de cet acte généreux et solidaire ; or est-ce que ce choix ne devrait pas être une des décisions les plus intimes du patient ? Par conséquent le 16 janvier 2016, la loi fut de nouveau abordée concernant les questionnements sur l’importance du refus et de sa mise en place pour lutter contre le manque considérable de greffes de tout ordre, et fut créé le Registre National Des Refus. Le patient doit indiquer à ce registre son envie de refus or si aucune action n’est faite de sa part, la famille doit attester l’opposition soit par oral ou écrit : « Dans le cas d'une expression orale, l'équipe médicale demandera aux proches d'en préciser les circonstances et de signer la retranscription qui en sera faite par écrit. »1 Cependant existe-il une véritable transparence de ces dernières et de l’état lui-même ? « De son vivant il voulait donner un rein à son meilleur ami et la loi l'interdit, et maintenant qu'il est mort vous venez me dire que la loi vous autorise à prendre ses organes pour les greffer à n'importe qui. […] Donner et prendre sont deux choses différentes »2 en 2011, la loi élargit le cercle des donneurs : « Le donneur peut également être toute personne apportant la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans avec le receveur ainsi que toute personne pouvant apporter la preuve d'un lien affectif étroit et stable depuis au moins deux ans avec le receveur. »3 Cette question sur l’intervention des familles divise les chercheurs, n’étant qu’une partie introductive concernant la xénogreffe nous ne développerons pas davantage cette question. Par conséquent quelles solutions avons-nous pour guérir ces patients ? Deux perspectives différentes existent à ce jour pour l’exemple du cœur celle de la xénogreffe (Américaine) ou l’intégration d’un outil mécanique : le Cœur Carmat (Française). La xénogreffe découle de l’intégration d’un organe différent de l’espèce biologique du receveur pour contrer les obstacles de l’allogreffe. En effet les 3 obstacles à supprimer sont certes la lutte contre le manque de donneur, également soulager le lourd traitement pour éviter un quelconque rejet du corps et enfin malheureusement une greffe n’est pas éternelle : « La durée de vie des transplantations d'organes est de 10 à 20 ans en moyenne, et les patients sont souvent transplantés plusieurs fois parce qu'ils perdent leur greffon, leur immunisation préalable par la ou les greffes précédente(s) 1 Resgistrenationaldesrefus.fr 2 Élisabeth, Lepresle. « Le consentement présumé du donneur, un paradoxe du langage » , Essaim, vol. nº 17, no. 2, 2006, pp.179-188. 3 Dondorganes.fr Page 51 sur 150
rendant la suivante plus difficile à réaliser. »1 Par conséquent essayer de nouvelles solutions est tout à fait légitime, le 07 janvier 2022 en Amérique, David Bennett âgé de 57 ans fut le premier patient à recevoir une greffe d’un cœur de porc génétiquement modifié. Cette personne a pu montrer l’incapacité des médecins à pouvoir soigner par le manque de moyens, ils doivent donc innover. Atteint d’une maladie cardiaque grave, l’état de santé du patient ne pouvait découler d’une greffe et ses problèmes d’arythmie empêchait toute intégration artificielle. « David Bennett accepte : « c'était soit mourir, soit faire cette greffe. Je veux vivre. Je sais que c'est une tentative hasardeuse, mais c'est mon dernier choix »,2 C’est une réussite, le corps n’exprime aucun rejet malheureusement l’homme décéda 2 mois après son opération. Est-ce que la xénogreffe ne serait pas le début d’une nouvelle perspective de guérison ou est-ce l’ouverture d’un fantasme et de dérive de mutation ? En effet nous connaissons trop peu les fusions entre organismes, elles découlent uniquement de notre imaginaire représenté par les différentes formes d’art tels que le cinéma et la littérature, nous aborderons la réception des spectateurs pour comprendre la relation entre leur point de vue et la manipulation génétique plus loin dans notre composition. Or, pourquoi le cochon semble-t-il être le candidat idéal pour ce type d’opération contrairement aux autres espèces comme les singes dont nous possédons un ancêtre commun ? Le cochon possède trois arguments majeurs, tout d’abord ses organes sont presque de la même taille, que ceux de l’homme. L’organe porcin est de forme conique pour un poids de 300g, celui de l’homme est de forme trapézoïdale et pèse 270g. Ensuite, le porc et l’être humain ne partagent pas de maladies, de plus ils sont souvent du groupe sanguin O. Enfin, l’homme possède un élevage important de porcs.3 Malheureusement ces similitudes ne sont guère suffisantes et il faut par conséquent avoir recours à la manipulation génétique. Pour le cas de David Bennet, le cœur porcin possédait 10 mutations génétiques. Tout d’abord 3 gènes qui risquaient d’entraîner un rejet de la greffe, un autre pour désactiver la croissance des tissus porcins et enfin 6 ajoutés pour faciliter l’acceptation de la greffe : « Ces résultats encourageants bien que préliminaires laissent penser que l'addition d'autres gènes étrangers au porc mais aussi l'inactivation de 1 Dumont, Martin, et al. « Greffes de main et de visage : quels sont les enjeux éthiques », Laennec, vol. 63, no. 1, 2015, pp. 41-52. 2 FuturaSanté : Première Greffe réussie d’un cœur de cochon sur un patient, 15/01/22. 3 Libération, sciences : Greffes : humains et porcs, compatibles comme cochons, 11/01/22. Page 52 sur 150
certains de ses gènes responsables de la synthèse d'antigènes majeurs qui activent les mécanismes de rejet amèneront à l'obtention d'animaux réellement exploitables comme source d'organes et de cellules. »1 L’Etat américain voit par conséquent la xénogreffe comme un atout de guérison et met en place les conditions et recherches pour permettre un développement plus facile à cette pratique. La Food and Drug Administration (FDA), régulateur de santé américain approuve en 2020 la commercialisation des cochons modifiés à la fois pour la consommation alimentaire et pour les usages médicaux (viande, produits pharmaceutiques et pour la production d’organes de remplacement), ces cochons sont nommés les GalSafe. Ils sont génétiquement modifiés pour empêcher des allergies dues à la molécule de sucre appelée galactose-alpha-1,3-galactose (alphagal) : « Il ne faut toutefois pas s'attendre à voir ces cochons déferler dans les rayons des supermarchés et les laboratoires. Pour l'instant, seuls 25 cochons GalSafe sont élevés dans une ferme de l'Iowa ; et il ne pourra sans doute pas être produit en masse comme un porc classique. De plus, l'alphagal n'est pas la seule cause de rejet dans les xénogreffes. D’autres modifications génétiques chez les cochons seront sans doute nécessaires afin de développer des organes pleinement compatibles pour une transplantation chez l'humain. »2 Trop peu de recherches et d’expériences à ce jour montrent un véritable positionnement sur les xénogreffes, certes le patient Bennett fût et restera celui qui marquera les esprits étant la première greffe officielle réalisée dans le cadre de la guérison et non de la recherche. En effet en 1984, le dernier cas avant ce patient fut un bébé (baby Fae) de quelques jours, né avec un problème cardiaque, la greffe se réalisa par un cœur de babouin malheureusement après 3 semaines le corps rejeta le greffon3 : « L'exploit relevait davantage de la recherche que de l'espoir de la vie […] Ne pas avoir eu de rejet dans les heures qui ont suivi la greffe est incroyable. On a réussi à tromper l'organisme pour faire en sorte qu'il ne détermine pas le cœur comme à détruire. […] Deux jours c’est déjà une prouesse, s'il ne fait pas de rejet, il pourra vivre comme tout patient transplanté. Et donner de l'espoir à nombre de personnes attendant une greffe. »4 Cependant comme toute 1 Louis-Marie Houdebine, « La transgénèse et ses applications médicales », pathologie Biologie volume 50, numéro 6 juillet 2002, pp.380-387. 2 Futura santé : Voici le premier cochon génétiquement modifié approuvé pour les usages médicaux, 18/12/2020. 3 Catherine Remy, « Le cochon est-il l’avenir de l’homme les xénogreffes et l’hybridation du corps humain », openedition pp.112-125. 4 Benoit Averland chirurgien de David Bennett – Interview Le Parisien 11 janvier 2022. Page 53 sur 150
situation et analyse les avis divergent de manière conventionnelle et manichéenne, de plus les questions éthiques restent les arguments principaux contre les xénogreffes et questionnent l’importance du bien-être animal et de son exploitation par l’homme. Certes le cas de Bennett suscite beaucoup de questions depuis son décès (8 mars 2022), néanmoins n’oublions pas que sa famille a pu profiter, bénéficier de sa présence en effet dans un temps court mais il sera à jamais un précurseur de la médecine génomique, il ne reste plus qu’à l’homme moderne de corriger les défauts. « Jusqu'à la fin, mon père voulait continuer à se battre pour préserver sa vie et passer plus de temps avec sa famille […], nous avons pu passer de précieuses semaines ensemble lorsqu'il se remettait de son opération, des semaines que nous n'aurions pas eues sans cet effort miraculeux, nous espérons que cette histoire puisse être un début d'espoir, et non la fin » déclaration du fils de David Bennett1 La France opte pour une approche différente de la manipulation génétique, l’Etat reste convaincu de l’application des allogreffes sans manipulation du génome, il faut seulement trouver d’une autre manière l’acceptation de l’organe remplaçant sans rejet par l’organisme. Or quelle solution reste-t-il, sachant que l’utilisation du porc a déjà montré son efficacité concernant les valves aortiques faites de tissu de la valve porcine ? L’approche technologique d’un cœur artificiel est soulevée : étant un organe inerte, il ne peut être rejeté par l’organisme, ce cœur est développé par la société CARMAT dont il porte le nom en 2008. L’origine de cette pratique remonte en 1937, où fut créé le premier cœur artificiel implanté dans des animaux. Au fil des décennies, l’implantation de ce cœur mécanique sur ces espèces offre un espoir et une perspective d’avenir car les cœurs fonctionnent de plus en plus dans le temps, mais qu’en est-il sur les hommes ? Le dessein est moins favorable que nous l’espérons à ce jour, car tous les patients possédant ce cœur sont décédés peu de temps après, entrainant un retrait de la commercialisation pour étudier les anomalies causées par ce dernier.2 Pourtant les causes de ce retrait ne sont pas 1 France24, Le premier homme greffé avec un cœur de porc décède deux mois après son opération, 09/03/2022. 2 carmatsa.com : CARMAT annonce le redémarrage de la production et confirme l'objectif de reprise des implantations de son cœur artificiel Aeson® en octobre 2022 : Communiqué de Presse, 28/03/2022. Page 54 sur 150
uniquement d’ordre médical, certes à ce jour le cœur possède encore beaucoup de défauts à corriger mais une forte pression causée par l’impact médiatique est également un facteur tout aussi important : « La France entière a envie de voir à quoi ressemble un homme qui a pris le risque d'abandonner son cœur et de vivre avec une machine à la place, confesse l'un d’eux [journaliste]. Cette histoire réveille en chacun de nous tant de fantasmes. Si on arrive à le shooter, c'est un gros coup !»1 Cependant pourquoi tant d’intérêt pour ce cœur technologique ? Le pionnier de ce cœur artificiel _Alain Carpentier_ a réussi habilement à se servir des médias tantôt par la presse scientifique pour la fascination du projet tantôt par la presse nationale : « le cœur est l'organe noble par excellence, qui touche à la vie, à l'amour, à la mort. Parce qu'il y a, dans cette idée de machine en acier capable de reproduire les battements naturels, de la science-fiction, du romanesque, de la folie, celle de deux ambitieux forcenés désireux de porter haut les couleurs de la France. »2 Or un outil si complexe permettant de reproduire les battements de différents efforts ainsi que « simuler » le comportement amoureux ne peut se produire en un jour. Vaincre les obstacles à la fois techniques, financiers, administratifs pour enfin découler sur les autorisations pouvant réaliser des essais sur les animaux puis sur les hommes doivent être au centre de la recherche afin d’optimiser au mieux la commercialisation du cœur : « C'est pour bientôt », rassurait le professeur, qui avait annoncé la commercialisation du cœur en 2011, puis en 2012, en 2013... La recherche scientifique n'est pas du marketing. »3 Certes les médias possédaient une certaine curiosité concernant le développement de cet organe, or pour l’heure, rien de vraiment transcendant ne méritait un quelconque article sur le sujet. Pourtant le 18 décembre 2013 dans le plus grand des secrets un homme de 76 ans souffrant d’insuffisance cardiaque et remplissant tous les critères d’acceptation tel que le poids du cœur (900 g) accepta le traitement. Tous signèrent des accords de confidentialité et en cas d’échec l’opération devait rester confidentielle et rien ne devait être divulgué avant la fin de l’essai : « C'est une fuite qui nous a obligés à monter à la va-vite une conférence de presse, se désole Philippe Pouletty. Un journaliste, qui avait eu vent de l'intervention, m'a appelé sur mon portable. Nous étions coincés. »4 L’explosion médiatique ne tarda pas, 1 Sophie, des Déserts, « Le cœur artificiel », Les Tribunes de la santé, vol. 47, no. 2, 2015, pp.91-97. 2 Ibid. 3 Ibid. 4 Ibid. Page 55 sur 150
tous ont voulu s’approprier l’exploit, malheureusement, ce ne fut que de courte durée car le patient décéda 74 jours plus tard le 2 mars 2014. Naturellement on demanda à Alain Carpentier d’expliquer les causes de cet échec or voulant faire preuve de transparence il entraîna tout doucement une perte de la crédibilité et fragilisa la société dont il est lui-même actionnaire à 16% : « Le cœur s'est arrêté brutalement, il y a eu un court-circuit. » Le mot fut lâché sans que les dirigeants de Carmat aient été prévenus. « Nous avons découvert les déclarations d'Alain Carpentier dans la presse, reconnaît Philippe Pouletty [directeur de la commercialisation et de la communication]. Et nous avons eu quelques explications... Au lendemain de son interview dans le JDD, Carpentier découvrait la réplique cinglante de Philippe Pouletty sur Europe 1: « Parler de court-circuit ne veut strictement rien dire en la matière : ce n'est pas un train électrique, pas un fer à repasser... Aujourd'hui nous ne savons pas quelle est la cause. Les relations sont parfois houleuses entre le père du cœur artificiel et les hommes chargés de le commercialiser. »1 Un véritable bras de fer entre les deux individus et la multiplicité des voix souvent discordantes freine et inquiète la population française concernant le peu de transparence du développement de cet outil. Par conséquent le ton des médias fut également différent, en septembre 2014, le magazine Envoyé Spécial de France 2 diffuse le reportage suivant : Le business de l’homme réparé accusant la société CARMAT de surestimer leur prothèse, la réponse de la société fut immédiate par un long communiqué de presse afin d’éviter des pertes importantes pour l’entreprise étant déjà faible depuis le début de cette affaire. Dans ce communiqué la société exprime qu’un autre patient eu recours au cœur et qu’il n’était guère dans le reportage accusant à son tour le manque de transparence de France 2 : « Je revis, disait-il, en racontant qu'il pouvait désormais faire du vélo d'appartement, monter des escaliers, rendre visite à ses petits-enfants. »2 Or nous l’avons évoqué plus haut, à ce jour aucune personne en possession du cœur CARMAT n’a survécu, les causes étant multiples. Nous pouvons conclure que le cœur n’était et n’est pas encore prêt à ce jour pour produire les soins espérés mais est-ce que la société peut faire confiance à un outil dont les créateurs ont tant de mal à jouer sur la même partition ? Cette affaire montre le manque de confiance des institutions tels que les laboratoires 1 Ibid. 2 Ibid. Page 56 sur 150
pharmaceutiques dont nous avons déjà fait le parallèle avec le vaccin H1-N1 plus haut dans notre composition. Par conséquent quelle solution nous reste-t-il si l’aspect médiatique entraine un refus général de la population, sommes-nous en train de fermer les portes de nouvelles perspectives de guérison ? En d’autres termes à qui pouvons-nous faire confiance dans un monde avec si peu de transparence sur les objectifs ? Les seuls composants de l’organisme de l’homme offrant cette transparence sont les gènes et les cellules qui le composent car ils sont uniques à chaque homme. Nouvelles directions, la création génétique : le dieu mortel Pour comprendre le fondement et le fonctionnement de la médecine génomique, il est important d’expliquer ce qu’est un organisme sur le plan scientifique. Toutes les espèces ont leur propre « identité » génétique ce qui explique pourquoi nous sommes tous différents, or la manipulation du génome ne peut être réalisée uniquement car, notre code génétique est universel : il s’agit de l’ADN.1 Les gènes sont des composants de cette dernière chaque gène correspond à une information génétique propre à l’individu. Les chromosomes étant par paires, les gènes bénéficient de cette multiplicité. On les nomme les allèles, toutes différentes car l’une est d’origine paternelle l’autre maternelle. Les gènes permettent le fonctionnement de l’organisme car ils indiquent le rôle que doit avoir chaque cellule quand l’échange est réalisé, elles produisent des protéines, c’est la traduction du code génétique. Elles permettent de réguler le corps de l’entretenir par la création des anticorps ou encore déterminer l’apparence esthétique, la couleur des yeux ou des cheveux. Les maladies génétiques sont le résultat d’une mutation ou anomalie chromosomique qui perturbe la fabrication des protéines, le gène atteint envoie de mauvaises informations aux cellules. Par conséquent il peut y avoir une absence, un excès ou une anormalité de fabrication. Il est important de souligner qu’une anomalie génétique n’entraîne pas forcément sur une maladie génétique néanmoins l’environnement influence fortement ce type de pathologie, on parle d’épigénome : « Les maladies mentales constituent un bon exemple, dans lequel des facteurs environnementaux, sociaux et familiaux s'expriment à 1 Génétique-medicale.fr Page 57 sur 150
travers les générations et interagissent avec une transmission génétique ».1 L’exemple le plus notable sont les répercussions de la famine causée lors de la seconde guerre mondiale (1939-1945) aux Pays- Bas. En effet les Allemands nazis en mai 1940 ont réquisitionné un ensemble de ressources premières laissant peu au peuple hollandais, cette période fut si noire qu’on l’a nommée l’Hiver de la faim : « Lorsque les Alliés entrèrent enfin aux Pays-Bas en mai 1945, entre 100 000 et 150 000 Hollandais souffraient d’œdèmes provoqués par la malnutrition. » 2 Certains chercheurs ont pu prouver que certaines femmes enceintes de cette période avaient des enfants qui, une fois à l’âge adulte, possédaient un taux de mortalité plus fort que les autres membres de la société en observant leurs codes génétiques.3 Un champ d’expertise que l’on nomme l’épigénétique a permis cette analyse : « l'étude des changements héréditaires dans la fonction des gènes, ayant lieu sans altération de la séquence de l'ADN »4 découlant de l’épigénome qui est l’ensemble des modifications épigénétiques d’une cellule. À la suite de cette mauvaise nutrition ces adultes ont donné naissance eux aussi à des enfants plus petits que la moyenne. Par cette étude et notre connaissance actuelle du génome humain, beaucoup cherchent à comprendre le développement de certaines maladies neurodégénératives tels qu’Alzheimer et Parkinson, étant admis que les anomalies épigénétiques contribuent au développement et à la progression des maladies humaines. Il serait donc possible de trouver la source de certains maux de l’homme dont le cancer qui est l’une des principales causes de décès en France5 et ainsi l’anticiper plus rapidement pour un meilleur accompagnement et traitement. Malheureusement, lorsque le cancer a déjà atteint un certain seuil, les solutions les plus radicales sont choisies n’existant à ce jour aucun soin permettant une guérison sans séquelles. Nous pouvons citer en exemple, l’intervention chirurgicale pour le cancer de la prostate qui résulte au retrait de cette dernière. Pour d’autres pathologies la chimiothérapie par l’utilisation des médicaments peut ralentir la croissance des cellules cancéreuses. Dernière possibilité la radiothérapie ayant recours à de puissants rayons pour détruire les cellules cancéreuses. Il est tout à fait possible que selon 1 Daniel Souery, et Julien Mendlewicz. « Interactions des gènes et de l'environnement dans les troubles du comportement », Cahiers de psychologie clinique, vol. 16, no. 1, 2001, pp.25-32. 2 Lowe, Keith. « Famine », , L'Europe barbare. sous la direction de Lowe Keith. Perrin, 2015, pp.65-76. 3 P.Ekamper : alli Independent and additive association of prenatal famine exposure and intermediary life conditions with adult mortality between age 18–63 years, 01/11/2013. 4 Leem.org 5 Fondation ARC : Fondation pour la recherche sur le cancer ,157 400 décès 2018 en France, 26/04/22. Page 58 sur 150
le cancer du patient, ce dernier reçoit une combinaison de traitements que nous venons d’évoquer or les effets secondaires sont fréquents. Est-ce que la médecine génomique peut aider les patients à guérir de ses dérèglements du corps ? En 2012, un chercheur japonais du nom de Shinya Yamanaka trouva une potentielle nouvelle voie : reconfigurer les cellules adultes en cellules souches1. Pour bien saisir la manipulation génétique du chercheur, il est important d’expliquer les cellules souches et ses mutations dans un organisme, pour éviter un éloignement du sujet trop important nous parlerons uniquement de deux types de cellules souches : totipotentes et pluripotentes. Les cellules souches contrairement aux autres cellules sont capables de s’auto-renouveler à l’infini en cellules plus spécialisées. Les cellules souches totipotentes permettent la création d’un organisme entier ainsi que les composants annexes comme le placenta et le cordon ombilical. Contrairement aux cellules pluripotentes qui sont les cellules filles des cellules totipotentes après plusieurs divisions, formant les composants du corps comme les tissus de la peau. Notre corps est donc une immensité de diverses cellules pour permettre un fonctionnement optimal, du moins lorsqu’il n’y a pas d’anomalie. Si l’anomalie est présente au lieu de la traiter par une destruction Shinya Yamanaka propose une mutation ou comme dit plus haut une reconfiguration des cellules. Théoriquement ce chercheur souhaite approfondir ce que l’on nomme la thérapie cellulaire qui consiste à l’injection telle une greffe des cellules dans un organisme pour restaurer la fonction d’un tissu organe : « Yamanaka et son équipe ont établi chez la souris que l’insertion de 4 gènes seulement dans des cellules du derme suffisait à les reprogrammer pour les rendre pluripotentes. Ces cellules ont été appelées iPS (induced Pluripotent Stem cell »2 Une quantité importante de cellules permettrait la reconstruction d’un organe complet propre à chaque patient et ainsi nous n’aurions plus besoin de greffes d’individus extérieurs, à l’avenir la seule greffe qu’il restera sera l’autogreffe pour cette efficacité. Grande innovation de la médecine régénératrice mais encore loin d’être parfaite à cause de plusieurs facteurs, d’ordre organiques puis éthiques. Yamanaka et son équipe ont bien trouvé par la manipulation de l’épigénome une reprogrammation des cellules souches qui portera le nom de cellules pluripotentes induites3, 1 Khochbin Saadi, Epigénétique : le génome et son environnement, 23/06/22. 2 Thomas leccler, « REPROGRAMMATION CELLULAIRE : PERSPECTIVES SCIENTIFIQUES ET IMPLICATIONS ÉTHIQUES » _ cairn 2013, Tome 61 | pp.40 – 50. 3 Ibid. Page 59 sur 150
pourtant l’identité cellulaire de chaque organisme assure une conformité stable et résiste aux nombreux changements car chaque cellule possède un rôle et ces changements nuiraient au bon fonctionnement de l'organisme. « En faisant agir des facteurs régulateurs directs de l'expression des gènes qui sont normalement actifs dans les cellules souches, mais pas dans les cellules différenciées. Les recherches menées par Yamanaka et d'autres chercheurs montrent que cette reprogrammation ne marche que sur une fraction négligeable de cellules. La grande majorité des cellules échappe à l'action de ces facteurs. »1 Malgré la réalisation d’une certaine prouesse la stabilité de l’information génétique rejette toute modification car si certains dysfonctionnements se créent, ils peuvent provoquer des pathologies graves comme les cancers. Si dans un futur proche, nous arrivons à plier à notre volonté cette reprogrammation cellulaire deviendrons-nous par conséquent tous des OGM (organisme génétiquement modifié) spécifiques ? Cette recherche aboutissant économiquement à une découverte majeure, serions-nous en train de devenir le fruit de notre propre commercialisation ? Cette question est actuellement posée dans le cadre de l’agro-alimentaire : « La présence d'OGM non autorisés dans les semences, graines destinées à la culture et premier maillon de la chaîne alimentaire, peut avoir des conséquences irréversibles pour l'environnement et représenter un risque pour la santé si leur innocuité n'a pas été évaluée », affirme la DGCCRF ».2 Par conséquent la manipulation génétique en France se veut et se doit d’être faite avec une certaine prudence. Il faut former les chercheurs dans ce domaine pour voir, apprendre et expérimenter les conséquences pour prétendre que la manipulation génétique soit sans risque. La science a toujours eu l’objectif de prôner le progrès afin de rendre l’existence de l’homme plus vivable sur le long terme pourtant une certaine éthique se doit d’être appliquée. La manipulation des cellules et de la vie qui en découle est un privilège exclusif à Dieu que les pratiquants sacralisent afin de ne pas rompre des cycles de croyance et de civilisations. Cependant, si tous les récits de la Genèse placent l’origine de la Vie sur Terre, La science montre que la Vie vient de l’Espace et qu’elle est venue sur Terre à la suite d’une pluie de météorites chargées d’acides aminés, à l’origine de l’ADN et du vivant3. La Vie et le 1 Ibid. 2 Le Parisien : En France, une centaine d’OGM autorisés à la commercialisation, notamment dans l’alimentaire 05/01/2021. 3 “Nous sommes les produits de la forge des étoiles” - Hubert Reeves. Page 60 sur 150
Vivant sont différents : Le Vivant est ce matériau autonome et animé, contrairement aux minéraux inertes. La Vie est l’interprétation que nous faisons du Vivant, dans l’idée qu’elle est fragile et précieuse, alors qu’elle semble infinie, malgré la mortalité de la plupart des espèces. Nous devons ainsi dépasser l’interprétation de la vie pour mieux comprendre, par la science, le vivant. La Vie est une conception particulière et humaine du Vivant, le Vivant ne se réduit pas à la Vie. Cette idée de protection de la Nature et de la Vie est reliée à la pensée humaine occidentale d’une toute puissance sur l'environnement. Une des conséquences de cette sacralisation de la Vie de l’humain, accompagnée de l’angoisse de sa finitude et le questionnement de ses origines, est la création des mythes que la science chercha ensuite à déconstruire. Une constante de l’humanité est la peur (vulnérabilité, transgression des interdits naturels, mort…). Cette peur a bloqué pendant longtemps en Occident le travail de la Science. La médecine arabe du 13ème siècle, plus scientifique, s’oppose à l’interdit Chrétien de toucher ou de disséquer les corps de l’Occident médiéval (Transgression à la Renaissance et l’Humanisme). Aujourd’hui, les interdits se sont géographiquement inversés. Les interdits sont uniquement humains et pas naturels. L’interdit religieux a ainsi primé en France (On ne peut pas utiliser un embryon pour la science, car source de vie humaine sacralisée, pour certains). La France a ainsi créé des commissions éthiques : des personnes juristes et politiques décident des interdictions. Même débat sur les PMA… Les témoins de Jéhovah interdisent les transfusions sanguines ! Le Judéo-Christianisme occidental sacralisant le vivant (Vatican et l’encyclique papale Humanae Vitae de Jean-Paul II) lié au système juridique le plus contraignant au monde (Lois Bioéthiques) ont fait de la France un pays qui craint d’innover. La France confond volontairement éthique et morale, on devrait parler de lois bio-morales. Les seules limites que l’homme possèdent sont uniquement celles qu’ils s’imposent comme dans tout domaine les conséquences ne sont pas manichéennes, c’est uniquement en réalisant des tests que nous pourrions ouvrir le champ des possibles. Le CRISPER-CAS9 fut récemment utilisé dans le cadre du traitement des maladies d’ordre héréditaire en 2017 : « ces patients Page 61 sur 150
devront être surveillés tout au long de leur vie pour qu'on s'assure qu'il n'y ait pas d'effets négatifs ».1 Tel fut le cas des patients greffés pour le cœur Carmat. PARTIE 2 : LA MANIPULATION GENETIQUE, NOUVELLE ETUDE DE L’HOMME OU ESPOIR DE GUERISON ? 1 Courrier international – guérison : trois personnes soignées grâce à l’outil d’édition du génome Crispr, 15/06/20. Page 62 sur 150
Préambule Cette deuxième partie de ce document comportera l’ensemble des recherches effectuées, les méthodes seront expliquées et les résultats analysés. En parallèle, des recherches complémentaires d’arguments d’autorité seront également utilisées pour un apport scientifique plus important. La médecine est actuellement, nous l’avons vu, en pleine mutation, pourtant, pouvons prétendre que la médecine prédictive et personnalisée est la médecine de demain ou sommes-nous uniquement dans les prémices de son développement ? Nous tacherons d’y répondre dans cette partie. Pour un confort de lecture nous rappellerons ici le sujet, la problématique ainsi que l’hypothèse. Sujet : Médecine et transhumanisme. Un accompagnement révolutionnaire ou un abandon des spécificités humaines ? Problématique : En quoi le transhumanisme permet-il une révolution de la médecine dans le secteur de régénération des organes et de la cartographie du génome ? Hypothèse : La médecine régénératrice est l’un des piliers du transhumanisme. A ce titre, elle constitue un dépassement des limites connues de l’être humain, notamment dans Page 63 sur 150
le domaine de la régénération des organes et de la connaissance du génome de chaque individu. Pour répondre à notre problématique et également à notre hypothèse, notre étude empirique fut réalisée par deux méthodes : l’enquête quantitative et qualitative, c’est à dire un questionnaire et des entretiens. Le questionnaire devait permettre de connaître l’opinion de la population. Par ses 55 questions nous avons pu comprendre le rapport au soin qu’elle entretenait et nous avons pu également savoir si oui ou non elle détient une connaissance de ces mutations. Nous avons pu récupérer par la publication sur les réseaux sociaux Facebook et LinkedIn, 180 réponses dont 79,4% sont des femmes, les individus se plaçant équitablement dans différents groupes d’âge : de 18-25 ans (27,8%), 46-55 ans (22,8%), 26-35 ans (21,1%) et enfin 36-45 ans (13,9%). Vous pouvez consulter l’ensemble du questionnaire ainsi que les réponses obtenues lors des entretiens directement dans les annexes de cet ouvrage. Traitant de la thématique de la cartographie du génome, les maladies génétiques sont au cœur de l’étude empirique afin de voir potentiellement un espoir de guérison car ces pathologies n’ont aucun remède à ce jour. Étant des maladies extrêmement rares, les parents sont souvent seuls face à l’immensité de la pathologie et ne retrouvent qu’un certain accompagnement envers des semblables rendu possible par certaines associations qui expliquent aux individus ces pathologies et accompagnent les parents. Elles nous semblaient être le meilleur point de convergence entre les envies des patients et les réalités possibles proposées par les chercheurs. Dans cette optique, nous avons interrogé 5 associations et un chercheur en biologie moléculaire afin de corréler ces deux perspectives. Nous devions traiter si le transhumanisme a permis une révolution de la médecine dans le secteur de régénération des organes et de la cartographie du génome. Malheureusement, nous avons dû orienter notre analyse uniquement sur le génome car ne possédant pas de retours de spécialistes sur la question de la régénération des organes, pour Page 64 sur 150
palier à ce manque, des recherches complémentaires furent effectuées. Deux perspectives seraient possibles : l’encodage génétique et l’utilisation des cellules souches du cordon ombilical. Elles sont en cours de développement et peut-être pourrions-nous prétendre à l’avenir être dans une révolution médicale. Après une analyse de ces deux perspectives d’avenir nous traiterons si l’utilisation du transhumanisme dans le secteur de la cartographie du génome est véritablement un dépassement des limites de l’être humain. Le traitement par l’analyse : l’encodage génétique Le cancer, nous l’avons vu, reste la pathologie dont nous n’avons pas encore de traitement efficace sans conséquences pouvant endommager le corps. Étant la maladie la plus répandue 71% des personnes interrogées souhaitent voir la guérison du cancer comme le nouveau progrès thérapeutique. Nous l’avons indiqué, la reconfiguration des cellules totipotentes proposé par Shinya Yamanaka en 2012 ne peut vraiment aboutir car l’identité génétique repose sur la conformité de chaque cellule. Selon le chercheur biologiste moléculaire Gilles-Éric Séralini (annexe 6) cela semble impossible car le génome est un tout, il n’est pas fixe et cela risque d’entraîner des maladies dont nous ignorerons l’existence. Par conséquent quelles actions pouvons-nous prétendre de faire pour guérir ce dysfonctionnement de l’organisme sans avoir recours aux soins palliatifs ? Or pour prétendre pouvoir trouver des solutions permettant de découler sur des traitements, il faut comprendre la pathologie dans son ensemble. Partant de ce postulat la médecine prédictive et personnalisée serait le meilleur choix, or nous ne pouvons prétendre à une guérison car nous aurons toujours deux profils distincts : celui dont on prétend qu’il est malade et celui dont on sait qu’il est malade1. Ne possédant pas encore les moyens et les connaissances pour permettre un traitement 100% personnalisé, il faut des éléments de comparaison pour que les médecins puissent adapter au mieux les soins et comprendre les pathologies sans sortir du cadre de la législation, le secret médical étant un droit fondamental du code Français. L’objectif serait de comprendre le cheminement de la pathologie par les gènes de prédisposition pour atteindre les gènes responsables, il s’agit des gènes dits ciblés2. 1 Universscience : Vidéo Conférence : Votre destin est-il inscrit dans vos gènes ? – 2015. 2 Ibid. Page 65 sur 150
L’inconvénient de cette pratique est l’inégalité génétique dont nous sommes tous victimes et le fait que chaque patient soit différent. En quoi cette recherche de l’encodage va-t-elle permettre au cancérologue d’avoir les outils pour permettre un traitement ? Tout d’abord, il permettra de comprendre davantage le fonctionnement de l’organisme, ensuite le but de cette manœuvre serait d’obtenir « une carte génétique » (identité) de la tumeur et nous espérons à l’avenir la création de meilleurs médicaments résultant de cette analyse : « La question de savoir s'il faut traiter le cancer en fonction de la carte génétique du cancer et non plus en fonction de la localisation est posée. Il n'a pas encore été démontré que réaliser la carte génétique de la tumeur des patients permettrait d'améliorer leur devenir » 1. Par conséquent nous ne pouvons pas encore prétendre qu’il s’agit de la solution pour palier à cette pathologie néanmoins cette découverte renforce les solutions que nous maîtrisons comme la chimiothérapie. C’est uniquement la combinaison de chaque pratique qui permettra de réduire le taux de décès en France. Les ressources du cordon ombilical L’avancement de la médecine est malheureusement toujours plus lent que la prolifération des maladies des patients, par conséquent les médecins et chercheurs doivent trouver des moyens de guérison encore inexplorés. Notre échange avec Jean-Michel Dubois président de l’association Neurofibromatoses et Recklinghausen (Annexe 2) a démontré que son cercle de chercheurs éprouve un intérêt pour la reconfiguration des cellules proposée par Shinya Yamanaka, car les fibromatoses sont des tumeurs mais il ne préfère faire aucune prétention à ce jour, étant toujours en phase de test. Par conséquent que nous reste-t-il, si la reconfiguration n’aboutit jamais ? Si nous ne pouvons pas créer les cellules il faut prendre celles que l’organisme nous propose, avons-nous à notre disposition des cellules souches dites « saines » ? Nous l’avons expliqué plus haut dans notre argumentaire en surface : comment se constitue un organisme, c’est un être dont la composition est un ensemble de cellules divisées réalisée par une cellule dite « mère ». 1 Ibid. Page 66 sur 150
Pourtant toutes nos cellules ne se divisent pas pour produire les composants d’un homme comme les organes et la peau, deux éléments restent primordiaux pour un développement propice du futur enfant : il s’agit du placenta et du cordon ombilical. « Les cellules issues du sang placentaire et ombilical sont intéressantes pour des raisons qui tiennent autant à leur efficacité thérapeutique qu'à leur facilité et à leur innocuité de recueil. Ces prélèvements de sang placentaire, par rapport aux prélèvements de moelle osseuse, permettent de contourner les enjeux psychiques inhérents au don de moelle intra-familial, notamment d'éviter la dette psychologique entre donneur et receveur ou encore la culpabilité du donneur en cas d'échec de la greffe »1. Ayant compris que nous pouvions réutiliser ces composants, il va de soit de s’en procurer, tout comme la donation d’un organe à la suite d’un décès, le consentement de ces femmes reste d’une importance cruciale, majoritairement, elles sont favorables à ce don : « Pour que le sang soit conservé, l'accouchement doit s'être déroulé dans de parfaites conditions, de même que tous les examens requis doivent être validés pour que le sang puisse être ensuite délivré à des fins de greffes. Les femmes qui refusent d'emblée de participer à la procédure sont très peu nombreuses. Sur 1 556 femmes sollicitées (période de six mois), 52 seulement refusent le prélèvement pour des raisons essentiellement matérielles »2. Afin d’obtenir cet outil, il est important d’avoir un véritable accompagnement lors de l’accouchement, les patientes doivent être en parfaite santé, néanmoins cette coexistence entre la patiente et le personnel de santé se doit d’être réalisée sur l’ensemble de la grossesse et sur les potentiels enfants à venir. En effet même si les femmes acceptent de donner le sang placentaire, à ce jour malheureusement nous en avons trop peu. Notre questionnaire relève que 71,7% des femmes savent qu’il existe une pénurie de dons d’organes ; sur ces 71,7%, 73,7% sont favorable à donner leurs organes au décès montrant une véritable solidarité entre membres de la société mais si les organes sont inutilisables, ce don ne sera qu’une représentation de satisfaction morale de l’individu. Pour résumé, nous pouvons soigner des pathologies par les cellules contenues dans le sang placentaire, la majorité des femmes acceptent de réaliser ce don, et enfin cela permet d’apporter potentiellement l’élément manquant qui 1 Claire Boileau, « Controverses institutionnelles et sociales autour du sang placentaire recueilli à des fins thérapeutiques », Journal des anthropologues, 88-89 2002, pp.123-138. 2 Ibid. Page 67 sur 150
permettra la configuration et non la reconfiguration d’un organe pour chaque individu. « L'utilisation des cellules souches du sang de cordon représentant de nombreux avantages, les chercheurs s'y intéressent de plus en plus. En 1963, une première tentative a eu lieu pour soigner une patiente atteinte d'un cancer par transfusion de sang de cordons. Toutefois, ce n'est qu'en 1988 qu'une telle intervention a été réalisée avec succès par l'équipe du professeur Éliane Gluckman à l'hôpital Saint-Louis à Paris pour soigner un enfant atteint de la maladie de Fanconi à l'aide de sang issu de cordon ombilical de sa petite sœur. Depuis, plus de 20 000 interventions de même nature ont été réalisées dans le monde. »1 Par conséquent pourquoi ce moyen n’est-il pas plus mis en avant, comment l’Etat Français ainsi que les médias peuvent-ils être si indifférents sur ce potentiel progrès ? Nous l’avons vu, l’un des plus lourds fardeaux que la France s’impose c’est sa crainte d’innover, mais un autre facteur amplifie ce phénomène que le personnel de santé redoute : la crainte de l’erreur pouvant découler sur des scandales médiatiques et ainsi rompre le lien de confiance entre les représentants de la médecine et les patients. L’affaire du sang contaminé est un scandale d’ordre à la fois sanitaire, financier et politique ayant touché plusieurs pays plus particulièrement la France dans les années 1980 et 1990 à la suite d’infections par transfusion sanguine. L’épidémie du Sida est identifiée au début des années 1980 mais ce n’est que bien plus tard que les scientifiques identifient les modes de transmission notamment par le sang, néanmoins la France n’est pas alertée et ne prend pas de mesure, ce ne sera qu’en août 1985 qu’elle rendra le dépistage obligatoire. Par conséquent le sang contaminé circule, les premières victimes sont de nombreux hémophiles et patients ayant recours à une transfusion sanguine étant contaminés par le VIH2 ou l’hépatite C. Par conséquent, les familles souhaitent une justice exemplaire, 3 ministres devaient être renvoyés de leur fonction : Georgina Dufoix, Laurent Fabius et Edmond Hervé. Cependant, en 4 ans les juges ont beaucoup modifié le motif : non-assistance à personne en danger, tentative d’empoisonnement, ou homicide 1 Madanamoothoo, Allane. « Chapitre 14. L'intérêt et la conservation des cellules souches du sang de cordon : approche comparative des droits anglais et français », Journal international de bioéthique et d'éthique des sciences, vol. 26, no. 3, 2015, pp.199-214. 2 Précision lexicale VIH/SIDA : Le VIH est l’acronyme de Virus de l’Immunodéficience Humaine, il s’agit d’un virus qui affaiblit le système immunitaire. Le SIDA est l’acronyme de Syndrome de l’ImmunoDéfience Acquise. Par conséquent il s’agit du stade avancé de l’infection par le VIH. Donc si l’individu a le SIDA, il a donc nécessairement le VIH. Cependant être attient du VIH ne signifie pas que nous sommes au stade de l’infection. Page 68 sur 150
involontaire car cette décision a pour conséquence les condamnations des laboratoires pour potentiellement complicité montrant aux yeux de la population « une justice à géométrie variable », Georgina Dufoix exprime : « Je me sens profondément responsable; pour autant, je ne me sens pas coupable, parce que vraiment, à l'époque, on a pris des décisions dans un certain contexte, qui étaient pour nous des décisions qui nous paraissaient justes.» a été résumée par une formule devenue célèbre (« responsable mais pas coupable »)1. Seul Edmond Hervé sera condamné mais avec une dispensation de peine Michel Garretta ancien directeur du Centre de Transfusion Sanguine (CNTS) a été condamné pour tromperie et non-assistance à personne en danger à 4 ans de prison et une amende de 500 000 francs. Ce manque de condamnation montre au peuple français dont il a été acteur par la donation de son sang en grande quantité et gratuitement, une profonde injustice et un manque important de considération pour tous les proches des victimes. Pour des enjeux budgétaires l’Etat a privilégié la maladie à la guérison, mais à la suite de ce choix, il entraîna l’ouverture d’une désunion entre patriotes. En effet en se basant sur un graphisme réalisé par Statista en 2011 : « les raisons des Français à ne pas donner leur sang » : la majorité (28%) exprime un sentiment de peur, il faudra attendre plusieurs années pour regagner la confiance des citoyens. Nous pouvons également appuyer ce chiffre par notre étude quantitative montrant que sur 180 personnes : 68 expriment une confiance mitigée envers les laboratoires pharmaceutiques, contrairement au personnel de santé montrant que 55% des personnes accordent leur confiance. Pourtant malgré une confiance acquise ce sont les médecins qui sont victimes de la mauvaise réputation des laboratoires étant les premiers contacts que les patients obtiennent. Elle entraîne une mise en garde du malade pouvant et souhaitant à tout moment pouvoir attaquer en justice celui qu’il croit être son bourreau. La pression semble tellement présente que l’utilisation du sang placentaire pose des problèmes plus d’ordre judiciaire que par le manque de moyens : « Un praticien, réticent à signer les documents, fait ainsi valoir qu'il « ne veut pas d'ennui à la retraite ». La secrétaire d'une banque de tissu indique qu'elle « fait tout signer [...], surtout le dossier définitif [...] » et qu'elle « a peur d'aller en prison ». Une sage-femme cadre exprime des réticences du même ordre « Il ne faudrait pas se retrouver dans quelques 1 INA Actu : 20h Antenne 2 du 17 juillet 1998 : Affaire du sang contaminé. Page 69 sur 150
années avec un problème comme on a eu pour le sang contaminé, le sida... Creutzfeld-Jacob... Mais d'un autre côté, est-ce qu'il faut tout refuser en bloc ? Est-ce qu'il faut refuser le progrès ? »1. Par cette crainte de l’accumulation une nouvelle médecine venant des États-Unis se développe de plus en plus en France : la médecine défensive. « La médecine défensive est une médecine de l'évitement dans laquelle la préoccupation des médecins consiste davantage à se prémunir contre le risque judiciaire qu'à dispenser des soins appropriés à leurs malades. »2. Par conséquent ne serions-nous pas en train de créer une véritable forteresse face au progrès ? Les premières victimes de ce manque d’innovation sont les personnes atteintes de maladies génétiques, par conséquent il nous semblait primordial d’interroger les présidents des nombreuses associations qui ont eu la gentillesse de nous accorder de leur temps afin de partager leur quotidien ainsi que leurs attentes aux niveaux de la génétique. Est-ce que le transhumanisme dans le cadre de la médecine est en marche ou bloquons-nous les accès au progrès ? 1 Ibid. 2 Barbot, Janine, et Emmanuelle Fillion. « La « médecine défensive » : critique d'un concept à succès », Sciences sociales et santé, vol. 24, no. 2, 2006, pp. 5-33. Page 70 sur 150
Chapitre 1 : Méconnaissance du génome ou fantasme de nos inquiétudes ? Dans ce chapitre, nous étudierons la méconnaissance du génome dont souffre la majorité des Français. Entre manque d’informations et fantasmes fictionnels, ce n’est pas la génétique en elle-même qui attire, mais plutôt l’idée que l’on se fait d’elle. Véritable révolution médicale, douce illusion, ou dangereuse chimère ? En interrogeant 180 personnes, nous nous sommes rendu compte que (67,2 %) d’entre elles ne connaissaient pas la médecine prédictive, mais également que (67,8 %) de ces mêmes personnes pensaient qu’elle était utilisée dans le contexte de prédictions de potentiels cancers. Le cancer est une maladie qui peut en effet être génétiquement héréditaire, ce qui signifie que la médecine prédictive peut potentiellement prévenir l’apparition de cellules cancéreuses chez un individu dont le patrimoine génétique est plus à risque. Cependant, (64,9%) de ces mêmes personnes sont en accord avec la proposition suivante : « Si la médecine prédictive peut par les gènes supprimer les pathologies rares comme la maladie des os de verre elle guérit, si elle nous partage de nouvelles connaissances sur nos gènes ce n’est plus de la médecine mais de la science. » La médecine prédictive est en effet une pratique que peu de personnes connaissent réellement, car trop éloignée de la médecine traditionnelle réparatrice qui rétablit un état antérieur au mal qui ronge l’individu. Source de rêves pour certains et de cauchemars pour d’autres, nous allons essayer dans ce chapitre d’en comprendre les raisons, dans le cadre français. Page 71 sur 150
Le principe de précaution l’armure transparente du principe de responsabilité A l’origine pour combattre les problèmes liés à l’Environnement, le principe de précaution est déclaré au sommet de la terre en juin 1992 à Rio puis rentre dans le Droit de la Communauté Européenne avec le traité de Maastricht en 1992 avant de s’inscrire dans le droit français avec la loi Barnier du 2 Février 1995. Selon la définition évoquée par le Conseil d’Etat en 1998, le principe de précaution repose sur le concept qui se définit « par l'obligation pesant sur le décideur public ou privé de s'astreindre à une action ou de s'y refuser en fonction du risque possible. Dans ce sens, il ne lui suffit pas de conformer sa conduite à la prise en compte des risques connus. Il doit, en outre, apporter la preuve, compte tenu de l'état actuel de la science, de l'absence de risque »1. Cette disposition expose qu’en l’absence de certitudes, dues à un manque de connaissances techniques, scientifiques ou économiques, il convient de prendre des mesures anticipatives de gestion de risques sur l’écologie, l’économie ou la santé. Ainsi, plus que le principe de responsabilité, qui adapte le comportement des acteurs en fonction des résultats, le principe de précaution bloque la recherche tant qu’elle n’apporte pas la preuve tangible de l’absence de risques liée aux expérimentations. Ce principe va évidemment s’étendre à d’autres domaines comme la santé publique avec les affaires liées aux OGM (Organismes Génétiquement Modifiés), au bisphénol A dans les contenants alimentaires ou au sang contaminé par le VIH ou l’Hépatite C transfusé au cours des années 1980 / 1990. Cela a concrétisé toutes les craintes citées précédemment. Est ainsi créé par l’arrêté ministériel du 30 Juillet 1996 le Comité de la Prévention et de la Précaution (CPP), à pour mission 1 Conseil d’État [1998], p.256. Page 72 sur 150
d’aider le ministère chargé de l’environnement sur les principes de prévention et de précaution. Si le principe de précaution est mis en œuvre en cas d'incertitude scientifique ; le principe de prévention, lui, fait logiquement suite en cas de risque identifié. Le CPP exerce des fonctions de veille, d’alerte et d’expertise pour les problèmes de santé liés aux perturbations de l’environnement tout en faisant le lien entre, d’une part, les actions de recherche et la connaissance scientifique et, d’autre part, l’action réglementaire. Le Conseil d’État a fait application de ce principe. Par exemple, dans son arrêt « Association Greenpeace France » du 25 septembre 1998, il a prononcé sur ce fondement un sursis à exécution d’un arrêté du ministère de l’Agriculture et de la Pêche qui autorisait la commercialisation de variétés de maïs génétiquement modifié1. Le rapport remis au Premier ministre Lionel Jospin, le 15 octobre 1999, par les biologistes généticiens Philippe Kourilsky et Geneviève Viney dit : « Le principe de précaution doit s'imposer à tous les décideurs ». Il s'agirait d'un nouveau principe de responsabilité s'appliquant à « toute personne qui a le pouvoir de déclencher ou d'arrêter une activité susceptible de présenter un risque pour autrui ». En février 2005, le Parlement réuni en Congrès a inscrit dans la Constitution la Charte de l'Environnement, installant par là même le principe de précaution (article. 5) au niveau le plus élevé de la hiérarchie des normes juridiques, en la présentant sous ces termes : « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veilleront, par application du principe de précaution, et dans leurs domaines d'attribution, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ». L’article 5 de la Charte de l’environnement de 2005 précise que l’État et les collectivités locales ne devront appliquer le principe de précaution que dans les domaines qui relèvent de leurs attributions respectives. Ainsi, un maire ne pourrait interdire par arrêté la culture d’OGM dans sa commune, car cette compétence relève du préfet qui a le pouvoir de police spéciale exclusive. Toutefois, seules les autorités publiques sont responsables, et non les entreprises ou les particuliers, et 1 « Association Greenpeace France » du 25 septembre 1998. Page 73 sur 150
uniquement dans leurs domaines d’attribution. Depuis 2005, le principe de précaution a été repris dans différents plans nationaux tel que le plan Cancer 2009-2013 qui précise que « devant les incertitudes sur les liens ou le poids d’expositions environnementales, […] la recherche doit être mobilisée et des comportements de précaution sont à rechercher collectivement ». Par ces précisions historiques, nous pouvons dire que le principe de précaution permet une sécurité et une sûreté concernant la recherche scientifique et son application dans la société, mais à quel prix ? En effet, si la France fût la terre de l’innovation scientifique et biologique pendant le XIXème et le XXème siècle, le territoire des prix Nobel, de Pasteur et Curie, qu’en est-il aujourd’hui ? Si le principe de précaution précise qu’il s’agit d’être capable d’anticiper sur les effets négatifs potentiels de chaque création ou nouvelle technologie découverte, il est en réalité impossible de les connaître, sachant que chaque chose a des effets négatifs. La découverte du Radium par Marie Curie a pu guérir mais aussi tuer, il s’agit ainsi de tempérer l’utilisation de la découverte (doliprane, fission nucléaire…). Ce principe est, pour de nombreux détracteurs, une constitutionnalisation de la peur. Les sciences doivent permettre l’innovation grâce à la compréhension, cela peut être freiné par ce principe de précaution. Le principe de précaution, ainsi envisagé, se situe bien dans le contexte philosophique mis en place par Hans Jonas1 : l'extension du domaine de responsabilité, la nécessité d'une maîtrise de la maîtrise, l'obligation de savoir, qui est, entre autres, l’obligation d'anticiper ce que l'on ne peut véritablement prévoir. Pour autant, ces principes n'existent que dans leur application et ce que l'on peut en connaître montre que l'on n'est pas nécessairement conduit à ce qui caractérise la démarche de Jonas : le décrochage vers l'irrationalité d'une éthique de la peur, la décision sous la menace de la catastrophe, ce qui aurait pour effet de bloquer aussi bien l'investigation scientifique que la délibération politique. Selon certains auteurs, le principe de précaution mal utilisé peut ainsi conduire à des blocages inutiles, qui peuvent retarder les pays qui l'appliquent dans la voie du progrès technique. Dans Les Prêcheurs de l'apocalypse en 2007, Jean de Kervasdoué déclare ainsi : 1 Hans Jonas, Das Prinzip Veranwortung. Versuch einer Ethik für die technologische Zivilisation, Francfort/Main, 1979 (trad. fr., J. Greisch, Le Principe responsabilité. Essai d'une éthique pour la civilisation technologique, Paris, Le Cerf, 1990). Page 74 sur 150
« Être prudent, analyser les risques pour tenter de les éviter, constituent de sages conseils ; mais d'avoir fait de la précaution un principe est un drame : il ne s'agit plus de tenter d'analyser des évolutions vraisemblables, compte tenu des informations disponibles, mais d'imaginer l'irréel, l'impensable, sous prétexte que les dommages causés pourraient être importants. ». En ce qui concerne la recherche médicale l’Académie nationale de médecine estima en 2001 : « que le principe de précaution trouve, ici, son application du fait de l’incertitude inhérente aux risques de la recherche ; que l’ensemble du dispositif législatif, réglementaire et institutionnel en place répond au mieux aux exigences de sécurité, tout particulièrement dans le domaine du médicament. Elle attire l’attention sur les effets dommageables que pourrait avoir une interprétation du principe de précaution qui permettrait de déroger aux exigences d’une démarche rigoureuse pour s’assurer de l’efficacité d’une thérapeutique. »1. C’est ainsi qu’une proposition de loi a été publiée en novembre 2014 sur le site de l'Assemblée nationale pour remplacer dans la Constitution le principe de précaution par un principe d'innovation responsable, « composé à la fois du principe d'innovation et de celui de responsabilité ». Les élus promoteurs de cette proposition ajoutent que « loin d'être antinomiques, ce sont deux principes complémentaires permettant d'atteindre le même objectif : un développement économique efficace, réfléchi et pondéré face aux grands risques environnementaux ». Cette décision ne sera cependant pas acceptée alors que Nicolas Hulot, envoyé spécial du président de la République François Hollande pour la protection de la planète, souligne tout d’abord que « l’innovation est un enjeu majeur pour résoudre l’ensemble des difficultés dans lesquelles nous sommes et qu’elle fera partie des clefs pour résoudre la difficulté de conjuguer les enjeux du court et du long termes »2. Cependant, il poursuit en demandant de ne pas affaiblir le principe de précaution. Selon son analyse, ce principe n’est nullement anti-innovation : « Regardez l’histoire depuis que ce principe de précaution a été inscrit dans la Constitution : en quoi, sur un plan purement 1 Rapport au nom d’un groupe de travail « La médecine et le principe de précaution », Georges DAVID, Guy NICOLAS, Claude SUREAU, 2001. 2 Le principe d'innovation - Compte rendu de l'audition publique du 5 juin 2014 et de la présentation des conclusions les 4 et 26 novembre 2014. Page 75 sur 150
juridique, dans les faits, a-t-il empiété, bien que parfois, psychologiquement, certains en abusent tant dans le vocabulaire des journalistes que dans le vocabulaire des acteurs politiques ? ». Le fondement de cette position est la conviction que « Nous sortons d’un siècle des vanités, et je ne voudrais pas que nous reproduisions ce siècle… On a été très loin dans l’excès. Je ne crois pas que le principe de précaution ait en quoi que ce soit sacralisé le risque zéro… Je voudrais rappeler cette petite phrase de Michel Foucault : « Je déplore que le sort de l’humanité soit dans d’aussi mauvaises mains que les siennes ». Je veux lui donner tort, c’est une bonne nouvelle de savoir que nous avons entre les mains notre propre destin. ». Ainsi, si le principe de précaution semble bien ancré dans la politique française, pour le meilleur et pour le pire, nous pouvons nous demander d’où provient cette peur du grand public concernant la génétique. La peur vient de l’idée que les sciences constituent une menace en termes de modification. Selon Hans Jonas, la peur constitue un principe heuristique. Elle nous amène à découvrir des choses que nous ne découvrirons pas sans elle. C’est pourquoi tous les scientifiques doivent se considérer être responsables de toutes leurs découvertes. Ici, on est dans un usage de la peur qui paraît positif. Les scientifiques doivent rendre des comptes. Pour illustrer, prenons le Projet Manhattan, mis en place pendant la Seconde Guerre Mondiale par les États-Unis, rassemblant les plus grands scientifiques de l’époque et visant à créer l’arme nucléaire - sous prétexte que les Allemands y étaient presque arrivés. Après la guerre, il s’est avéré que ça n’était pas du tout le cas, et Julius Robert Oppenheimer a toujours considéré cette découverte comme son plus grand regret : les responsabilités engagées étaient bien trop grandes, il se sentait coupable, responsable, de tous ses effets dévastateurs. On peut donc considérer que la responsabilité couvre le champ des scientifiques honnêtes. Les expériences nazies dans les camps de concentration nous apprennent qu’il existe une transgression, le code de Nuremberg. « Nous ne devons jamais utiliser un autre être humain comme un moyen mais toujours comme une fin en soi » (Emmanuel Kant au XVIIIème siècle). Le respect total de la dignité humaine est donc au cœur des expériences sur la génétique. On peut également porter le sujet sur les expérimentations animales, alors qu’il existe des simulations Page 76 sur 150
informatiques, ou sur le non-respect de la dignité animale. (Destruction des habitats naturels…). Cette frontière s’appelle la morale, comme la conscience de la différence entre le Bien et le Mal. Les scientifiques ne peuvent pas agir sans dimension morale, d’où l’existence de certaines lois humaines fondamentales. Cette moralité renforce cet aspect positif de la peur que nous avons évoquée. L’aspect négatif de la peur est l'apparition des tabous et la paralysie de l’avancée scientifique. Par ces aspects aucune sciences n’est fixe, l’astronomie a longtemps été combattue par l’astrologie, la médecine moderne par la théorie des humeurs antiques, la science par la religion. La peur n’est donc pas toujours bonne conseillère et peut parfois être un terrible frein. Dans son ouvrage Pour un catastrophisme éclairé. Quand l’impossible est certain, Jean-Pierre Dupuy a accusé le principe de précaution d'être trop timoré, mais pour des raisons inverses. Ce n'est pas comme frein au développement des techniques que Jean- Pierre Dupuy critique le principe de précaution, mais parce qu'il est impuissant à parer aux conséquences catastrophiques de ce développement des techniques. Le principe de précaution, selon lui, participe de la rationalité instrumentale, celle de la technique et du calcul économique, en s'en tenant à une gestion probabiliste des risques, là où il faudrait anticiper la catastrophe.1 Dans tous les cas, les principes de responsabilité et de précaution sont mis en pratique dans le cadre de la médecine, entraînés par la peur de l’erreur médicale et de ses conséquences. En effet, la loi du 4 mars 2002 a instauré une procédure spécifique d’indemnisation des victimes de fautes médicales, prévue par les articles L.1142-5 et suivants du code de la santé publique. Cette procédure n’est pas obligatoire et la victime peut toujours décider de saisir les juridictions de droit commun. Le régime de la responsabilité médicale a été établi par la Jurisprudence. L’arrêt Mercier de la Cour de cassation en date du 20 mai 1936 avait pour la première fois reconnu la nature contractuelle de la responsabilité du médecin, reposant sur la démonstration d’une faute de sa part, d’un dommage subi par le patient et 1 Jean-Pierre Dupuy, « Pour un catastrophisme éclairé. Quand l'impossible est certain », Paris, Seuil, 2002. Page 77 sur 150
d’un lien de causalité entre les deux. Cette décision énonce que l’obligation de soins découlant du contrat médical à la charge du médecin est une obligation de moyens. A ce titre, le médecin doit tout mettre en œuvre pour soigner son patient. Cette obligation se distingue de l’obligation de résultat, qui impliquerait que le médecin s’engage à guérir le patient. Dans le cadre de la médecine prédictive et de la cartographie du génome humain, les données acquises confirment l'origine génétique de certaines maladies, pour cette raison, les experts peuvent soulever de plus en plus des prédispositions génétiques à tel ou tel préjudice et les avocats de victimes d'erreurs médicales doivent rester vigilants car la jurisprudence de la Cour de cassation décide que : « Le droit de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable. »1 Pour mener à bien cette appréciation, les juges doivent donc, à l’appui de rapports d’experts, connaître l’état de santé de la victime avant la survenance de l’accident pour identifier les éventuelles séquelles qui en découleraient. Il semble que les risques judiciaires entraînent de nombreux blocages administratifs, la peur de représailles a donné naissance à la médecine défensive, lorsque le médecin cherche plus à se protéger qu'à protéger son patient. La peur du procès, ou tout simplement des reproches, le conduit à multiplier les examens et les traitements inutiles. Cette dérive née aux USA menace désormais la France. Tout l’art médical consiste à gérer l’équilibre entre la prescription abusive d’examens et le risque de passer à côté d’une maladie grave, la médecine défensive tient de cette dérive judiciaire et cette catégorie d'injustice est dévastatrice pour l’exercice médical. Dans le cadre de la génétique en France, il est d’ailleurs bon de rappeler que l’accompagnement des patients atteints de ces pathologies rares est critiqué par les membres associatifs que nous avons pu interroger. Selon Emma Del-Rey, présidente de l’Association contre les Maladies Mitochondriales, pour obtenir un rendez-vous chez un généticien, il faut attendre minimum 3 ans. Ce rendez-vous est possible seulement lorsque le patient a eu de nombreux tests qui nous poussent vers l’analyse génétique. Très peu de parents se sentent accompagnés lors de ces 3 ans. Lionel Ribes, président de l’Association Nationale des Hypercholestérolémies Familiales, pense 1 Cass. Crim 12 avril 1994 (93-84.367 Publié au bulletin). Page 78 sur 150
qu’il faut se tourner vers une médecine personnalisée à chaque patient atteint de ces maladies génétique. Enfin, selon Jean Michel Dubois président de l’Association Neurofibromatoses et Recklinghausen, obtenir un rendez-vous est très long car si La neurofibromatose de type 1 se manifeste dès la naissance sur la peau où nous pouvons voir des tâches “café au lait”, les autres neurofibromatoses se manifestent plus tard : « Un diagnostic rapide rassure toutefois les parents et ils seraient moins seuls dans cette bataille ». Il est enfin intéressant de comparer deux pourcentages recensés sur 180 individus : Si 51,7% sont plutôt confiants voire totalement confiants en notre personnel médical (24,4 % étant neutres) et 44,2% d’entre eux considèrent avoir été correctement voire parfaitement accompagnés par les médecins (28,5% étant neutres), seul 24,5% ont confiance dans l’industrie pharmaceutique (37,8% sont neutres). Nous pouvons ainsi constater que le manque de confiance de la population semble plutôt se diriger vers l’industrie pharmaceutique, moins proche des individus que les médecins et minée par de multiples scandales relayés par tous les médias (Médiator, Distilbène, gaspillage des vaccins H1N1, Vioxx…). Ce manque de transparence a été par ailleurs extrêmement visible lors de la division de la population française sur la question du vaccin contre la Covid-19. Entre un manque de confiance dans les institutions pharmaceutiques, les risques d’une déviation vers la médecine défensive, les multiples scandales sanitaires, un manque d’action étatique et un rayon d’action associative encore trop faible aujourd’hui, la question de la médecine génétique est un sujet encore très mal maîtrisé par l’individu moyen en France, et lorsque la réalité ne convient plus, l’humain se tourne vers la fiction. Le 7ème art : unique pont de connaissance entre la population et le génome Si tant de craintes existent concernant la génétique, il est très probable que cela soit dû à un manque de connaissances sur ce sujet. En effet, en posant la question d’un potentiel caractère tabou à la génétique en France, expliquant que (94,6%) des 175 personnes interrogées ne connaissaient pas le Plan Médecine France Génomique 2025, aux 5 membres associatifs combattant les maladies génétiques, mais aussi au chercheur en Page 79 sur 150
biologie génétique M.Séralini, tous répondent qu’il existe en France un manque de communication et un intérêt très faible de la population, majoritairement peu concernée par ces maladies génétiques. Le seul relais populaire de la génétique semble donc être le 7ème art, en effet, le cinéma, surtout anglo-saxon a trouvé dans la question des manipulations génétiques et de la cartographie du génome un sujet d’intrigue parfait pour présenter un sujet de peur dans le progrès scientifique. Il semble ainsi que le 7ème art se soit toujours méfié du génie génétique. A partir des années 1970, le cinéma américain est marqué par les découvertes européennes de nouvelles techniques contribuant au développement du génie génétique par Ulrich Laemmli et sa méthode pour séparer des morceaux d'ADN, et Bernard Mach et sa méthode pour copier des gènes. L'idée de la manipulation génétique se retrouve dans le genre horrifique : Le chat à neuf queues de Dario Argento (Théorie des gènes du criminel), Night of the Lepus - (les Rongeurs de l’apocalypse) de William Claxton (Modification génétique de lapins devenant des créatures assoiffées de sang), The The Mutations - (Freakmaker) de Jack Cardiff (Un scientifique fou tente de combler le fossé entre la vie humaine et la vie végétale) et Embryo de Ralph Nelson (Un scientifique découvre un moyen d'accélérer de manière fulgurante la croissance du fœtus humain, le transformant en adulte en l'espace de quelques jours). Nous pouvons tout de même citer l’utilisation plus réaliste de la génétique au cinéma en 1979, alors que Goldengirl – (De l’or au bout de la piste) de Joseph Sargent imagine un scientifique qui a « amélioré » sa propre fille pour en faire une athlète olympique imbattable. Dans les années 1980 et au début des années 1990, la question de la génétique passe du film d’horreur ou policier à la science-fiction. En effet, comment parler de la crainte populaire de la génétique véhiculée par le cinéma sans parler du maître de l’horreur moderne David Cronenberg et de son remake de la mouche noire (1958) de Kurt Neumann. La Mouche de 1986 est d’abord l’histoire d’un espoir et d’un échec, de la découverte d’un moyen pour l’homme de se téléporter au résultat dramatique et horrifique de la mutation du personnage principal, en voulant se prendre pour Dieu, le voilà devenu créature mi-homme mi-mouche. Deux corps étrangers ne peuvent pas voyager ensemble. Ils ne peuvent pas cohabiter. Son expérience est l’histoire d’une évolution puisque sa téléportation s’opère par une déconstruction puis une reconstruction de séquence ADN. Le héros de Cronenberg ne va Page 80 sur 150
se transformer que progressivement, et il ne perdra l’usage de la parole qu’à la toute fin. Il peut ainsi décrire l’horreur de ce qui lui arrive, évoquer les perspectives qu’ouvre sa mutation. La maladie génétique vue par Cronenberg devient ici une puissante métaphore du mal intérieur du protagoniste, dont la relation avec sa femme évolue telle une romance tragique alors qu’il perd son humanité au fur et à mesure qu’il devient une mouche. Alors que la dernière once d’humanité était sur le point de lui échapper, il suppliera sa femme de mettre fin à ses jours, ce qu’elle fera par amour, refusant de voir souffrir l’homme qu’elle a aimé. Dans Blade Runner de Ridley Scott (1982), d'après une nouvelle de Philip K. Dick, les progrès de la génétique sont à l'origine des réplicants, androïdes de chair génétiquement améliorés, mais programmés pour une vie d’esclave et une mort prématurée. Enfin, nous devons ici parler du chef d’œuvre de Steven Spielberg et de Michael Crichton : Jurassic Park (1993) qui marque la percée de la génétique dans la conscience du grand public. On y spécule sur la possibilité de faire revivre des créatures disparues à partir de leur ADN retrouvé. Encore une fois, la génétique dans les mains des mauvaises personnes a créé un monde dangereux, qui marquera les esprits de tous les enfants des années 1990 et qui continue encore à faire parler de lui aujourd’hui. Enfin, alors qu’une nouvelle génération de technologies permet d’intervenir sur une zone spécifique de l’ADN afin d’accroître la précision de la correction ou de l’insertion pratiquée, les années 1990 marquent le passage de la génétique au rang d’une possibilité humaine et rentrant donc au cœur de films d’anticipation, inspiré des romans dystopiques d’Orwell ou d’Huxley des années 1930 / 1940, avec des problématiques plus modernes. En 1997, le réalisateur néo-zélandais Andrew Niccol décide de réaliser le long métrage Bienvenue à Gattaca, qu’on peut présenter comme un thriller d’anticipation dont le sujet principal concerne la cartographie du génome humain, et sa potentielle utilisation dans un monde rongé par le besoin de perfection génétique. S’inspirant de romans présentant des futurs terrifiants car trop « parfaits » comme Nous autres d’ Evgueni Zamiatine (Un Etat totalitaire contrôle le bonheur des gens au détriment de leurs libertés individuelles), Un bonheur insoutenable de Ira Levin (Uniformisation de la population grâce à un traitement hormonal), Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley (Fabrication des individus Page 81 sur 150
dans une usine) ou 1984 de George Orwell (La surveillance panoptique et constante), ce film renouvelle le thème classique en science-fiction de l'individu révolté (souvent par amour) contre une société idéale (La Cité et les Astres de Sir Arthur C. Clarke, Le Monde aveugle de Daniel F. Galouye, THX 1138 de George Lucas ou Croisière sans escale de Brian Aldiss), mais avec les préoccupations de notre temps. L’histoire de Bienvenue à Gattaca se déroule dans un futur proche où la reproduction sexuée naturelle a laissé sa place à la programmation génétique des futurs individus grâce à la cartographie complète du génome de l’enfant à naître. Prédispositions naturelles, physiques ou mentales, traits de caractère et morphologie du bébé sont prévues, et déterminent l’avenir de l’individu avant même sa naissance. Dans le film, l’exemple du pianiste à 12 doigts en est la preuve. Tout individu dont le patrimoine génétique n’entre pas dans les normes génétiques établies se voit mis à l’écart de la société et cantonné au travail le plus ingrat. Ces parias sont généralement issus de procréation « naturelle », sans intervention de la science génomique, et sont rejetés par les autres à cause de cela. Le héros du film, incarné par Ethan Hawke, usurpera l’identité d’un individu « d’élite génétique » qu’un accident causé par une tentative de suicide l’a laissé paraplégique. Cela met en question le sujet de la détermination génétique dans son rapport à l’environnement extérieur à l’individu et ses relations avec autrui. “G.A.T.T.A.C.A” fait référence aux initiales des 4 composants qui forment l’ADN et offre une grande réflexion sociale de notre monde qui pourrait évoluer comme tel. Le marché de la parentalité et de la fécondation pourrait bien évoluer avec ces mêmes propositions de choix de génomes. Au sujet de la manipulation génétique, A.Niccol commente : « Comment pourrions-nous regarder dans les yeux un parent qui porte le gène de la maladie de Huntington par exemple et lui dire ‘Nous ne devrions jamais trafiquer le génome humain.’ C’est tout simplement ridicule, parce qu’en ce qui concerne les maladies génétiques, c’est un cadeau du ciel. Le problème réside dans le fait de franchir la ligne entre santé et perfectionnement et alors, où s’arrête-t-on ? Des dents qui ne sont pas bien alignées : est-ce un défaut génétique ? Et qu’en est-il de la calvitie précoce ? Où s’arrête-t-on ? Et chacun délimiterait alors sa propre limite, au fur et à mesure que ces choses deviennent de plus en plus possibles. Et ces possibilités existent véritablement. Je ne date jamais le film pour cette raison spécifique. Aujourd’hui on peut Page 82 sur 150
choisir le sexe et on peut éviter de nombreuses maladies génétiques en concevant un enfant dans cette boîte de Petri. Et cette étrange pression sociale qui naîtra quand on optera pour un enfant conçu naturellement, comme avant, sera de plus en plus forte : les gens diront : ‘Pourquoi vous infligez cette maladie à votre enfant ?’ C’est ainsi qu’une étrange honte sociale se développera. À la fin, il se peut qu’on en arrive à un point où le patrimoine génétique sera tellement réduit que l’espèce en viendra, dans les faits, à s’éteindre. Il se peut que les hommes petits et chauves soient porteurs d’un avantage génétique et qu’on les élimine tous. » L’année suivante, en 1998, les réalisateurs Leslie Libman et Larry Williams décident d’adapter le célèbre roman d’Aldous Huxley de 1932 Le meilleur des mondes. Le roman comme le film dépeignent une société « parfaite » dans laquelle la natalité serait entièrement sous le contrôle d’un groupe de scientifiques en génétique. Chaque individu y est « construit » génétiquement afin de servir du mieux possible la place sociale qui lui est attribuée. Ce monde est dénué de libre-arbitre mais aussi du hasard lié aux naissances « naturelles », de la même manière que dans Bienvenue à Gattaca, la société dystopique d’Huxley fait tout pour garder les individus dans les castes qui leur sont prédestinées. Dans les centres de conditionnement et d’incubation, véritables usines d’élevage de fœtus, les « Prédestinateurs » et « Directeurs d’Incubation » ont pris le relais de la maternité. Les individus créés dans ces fabriques dans des tubes à essai sont le résultat de dosages génétiques précis lors de leur processus de maturation. Ainsi, les castes constituent le fondement même de cette société, depuis les Alphas, l’élite, ayant bénéficié de la plus grande attention et de tous les soins pendant leur conception, jusqu’au Epsilons, en bas de l’échelle, les « attardés mentaux » servant aux plus basses tâches manuelles, qui ont vu leur évolution stoppée et/ou retardée à l’aide de différents produits chimiques, et qui sont souvent des clones répétés à l’envie d’un même individu. Plus qu’à Gattaca, l’individu parfait n’est recherché que lorsque l’on a besoin de lui, car une élite intelligente ne saurait se réduire à de basses besognes. « Communauté, Identité, Stabilité » représente cette société de conditionnement dans laquelle la génétique joue un rôle moteur. Ainsi, le cinéma semble être un relais populaire de la peur que peut engendrer la modification de la nature même de l’homme ou des animaux. L’individu lambda craindra le caractère dystopique d’un futur décrit dans Terminator de James Cameron (1984) plutôt que de lire Page 83 sur 150
des dizaines d’articles scientifiques lui décrivant les modalités d’une telle mise en œuvre de l’intelligence artificielle dans notre société. Pour la manipulation génétique, c’est la même chose : les études existent pour ceux qui prennent la peine de les chercher (Annexe 6), la communication étatique sur le sujet est encore insuffisante et les associations n’ont pas assez de voix pour convaincre ceux qui ne sont pas concernés par les maladies génétiques. Le seul moyen pour beaucoup d’individus d’approcher la génétique, c’est par la fiction mais cette dernière préfère évidemment l’exagération spectaculaire à la rigueur scientifique. Cela est encore plus visible aujourd’hui, à l’heure du Binge-Watching Netflix, même si certains documentaires ont pu y voir le jour comme Sélection contre-nature en 2019, expliquant les recherches des bio-hackers, de l'éradication de maladies au choix des traits d'humains en devenir, et les questions morales soulevées par ces pratiques. Aujourd’hui, le cinéma ne semble plus vraiment s’intéresser aux manipulations génétiques mais plutôt au développement de l’Intelligence Artificielle et à notre société marquée par la communication digitale pour le meilleur et pour le pire. D’où peut ainsi venir ce manque d’intérêt actuel de la majorité de la population pour la manipulation génétique et la cartographie du génome ? La manipulation génétique manque d’intérêt ou de communication ? Nous l’avons vu, les connaissances primaires sur la manipulation génétique des citoyens relèvent surtout de la fiction. Cependant grâce à la proximité des plateformes de vidéos tel que Netflix nous est apportée une certaine vulgarisation tout en restant une approche professionnelle. Si la distance semble se réduire au fil des années notre questionnaire relève un véritable manque de connaissance sur ce domaine, la majorité des personnes interrogées ne connaissaient pas les différentes médecines à ce jour (Annexe 1). Cependant le docteur Gilles-Éric Séralini exprime que lors de la formation au bac, dans la spécialité scientifique, les élèves ont beaucoup de cours sur l’ADN et le génome. Plus précisément, ils approfondissent leur cours de seconde en abordant en complément la cellule musculaire, les effets du stress et des comportements sur l’organisme. Par Page 84 sur 150
conséquent nous pouvons dire qu’il s’agit d’une infime initiation à peu d’individus car les élèves de la filière scientifiques doivent choisir leur spécialisation entre les mathématiques, la physique-chimie et la SVT (Sciences de la Vie et de la Terre). De la première à la terminale la SVT est avant-dernière des spécialités choisies, devant l’histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques (39,5% en première - 27% en terminale)1. En conclusion nous pouvons dire que la thématique du génome n’est pas un élément essentiel de formation pour un futur citoyen Français, pourtant de nombreux ouvrages sont disponibles à l’achat afin d’acquérir ces connaissances ou par volonté de perfectionnement de ses dernières. Néanmoins nous ne pouvons pas reprocher au peuple Français de choisir ses envies de lecture, le sujet étant tellement vaste. Pourtant on estime qu’un enfant sur 100 à la naissance est touché par une maladie génétique, au fil des années on a réussi à déterminer le nombre exact de gènes : 30 000. Les chercheurs doivent maintenant les identifier un par un et comprendre leurs fonctions respectives, malheureusement cette tâche est très complexe car tous les êtres n’ont pas le même taux d’activation de ces gènes. Les maladies génétiques sont souvent d’ordre héréditaire car un parent, voire les deux, peuvent être porteur du gène défaillant, on parle de gène muté dominant à son gène sain. Si l’homme et la femme décident de mettre au monde un enfant il va y avoir croisement. Si un gène des deux parties possède un gène dominant il y a 50% de chances d’avoir un enfant malade. Autre perspective, les deux parents possèdent le gène muté mais ne sont pas malades car il se peut qu’il soit moins puissant que le gène sain on dit qu’il est récessif pourtant lors du croisement si l’enfant hérite de ses deux gènes récessifs, il sera malade mais contrairement au premier cas la pathologie ne sera possible qu’à 25% pourtant il aura 50% de chance d’être porteur de ce gène et pourra le transmettre à sa descendance et 25% de chance il ne sera plus porteur et ne sera pas malade. Donc indirectement nous sommes tous plus ou moins acteur des maladies génétiques, il est donc normal que les chercheurs s’interrogent sur le fonctionnement et la guérison possible. Aujourd’hui, il est possible par simple prélèvement de savoir si l’enfant sera atteint de trisomie 21. Par cette annonce le couple sera libre de choisir l’avortement ou non, majoritairement notre questionnaire montre que ce choix reste le premier, 60,8% optent pour l’avortement si les médecins 1 Studyrama : Bac 2021 les spécialités les plus demandées par les élèves en 2021. Page 85 sur 150
expriment que l’enfant aura un handicap contre 29,5% qui ne souhaitent pas répondre. Par ces analyses nous pouvons conclure que ce n’est pas un certain manque d’intérêt envers la génétique qu’éprouvent les citoyens ayant des ouvrages disponibles ainsi que l’utilisation possible d’internet pour tous renseignements complémentaires, mais bien le fait que la majorité des parents ne se sentent pas capables d’élever dans la société d’aujourd’hui un enfant ayant un handicap. L’Entretien avec Carole Chehwah vice-présidente - Xtraordinaire (Annexe 4) exprime que nous sommes dans une société qui n’accepte pas le différent surtout au niveau pathologique, cherchant un responsable. Malheureusement, le coupable est souvent représenté comme étant la mère de l’enfant : « Les représentations du handicap façonnent les rencontres avec les personnes et leurs proches (Giami et coll., 1988). Le sujet au corps difforme, appareillé, au regard qui peine à se fixer, à la parole articulée inexistante ou perturbée, peut susciter plus le rejet que l'empathie, la pitié que la solidarité. S'il peut fasciner, c'est plutôt dans l'horreur que dans l'admiration. Passé le stade du bébé et du très jeune enfant, la dépendance à l'autre est une figure de l'humain dévalorisée dans notre société actuelle (Sticker, 1982; Korff-Sausse, 1996) qui prône une forme de réussite centrée sur l'autonomie, la beauté sculpturale et intacte.» Malheureusement toutes les maladies ne sont pas détectables et peuvent être d’ordre génétique, les chercheurs possédant encore moins de connaissance sur cette partie de l’organisme, selon les 4 associations interrogées l’accompagnement et le diagnostic sont plutôt pauvres, c’est dans ce cadre que les associations se sont créées pour compenser le manque médical et pouvoir trouver des points de convergence entre semblables dans ce combat, 3 associations interrogées réalisent des journées parents-enfants afin d’échanger et de se soutenir, cela permet également aux enfants atteints de la pathologie de retrouver un point de repère dans la société : « Dans le cas de maladies génétiques héréditaires, la famille entière peut se sentir porteuse et transmettrice d'une sorte de malédiction touchant son lignage, les parents se sentant coupables d'avoir transmis le « mauvais gène » à l'un de leurs enfants, qui lui-même à son tour peut se sentir coupable de pouvoir le transmettre à sa descendance. Ainsi, cette annonce se caractérise par la rencontre avec la question de Page 86 sur 150
la culpabilité et avec celle de l'injustice. »1 Il est donc important de retirer cette image que se donne les parents, c’est dans cette optique que les associations luttent pour ce combat faire entendre leur voix, Jean Michel Dubois s’exprime (Annexe 1) : « Toutes les maladies génétiques rares ont le droit d’être soutenues et les associations aidées par tout le monde. Les personnes qui veulent aider ne doivent pas tomber dans “la facilité” à donner la parole au moins présente médiatiquement. » L’état Français semble indifférent à cette détresse car toutes les associations interrogées expriment un manque de moyens financiers, pourtant, grâce à une communication importante et la présence d’un réseau, elles ont pu se développer et obtenir des donations sur le long terme. C’est lorsqu’elles produisent par des manifestations possibles accordées par les mairies qu’elles semblent le plus visible, c’est le bouche-à-oreille qui permettra de créer la visibilité qu’elles ont besoin, nous y reviendrons plus tard dans notre analyse. Pourtant même si la communication semble petit à petit obtenir une certaine place cela ne signifie pas que la réception sera optimale car les maladies génétiques souffrent d’une banalisation de la pathologie, Monsieur Ribes président de l’association ANHETF Association Nationale des Hypercholestérolémies Familiales exprime que ces maladies résultent sur le taux important de cholestérol pouvant entraîner des infarctus dès l’âge de 20 ans. « Le cholestérol est victime de sa mauvaise réputation, il faut expliquer aux populations et surtout dire que nous sommes atteints de maladie génétique. » (Annexe 5). En effet, une personne atteinte d’un taux de cholestérol important exprime une image d’un bon consommateur au détriment de sa santé pourtant les membres de l’association ont un régime alimentaire des plus strict. Briser les erreurs des laboratoires semble la première étape pour faire accepter la maladie au citoyen. 1 Gargiulo, Marcela, et Régine Scelles. « Famille et handicap : mutations dans les pratiques », Dialogue, vol. 200, no. 2, 2013. Page 87 sur 150
Chapitre 2 : La médecine prédictive/personnalisée : nouvelles médecines de l’individu Nous allons revenir dans ce chapitre sur l’évolution et les enjeux de la génomique et de la médecine génétique afin de poser la question des rapports entre les individus, les milieux associatifs, les chercheurs et médecins, et l’Etat dans le développement effectif de la médecine prédictive et personnalisée. La cartographie du génome étant propre à chaque individu, l’analyse de ses gènes responsables de potentielles maladies héréditaires est très longue et coûteuse, nous allons ainsi porter notre étude empirique sur ces enjeux. Nous nous poserons enfin la question des enjeux informationnels et communicationnels dans la relation qu’entretient le français lambda avec la médecine génétique et les besoins à développer pour mieux rendre compte des traitements de certaines maladies rares liées à la génétique héréditaire. Au cours de notre questionnaire, nous avons posé la question suivante : « Vous êtes un futur parent, lors des diagnostics prénataux on vous informe que grâce à la médecine prédictive, il est possible de déterminer les gènes criminels et malheureusement votre futur enfant les possède que faites-vous ? », sur 180 personnes interrogées, seules 27,1% décideraient de le garder, tandis que 36,2% décideraient d’avorter. S’il est à signaler que 36,7% des interrogées n’ont pas préféré répondre, il est intéressant de constater que l’argument d’autorité scientifique reste tout de même bien ancré dans notre pensée française, car si Milgram avait permis de démontrer que l’on pouvait faire souffrir un innocent pour le « bien de la science », notre étude se basant sur des personnes aux profils très différents montre qu’ils n’hésiteraient pas à avorter sans Page 88 sur 150
pour autant remettre en question la réelle existence de gènes du criminel, faisant totalement confiance à la médecine moderne. La même question posée avec le handicap était plus démonstrative car 60,8% des mêmes personnes interrogées demandaient l’avortement, 9,7% gardaient l’enfant et 29,5% ne se prononçaient pas. Cela peut être éventuellement expliqué par une croyance en l’éducation qui permettrait d’aliéner tout gène criminel avec un travail psychologique voire psychiatrique. De l’argument d’autorité scientifique à la médiatisation du phénomène génétique, du secret médical au système GAMIN, l’information et la communication autour de la médecine génétique et de la cartographie du génome nous permettra d’achever notre étude empirique et de conclure notre travail. L’évolution et les enjeux de la médecine génétique Avant de parler des enjeux dans le rapport qu’entretiennent chercheurs, patients et domaine de la médecine génétique, il convient de faire un bref résumé de l’évolution de la génomique et de ses applications au domaine médical. La génomique est une science qui émerge au début du XXème siècle avec la redécouverte des travaux du généticien Gregor Mendel sur l’hérédité et la corrélation, faite entre cette dernière et les chromosomes qui lui permet de « déceler les régularités héréditaires qui se transmettent de génération en génération, comme le type sanguin, ou les maladies liées au chromosome X, comme l’hémophilie, qui se transmet des mères aux fils ». Entre les années 1920 et 1940, on découvre l’Acide désoxyribonucléique (ADN) grâce à Phoebus Levene en 1929, puis est créée la biologie moléculaire en 1938, qui va permettre à James Watson et Francis Crick de découvrir la double-hélice de l’ADN en 1953, qui permettra à partir de 1973 de mettre au point le clonage de l’ADN et l’isolation des gènes. Les gènes isolés sont séquencés à partir de 1997 grâce à Maxam et Gilbert aux Etats-Unis et Sanger en Grande-Bretagne. Les années 2000 s’articuleront en génétique autour d’un projet ambitieux : séquencer l’intégralité du génome humain. Ce projet, connu sous la dénomination Human Genome Project, est né au début des années 1980 et s’est achevé en avril 2003 avec deux ans d’avance. Pour l’heure, ces recherches ont déjà permis aux scientifiques de mettre en relief certains désordres génétiques associés aux maladies rares mais aussi de découvrir les Page 89 sur 150
mutations associées à des maladies plus communes, comme des formes héréditaires de cancer1 , ou la maladie d’Alzheimer2. Ces progrès poussent aujourd’hui les chercheurs à élucider la base génétique de maladies telles que la dégénérescence maculaire, le diabète, l’obésité, l’hypertension, les maladies coronariennes, les maladies inflammatoires de l’intestin ou d’autres encore. L’amélioration des connaissances dans les domaines cités devrait conduire à terme à proposer de nouveaux traitements ainsi qu’à des mesures de prévention plus efficaces. Le principe est le suivant, lorsqu’une cellule humaine se divise, elle déclenche le processus de réplication de l’ADN pour en obtenir une copie. De temps en temps, le système produit quelques erreurs : ce sont les mutations. Majoritairement sans conséquence, certaines peuvent cependant être à l’origine des maladies génétiques évoquées plus tôt. La médecine génomique personnalisée permet d’identifier les gènes responsables de certaines maladies. Analyser l’ADN pour trouver ces derniers permet des diagnostics et pronostics (prévision de l’évolution d’une maladie) plus sûrs. En 2016, les gènes responsables de plus de la moitié des 7275 maladies monogéniques (maladie provoquée par la mutation d’un seul gène) recensées ont été identifiés. Cela fût rendu possible grâce au perfectionnement des méthodes de séquençage (déterminer la succession linéaire des bases A, C, G et T prenant part à la structure de l'ADN. La lecture de cette séquence permet d'étudier l'information biologique contenue par celle-ci) et de génotypage (déterminer l'existence de modifications à des positions connues, sur une partie ou la totalité du génome) de l’ADN, moins longs et coûteux à mettre en place aujourd’hui. Pour que cette identification soit pertinente, il est nécessaire de rassembler une importante base de données de génomes de personnes saines ou malades afin de séquencer, analyser et comparer les données. En général, les maladies génétiques sont rares, mais on en retrouve des milliers (plus d’une personne sur 2 000 peut en être atteinte). Parmi les plus fréquentes, on retrouve la Fibrose kystique (ou mucoviscidose), l’Hémochromatose (fer excessif dans l’organisme), la Trisomie21 (ou le syndrome de Down), les Myopathies (maladie génétique qui touche les muscles, comme la dystrophie musculaire de Duchenne ou la 1Risques héréditaires de cancers du sein et de l’ovaire. Quelle prise en charge ? 1998 Expertise collective de l’Inserm. http://ist.inserm.fr/basisrapports/risque.html 2Marie-Christine, alli., « Les formes tardives de la maladie d’Alzheimer : de la génétique à la biologie », Médecine/Sciences 2002 ; 18 : pp.709-16 Page 90 sur 150
dystrophie myotonique de Steinert), des cancers du sein associés à la mutation des gènes BRCA1 ou BRCA2, un cancer du côlon lié à une mutation des gènes MLH1, MSH2 ou MSH6, l’Hémophilie, la maladie de Tay Sachs, Anémie falciforme (ou drépanocytose), les Thalassémies (maladies des globules rouges), la maladie de Huntington ou encore le syndrome de l’X fragile. Si un membre de la famille de l’individu est atteint d’une maladie génétique, les risques de ce dernier d’être atteint ou de transmettre la maladie sont potentiellement plus élevés. Cependant, chaque individu est unique, et, depuis peu, la médecine se rend compte des limites de donner le même traitement à différents patients atteints d’une même maladie. Les différences génétiques individuelles peuvent être plus ou moins responsables de l’efficacité des traitements. Les particularités de chacun sont essentiellement explicables par l’ADN qui codifie tout notre organisme. Mais le biologiste moléculaire Gilles-Éric Séralini nous le rappelle dans notre entrevue : « C’est une pensée caricaturale de prétendre que la régulation est possible, ceux qui ont cette pensée considèrent que le génome est fixe or c’est faux, c’est vivant un génome. » Il n’est pas figé et peut évoluer sous l’influence de son environnement. La prise en compte du génome dans la médecine constitue un enjeu majeur pour adapter les traitements en fonction des dispositions génétiques de chacun. Mais la connaissance de l’ADN des individus n’est pas le seul facteur à considérer pour comprendre notre organisme. L’épigénétique a ainsi été inventé pour établir le lien entre les caractères observables (phénotypes) et l’ensemble des gènes (génotypes), afin de pouvoir réguler l’expression des gènes, et potentiellement désactiver l’expression d’un gène dangereux à des fins thérapeutiques. Elle ouvre ainsi des perspectives dans la compréhension et le traitement de nombreuses maladies. Séquencer les tumeurs peut par exemple permettre de trouver le traitement le plus efficace. En juin 2015, la France se lance officiellement dans la bataille mondiale de la médecine génomique personnalisée avec le plan « France Médecine Génomique 2025 ». Ce dernier vise notamment à intégrer le séquençage de l’ADN dans la prise en charge des patients. Pour cela, le plan prévoit de déployer un réseau de douze plateformes de séquençage à haut débit du génome couvrant l’ensemble du territoire : « Dès 2018, les Français pourront compter sur deux dispositifs complets en capacité de séquencer puis d’interpréter un génome. Pour ceux qui sont confrontés aux pathologies les plus rares, ou les plus difficiles Page 91 sur 150
à soigner, les informations rendues disponibles par cette possibilité pourraient se révéler déterminantes en améliorant les connaissances et en ouvrant la voie à de meilleures prises en charge de leurs pathologies. SEQOiA en Ile-de-France et AURAGEN en Auvergne- Rhône-Alpes auront à mettre en place une organisation lisible, efficace, et scientifiquement efficiente pour répondre d’abord aux besoins des patients qui sont atteints de maladies rares ou d’un cancer, puis, bientôt, à tous les patients ».1 La médecine génomique semble donc être un véritable espoir, à court terme dans la personnalisation des traitements aux pathologies rares, à long terme dans la compréhension scientifique des mécanismes génétiques à l’origine des maladies monogéniques. Cependant, cette médecine nécessite pour fonctionner un nombre très important de séquençages d’ADN de personnes saines et malades. C’est uniquement par de larges études qu’il sera possible d’identifier les marqueurs génétiques qui permettront de proposer des traitements adaptés aux patients. De plus, la seule compréhension du génome humain ne suffit pas. Pour progresser dans la médecine génomique personnalisée, il faut également prendre en compte la métagénomique (génome des bactéries qui colonisent l’Homme) et l’épigénétique (mécanismes qui agissent sur l’expression de l’ADN). Cela concerne la question du Big Data, des algorithmes, de la sécurité des données numériques et des supercalculateurs que nous aborderons plus loin dans notre réflexion. A la question de la quantité se rajoute celle de la qualité, car les pratiques médicales doivent être encadrées afin d’éviter certaines dérives comme le choix de gènes ou de gamètes lors de la procréation médicalement assistée par exemple. De plus, nous pouvons nous demander s’il est préférable de vivre dans l’ignorance ou de connaître les risques de développer une maladie génétique ? A la question « Selon vous est-ce nécessaire de tout connaître de soi ? », 33,1% des 180 personnes interrogées ne se positionnent pas, 44,9% sont plutôt d’accord et 21,9% ne sont pas d’accord. Les avis sont plutôt mitigés sur le caractère nécessaire de la connaissance du génome humain, cependant, 56,1% d’entre eux considèrent que cela est « bien », alors que 26,4% ne se prononce pas et 17,5% sont contre cette idée. Actuellement, en France, seuls des tests ciblés sur des gènes qui pourraient être responsables de maladies sont réalisés sur prescription médicale. Diane Van Haecke – d’Audiffret, titulaire d’une 1 solidarites-sante.gouv.fr Page 92 sur 150
maîtrise de Biologie spécialisée en génétique, ESSEC et Docteur en philosophie pratique, met en perspective le devoir d’information et d’accompagnement des patients qui doivent comprendre en profondeur les implications des données recueillies. Elle est co-fondatrice de UP for Humanness, association dédiée à l’insertion sociale et professionnelle de personnes fragilisées et à la recherche sur des enjeux de société. Lors de notre entretien avec M.Séralini, professeur de biologie moléculaire à l'université de Caen ainsi que cofondateur, administrateur et membre du conseil scientifique du Criigen (Comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique) jusqu'en 2018, nous avons pu poser plusieurs questions : A la question « La médecine prédictive permet aujourd’hui de déceler les gènes porteurs des maladies génétiques. Selon vous faut-il “reconfigurer les parents” ou utiliser la médecine personnalisée pour accompagner l’enfant et développer la recherche ? » il a répondu « La reconfiguration, comme je l’ai dit, je n’approuve pas et je pense que c’est assez réducteur de voir ses enfants comme des “gènes” : un individu est un tout. Les maladies génétiques sont un risque mais un risque faible car il y a toujours des modifications de génome pour chaque personne. Pour des maladies dont nous avons le recul comme la trisomie d’accord mais si nous n’avons aucune connaissance ou peu de la maladie génétique je ne suis pas pour un traitement personnalisé. ». Beaucoup plus optimistes concernant la médecine génétique, les membres de diverses associations soutenant les victimes de ces maladies génétiques ont également été interrogés. Il faut savoir que la majorité de leurs adhérents sont des personnes touchées par une maladie génétique ou leurs proches. A la question « Que pensez-vous de la médecine génomique et de son utilisation en France, est-ce une solution pour cette pathologie ? », plusieurs réactions sont à noter. Tout d’abord, Emma Del-Rey présidente de l’association AMMI (Association contre les Maladies Mitochondriales) est plutôt optimiste bien que réservée sur la question : « On a envie de dire oui, mais il ne faut pas oublier l’importance des barrières et des limites. Afin de faire avancer la recherche, il est possible de donner ses organes. Une crainte est présente car il faut s’informer et avoir suffisamment de recul pour choisir cette voie ». Lionel Ribes, président de l’ANHET.F (Association Nationale des Hypercholestérolémies Familiales), s’inquiète plutôt au sujet des moyens financiers nécessaires à la réalisation de telles expérimentations : « Toute Page 93 sur 150
manipulation est coûteuse, si c’est un avenir possible je dis oui pour l’instant le dépistage me semble le plus important. », Carole Chehwah, vice-présidente de l’association Xtraordinaire (handicaps mentaux liés au chromosome X) craint quant à elle la longueur des traitements et leurs dangers à long terme : « J’y crois car certains traitements actuels sont longs et ont de nombreux effets secondaires. C'est l'avenir cette solution mais aujourd’hui on ne sait pas la faire. », enfin, Jean Michel Dubois, président de l’ANR France (l’Association Neurofibromatoses et Recklinghausen), est plutôt réservé quant à l’application de la médecine génomique en France : « Trop hasardeuse dans le cas des fibromatoses on ne se sent pas concerné ». De nombreux doutes mais aussi de l’espoir encouragent les chercheurs à en savoir plus. Cependant, si les connaissances sont plus ou moins présentes, la mise en pratique de cette médecine dans le cadre des patients atteints de maladies génétiques héréditaire est encore compliquée, et le rendez-vous avec un médecin généticien spécialisé est très long. Les chercheurs et les patients seuls face à l'immensité du domaine ? A la question, « Selon-vous faut-il réduire l’exigence des critères requis pour l’obtention d’un rendez-vous chez un généticien ? », Emma Del-Rey répond : « Pour obtenir un rendez-vous chez un généticien, il faut attendre minimum 3 ans. Ce rendez-vous est possible seulement lorsque le patient a eu de nombreux tests qui nous poussent vers l’analyse génétique. Très peu de parents se sentent accompagnés lors de ces 3 ans. ». Ce manque d’accompagnement est expliqué par deux raisons, tout d’abord le nombre d’analyses et le manque de généticiens en France, exprimés par Carole Chehwah : « Je ne pense pas qu’il faut réduire les critères car avant de prétendre qu’un patient a un problème génétique il faut passer de nombreuses analyses avant de pouvoir avoir un test génétique, rentrer dans l’emploi du temps est difficile. » ou par Lionel Ribes : « Je pense qu’il n’y a pas assez de généticien, il serait intéressant d’avoir des centres de dépistage après il est important de ne pas avoir de dérive. Je pense qu’il faut se tourner vers la médecine personnalisée », mais aussi la durée de manifestation des symptômes de Page 94 sur 150
certaines maladies génétiques, comme expliqué par Jean Michel Dubois : « La neurofibromatose de type 1 se manifeste dès la naissance sur la peau nous pouvons voir des tâches “café au lait”. Obtenir un rendez-vous est très long car les autres neurofibromatoses se manifestent plus tard. Un diagnostic rapide rassure les parents et ils seraient moins seuls dans cette bataille. ». Ce diagnostic rapide mais rassurant est au cœur du métier de conseiller génétique que nous allons présenter dès à présent. Face à l’augmentation des demandes en matière de médecine génétique et conscient de la complexité et de l’hétérogénéité des situations et des enjeux éthiques associés à la génétique, le Pr Jean-François Mattéi, a créé le métier de conseiller en génétique en 2004 en France avec une formation obligatoire dédiée. Le rôle du conseiller en génétique a été défini dans la loi de Santé publique de 2004 (Art. L.1132-1)1 : « Aux termes de l'article L.1132-1 du code de la santé publique, le conseiller en génétique est ainsi chargé de participer à la délivrance des informations et des conseils aux personnes et familles susceptibles de faire l'objet d'un examen de leurs caractéristiques génétiques et à la prise en charge médico-sociale, psychologique et au suivi de ces personnes. » Le conseil génétique se déroule selon des modalités précises : il s’agit de recueillir l’ensemble des informations permettant d’établir un arbre généalogique pour ensuite expliquer les conséquences de la maladie en termes d’état de santé, de soin et de prévention, mais également de transmission de la mutation au sein de la famille et d’obligation d’informer les apparentés en cas de maladies graves pour lesquelles il existe des mesures de prévention et de soin, ou pour des projets parentaux. Cette consultation de conseil génétique peut déboucher sur un prélèvement afin de réaliser une analyse génétique, après recueil du consentement de la personne.2 Cependant, nous l’avons vu, notre rapport à la génétique est marqué par de nombreuses peurs et de fantasmes : Prédire son avenir pour le maîtriser ou même le transformer. Nous voilà entre un désir légitime de ne pas souffrir et une utopie de maîtrise guidée par certaines idéologies : mieux soigner ou envisager une santé parfaite et construire Le Meilleur des mondes3 ? Se vit ici un déplacement du champ décisionnel de la naissance au prénatal, du soin à la prévention et à la prédiction. Est-ce un 1 www.senat.fr 2 Zordan C. et alli., « Aspects réglementaires du diagnostic génétique en France », médecine/sciences, 2018 ; 34 (hors- série n° 2) : pp.13-5. 3 Huxley A., « Le Meilleur des Mondes, » Paris, Plon, « Pocket », [1932 – 1946] 2005. Page 95 sur 150
changement de paradigme de la médecine ? « Dans un tel contexte, chacun des membres de la famille est amené à s'interroger sur son désir de savoir s'il est porteur, potentiel transmetteur, sur la nécessité de parler du risque familial avec les ascendants, les collatéraux et les descendants. La menace d'une maladie à venir peut induire des représentations de pertes futures, amenant parfois à une sorte de mélancolisation, comme si la perte de l'avenir était un savoir absolu et déjà réalisé, non seulement pour soi, mais aussi pour les autres membres de la famille »1. Ce traitement personnalisé, nous l’avons mis en sujet dans la prochaine question : « La médecine prédictive permet aujourd’hui de déceler les gènes porteurs des maladies génétiques. Selon-vous l’utilisation du Crispr-Cas9 afin d’enrayer la maladie est-elle souhaitable ? Préférez-vous un suivi médical accru après la naissance de l’individu possible par l’analyse de ses gènes afin de lui obtenir un traitement personnalisé ? ». Emma Del-Rey répond : « La PMA permet d’éradiquer la maladie, tous devraient avoir la liberté de ce choix. Si ce sont des solutions pour guérir oui mais il est important d’optimiser l’accompagnement du patient. », Lionel Ribes soutient également un soutien personnalisé plutôt que la recherche d’un patient zéro : « Étant une maladie héréditaire trouver le patient zéro ne me semble pas utile, mais je dis oui pour la trouver le plus vite possible ainsi que le traitement personnalisé », Carole Chehwah met en exergue l’importance de donner le choix de savoir ou non à chaque individu : « Je pense que si on peut le savoir, il faut donner le choix à chaque personne. Après étant dans une société qui culpabilise la femme, je ne sais pas si toutes voudraient savoir si elles sont atteintes. En Amérique l’association : “remember the girl” composée de femmes atteintes de maladies mais ne la transmettant pas soutient les femmes afin d’enlever ce poids de regard de la société. J’opterais pour le traitement personnalisé. », enfin, Jean Michel Dubois demande un encadrement strict de ces traitements afin d’éviter toute dérive génétique : « Pour les neurofibromatoses, l’utilisation de la PMA permet à l’enfant de ne pas être atteint. Si c'est encadré je dirais oui pour le Crispr-cas9 mais j’opterais plus pour un traitement 1 Gargiulo, Marcela, et Régine Scelles. « Famille et handicap : mutations dans les pratiques », Dialogue, vol. 200, no. 2, 2013. Page 96 sur 150
personnalisé. Je refuse le « bidouillage » génétique, j’ai confiance aux chercheurs. ». Cet encadrement personnalisé des traitements est certes intéressant mais coûte extrêmement cher car il faut qu’il soit adaptable à chaque patient. Qu’en est-il des fonds disponibles de chaque association et de leur origine ? Nous avons ainsi posé la question à nos membres associatifs : « Votre association reçoit-elle des aides financières étatiques ? », Jean Michel Dubois a répondu : « Aucune aide étatique, seulement des dons privés. », Lionel Ribes a expliqué ce manque d’aide étatique : « Pas du tout, au niveau étatique nous avons peu d’importance, les chercheurs sont victimes également de la passivité de l'État. Les maladies rares sont importantes et il faut les encadrer. Si nous pouvions prédire les maladies, cela serait la médecine de demain, un véritable espoir. » Nous avons ainsi cherché à savoir si l’Etat français délaissait volontairement la recherche contre les maladies génétiques. A la question : « Pensez-vous que l’Etat Français s'autocensure par des barrières (principe précaution / lois Bioéthiques) ou délaisse complètement ce sujet ? », M.Séralini nous répond : « Je ne pense pas que ce soit délaissé car la question de la génétique touche l'international. Je pense que le contrôle et l’éthique sont importants. Il y a une méconnaissance du sujet. » Réponse confirmée par Carole Chehwah, qui souligne que : « Pas de demande effectuée, selon les projets nous pouvons avoir un soutien indirect de l’Europe. » L’Europe permettrait un soutien plus général de la recherche. Un programme européen de très grande envergure sur les maladies rares a été lancé en janvier 2019 : l’European Joint Programme on Rare Diseases (EJP RD). Il réunit différents acteurs de la lutte contre les maladies génétiques issus de 35 pays. Coordonné par l’Inserm, ce programme est cofinancé par la Commission européenne et les Etats membres pour cinq ans, l’objectif est déjà de le pérenniser. Emma Del-Rey déplore le manque d’implication française dans la recherche, se tournant vers une union des associations et laboratoires de recherche pour financer leurs actions : « Niveau étatique non, mais certaines subventions par les mairies lors de manifestations et évènements. Je pense que la France a tourné le dos à la recherche surtout d'ordre génétique car tous nos chercheurs partent aux Etats- Unis, étant mieux payés. De plus, les maladies et les traitements sont chers, l’état a dû se désengager car nous ne sommes pas assez nombreux, c’est pour ça que nous sommes partenaires avec L’Alliance Maladies Rares afin de gagner en visibilité et en Page 97 sur 150
communication. » L’Alliance Maladies Rares a été créée le 24 février 2000 afin de faire entendre la voix de 3 Millions de Français touchés par les maladies rares. Une maladie rare touche moins de 5 personnes sur 10 000 en population générale et environ 80% d'entre elles sont de cause génétique. Chacune des 240 associations luttant contre ces maladies représentent trop peu de malades pour intéresser les pouvoirs publics, la médecine, la recherche, l’industrie pharmaceutique. « Elle lutte pour une société équitable où la participation citoyenne de chacun et l’alliance de tous font avancer l’intérêt général, la solidarité et la connaissance. »1 Cette alliance fait elle-même partie de La Fondation Maladies Rares, créée le 7 février 2012 par décret du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Elle a été fondée par l’AFM ('Association française contre les myopathies) -Téléthon, L’Alliance Maladies Rares, l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), la Conférence des Directeurs Généraux de Centres Hospitaliers Universitaires et la Conférence des Présidents d’Université. Ensemble, ils coordonnent la recherche à l’échelle nationale, financent les projets scientifiques, permettent une meilleure accessibilité aux plateformes technologiques, la création et le maintien de base de données nationales (importance du Big Data), tout en servant de passerelle entre les chercheurs académiques, les associations de personnes atteintes de ces maladies, les Hôpitaux et l’industrie pour le développement de thérapies innovantes, mais aussi représentent la France dans les projets Européens et internationaux dans le domaine de la génétique et du traitement des Maladies Rares. Les différents tests génétiques ont été cités dans le Rapport du Comité international de bioéthique de l'UNESCO (CIB) de 1994, il comprend la génétique prénatale qui permet de diagnostiquer les maladies rares avant la naissance de l’individu, l’oncogénétique, qui se consacre aux risques de cancers d’origine génétique et à la prévention dans les familles à l’aide de suivi renforcé et de chirurgie de réduction de risque, la neurogénétique, qui touche les maladies musculaires et neurologiques comme Alzheimer, les dystrophies, la maladie de Huntington ou encore certaines formes d’épilepsie, la cardiogénétique qui se consacre aux maladies cardiaques héréditaires telles que l’hypertrophie cardiomyopathique, les arythmies ou le syndrome du 1 alliance-maladies-rares.org Page 98 sur 150
QT long, enfin, la génétique moléculaire et la cytogénétique qui ont recours aux analyses de laboratoire pour perfectionner des tests diagnostiques et identifier de nouvelles mutations génétiques. Il s’agit ensuite de rappeler que le droit français régit dans les articles L.2131-1 et suivants du code de la santé publique1 ces techniques de dépistage : L’examen ne peut être effectué qu’à des fins médicales, judiciaires ou de recherche scientifique, l’usage récréatif étant illégal en France (contrairement aux Etats-Unis), dans des laboratoires autorisés uniquement et avec l’accord de la personne concerné ou de ses représentant s’il est mineur. Afin d’élaborer ces tests et leurs potentiels traitements thérapeutiques associés, différents laboratoires et centres de recherche médicale ont vu la nécessité de s’unir pour mieux fonctionner. Le premier Téléthon en 1987 a par exemple donné le financement nécessaire à l’AFM pour créer en 1990 le laboratoire Généthon, le pionnier de la génétique, dont l’objectif est de cartographier le génome humain afin de découvrir les gènes responsables de maladies génétiques et ainsi créer des thérapies adéquates. Après avoir publié plusieurs cartes du génome humain entre 1992 et 1996, Généthon s’attaque à la thérapie génique dès 1997, en s’associant dès 1998 avec le laboratoire nantais de thérapie génique et l’Institut marseillais Paoli-Calmettes dans le réseau Gène Vector Production Network (GVPN), puis en mettant leurs ressources en commun avec la Harvard Medical School dès 1999 afin de délivrer plus de 2500 vecteurs à 370 équipes françaises et étrangères au début des années 2000. Un vecteur génique est le moyen de transporter un gène thérapeutique dans le génome d’un individu. Dès 2002, Généthon traite des maladies du système immunitaire et du muscle grâce à sa thérapie génique, qu’il peut fabriquer dès 2005 et tester sur l’Homme dès 2006, pour une maladie rare du muscle en Europe, la gamma-sarcoglycanopathie, puis dès 2010, pour le déficit immunitaire sévère du syndrome de Wiskott-Aldrich (WAS). En 2015, le laboratoire démontre son efficacité chez 6 enfants traités qui ont vu leur système immunitaire rétabli et leur état clinique s’améliorer. 13 traitements thérapeutiques ont déjà été développés par Généthon seul ou en collaboration avec des partenaires, et sont aujourd’hui en essai clinique à travers le monde pour des maladies rares de la vision, du foie, du sang, du système immunitaire et du muscle. Ainsi, les relations entre patients, chercheurs et l’Etat 1 legifrance.gouv.fr Page 99 sur 150
Français sont extrêmement complexes et font intervenir de très nombreux acteurs. L’individu lambda se retrouve souvent isolé face à la maladie génétique à cause d’un manque de connaissance et de communication sur le sujet, d’un trop faible nombre de spécialistes et de fonds qui auraient dû permettre un accompagnement et un soutien entre la décision du dépistage et la décision du traitement thérapeutique. Si les centres de recherches se sont progressivement unis aux associations de personnes touchées par ces maladies rares à partir de la fin des années 1990, il reste encore beaucoup de travail sur la communication effective des enjeux éthiques et sanitaires derrière la médecine génétique et la génomique. Les enjeux informationnels et communicationnels sont ainsi au cœur de notre problématique. Les enjeux informationnels et communications : source de bénéfice ? Dans notre composition nous avons abordé l’approche historique de la médecine et des apports technologiques qui ont pu contribuer à un accompagnement et une guérison optimale. La technologie par plusieurs moyens a permis une complémentarité entre les connaissances des chercheurs et sa capacité de calcul. Aujourd’hui il serait impossible de dissocier ce duo. L’utilisation de la technologie n’a pas uniquement pour ordre de permettre un soin optimal mais d’apporter un soulagement envers le corps médical par la numérisation du dossier médical et des ordonnances. Depuis la création de l’ordinateur la médecine possède de véritables informations intimes de chaque individu et l’état Français met un point d’honneur sur l’importance du secret. Cependant les envies/actions entreprit par le Plan France Médecine Génomique 2025 dans l’espoir de développer une médecine personnalisée ne risque pas d’aller à l’encontre de ce secret ? « A ce jour, l'interprétation des données issues du séquençage des génomes entiers reste un vrai défi. Si l'on met à part les maladies dites « monogéniques », très rares, il est encore difficile de trouver à la plupart de ces données une signification claire en termes de santé. Parallèlement, ces données circulent toujours plus, notamment à l'échelle internationale entre équipes de recherche, ce qui est heureux mais potentiellement problématique, car leur anonymisation Page 100 sur 150
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