indépendante de réfé- rence gérant plus de 50 milliards d’euros d’encours, Banque Degroof Petercam propose ses services à des investisseurs privés et institutionnels ainsi qu’à des organisations. Présente en France depuis 2001, la Banque offre à ses clients une large gamme de services dans les métiers de la gestion de fortune, de la banque d’affaires et de la gestion d’actifs. Basée à Paris et présente à Lyon, Lille et Toulouse, Degroof Petercam France emploie près de 115 professionnels ouverts sur le monde. Retrouvez-nous sur degroofpetercam.frN°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 71

Comprendre FAMILY OFFICES« Ces structures familiales sont PHILANTHROPIEdes poches d’investissements L’exemple de Sodexho constitue un cas d’école. Trois des quatreindispensables pour l’avenir de enfants aspiraient à succéder à leur père, Pierre Bellon. Dans lel’économie. Toutefois, il ne faut pas respect strict des règles de l’art, celui-ci choisira l’aînée, sa filleêtre angélique : il s’agit également Sophie, en 2016. Mais combien de familles se sont entredéchiréesde l’optimisation de fortune » dans de telles circonstances  ! En tant qu’homme (ou femme) orchestre, « le family officer peut prévenir les désaccords familiaux,LA RELÈVE alerter sur les risques. Il est là pour animer l’«  affectio familiae  »,Il est une clé d’or dans la gestion du patrimoine familial, «  la créer des liens, mettre en place une gouvernance où tout le mondepréservation des intérêts avec une vision à long terme et transgénéra- se sent bien  », témoigne Jean-Marie Paluel-Marmont. «  Le FOtionnelle », confirme Jean-Marie Paluel-Marmont. peut s’occuper de la transmission organisée par le conseil de famille »,Cette ligne de conduite prévaut chez Labruyère-Eberlé : « Nous appuie Gérard Hirigoyen, économiste et professeur des univer-n’avons pas hésité à effectuer des cessions et à investir dans d’autres sités de Bordeaux. « La gouvernance est spécifique et duale dans lesdomaines. Là réside le succès des entreprises familiales  », atteste entreprises familiales. Il faut faire en sorte que les conflits ne débordentVincent Labruyère, représentant la troisième génération d’un pas de la famille pour atteindre l’entreprise. » L’agrégé en sciences degroupe autrefois très présent dans la distribution de produits gestion, auteur d’une douzaine d’ouvrages, prône la mise en placepétroliers et la gestion de stations-service (au nombre de 110) d’une assemblée familiale, « le pendant du conseil d’administration.à l’enseigne Total. «  Le métier totem et fédérateur de la famille, Elle a une grande valeur morale et un statut juridique lorsqu’un pactec’est le pôle vinicole. Il doit rester dynamique. Nous ne voulons pas d’actionnaires lui est adossé. Un conseil de famille n’est pas redondantdemeurer des rentiers sur des bouts de vignes. » Ce pôle, qui possède par rapport à un family office : il en est complémentaire ».des domaines en Beaujolais, Bourgogne, Bordelais et deux petits La philanthropie jouit d’un prestige grandissant pour fédérer lesvignobles en Champagne, est placé sous la responsabilité de son membres d’une famille autour de valeurs partagées. Sur ce point,neveu Édouard Labruyère. De cette quatrième génération, ils la famille Mérieux a joué les pionnières avec sa fondation créée ensont trois à travailler dans l’entreprise sur 13 au total, tous sont 1967 par Charles Mérieux en hommage à son père Marcel, fon-propriétaires ou nus-propriétaires de Labruyère-Eberlé. « Ils sont dateur des laboratoires éponymes. « Les nouvelles générations sontdéterminés à rester ensemble et ont constitué des groupes de travail sensibilisées à la responsabilité sociale des entreprises, avise Xavierpour imaginer l’entreprise à l’horizon de 15 ans. Leur ambition est Gautier. Nul n’a plus honte de gagner de l’argent. L’essentiel, c’estde tripler sa taille », savoure Vincent Labruyère. Les trois piliers comment l’argent est utilisé. » En tentant de lui donner du sens.(vinicole, immobilier commercial et private equity) consolidentaujourd’hui 55 millions d’euros de chiffre d’affaires avec 150 col- GLOSSAIRElaborateurs. La relève se prépare donc. Depuis près de deux ans,l’évolution de la gouvernance fait l’objet d’une réflexion avec des Affo : association fondée en 2001 et ayant vocation à participerconsultants extérieurs, en particulier Frédéric Lucet, fondateur au développement et à la reconnaissance du métier du FO, métierdu Family business group. À la fin de l’année, la « G3 » prendra de conseil et de prestations de services dédié à une ou plusieursdu recul : Jean-Pierre Labruyère, 80 ans, frère aîné de Vincent familles. Dans le premier cas les family officers sont les salariéset longtemps maître à bord, quittera la présidence du conseil d’une unique famille. Après Marseille en 2014, un bureau a ouvertde surveillance où siègent un représentant des quatre souches à Lyon en 2016.familiales et deux administrateurs extérieurs (Laurent Burelle Family officer  : un chef d’orchestre ayant de l’expérience.et Daniel Cathiard), et bientôt un troisième. Vincent Labruyère Un ancien banquier, ex-dirigeant, un bon généraliste, un finprendra, lui, la tête de l’instance de surveillance et sera rem- psychologue.placé à la présidence du directoire par un dirigeant extérieur Family business network (FBN) France : réseau regroupantarrivé récemment dans le groupe en qualité de consultant. Une 150 familles adhérentes pouvant faire entrer jusqu’à dix personnesmanière de vérifier que la greffe prenne bien, toujours dans un opérationnelles ou non dans l’entreprise familiale. Ces entreprisessouci de maintenir la cohésion familiale. S’il est un moment à doivent réaliser plus de dix millions d’euros de chiffre d’affaires etbien préparer, c’est précisément celui de la transmission. « Com- avoir vécu au moins une transmission.ment sélectionne-t-on le dirigeant ? Dans la famille ou non ? », insisteJean-Marie Paluel-Marmont. N°136 Juillet-Août 201772 Acteurs de l’économie - La Tribune

RUBRIQUE DE NOM Comprendre“ L’INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE EN DIRECT ”1 mois *29 .-d’essai à CHFPapier (uniquement en Suisse) L'Agefi Indices Nos autres titres (selon périodicité)Numérique Code d'accès Tous les contenus agefi.com Archives en ligne, + de 420’000 articles Tous nos titres sur notre App iPad NewsletterAbonnement sur www.agefi.com/abo agefi.com*Cette offre est valable toute l’année et non renouvelable. TVA et frais de port inclus. Acteurs de l’économie - La Tribune 73 N°136 Juillet-Août 2017

Comprendre BAUD INDUSTRIES MARCEL BAUD « LE PAPA »LIONEL BAUD RÉNALD BAUD JEAN-NOËL BAUD © Baud Industries, Didier Bert BAUD INDUSTRIESL’UNION SACRÉE PORTRAIT, DIDIER BERT Au cœur de la vallée de l’Arve (Haute-Savoie), il est une entreprise aussi discrète que puissante, aussi bienancrée sur le territoire qu’orientée à l’international, dont la trajectoire est menée de concert par une fratrie de trois enfants Baud, soucieux de veiller, ensemble, à la pérennité de l’ETI éponyme. De cette union - qui fait la force -, le cadet Lionel revêt les habits de pilote, celui d’amateur de rallyes automobiles qui entend conduire l’entreprise le plus loin et le plus vite possible, porté aussi par l’obsession de soutenir la filière du décolletage. Portrait d’une famille dont la figure du fondateur, dit « le papa », transpire encore à tous les étages et dontActeurs de l’économie-La Tribune a pu en percer les mystères, grâce à la rencontre - rare - avec ses dirigeants.74 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

BAUD INDUSTRIES ComprendreDans la vallée « La vallée de l’Arve est silencieuse, discrète », de marchés dans le décolletage pour lade l’Arve, en témoigne Guy Métral, président de la CCI connectique. Trois ans après sa fondation,plein cœur de la de la Haute-Savoie, qui explique cette dis- il rachète une entreprise haut-savoyardeHaute-Savoie, crétion par la nature sous-traitante des de vingt personnes, Microtechnica. Lasur ce territoire entreprises, non coutumières à vanter un société, mise à mal, détient un savoir-faireoù la sous- produit fini auprès du grand public, mais reconnu auprès de l’horlogerie française.traitance est plus promptes à des négociations discrètes Une politique d’acquisition d’entreprisesreine, les avec leurs clients eux-mêmes industriels. en difficultés, mais offrant une ouvertureindustriels Et dans le cas précis, obtenir une ren- sur un nouveau marché, demeurera la stra-ne sont pas contre avec les frères Baud, dirigeants de tégie de développement externe privilégiéehabitués à l’entreprise éponyme, relève du défi. «  Il chez Baud. « Le papa » transmet le soucicommuniquer leur est difficile d’admettre que ce qu’ils font de la précision à ses fils. Celui de l’exi-sur leurs peut faire rêver les gens à l’extérieur de l’en- gence aussi. «  En vallée de l’Arve, les chefsactivités. treprise, parce que pour eux, c’est normal  », d’entreprises avec un ADN familial, issus des explique André Montaud, directeur géné- paysans de la montagne, veulent des résultatsN°136 Juillet-Août 2017 ral de Thésame, qui évoque une «  com- très vite », observe Jean-Marc André, direc- munication timide, voire presque de modestie teur général de Mont-Blanc Industries. Ils extrême  », tout en précisant que les der- ajouteront celui de l’excellence au fil de nières années ont vu l’entreprise s’ouvrir leur propre parcours. davantage. Il faut dire que la culture de Alors qu’ils ont commencé à travailler ado- l’entreprise est ancrée dans la production lescents auprès de leur père, les weekends, et l’innovation bien davantage que dans la les membres de la fratrie rejoignent tour à communication, dans le savoir-faire plu- tour l’entreprise paternelle. Renald et Lio- tôt que dans le faire savoir. C’est ainsi que nel d’abord, après leurs formations tech- l’aventure entrepreneuriale de la famille niques (à l’École d’ingénieurs de Genève Baud s’est construite. Bâtie sur l’histoire pour le premier, à la Haute école d’horlo- d’un apprenti nommé Marcel Baud – que gerie de Cluses pour le second), Jean-Noël ses fils appellent « le papa » – embauché ensuite, après des études en hôtellerie puis au début des années 1950 par l’entreprise de gestion qui le conduiront à la direction Maitre, un des plus importants décolle- des achats. Mais c’est au cadet que revient teurs de la vallée. de prendre la présidence du groupe. Il commence comme décolleteur dans une FONDATEUR VISIONNAIRE usine de l’entreprise à Morteau, dans le Après avoir gravi tous les échelons jusqu’à Doubs. Le jeune homme fait part à son devenir directeur technique de l’entre- père de son goût pour le management. « Si prise, Marcel Baud se met à son compte en tu veux apprendre le management, construis 1978. Il est alors père de trois fils : Renald une usine dans un champ et débrouille-toi », (né en 1962), Lionel (en 1967), et Jean- lui répondra «  le papa  ». Marcel Baud Noël (en 1968). Il installe une machine achète le champ dans le Jura, et fait mon- dans le garage de la maison familiale, près ter les quatre murs. Son fils s’y installe. de Ville-la-Grand, à proximité de la fron- « Cela a été une école extraordinaire », sou- tière suisse. Son alimentation en matière rit-il. En 1996, Marcel Baud, âgé de 61 ans, première est entièrement automatisée, convoque ses fils. «  À cet instant, il nous ce qui est précurseur à l’époque. « Il s’est explique qu’il est important de bien préparer lancé pour mettre en application ses convic- la transmission de l’entreprise  », cite Lionel tions qu’il n’arrivait pas à mettre en œuvre Baud. La succession est en marche. chez son employeur », pointe Renald, désor- mais directeur technique du groupe. La LE VESTIAIRE DU LUNDI cellule entièrement automatisée Usitro- « Je vous donne tout et je pars vivre dans le nic, inaugurée en ce printemps 2017, n’est sud, parce que je dois être à au moins trois que « ce que le papa avait en tête il y a qua- heures de l’entreprise pour ne pas venir vous rante ans, analyse Lionel Baud. Il voulait casser les pieds », leur expliquera le père de que les machines puissent faire le maximum famille. Il transfère ses actions à ses des- d’heures de production en autonomie  ». La cendants, qui s’entendent pour nommer cellule robotisée contrôle elle-même ses Lionel Baud PDG. Chacun garde sa direc- pièces jusqu’à être capable de changer tion transversale... tout en dirigeant une d’outil si nécessaire, et analyse son propre usine pour rester sur le terrain. Chaque fonctionnement. site dispose d’une autonomie, renforcée Bien avant Usitronic, à l’époque de Marcel par le fait qu’il est orienté vers un marché Baud, l’idée est déjà de gagner du temps différent. De cette façon, « ce groupe a une sur les grandes séries. Grâce à sa produc- capacité à aller chercher de nouveaux mar- tivité, l’entrepreneur récupère des parts chés, analyse André Montaud. Ils sont agiles Acteurs de l’économie - La Tribune 75

Comprendre BAUD INDUSTRIESau point d’être capables de prendre des déci- dans le canton de Neuchâtel, où une « PARI INCROYABLE »sions importantes en un jour. » Pour se coor- usine est construite pour fournir les hor- Baud Industries poursuit son programmedonner, le secret de la fratrie réside dans le logers locaux. Une autre ouverture est d’acquisitions avec EBEA en 2009.déjeuner du lundi. « C’est une ambiance de lancée en 2011, à Meyrin, dans le canton Cette entreprise de décolletage de 200vestiaire de sport, décrit Lionel Baud. On se de Genève, avec le rachat de l’entreprise employés, basée à Vougy, s’apprête alorsdit tout. Et quand on en sort, nous allons tous Freri, sous-traitante pour l’horlogerie. à être vendue par un fonds d’investisse-dans la même direction. » Si ce rendez-vous Quatre ans plus tard, les activités du site ment américain à un autre fonds, françaishebdomadaire est rituel, il n’a pas toujours sont regroupées aux Verrières, après que celui-ci. « Nous sentions que le propriétairelieu au même endroit. «  On préfère chan- le principal client du site genevois ait lui- américain allait nous laisser tomber, se rap-ger parce que cela peut faire du bruit ! », rit même déplacé ses activités. Le syndicat pelle Patrick Lhuillier, délégué syndicalLionel Baud. Cette union est le liant de la suisse Unia critique alors la soudaineté CGT chez Baud à Vougy. Il n’investissaitrelation des trois frères qui transpire à tous de la fermeture, soulignant «  le manque pas. Nous ne pouvions nous fournir en maté-les niveaux et leur permet d’avancer main de concertation  » de l’industriel français, riel.  » Baud Industries reprend l’entre-dans la main. « Ils ont cette volonté de tra- en contradiction avec les usages suisses. prise... aussi importante que l’ensemblevailler ensemble, cette conscience qu’ensemble Interrogé sur sa façon d’appréhender les de tous ses sites additionnés. «  Sanson est plus fort, observe Jérôme Akmouche, échecs, Lionel Baud commente, sobre- licenciements  », souligne le syndicaliste.directeur du Syndicat national du décol- ment : « Oui, nous faisons des erreurs, parce Depuis le rachat, le site n’a pas connu laletage (SNDEC). De plus, ils disposent de que nous nous engageons énormément et très moindre grève. Et les investissements secette force de conserver cette proximité carac- rapidement. Quand nous en commettons, nous sont multipliés. «  Nous sommes là pourtéristique des entreprises familiales, dans un essayons toujours de les corriger, puis nous longtemps  », assure-t-il. «  Nous avons faitgroupe qui compte désormais plus de 500 organisons un débriefing pour ne jamais les un pari incroyable, en pleine crise, se félicitepersonnes. » En 2000, Marcel Baud achève rééditer.  » S’ensuivront des implantations le PDG. Mais nous nous sommes diversifiésla transition. «  On lui parlait au téléphone en Pologne, à Singapour, en Tunisie et aux en apportant des services complémentairestous les matins, puis les appels se sont espa- États-Unis, à chaque fois pour suivre des à nos clients, comme la rectification et l’as-cés  », relate le PDG. Les trois frères sont clients qui développent leurs activités dans semblage.  » L’acquisition propulse Bauddésormais, seuls, aux commandes de l’en- ces zones. En grandissant, l’entreprise Industries au premier plan dans le sec-treprise. « Leur réussite tient au fait de savoir familiale ressemble de plus en plus à une teur automobile. «  Cela nous a placés enmettre en avant l’entreprise avant leur sort entreprise de taille intermédiaire (ETI) relation directe avec les donneurs d’ordre depersonnel, témoigne Guy Métral, lui-même sur le modèle allemand, c’est-à-dire une premier rang  », pointe l’ainé. Le groupeprésident d’une entreprise de décolletage. entreprise de taille suffisante pour être un familial mettra six ans à redresser l’ex-On observe une vraie complicité entre eux. » acteur majeur sur ses marchés, avec des EBEA, devenue Baud Vougy. Lionel capitaux familiaux pour assurer sa péren- Baud est toujours à l’affût des moindresVISION INTERNATIONALE nité. Avec une caractéristique en plus  : opportunités. «  En relation commerciale,Les années 2000 sont aussi celles de «  En Allemagne, nos concurrents sont près Lionel est une fusée... comme ses frères dansl’éclatement de la bulle internet. Baud de leurs clients que sont les grands donneurs leurs domaines, illustre Guy Métral. IlsIndustries surmonte ce passage et com- d’ordre, détaille Lionel Baud. Ils ne sont pas recherchent constamment des opportuni-mence à suivre ses clients à l’internatio- intéressés à aller voir ailleurs. Nous, nous y tés commerciales, technologiques, à l’inter-nal. La première implantation étrangère allons. Nous reprenons une entreprise par an, national. Ils ont cette volonté permanentea lieu en Suisse en 2006, aux Verrières, en France ou à l’étranger. » d’avancer. »Les frères Baud reconnaissent avoir des difficultés à accueillir des profils expérimentés d’encadrement capables de s’intégrer dans leur entreprisefamiliale internationalisée. La création de leur école Marcel Baud Académie doit ainsi permettre d’inculquer la culture « Baud ». © Baud Industries, site internet76 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

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Comprendre BAUD INDUSTRIESUN LOBBYISTE À L’ÉLYSÉE manque de moyens financiers. L’idée des à lancer des mesures structurelles pourLionel Baud, une fusée à l’image de sa pôles de compétitivité est lancée. Le pre- pouvoir répondre à la demande. Le Tech-passion pour les rallyes automobiles. La mier des 67 pôles français sera celui du nocentre, bâtiment consacré à la recherchecompétition et la préparation de course décolletage. En octobre 2008, il se rend à et développement et à la mise en avant desl’animent depuis toujours. «  Si on a huit l’Élysée pour rencontrer le président Nico- savoir-faire du décolletage, est ainsi penséminutes pour changer une boîte de vitesses, c’est las Sarkozy, alors que la crise financière en pleine période de crise. Il ouvrira enpossible uniquement si tout est prêt, illustre- frappe l’industrie. Il se présente avec un 2019 à Cluses et mobilisera 12 millionst-il. Ce n’est qu’après avoir réglé une multitude plan de soutien à la sous-traitance en dix d’euros d’investissements.de détails que l’on peut prétendre à la vic- points et en sort avec six millions d’eurostoire. » Plusieurs copilotes se succèdent sur pour développer la formation et lancer un DE CASQUETTE EN CASQUETTEle siège passager. Mais la révélation viendra fonds d’investissement du secteur baptisé Aujourd’hui, alors que le financementen 2014 avec une copilote qui n’est autre Arve Industrie Capital. «  Pendant la crise, n’est plus un problème majeur pour Baudque Lucie, sa fille, prise de passion pour la Lionel Baud s’est retroussé les manches tout en Industries, son PDG prend le temps pourcourse automobile. « Ensemble, nous avons fixant un cap avec des ambitions », témoigne s’investir ailleurs et ajoute une nouvellegagné des manches du championnat, sourit Jérôme Akmouche. Des actions à court activité à un CV déjà bien garni, puisqu’ilfièrement le pilote. Depuis que nous prati- terme sont mises en œuvre, telles que des se voit confier la présidence de la Banquequons cette passion commune, cela a changé demandes de différés d’amortissement populaire des Alpes, avec un argumentnos relations. » Le PDG avoue ainsi rattraper et un moratoire sur les charges. «  Nous affectif qui l’a convaincu. «  J’y suis alléle temps passé après avoir été loin d’elle, sommes allés voir le gouvernement parce que parce qu’elle a été celle permettant à mon pèredurant son enfance, lorsqu’il travaillait en nous ne voulions pas mettre nos salariés au de démarrer, explique celui qui est à pré-Asie*. Toujours à cent à l’heure, Lionel chômage, même deux jours par semaine  », sent vice-président délégué de la BanqueBaud s’engage pour sa filière et prend, en relate l’industriel. Le programme Former populaire Auvergne Rhône-Alpes depuis2003, la présidence du Centre technique plutôt que licencier est créé : durant les jour- la fusion des caisses régionales. Mon pèredu décolletage (qu’il conservera jusqu’en nées sans travail, les employés suivent des rentrait parfois des machines sans savoir2014). Conscient de l’importance d’être formations. Le temps disponible est investi comment les financer et personne ne voulaitcapables d’innover collectivement entre pour rehausser les compétences. Néan- l’accompagner par manque de fonds propres.industriels du décolletage, le PDG cible le moins, le président du SNDEC tient aussi Je le revois arriver à la maison, déprimé de ne pas trouver de soutien financier. » À cela s’ajoute, un mandat au conseil d’adminis- tration du Medef de Haute-Savoie. « Il est intéressé par tous les mondes professionnels, observe Jean-Luc Raunicher, son président départemental. Il nous apporte une connais- sance approfondie du milieu du décolletage et de l’industrie en général. » LA MARCEL BAUD ACADÉMIE À présent, le défi majeur de Baud Indus- tries, dont le chiffre d’affaires attein- dra 90 millions d’euros fin 2017, réside dans le recrutement de techniciens. «  Il s’agit du principal frein à notre croissance. Si nous en avions davantage, nous aurions plus de commandes », assure son PDG. Une © rallye-passionfrance.over-blog.com © Baud Industries, site internet Lionel Baud partage sa passion des rallyes avec sa fille Lucie, et copilote. La synergie de nos expertises : la réponse à vos enjeux cms.law/bfl/lyon N°136 Juillet-Août 2017 Nos équipes d’avocats experts en droit et fiscalité, tant en conseil qu’en contentieux, vous offrent des solutions à haute valeur ajoutée. CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon 174 rue Créqui - CS 23516 - 69422 Lyon Cedex 03 - France T +33 4 78 95 47 9978 Acteurs de l’économie - La Tribune

BAUD INDUSTRIES Comprendre« La culture de l’entreprise est ancrée dans la production et l’innovationbien davantage que dans la communication, dans le savoir-faire plutôtque dans le faire savoir »problématique qui touche tout le milieu à aller encore plus loin. Après avoir visité aujourd’hui, l’usine de Detroit. Une his-du décolletage, alors Lionel Baud joue la des écoles d’entreprises en Allemagne, le toire qu’ils ont déjà commencé à trans-carte de la filière. À la tête du SNDEC, groupe lancera sa Marcel Baud Académie mettre à leurs enfants.qu’il préside depuis 2007, il a lancé au début de l’année 2018, dans son usine Soucieux de préparer l’avenir, le triumvi-Smile. Un programme pédagogique qui de Vougy. L’objectif affiché est de fournir rat a lancé un mini-conseil de la troi-reconstitue une entreprise industrielle toutes les compétences nécessaires aux sième génération. Deux fois par an, lesdurant quelques jours, dans laquelle les 500 employés du groupe, pour « grandir six petits-enfants de Marcel Baud, âgéscollégiens peuvent endosser les différents dans l’entreprise » de 14 à 20 ans, se réunissent avec unrôles qui existent en entreprise  : opéra- Derrière, il s’agit aussi d’inculquer la coach, pour entendre parler de l’entre-teur de production, comptable, ingénieur, culture « Baud ». Car « le plus grand défi prise, voire pour envisager leur aveniretc. Depuis cinq ans, le programme a vu pour les recrues est de comprendre le fonc- au sein du groupe, ou ailleurs. «  Nouspasser plus de 2 500 jeunes. Résultat  : tionnement des trois Baud », sourit le ben- ne forcerons personne à entrer dans l’entre-les classes techniques sont remplies sur jamin Jean-Noël. Les frères reconnaissent prise », affirment en chœur les frères. Lesle territoire, alors qu’elles peinaient à avoir des difficultés à accueillir des profils pères ne participent qu’à la fin de chaquerecruter quelques années auparavant. expérimentés d’encadrement capables de réunion, espérant qu’elles s’espaceront.«  On en ouvre même d’autres  », se réjouit s’intégrer dans leur entreprise familiale Imaginant sans doute, un jour, déména-Lionel Baud. Si bien que le président de internationalisée. Pour eux, l’enjeu est de ger à trois heures de route afin de ne pasla région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent perpétuer l’histoire de leur père, passé s’immiscer dans le quotidien des futursWauquiez, souhaite à présent étendre d’apprenti à chef d’entreprise. Une his- successeurs.Smile aux autres départements de la toire qu’ils ont poursuivie par leurs par-région, en l’adaptant à leurs besoins. Un cours personnel et collectif. Et qu’ils font * Il a été impliqué dans un dramatique accident lorschallenge à nouveau relevé pour Lionel vivre à leurs collaborateurs, comme cet de l’édition 2016 du Rallye Dakar. Sujet sensibleBaud. D’autant plus que le PDG n’entend ouvrier recruté dans le Jura qui ne par- qu’il n’a pas souhaité évoquer.pas s’arrêter là. Baud Industries s’apprête lait pas un mot d’anglais et qui dirige,VENT DE FRAICHEUR SUR 8 MONT-BLANC ... ... LAISSEZ-VOUS SURP R ENDRE ... WWW.8MONTBLANC.FR CANAL 31 DE LA TNT CANAL 30 SUR LES BOXN°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 79

Comprendre CHRONIQUESLA FIDUCIE : you can trust it ! Guillaume Sereaud pour quels avantages ? Premièrement, finaliser le trans- Dès lors, l’ensemble des impôts dus au titre desdits biens Directeur business fert de propriété : le contrat de fiducie transfère le droit doit être payé par le constituant. et ingénierie patrimonial de propriété au fiduciaire en créant un patrimoine dis- La fiducie permet à la fois de gérer un patrimoine : le Expert & Finance tinct et lui octroie les pouvoirs du propriétaire qu’il peut constituant transfère un actif au fiduciaire, qui le gérera exercer pour atteindre l’objectif défini dans le contrat. Il pour son compte et qui lui rétrocédera à la fin du contrat.La fiducie (dérivée du terme anglo-saxon trust) est est donc, à ce titre, nécessaire de définir un objectif clair L’objectif pour le constituant est de se décharger de la une opération instituée par la loi du 19 février en limitant par ailleurs les droits et obligations du fidu- gestion de certains biens, faute de la compétence notam- ciaire. Deuxièmement, faire gérer le patrimoine par un ment. À titre d’exemple, la fiducie présente un intérêt capi- 2007, par laquelle le constituant (un particulier, professionnel : comme précisé par le Code civil à l’article tal en présence d’une personne dite «  vulnérable  », de 2015, le fiduciaire est nécessairement un professionnel : par son âge, un handicap ou une maladie. Il s’agit aussi une société, une association), transfère des actifs, établissement de crédit, avocat, compagnie d’assurance, d’un outil supplémentaire et complémentaire du mandat entreprise d’investissement. Cela assure une garantie pour à effet posthume : ce dernier permet de son vivant de des droits, des sûretés, à une autre personne, le le constituant au regard de la responsabilité du profes- confier à la personne de son choix la mission de gérer sionnel qui appartiendra, en outre, à une instance profes- son patrimoine, à son décès. La fiducie est une alternative fiduciaire. Le fiduciaire gère les biens qui lui sont transférés sionnelle. Troisièmement, contrôler la gestion réalisée : la au mandat de protection future. Recourir à la fiducie peut dans un but précis au profit d’un bénéficiaire. La fiducie liberté contractuelle s’appliquant au contrat de fiducie, le permettre d’organiser la gestion durable de son patrimoine. peut être utilisée pour garantir le règlement de constituant pourra contrôler la gestion des biens par le Enfin, le contrat de fiducie peut également servir de sûreté dettes (ficucie-sureté) ou pour la gestion active fiduciaire désigné. Ainsi, il fixera notamment les modalités pour garantir l’exécution d’une obligation. Le débiteur de d’un patrimoine complexe (fiducie-gestion). Mais dans lesquelles le fiduciaire rendra compte de sa mission. l’obligation transfère la propriété d’un bien à son créancier En outre, il pourra prévoir les conditions de changement de dans le cadre d’un contrat de fiducie à titre de garantie. fiduciaire ou de fin du contrat de fiducie. La fiducie est ainsi un outil aux multiples facettes dont l’utilisation reste encore homéopathique en France. Depuis Utilisation homéopathique son intronisation, elle a été utilisée essentiellement pour La fiducie oui, mais quelle fiscalité ? Fiscalement, la consti- l’organisation et la sécurisation des pactes d’actionnaires, tution de la fiducie étant traitée comme une opération inter- pour gérer un patrimoine complexe ou enfin, et le plus calaire, celle-ci est régie par un principe de neutralité fiscale. souvent, pour garantir un créancier.L’AMÉNAGEMENT DU RÉGIME MATRIMONIALau secours du conjoint survivant Olivier Morin voie privilégiée. À la différence de l’assurance-vie qui - Autre exemple, il arrive fréquemment que les © DR Responsable service ingénierie ne peut concerner que des actifs financiers, l’amé- conjoints souhaitent conserver la propriété d’une patrimoniale Banque Populaire nagement pourra porter sur l’ensemble des biens résidence principale ou secondaire ; dans ce cas, il Auvergne Rhône Alpes composant le patrimoine des époux. En matière de est possible d’insérer une clause de préciput permet- communauté, les modifications pourront porter à la tant au conjoint de prélever le bien en question, puisLa réforme législative de 2001 a considéra- fois sur la composition de la communauté et sur son la moitié du solde de la communauté. blement renforcé la protection du conjoint attribution. survivant. Cependant, la nécessité de Ainsi, il est possible de faire entrer dans la commu- Masse commune renforcer la protection du conjoint nauté certains biens déterminés, voire l’ensemble Le régime de la séparation des biens, peut également survivant demeure forte, notamment des biens (on parlera alors de «  communauté être aménagé. Ainsi, il peut être créé une masse com- en raison de l’allongement de l’espérance de universelle »). mune de biens (dénommée « société d’acquêts »), qui vie. L’aménagement du régime matrimonial est une En complément, l’attribution des biens provenant de la vient atténuer le régime de la séparation de biens. Le communauté suite à un décès pourra être aménagée. régime de la séparation de biens est souvent choisi 80 Acteurs de l’économie - La Tribune - La clause la plus connue est la clause d’attribution lorsque l’un des conjoints exerce une profession risquée. Au fil du temps, on constate cependant que les couples intégrale de la communauté au conjoint survivant. mariés en séparation de biens ont tendance à acqué- Cette clause sera souvent privilégiée par les couples rir des biens en indivision. La société d’acquêts permet sans héritiers directs dont la protection mutuelle est alors de créer une masse commune, qu’il est possible prioritaire. d’attribuer de façon préférentielle au conjoint survivant. - Pour des couples avec des enfants, la communauté En complément, lorsque les époux contribuent de façon universelle avec attribution intégrale renchérit le inégale au financement des biens, la société d’acquêts coût global de la succession, car l’ensemble des viendra également sécuriser ce transfert de richesses biens est transmis en une seule fois aux enfants, entre les deux patrimoines. L’aménagement d’un régime lors de la seconde succession. Une clause d’attribu- matrimonial existant pourra avoir lieu après deux années tion sur-mesure, entre 50 % et 100 % sera souvent d’application de ce régime et se fera par acte notarié. préférée. N°136 Juillet-Août 2017

CHRONIQUES ComprendreLA CIGARETTE ÉLECTRONIQUE dans lesvapeurs d’une règlementation en constructionCaroline Mô Albane Lafanechère scolaires et les établissements destinés à l’accueil, à la règlement intérieur de la société et ce, aux fins de rap-Avocat collaborateur, Avocat associée, formation et à l’hébergement des mineurs ; les moyens peler aux salariés cette interdiction et la possibilité d’êtreColbert Avocats Colbert Avocats de transport collectif fermés ; les lieux de travail fermés sanctionné en cas de manquements. et couverts à usage collectif  ». Ces dispositions ont étéLe développement de la cigarette électronique en reprises à l’article L. 3513-6 du Code de la santé publique Interdite de publicité ? France s’est fait dans un cadre juridique com- La publicité en faveur des cigarettes électroniques a donné plexe hésitant entre l’application pure et simple et ont été explicitées par le décret n°2017-633 du 25 lieu à de nombreux débats, les premiers enjeux étant notam- des dispositions relatives aux cigarettes et à la ment pour les vendeurs de cigarettes de mettre un terme création d’un dispositif spécifique. Différentes avril 2017 relatif aux conditions d’application de l’interdic- à une concurrence jugée déloyale. L’ordonnance n°2016- règlementations sont ainsi intervenues au cours des der- 623 du 19 mai 2016 portant transposition de la directive niers mois pour fixer les premiers contours du vapotage. tion de vapoter dans certains lieux à usage collectif, qui 2014/40/UE sur la fabrication, la présentation et la vente Alors que la vapeur prospérait dans les lieux publics, res- des produits du tabac et des produits connexes, a créé sur taurants ou encore sur leurs lieux de travail, certaines voix entrera en vigueur au 1er octobre 2017. La principale inter- ce point un nouvel article L. 3513-4 du Code de la santé ont commencé à s’élever contre cette utilisation. C’est publique. Celui-ci dispose que « la propagande ou la publi- dans ce contexte que la loi n°2016-41 de modernisation rogation concernait l’application de cette interdiction dans cité, directe ou indirecte, en faveur des produits du vapotage du système de santé du 26 janvier 2016 est venue déci- est interdite », sachant que les produits du vapotage sont tant der qu’« il est interdit de vapoter dans : les établissements les bureaux individuels fermés. Une confirmation de cette les dispositifs électroniques de vapotage que les flacons de recharge. Le Conseil d’État a récemment validé ce dispositif position était donc attendue dans les textes d’application. en relevant toutefois que cette interdiction « ne portant que sur la propagande et la publicité, elle ne saurait, eu égard aux Cela semble être le cas au regard de l’article 1er du décret dispositions de l’article L. 581-1 du code de l’environnement précité et en l’absence de toute autre disposition législative, qui définit les lieux de travail soumis à l’interdiction comme être interprétée comme faisant obstacle à ce que les établis- sements commercialisant des produits du vapotage puissent les locaux recevant des postes de travail situés ou non signaler la nature de leur activité par l’enseigne du lieu de vente », (CE, 10 mai 2017). dans les bâtiments de l’établissement, fermés et couverts, Gageons que ces dispositions devraient faire l’objet de nom- breux débats afin de déterminer exactement ce que recouvre et affectés à un usage collectif, à l’exception des lieux qui la notion de publicité directe ou indirecte. accueillent du public. La référence expresse à un usage collectif permet donc d’exclure les bureaux individuels fermés. En outre, et dans ce cadre, l’employeur doit veiller à apposer une signalisation apparente rappelant le principe de l’interdiction de vapo- ter et, le cas échéant, ses conditions d’appli- cation dans l’enceinte de ces lieux. À défaut, l’employeur s’expose à une contravention de 3e classe. Le salarié pourra également faire l’objet d’une contravention de 2e classe s’il méconnaît l’interdiction de vapoter sur son lieu de travail. Enfin, il est conseillé de reprendre les dispositions de cet article dans le cadre duVIRAGE ?Àl’heure de ces lignes, le gouvernement nouveau vient d’arriver. Un bon cru ? route, les sacs sont inévitablement lourds pour une route longue et c’est la cohésion et la Laissons-le mûrir un peu, issu qu’il est d’une récolte multicépages dont il reste solidarité d’une équipe qui permet de franchir les étapes décisives. à expérimenter les équilibres, et, plus encore les accords qu’il assumera avec les mets complexes qu’il devra maîtriser. Mais le moment n’est déjà plus aux Prise de consciencevendanges. À l’heure où les startups fleurissent avec leur capacité de créativité, d’enthousiasme et de prise de risque, notre société peut-elle se contenter de regarder passer les trains pour seDans des billets précédents, combien de fois n’ai-je pas déploré ce climat délétère fait lamenter de ne pas les voir ralentir en la laissant sur le quai ? Le risque majeur ne serait-il pas dans une incapacité à casser la rigidité de nos systèmes de pensée, à infléchir desde ces exaspérations et oppositions stériles puisées dans un terreau d’intérêts égoïstes systèmes de valeurs devenus lentement et sournoisement inadaptés ? Il ne s’agit pas de déconstruire notre culture riche de tout ce qu’elle a bâtie au fil de son histoire, de ses et partisans en lieu et place de la recherche de conver- heureux développements et de ses drames, mais il faut aussi regarder en face le monde dans lequel nous sommes immergés. Un monde qui génère des développements tech- gences objectives sur des propositions positives et nologiques sans cesse accélérés d’où sortent et sortiront d’irréversibles transformations. En même temps que les bouleversements géopolitiques ne cesseront de nous affronter réalistes ? Bien sûr, ne soyons pas naïfs. Il reste à à des réalités économiques et sociales dont il ne faut pas se voiler. La conséquence politique ? Qu’une prise de conscience de notre société conduise cette dernière à n’être voir et à démontrer que l’intelligence peut pas seulement attentiste et critique, pleurant sur un passé où « c’était bien mieux avant » mais, progressivement, accepte, chacun à son niveau, de devenir acteur, modeste sans prendre le dessus sur les aveuglements doute mais conscient et actif. L’écologie déjà dont tout le monde parle ne commence-t- elle pas chez soi ? et les intolérances, que les logiques Acteurs de l’économie - La Tribune 81 jusque-là cultivées peuvent s’ouvrir à d’autres horizons. La pente sera sévère et souvent glissante, le chemin caillouteux et semé d’obstacles connus à franchir, l’inflexion © Alain Rico - DR du parcours initialement prévu pourra être nécessaire, le doute, parfois, pourra aussi frei-Jean Lafay ner les ardeurs. Une nouvelle cordée est enN°136 Juillet-Août 2017

Respirer RUBRIQUE DE NOM82 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

RUBRIQUE DE NOM RespirerN°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 83

Respirer VIN Auguste Clape, son fils Pierre-Marie et Olivier, son petit-fils.DOMAINE CLAPELES CORNACS DU CORNASSur les coteaux escarpés de la rive droite du Rhône à Cornas, en Ardèche, et dans l’intimité dela cave et des vieux foudres, prend naissance un des meilleurs crus de la vallée du Rhône Nord.Auguste Clape, 92 ans, appartient aux fondateurs et gardiens du temple de cette petiteappellation créée en 1938. Et sa mémoire rend compte du travail acharné conduit depuisl’après-guerre pour parvenir à une telle notoriété. Ce qui a permis à Pierre-Marie, son fils,et à Olivier, son petit-fils, d’établir à ses côtés un présent sûr et florissant.REPORTAGE, DOMINIQUE-MYRIAM DORNIERPHOTOGRAPHIE, LAURENT CERINO / ADEDomaine Clape Ne venez pas chez Clape pour quasi planétaire. De plus, rien n’indiqueCornas (Ardèche) acheter du vin ! Ils passent leur le domaine : il faut chercher, à pied, les8,5 hectares temps au téléphone à répondre rares indices qui vous y conduisent ; unCôte du Rhône qu’ils n’en ont pas à vendre. nom écrit en tout petit sur la sonnette,Cornas : Avec 35 000 bouteilles pro- et vous y êtes. Une fois traversées lesCuvée Renaissance duites chaque année, ils ne peuvent servir épreuves d’orientation, la porte s’ouvre,Cuvée cornas tout le monde, alors que la demande est l’accueil est chaleureux, le voyage peut70 % à l’export N°136 Juillet-Août 201784 Acteurs de l’économie - La Tribune

VIN Respirercommencer. Et à ce moment-là, peut-être homme évoque aussi une servitude subie l’époque, c’est évidemment l’abondancecroiserez-vous dans la pénombre du petit et une jeunesse pas vraiment dorée : son et la richesse, une vie plus facile  ! Et ilchai, des Japonaises aux anges, un verre père, grand invalide de guerre à 26 ans, ne manque pas de souligner, malicieux,de « vin noir » à la main. inapte au travail ; un beau-père militaire, qu’aujourd’hui, « c’est pareil que sous LéonÀ regarder un peu en arrière, tout a com- tué à l’âge de 24 ans, laissant une jeune Blum, les gens veulent moins travailler ». Lemencé par les femmes. Car lorsqu’en veuve à la tête de l’exploitation agricole. Front populaire  : une ambiance paren-temps de guerre, les hommes se font Une décimation pléthorique des jeunes thèse avant l’hécatombe de la Secondemassacrer dans des conflits absurdes et gens au front des guerres, d’où l’absence Guerre mondiale, et dont l’enfant qu’illointains, elles sont toujours présentes, cruciale de main d’œuvre. Le prix du était se souvient de l’extraordinaire épi-permettant à la vie de ne pas s’éteindre, vin vendu en vrac était alors «  plus bas sode des premiers congés payés. Maismalgré tout. Chez les Clape, c’est par qu’un kilo de farine  », souligne Auguste quand l’heure est venue pour sa progéni-l’arrière-grand-mère d’Olivier, Hen- Clape, ajoutant qu’à chaque automne, des ture de choisir un avenir, c’est son expé-riette Rousset, qu’est fondé le domaine. hommes désertaient les vignes pour les rience et sa raison qui parleront  : «  MaQuelques arpents difficiles à travailler  : usines de Valence qui, dans les années femme voulait envoyer nos trois enfants fairecinq hectares de vignes, dix de céréales, 1960, embauchaient à tour de bras. « La des études, pour qu’ils choisissent un autresur lesquels, dès l’après-guerre, Auguste montagne de ce village est presque toute métier », dit-il. Pourtant, quelques annéesClape, originaire de Vernoux, à quelques complantée en vignes qui produisent un très plus tard, il accueillait, à bras ouvert, sonencablures, s’est éreinté, seul, avec son bon vin. Sa couleur, sa corpulence, son archi- fils Pierre-Marie, quand celui-ci décidait,épouse. Sur le vignoble escarpé et les tecture sont imposantes. C’est ce qu’on peut en 1988, de quitter le secteur industrielchaillées (petites terrasses abruptes), tout appeler un vin viril. » Déjà, en 1763, l’abbé pour travailler à son côté. À présent, lase faisait à main d’homme. Alors un Morin, auteur de ces lignes, ne s’y trom- contiguïté de sa demeure et de la cavejour, fatigué par trente années de labeur pait pas. Alors malgré la menace de dispa- – dont il perçoit de près la secrète alchi-en solitaire, Auguste est allé « chercher le rition qui pesait sur le vignoble, Auguste mie -, témoigne de cette affection pudiquePortugais ». Alcino, l’étranger providentiel Clape y croyait ferme. Fier et soucieux portée par son fils et son petit-fils. Ils sedu village au prénom d’opéra mozartien, de s’affranchir des négociants, il a été sentent pleins de gratitude vis-à-vis dedevenu rapidement membre à part entière l’un des premiers à mettre en bouteilles cette conscience nourrie de l’expériencede la famille, et qui, trois décennies plus toute sa production en 1969. Ce qu’il qu’il incarne, et qui leur rappelle à chaquetard, vit toujours à Cornas. Mais le vieil décèle en premier quand il contemple saison, d’où ils viennent.N°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 85

Respirer VINDES TAISEUX ans, qui a appris le métier sur le terrain vieux millésimes de la cave sont recou-Un beau jour, à Cornas, au cœur de l’Ar- avec son père et son grand-père, a décidé, verts d’un duvet épais de moisissuresdèche, et du temps d’Auguste, d’autres en 2008, de faire évoluer les méthodes de qui masque les étiquettes  ; l’ambianceétrangers sont arrivés, venant du culture, supprimant progressivement le catacombes ajoute au mystère. «  PourRoyaume-Uni. Et ce qu’ils dégustaient, désherbant qui avait permis au domaine s’y retrouver, nous avons un plan  », souritavec stupéfaction, avait de quoi leur faire d’exister à ses débuts. Il s’est mis au Olivier Clape, alors qu’à chaque fin d’an-oublier l’humidité brumeuse de leur labour dans les rangs étroits, convaincant née, la famille s’offre une verticale deschère île. À vrai dire, ce n’était pas vrai- a posteriori son père dans l’utilisation de millésimes depuis 1964. Par la profon-ment des Anglais, mais des Écossais qui, produits de traitement bio, comme le deur des évocations, le gustatif mène toutd’après la légende, parcoururent fébri- soufre et le cuivre, utilisant des mulets droit au ciel, il ne faut pas s’y tromper.lement le petit village pour y dénicher, pour travailler le bas des coteaux. Cepen- L’amateur éclairé devient intelligent, per-derrière les imposants portails de bois, dant la tâche reste très physique, rang par tinent, poète, ému comme un enfant, pasle secret décliné du cornas. Mais aussi rang, face à la pente. « Un travail éprou- du tout un abruti aviné. Avec le cornas,des journalistes comme le célèbre Parker. vant, à la pioche. Les gens ne se rendent pas loin d’être un vin rustique, c’est sur uneCar la demande existait au Royaume- compte », souligne-t-il. monture ailée qu’il parcourt les strates deUni comme outre-Atlantique, et ce l’espace et du temps.sont eux qui ont propulsé l’appellation. UN PETIT MIRACLE D’ALCHIMIEAlors depuis 40 ans, les Clape recourent Aujourd’hui, ce sont 55 producteurs PROBLÉMATIQUE SPÉCULATIONau même importateur. Néanmoins, et 135 hectares qui produisent chacun Alors que le monde vient à Cornas parles Anglais du départ n’ont pas seule- un cornas très spécifique, malgré une le biais d’importateurs avisés, l’Ardèchement acheté du vin. Ils se sont investis relative uniformité géologique. Sur un des vignerons voyage et observe. Olivierfinancièrement sur certains domaines, kilomètre et demi à peine se déploient Clape est parti faire du vin à Napa Val-se substituant d’ailleurs aux banques de toutes petites parcelles aux sols gra- ley, aux États-Unis, où le raisin arrivelocales, très en retrait vis-à-vis de ces nitiques pour la plupart, de la roche et par camions. Le travail y est taylorisé, lepionniers, de ces aventuriers qui délais- peu de terre, avec du limon et des allu- monde des bactéries maîtrisé, ordonné,saient un travail salarié pour se lancer à vions pour le bas des pentes. Des pay- dompté. Il a trouvé en Nouvelle-Zélandecorps perdu à l’assaut des coteaux sans sages somptueux, grands amphithéâtres et en Australie, en revanche, davan-un kopeck. Juste un rêve. Ainsi Thierry végétaux orientés Sud et Sud-Est, hérissés tage d’authenticité. «  La France reste laAllemand, un voisin, qui ne proposait d’arêtes minérales et abrités du mistral, référence absolue à la fois pour le vin, lason vin qu’en barrique, faute de moyens, qui surplombent le Rhône en aval. Chauf- nourriture, la diversité des régions. Auxs’était vu gratifié d’une belle accolade et fés à blanc par le soleil ardent de l’été, ils États-Unis, si l’on veut changer de paysage,d’un chèque important, pour acheter ses produisent un vin très tanique qui fleure il faut prendre l’avion  ! C’est en voyageantbouteilles. Auguste Clape qui a voyagé bon la pierre, le cuir, le fumé : masculin que nous nous rendons compte de la chanceun peu, et goûté par ailleurs, a aussi à l’extérieur, féminin à l’intérieur. Une que nous avons.  » Cependant la spécu-son avis sur le Bordelais  : beaucoup de trame assez serrée, qui envoûte et capte lation sur les terres commence à poserpublicité, du marketing et des Chinois, par sa structure puissante unique, dévoi- problème. Les Clape, comme tous ceuxici et là, qui achètent. Et le vin  ? «  Pas lant une finesse qu’il s’agit de chercher de la rive droite du Rhône, restent dansmeilleur que le cornas. En tout cas, le tra- en vinification. Tout l’art du vigneron est une sagesse et une mesure toute ardé-vail revient plus cher ici que là-bas. » Sans ici réuni. Le temps referme le cornas les choise  ; mais certains vignerons sur ladoute que pour Auguste Clape, la cari- premières années  : il faut alors attendre rive en face, côté Drôme, font feu de toutcature de l’œnologue bordelais évoqué huit à dix ans pour y découvrir, enfin, un bois et profitent de la dérégulation desdans le film Mondovino, surveillant par petit miracle d’alchimie, des arômes capi- droits de plantation, en achetant fréné-téléphone ses cuvées entre deux avions teux de violette et d’épices, une pointe de tiquement tout ce qui est à vendre. Atti-et en costume-cravate, relève de la pure truffe. Pas de bois neuf, l’élevage se fait rant ainsi les spéculateurs et plantant àscience-fiction. dans des vieux foudres ovoïdes qui ne tout va. Des montages astucieux les dis-Les Clape sont cependant des taiseux. marquent pas le vin. Et le domaine qui pensent de payer la MSA, alors qu’ils fontIci, on communique presque silencieu- produit deux cuvées, vinifie séparément venir des ouvriers équatoriens, par l’in-sement, malgré une entente de principe, et assemble, en isolant des vignes par- termédiaire d’agences espagnoles. C’estpour faire ce qu’il y a à faire. Olivier, 38 fois centenaires et les jeunes plants. Les le désir de puissance matérielle, comme GÉRARD GASQUET N°136 Juillet-Août 2017 EXPOSITION DU JEUDI 7 SEPTEMBRE AU SAMEDI 7 OCTOBRE 2017 vernissage en présence de l’artiste, le jeudi 7 septembre de 18h à 21h Le soleil sur la place | Galerie Franck Lassagne | 4 rue Antoine de Saint-Exupéry 69002 Lyon Tél. 04 78 42 56 65 | Mobile 06 84 36 06 67 | du mardi au samedi de 11h à 13h et de 14h30 à 19h sur rendez-vous | www.lesoleilsurlaplace.com86 Acteurs de l’économie - La Tribune

VIN Respirerune ombre dans l’intention humaine. « Les vieux millésimes administrative qui les oblige à déléguer,Les jeunes qui veulent s’installer essuient de la cave sont les taxes qui découragent la création deles plâtres. Mais la Drôme et l’Ardèche recouverts d’un duvet groupement foncier agricole (GFA) etque sépare le Rhône n’ont pas la même épais de moisissures les droits de succession, dont le mon-spécificité historique, loin s’en faut. Les qui masque tant élevé, peut provoquer des cessionsconfondre reviendrait à dire à un Catalan les étiquettes ; qui atomisent les domaines. Mais quantqu’il est espagnol. Sur la rive gauche, se l’ambiance catacombes à l’équation travail/valeur marchande,trouve la plaine drômoise et la richesse, ajoute au mystère » Auguste Clape rétorque, l’air entendu  :alors que sur la rive droite, c’est la mon- « L’argent, c’est autre chose. »tagne, le plateau, les reliefs et une histoire un manager ou un homme d’affaires. Iléconomique marquée par la difficulté, souhaite que son domaine demeure un Olivier Clape a fait évoluer les méthodes de culture et s’estdonc la prudence. Mais ces excès expan- domaine familial, continuant à se sentir mis au labour dans les rangs étroit à l’aide de mulets poursionnistes, un peu infantiles, font sourire libre dans ses vignes. Ne pas dépendre travailler le bas des coteaux. Un travail physique, rang parPierre-Marie Clape. Tous les vignerons se d’un patron, pour lui qui s’est cogné rang, face à la pente.connaissent depuis des années, voire des quelque temps aux murs des bureaux,générations, ici comme en face, et la bon- avant de revenir travailler ici avec sonhomie et une certaine bienveillance dans père, reste un bonheur malgré la tâcheles relations restent de mise. rude. Et la tendance serait plutôt de gar- der ses racines terriennes et de mettre dePRUDENCE l’argent de côté et non d’investir à toutCe printemps 2017 est précoce et impré- va : « Le vin vit sa période la plus faste, maisvisible : les pousses qui devraient mesurer on ne sait jamais, il faut rester prudent. » Ilcinq centimètres en font trente, comme y a aussi une hydre qu’ils aimeraient tousen 2003 et 2007. Dans d’autres régions, voir s’amenuiser, à savoir la complexitéla grêle a détruit le vignoble, mais ilsemble que ce territoire soit protégé desgrands cataclysmes. Olivier Clape, quantà lui, ne veut pas s’agrandir, et devenirRABBIT HOLE BODY REVOLUTION L'AMOUR NOVECENTO LE QUAT’SOUS SAISON & WAITING ET LES FORÊTS Alessandro Baricco Annie Ernaux 17 — 18UNIVERS PARALLÈLES Mokhallad Rasem Éric Reinhardt André Dussollier Laurence Cordier Laurent Bazin 04 72 77 40 00David Lindsay-Abaire BEC-DE-LIÈVRE PETIT ÉLOGE BLUEBIRD THEATREDESCELESTINS.COMClaudia Stavisky 20 000 LIEUES DE LA NUIT Simon Stephens VENGEANCE SOUS LES MERS Ingrid Astier Claire DeversDANS LA PEAU OU PARDON Jules Verne Gérald GaruttiDU MONSTRE Christian Hecq LE PAYS LOINTAINLucie Depauw Fabio Rubiano Valérie Lesort LES EAUX Jean-Luc LagarceStéphanie Marchais ET FORÊTS Clément Hervieu-LégerCécile Auxire-Marmouget NORD-EST ARTURO Marguerite DurasChristian Taponard Torsten Buchsteiner BRACHETTI Michel Didym PROFESSEUR Galina Pyanova BERNHARDITARKOVSKI, ARTiSHOCK Theater SOLO À LA TRACE Arthur SchnitzlerLE CORPS Alexandra Badea Thomas OstermeierDU POÈTE LA MISSION RAMONA Anne ThéronJulien Gaillard Rezo Gabriadze TRINTIGNANT -Antoine de Baecque SOUVENIR ACTRICE MILLE - PIAZZOLLAAndreï Tarkovski D’UNE RÉVOLUTION LE DIAMANT Pascal Rambert Jacques PrévertSimon Delétang DU MARÉCHAL Allain Leprest Heiner Müller DE FANTIE GEORGE Robert Desnos / Boris Vian…ÇA VA ? Matthias Langho f Rezo Gabriadze DANDIN Jean-Louis TrintignantJean-Claude Grumberg Astor Piazzolla / Daniel MilleDaniel Benoin TABLEAU D’UNE LA FUITE ! OU LE MARI EXÉCUTION CONFONDU BOTALA MINDELEMARTYR Howard Barker COMÉDIE EN Rémi De VosMarius von Claudia Stavisky HUIT SONGES Molière Frédéric DussenneMayenburg Jean-Pierre VincentOskaras Koršunovas EVA PERÓN Mikhaïl Boulgakov FESTEN & L’HOMOSEXUEL Macha Makeïe f LOVELESS Thomas VinterbergJE N'AI PAS Claude Jaget Mogens RukovENCORE OU LA DIFFICULTÉ LA CUISINE D’ELVIS Anne Bu fet Bo Hr. Hansen / DanielCOMMENCÉ DE S’EXPRIMER Lee Hall / Pierre Maillet Yann Dacosta Benoin / Cyril TesteÀ VIVRE Collectif MxMTatiana Frolova Copi / Marcial Di Fonzo Bo MARGOT TRISTESSESThéâtre KnAM Christopher Marlowe Anne-Cécile Vandalem LA VIE QUE Laurent Brethome JE T'AI DONNÉE Luigi Pirandello Jean LiermierN°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 87

PUBLI-REPORTAGE © Fotolia Mieux se déplacer en polluant moins. Partager sans se priver. Protéger tout en développant… Les enjeux de la mobilité de demain sont multiples et ressemblent à de vrais casse-têtes. Mais ils pourraient bien trouver des réponses en Auvergne-Rhône-Alpes, grâce à des acteurs impliqués et volontaires, qui ont compris la dimension globale de cette problématique.LA MOBILITÉUN ENJEU D’AVENIR88 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

© Communiquez - Image : iStock, RichVintage - Juin 2017 N°136 Juillet-Août 2017 RUBRIQUE DE NOM Respirer BONDISSONS VERS UNE NOUVELLE DYNAMIQUE DE MOBILITÉ 2017-2030 Un plan d’actions pour les déplacements. Un projet partenarial piloté par le Sytral. www.sytral.fr Acteurs de l’économie - La Tribune 89

PUBLI-REPORTAGE nouveau partage de la voirie, avec LES INNOVATIONS moins de voitures, plus de transports TECHNOLOGIQUESD’ici à 2050, le nombre collectifs. Et notamment le tramway », Pour continuer à anticiper et conser- de véhicules et de raconte Philippe Bossuet, directeur ver son avance en matière de mobi- kilomètres parcourus Prospective, Études Amont et Plan lité durable, le Sytral vient d’arrêter devrait doubler. Par- des Déplacements Urbains au sein du le projet d’une troisième version de tout dans le monde, Sytral, le syndicat mixte qui gère les son PDU (voir encadré). Il souligne les villes vont continuer à se déve- transports en commun de l’aggloméra- un changement rapide des compor- lopper et à attirer les populations. tion lyonnaise. Grâce à cette prise de tements des usagers. Exemple  : le L’agglomération lyonnaise se prépare, conscience rapide et précurseur, Lyon covoiturage est entré très vite dans les elle, à accueillir 150 000 habitants a conforté et accentué son attractivité. habitudes des Français. Tout comme supplémentaires d’ici à 2030. Et Elle se démarque aujourd’hui par une l’autopartage. «  On voit des change- comptabilisera 800 000 emplois. Ces part modale importante des trans- ments profonds. Avant, le nombre «  nouveaux Lyonnais  » voudront se ports collectifs, qui égale la région de voitures augmentait même si leur déplacer sans passer des heures dans parisienne. Les usagers peuvent facile- utilisation baissait. Aujourd’ hui on les embouteillages. Ils rechercheront ment passer de leur voiture au métro, assiste à un début de démotorisation une qualité de vie : des espaces verts, en passant par le tramway, le bus, dans le centre-ville. Avec des ménages des transports en commun perfor- le train, la marche à pied ou le vélo. qui ne possèdent plus du tout de voi- mants mais aussi un air respirable L’utilisation de la voiture a également tures mais qui en louent quand le pour leur famille ! Il faudra donc veil- considérablement baissé. De près de besoin se fait sentir », observe Philippe ler aux enjeux de santé publique. 50% en 2006, elle est aujourd’hui en Bossuet. dessous des 44 % et devrait atteindre Les progrès technologiques ont DES TRANSPORTS EN COMMUN 35 % en 2030. Un niveau qui sera fortement soutenu cette tendance EFFICACES identique à celui de la marche à pied. et favorisé les changements de Alors, quelle mobilité faut-il envisager pour demain  ? La question se pose déjà depuis plusieurs années. «  Dès 1997, nous avons mis en place un plan de déplacements urbains (PDU). Nous étions la première agglomération à le faire. Ce document de programmation et de prospective a débouché sur un«Nous nous eforçons © Navyade rendre les pneustoujours plus économessans sacriier sécuritéet longévité. Une équationdiicile à résoudre quimobilise notre R&D.Notre objectif estde réduire de 20 %les émissions de CO2en phase de roulaged’ici à 2030  »Claire Dorland-ClauzelMembre du comité exécutifdu groupe Michelin en chargedu développement durable.90 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

PUBLI-REPORTAGE © NavyaUN PLAN DE DÉPLACEMENTS URBAINS, KESAKO ?Le Sytral vient d’arrêter le projet de la troisième version du Plan de déplacement urbain. Il sera adopté à la fin de l’an-née 2017. Ce document est stratégique puisqu’il est à la fois programmatif et prospectif. Il donne ainsi un programmeferme à 5 ans avec un plan d’action précis. Et une vision à 2030 afin de planifier les grandes politiques, pour assurer lemaximum de continuité et d’anticipation en la matière.Son autre particularité est qu’il inclut tous les acteurs, privés et publics, qui sont en lien avec les déplacements sur unterritoire vaste qui compte 73 communes : la métropole de Lyon mais aussi les 8 communes de la Communauté deCommunes de l’Est Lyonnais (CCEL) et les 6 communes de l’ouest lyonnais adhérentes au Sytral.Ce dernier pilote l’écriture du PDU et travaille communément avec toutes les parties prenantes. « Le premier PDU del’agglomération lyonnaise date de 1997 et il nous a permis de penser très tôt la ville de demain et de conforter nosatouts. Le PDU a ensuite été revu en 2005 puis en 2017. Pour le faire évoluer, nous nous appuyons sur des donnéesprécises, liées aux grandes enquêtes de déplacements urbains. Nous analysons les flux entre notre territoire et les ter-ritoires voisins », explique Philippe Bossuet.Equité et santéAlors, à quoi ressemblera la ville en 2030 ? La voiture perdra du terrain, même si elle aura une place adaptée auxbesoins. La marche à pied restera un mode de déplacement prioritaire, avec des transports en commun toujours fortset la présence des vélos renforcée. Les modes alternatifs à « l’autosolisme » se développeront à l’image de l’autopartageet du covoiturage. En termes de transport de marchandises, le dernier kilomètre sera aussi une question centrale avecdes réflexions conjointes entre institutions et acteurs privés. Des innovations technologiques bouleverseront sûrementle paysage. Mais pas question de penser des outils futuristes juste pour le plaisir, chaque mode de transport devra sou-tenir un équilibre global. Les évolutions se feront autour de 4 piliers : le cadre de vie et la santé publique, l’équité et lacohésion sociale, l’attractivité de l’agglomération et l’implication des usagers au cœur de la démarche afin de penserun système qui colle aux comportements.« Cela donnera naissance à une mobilité du futur mais réaliste, et non une mobilité futuriste », conclut Philippe Bossuet.N°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 91

PUBLI-REPORTAGE © Muriel Chaulet « Dans la vie de tous les jours, les gens ont tendance à faire l’économie d’eforts physiques et optent pour des transports passifs. Marcher permet de se déplacer mais participe aussi à la mobilité durable et à la santé publique. Cette application mobile va ainsi ofrir des parcours adaptés à tous les proils et favoriser les déplacements urbains pédestres » Yann Cucherat Adjoint aux Sports à la Ville de Lyoncomportements. Fini le temps où a été très médiatique dernièrement  : basé à Clermont-Ferrand, qui a trèsprendre le bus impliquait d’arriver la navette autonome Navya. Cette tôt compris l’enjeu et l’a intégré à saen retard. Maintenant, l’heure d’ar- voiturette parcourt depuis fin 2016 stratégie. Il y a 20 ans, le groupe arivée est connue et assurée grâce à les quais de Saône, le long du centre lancé le Michelin Challenge Biben-des modules d’information, des appli- commercial Confluence. Elle est ali- dum, devenu aujourd’hui le Movin’Oncations mobiles comme Onlymoov mentée par l’électricité et n’a pas by Michelin. Ce sommet annuel s’estou celle des TCL. Même dans le de chauffeur. Ce véhicule d’un nou- tenu du 13 au 15 juin 2017 à Mon-métro, les incidents sont instantané- veau genre, lancé par l’entrepreneur tréal et a réuni une centaine dement relayés et l’heure d’arrivée de la Christophe Sapet, donne le ton de la partenaires et plus de 3 000 parti-prochaine rame s’affiche sur tous les mobilité de demain : elle sera connec- cipants. Cet événement est devenuquais. Une révolution pour les usagers tée, partagée et écologique. D’autres la référence mondiale de la mobilitéqui maîtrisent leurs temps de trajet et entreprises planchent sur le transport et de ses défis. Il traite aussi bien desvoyagent plus sereinement. aérien. « Nous sommes démarchés par moyens de transport connectés que des start-up qui travaillent sur des de la mobilité urbaine durable. « C’estLES ACTEURS PRIVÉS technologies aériennes sans conduc- le grand sommet du ‘comment’. L’effi-La mobilité durable passe aussi par teur  », souffle Philippe Bossuet, du cacité naît du dialogue et de l’ impli-le dialogue et la coopération entre les Sytral. cation de toutes les parties prenantes.sphères privées et publiques. Lyon Les grands groupes se saisissent Nous souhaitons, à travers cet événe-fait figure d’exemple sur ce volet avec aussi de la question. Surtout quand ment, enclencher le mouvement de lade nombreux partenariats et expéri- la mobilité durable touche le cœur de mobilité de demain », explique Clairementations conjointes. Une initiative leur activité. C’est le cas de Michelin, Dorland-Clauzel, membre du comité« On voit des changements profonds. Avant, le nombre © Sytralde voitures augmentait même si leur utilisation baissait.Aujourd’hui on assiste à un début de démotorisationdans le centre-ville. Avec des ménages qui ne possèdentplus du tout de voitures mais qui en louent quandle besoin se fait sentir »Philippe BossuetDirecteur Prospective,Études Amont et Plandes Déplacements Urbainsau sein du Sytral92 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

RUBRIQUE DE NOM Respirer L’APPLI QUI CONNECTE LA VILLE À VOS BASKETSN°136 Juillet-Août 2017 • 11 parcours gratuits, de différents niveaux, • Renforcement musculaire, • Commentaires historiques… DÉCOUVREZ LYON AUTREMENT ! Acteurs de l’économie - La Tribune 93 Téléchargez l’application

PUBLI-REPORTAGEexécutif du groupe en charge du déve- rendre les pneus toujours plus économes Preuve que la mobilité durable se joueloppement durable. sans sacrifier sécurité et longévité. Une sur tous les fronts, tant écologiques,En plus de participer activement à équation difficile à résoudre qui mobi- environnementaux, technologiquesconstruire la mobilité de demain, lise notre R&D. Notre objectif est de que sociétaux. L’avenir se joue dèsMichelin intègre également ces enjeux réduire de 20 % les émissions de CO2 aujourd’hui.dans son fonctionnement et dans ses en phase de roulage d’ ici à 2030  »,produits. «  Nous nous efforçons de précise Claire Dorland-Clauzel.SE DÉPLACER À PIED, UN TRANSPORT D’AVENIRD’ici à 2030, la marche à pied représentera 35 % des déplacements dans la métropole lyonnaise. Un chi re élevé, liéaux e orts mis en place pour l’accessibilité et la promotion de la marche à pied comme mode de transport. L’exerciceprésente de nombreux avantages : il ne pollue pas et participe aussi à maintenir les usagers en bonne santé et démo-cratise l’e ort physique.Une appli gratuitePour soutenir cette pratique, la Ville de Lyon s’apprête à lancer enforme@lyon, une application mobile gratuite propo-sant divers parcours de santé en milieu urbain, déclinés en plusieurs niveaux de di culté. « Dans la vie de tous les jours,les gens ont tendance à faire l’économie d’e orts physiques et optent pour des transports passifs. Marcher permet dese déplacer mais participe aussi à la mobilité durable et à la santé publique. Cette application mobile va ainsi o rir desparcours adaptés à tous les profils et favoriser les déplacements urbains pédestres », explique Yann Cucherat, adjointaux Sports à la Ville de Lyon. Entièrement gratuite, enforme@lyon proposera onze circuits avec 3 niveaux de di cultés.L’objectif est d’en proposer un nombre équivalent chaque année sur le sol lyonnais. Grâce à la géolocalisation, l’utilisa-teur peut parcourir le circuit à son rythme, en marchant seul ou en famille, mais aussi en courant pour les plus sportifs.Il pourra disposer d’informations sportives sur sa performance et en apprendre plus sur le patrimoine de la ville. Grâceà des agrès et du mobilier urbain, il pourra pousser davantage l’exercice et faire du renforcement musculaire. Tousles publics sont concernés, même les personnes en situation de handicap avec des parcours adaptés aux mobilitésréduites. Chacun pourra ainsi reprendre goût à la marche à pied, à la course et à l’activité physique en général.enforme@lyon sera inaugurée mercredi 28 juin94 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

MICHELIN AGIT RUBRIQUE DE NOM RespirerEN FAVEUR DELA MOBILITÉ DURABLE. Retrouvez notre action sur Acteurs de l’économie - La Tribune 95 #MichelinTakesAction Sur notre site michel.in/mobilite-durableN°136 Juillet-Août 2017

11e Prix de l’esprit d’entreprendre 1CÉLÉBRER TOUTES LES CULTURESCOMPTE-RENDU, STÉPHANIE BORGPHOTOGRAPHIES, LAURENT CERINO / ADERévolutionner, éduquer, rebondir, mobiliser, créer... autant d’expressions du verbe entreprendre,autant de reconnaissances lors de la 11e édition du Prix de l’esprit d’entreprendre, organisé parActeurs de l’économie, en partenariat avec emlyon business school. Ce cru 2017, célébréle 14 juin en clôture du Salon des entrepreneurs de Lyon, a mis en valeur des personnalités etdes collectifs, emblématiques, qui forcent l’exemple. Mais si chacun s’est forgé sa propre cultureentrepreneuriale, tous ont, à leur façon, réussi le pari de conjuguer nécessités économiqueset sens commun. À l’image de l’artiste Bartabas, président d’honneur de la cérémonie etde Jean-Marc Borello (groupe SOS), Grand Prix.Une sélection finale de trente dossiers de can- l’enseignement supérieur, ont eu la lourde heureuse, ont pris conscience de l’impérieuse didatures, six prix tâche d’évaluer ces trajectoires, toutes nécessité de tirer profit du capitalisme en jugu- à remettre. Les 15 remarquables. « Le choix était cornélien tant lant ses excès », se félicite Denis Lafay, direc- membres du jury du 11e chacun méritait de gagner », résume l’un de teur de la rédaction d’Acteurs de l’économie. Prix de l’esprit d’entre- ses membres à la sortie de la cérémonie. Des personnalités aux cultures diverses, prendre, composé de Malgré tout, ce jury a réussi « à faire éclater issues d’univers souvent très opposés, mais des trésors, des personnalités pour lesquelles qui donnent «  une vraie leçon entrepreneu-personnalités du monde l’action d’entreprendre devient une nourri- riale, car elles sont de véritables acteurs de leuréconomique et de ture de l’humanité, et qui, par une résistance vie et de celle de tous les autres », poursuit-il.96 Acteurs de l’économie - La Tribune N°136 Juillet-Août 2017

11e Prix de l’esprit d’entreprendre 1Lauréats et partenaires. 42 2Bartabas. 3Équipe d'Emmaüs-Lyon. 4Jean-Marc Borello. 5Hélène Courtois. 3 5CULTURE ET ALTÉRITÉ rentabilité, dont il a pleinement intégré l’essence de son art, l’entrepreneur auSans conteste, Bartabas s’inscrit dans la contrainte. « J’ai une période de six mois milliard d’euros de chiffre d’affaires necette lignée. Même s’il s’en défend sou- entre deux spectacles pour enclencher le pro- craint pas la croissance. Il en fait mêmevent tout au long de la soirée : « Je ne suis cessus créatif. Pas plus, pas moins. Certes, un moteur. « Notre management agile nouspas familier de cet univers entrepreneurial », ma créativité est limitée, mais mon art, basé permet de l’absorber. Même si nous avons dessouligne l’artiste, président d’honneur sur le rapport avec le cheval, reste contraint. objectifs toujours plus ambitieux, ils ne sontde la cérémonie. Bartabas a bel et bien Il n’est pas reproductible à l’infini. Le piège pas inatteignables. Il faut rehausser la barreconstruit son propre modèle, empreint serait de chercher à se produire dans des pour motiver. Et comme nous voulons chan-d’une véritable culture artistique. « Dans salles toujours plus grandes. Mais on perdrait ger le monde, nous avons du travail pour plu-notre compagnie moitié homme, moitié che- la qualité de la relation avec le public. La sieurs années. L’épanouissement passe par lavaux, ce qui compte, c’est le collectif. Créer, vraie difficulté reste de trouver le bonheur et formation, la progression. Nous investissonsse former et exister ensemble est une valeur l’équilibre en gardant un mode de fonction- sur notre capital humain », explique-t-il.que je défends  », explique le metteur en nement adapté », raconte Bartabas devantscène, fondateur de la compagnie Zingaro une assemblée de 350 spectateurs. CULTURE ET PASSIONet de l’Académie équestre du domaine de Faire avec les contraintes économiques, Néanmoins, même s’ils exhortent àVersailles. L’artiste se positionne aussi et créer différemment, caractérise le par- prendre en compte les réalités du terrain,comme un manager tourné vers l’autre et cours de Jean-Marc Borello (Grand Prix Bartabas n’en oublie pas la passion. « Il nel’accomplissement de soi. «  Je ne recrute de l’esprit d’entreprendre). L’homme, faut jamais se poser la question de savoir sipas à la performance passée. Mon travail d’abord fonctionnaire puis dirigeant de cela rapporte. C’est en ne pensant pas « auconsiste à mettre en valeur les chevaux qui PME, a fondé SOS, une petite association pognon  » que l’on en gagne  », lance-t-il àarrivent à moi, à faire ressortir ce qu’il y a de devenue un grand groupe international, Amélie Thépot, fondatrice de LabSkinmeilleur en eux. Comme pour les Hommes conjonction de la recherche de l’intérêt Creations (Prix Créer). La dirigeante,qui intègrent l’Académie  : au final, un bon général et de la logique économique. qui a mis au point un système de fabri-maître doit devenir inutile parce qu’il a su « C’est ma façon d’être insoumis. Il ne s’agit cation de peau en 3D, a reçu les faveursconduire à l’autonomie  », indique-t-il. pas d’exploiter la misère, mais bien d’appor- du public, invité à voter d’abord sur leMais à l’épreuve de la création et du ter des solutions. Il faut faire avec la réalité site d’acteursdeleconomie.com puis encollectif, se frotte la réalité économique. sans jamais l’accepter », lance, un brin pro- direct après sa présentation. Elle concou-«  L’acte artistique ne doit pas être séparé vocateur, Jean-Marc Borello. rait face à Virginie Fraisse, fondatrice dede l’acte économique  », analyse-t-il. Sans Si Bartabas choisit un modèle de déve- Aura Signi, qui a développé une série depour autant sacrifier l’art sur l’autel de la loppement maîtrisé pour ne pas perdre soutiens-gorge sur-mesure en 3D pourN°136 Juillet-Août 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 97

11e Prix de l’esprit d’entreprendreles femmes atteintes du cancer du sein, les jeunes, même si elle n’est ni aboutie ni par- Enfin, il n’y a pas de projets d’envergureet Christophe Sibieude, co-fondateur faite. Je cherche à co-construire avec les jeunes sans erreurs d’aiguillage ou sans troude Short Edition, borne interactive qui une culture scientifique collective », indique de parcours. Et de sursauts. À l’imagedélivre, en mode aléatoire, une petite his- la marraine scientifique bénévole du Pla- de Christian Barqui (Prix Rebondir). Letoire imprimée sur papier. netarium de Vaulx-en-Velin. directeur général de l’entreprise Florette«  Je suis enthousiaste à l’idée que d’autres Comme elle, Prosper Teboul (Prix édu- et président du réseau APM, a connuessaient de trouver de nouvelles solutions qui quer) est à la quintessence de ce com- plusieurs succès, quelques échecs, maispermettent de mieux vivre dans ce monde bat. Le directeur général de l’Association sans regret. « Le mot de ma vie, c’est oser. Ildans une logique de richesse partagée équi- des paralysés de France milite pour que faut tenter pour faire un bilan sans regret »,tablement. Donner du sens à son travail, c’est les personnes en situation de handicap assure-t-il. Une capacité intrinsèque, maisdonner du sens à sa vie. De plus en plus de puissent exercer leur propre choix et deve- aussi un soutien de sa famille, et de sonjeunes le comprennent  », commente Jean- nir des citoyens à part entière. « La société a épouse en particulier. Elle témoigne : « IlMarc Borello. trop tendance à assimiler handicap avec assis- prenait de gros risques financiers, mais peu tance et manque d’expertise. Je ne veux pas à peu, j’ai eu confiance. Nous avons définiCULTURE ET TRANSMISSION mettre en contradiction le handicap et l’entre- ensemble les conditions de réussite. Il a laAccepter que rien n’est acquis, que tout prise », souligne-t-il sur quelques notes du capacité à savoir s’entourer et à motiver lesreste à prouver, mais surtout à transmettre, concerto pour violon de Beethoven. « Des personnes qu’il l’accompagne. »c’est aussi le sens de la quête d’Hélène figures brillantes de la musique, mais pas seu- Révolutionner, éduquer, rebondir, mobi-Courtois (Prix Révolutionner). L’astrophy- lement, avaient un handicap », rappelle-t-il liser, créer, se rebeller, inventer, faire lasicienne, spécialiste en cosmographie, réa- avant de céder sa place à Philippe, Vytas, révolution, transgresser, rendre le mondelise des cartes extragalactiques animées. Hervé, Christophe, Pierre-Yves et Lucie meilleur, écrire le futur… peu importe laAu-delà de la technique, qui révolutionne d’Emmaüs-Lyon (Prix Mobiliser). «  Avec culture tant qu’elle est empreinte de soli-l’approche des planètes, Hélène Courtois, ce collectif, on est solide ensemble », résume darité et d’humanité. Car ces entrepre-aux qualités entrepreneuriales, considère Lucie, compagnonne. L’association lyon- neurs, chacun dans son chemin de vie,que la « recherche n’a pas de sens si elle reste naise, à la mission sociale «  est l’occasion caressent le but ultime  : «  Être de bonsenfermée dans nos laboratoires. Elle se doit de rappeler qu’on peut entreprendre collecti- humains. Être tout simplement de bellesd’être partagée avec le grand public, et surtout vement, avec efficacité », commente le jury. personnes », conclut Bartabas. 67 8 9 11 1098 Acteurs de l’économie - La Tribune 6Bartabas et Jean-Marc Borello. 7Amélie Thépot. 8Virginie Fraisse. 9Christian Barqui. 10Prosper Teboul. 11Christophe Sibieude. N°136 Juillet-Août 2017

executive.em-lyon.com RUBRIQUE DE NOM 11e Prix de l’esprit d’entreprendretransformezvotre aveniravecemlyonbusiness schoolPROGRAMMES DE FORMATION CONTINUEPOUR MANAGERS & DIRIGEANTSAdvanced Management Programme – Diriger Une ActivitéExecutive MBA – Transformation Digitale des OrganisationsLYON . SHANGHAI . SAINT-ETIENNE . CASABLANCA . PARIS*LesNe°n13tr6eprJeunileleutr-sAsooûntt d2e0s17créateurs. Nous créons des entrepreneurs. **Entrepreneurs visionnaires. Centre pour le Développement du ManageAmcetnetuErnstrdeeprle’énceourniaolm- Cie.D-.ML.aE.TSroibcuiéntéep9ar9actionssimplifiée au capital de 4.352.710 euros - Siège social : 23 avenue Guy de Collongue - 69130 ECULLY - 505 388 017 RCS LYON. Copyright : Gettyimages - Mise en page : K-zen

11e Prix de l’esprit d’entreprendre GRAND PRIXJean-Marc Borello,le capitaineDe l’association SOS, petite structure dans laquelle ilembarquait une poignée de personnes afin de venir en aideaux toxicomanes, au paquebot de l’économie sociale et solidairequ’il commande aujourd’hui, la singularité de Jean-Marc Borelloest demeurée intacte. Sans vision ni stratégie, au gré des ventset des combats, l’entrepreneur s’engage pour l’intérêt généralen réussissant à concilier innovation sociale et e cacitééconomique. Et en dépit des tempêtes et des sollicitations,il n’a jamais abandonné. ROMAIN CHARBONNIER 000 salariés. Les décisions seront prises – comme la voix de l’économie sociale collégialement par les sept dirigeants du et solidaire en France. Le chantre d’unSon départ, Jean-Marc Borello groupe SOS. Une première singulière secteur en pleine évolution qui irradie le prépare minutieusement. À pour une entreprise de cette taille, por- à tous les étages de la société et dont la bientôt 60 ans, ce grand gail- tée par un patron obsédé par l’envie de croissance ne cesse de se confirmer. Si lard, dont l’accent ne trompe révolutionner et d’aller de l’avant, qui bien que les jeunes générations y voient pas sur ses origines sudistes, s’affranchit de la bien-pensance et du un intérêt décuplé et préfèrent s’enga- n’a pas l’intention de quitter l’associa- politiquement correct. ger au travers d’une entreprise de l’ESS tion SOS qu’il a fondée en 1984, deve- Son groupe innove et expérimente, fait plutôt qu’en politique. Un engagement nue un groupe au milliard d’euros de et défait, déconstruit pour mieux recons- auquel a toujours cru Jean-Marc Borello, chiffre d’affaires. Un navire de l’écono- truire. Une façon de concevoir la vie lui qui a refusé toutes les fonctions poli- mie sociale et solidaire qui intervient à «  sans stratégie ni vision  ». Une philoso- tiques depuis trente ans. Travailleur la fois dans des activités hospitalières, de phie qui vaut parfois quelques critiques acharné, avec plusieurs idées à la minute, prise en charge de personnes handica- à Jean-Marc Borello. Une caractéristique il s’engage ainsi en entreprenant. Une pées, d’insertion, etc. qu’il conduit d’une qui l’habite, lui qui est passé de la fonc- manière de se nourrir intellectuellement main solide et dont il projetait pourtant tion publique à la tête d’établissements des autres pour mieux répondre à l’inté- de s’éloigner à l’horizon 2017, lorsque de nuit parisiens, pour devenir l’entre- rêt général. Tant et si bien que politiques celui-ci atteindrait de tels résultats. Seu- preneur qu’il est aujourd’hui, fonda- et patrons du CAC 40 «  se bousculent  », lement, sa passion de créer, de bâtir et teur et président de SOS, et dont l’aura raconte-t-il en souriant, pour obtenir ses de fédérer aura eu fini de le faire changer rayonne jusqu’aux plus hautes sphères conseils sur sa façon de gérer un groupe d’avis. Touche à tout et autodidacte, Jean- de l’État. alliant innovation sociale et efficacité Marc Borello ne raccrochera finalement économique. Sans aucun actionnaire au pas tout de suite, mais il anticipe tout de CHANTRE DE L’ESS capital. Le prix de la liberté, pour ce pas- même l’avenir, organisant habilement sa Avec un franc-parler tranché, une sil- sionné de voile, qui lui donne les moyens succession. L’entrepreneur a fait le choix houette imposante et une certaine idée du de ses ambitions et lui permet de faire de s’entourer d’une garde rapprochée, mariage du social et de l’économie, Jean- avancer son paquebot comme il l’entend, «  seule en capacité de diriger l’entreprise Marc Borello s’affiche – involontairement au gré des vents et des combats. à mon départ  ». Le moment venu, il lui confiera les clés de la maison et de ses 16 N°136 Juillet-Août 2017 100 Acteurs de l’économie - La Tribune


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