SOCIÉTÉ SOS WORK ADDICT ! MUSIQUE FOREVER BOWIE MAKE-UP EN COULISSE CHEZ ARMANI COUTURE BIJOUX MESSIKA, LA GRIFFE MODE ACCESSIBLE EVASION LES ELDORADOS FASHION Spécial MODE Pois, franges, couleurs…Laissez place au style ! NOS SIGNATURES: FRANCIS KURKDJIAN, DANIEL ROSSELAT, JULIEN FAVREAU, ALEXIS GEORGACOPOULOS, FRÉDÉRIC MAIRE, HERVÉ LOICHEMOL, BENOÎT VIOLIER, THIBAUT PANAS 137
REHAUSSEZ VOS TRAITS, REDÉFINISSEZ VOTRE BEAUTÉ. NOUVEAU RÉNERGIE MULTI-LIFT TECHNOLOGIE [UP-COHESION]™ FERMETÉ – CONTOURS – ANTI-RIDES NOUVELLE TEXTURE LÉGÈRE Fraîche et fondante Découverte : Dans l’espace, la peau subit une perte de fermeté accélérée. Inspiré de la biologie spatiale, Lancôme crée son premier soin lifting enrichi de la technologie [UP-COHESION] pour améliorer la fermeté et redéfinir les contours ™ du visage. Résultats visibles : les traits sont rehaussés de manière mesurable, la peau paraît plus dense, comme refibrée, les rides semblent visiblement réduites. Contours redéfinis, peau plus éclatante : confiance renforcée dans le futur de votre peau. 2 autres textures sont également disponibles dans la gamme Rénergie Multi-Lift : crème et crème riche. DP-ProfilFemme_RenergieML.indd 1 19.03.15 16:18
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SOMMAIRE MODE p.56 Let’s Dance © VINCENT CALMEL Narciso, cet esthète, p. 38 • Falling in love, p. 41 • Moodboard, p. 42 • Un week-end à Paris, p. 46 INTRO Edito, p. 8 • Courrier des lecteurs, p. 10 • Accessoires mais indispensables, p. 12 • Masterpiece, p. 13 • Places to be, p. 14 • L’épingleur épinglé, p. 16 SOCIÉTÉ SOS Work Addict!, p. 18 • Les nouveaux princes charmants, p. 20 • Le blog buzzeur, p. 22 CULTURE L’agenda culturel, p. 24 • Billet : le lever de rideau d’Hervé Loichemol, p. 25 • 30 bougies pour le musée de la photo, p. 26 Billet: les petits pas de danse de Julien Favreau, p. 27 • Les histoires de l’acrylique, p. 28 • Coupable d’être devenue humoriste, p. 29 Musique, Lisa Simone se dévoile au Cully Jazz, p. 30 • Billet : paroles de mélomane de Daniel Rossellat, p. 31 • Bowie « s’exhibe » à Paris, p. 32 Billet : le coup de projo de Frédéric Maire, p. 35 INTRO 5 Profil 137
BEAUTÉ p.72 Dans le petit monde d’Alexander Wang © COTY Beauté en rafale, p.68 • Billet : coup de fragrance de Francis Kurkdjian, p.69 • Détox ou pas détox, p.70 • Dans le petit monde d’Alexander Wang, p.72 Dans les coulisses du défilé Giorgio Armani Privé, p.74 MONTRES - BIJOUX Vitrine : plus d’un tour dans sa manchette, p. 78 • Messika: Girls’ best friend, p. 80 DESIGN Archi Design, p. 84 • Billet : les coups de cœur art & design d’Alexis Georgacopoulos, p. 85 Rencontre avec le designer Christoph Hefti, p. 86 ART DE VIVRE La recette de Benoît Violier, p. 90 • Billet : le nez de Thibaut Panas, p. 92 • Zurich, Londres : les eldorados fashion, p. 94 Insta style, p. 98 • Adresses, p. 99 INTRO Profil 137 6
ÉDITO Par Lucie Notari, rédactrice en chef Un certain sens du style ponse par la négative semble être une évidence. Un cirque qui offre C’était en février dernier, à Milan. Comme depuis plusieurs an- la désagréable image d’une extrême nées, ma valise (un peu trop pleine, bien évidemment) roulait superficialité à une industrie pour- sur le bitume italien direction : un joli studio, mon QG durant tant faite de multiples savoir-faire de quelques jours. J’aime la sensation que j’éprouve à chaque fois qualité, et qui crée, accessoirement, que je me rends aux Fashion Weeks, mon esprit est alors en to- un nombre considérable d’emplois tale contradiction : un doux mélange d’excitation à la découverte et nourrit l’économie de certains des nouvelles collections, un plaisir aussi de revoir et de discu- pays. Car moi, ce que j’ai vu à Milan, © DENIS HAYOUN ter avec des personnes que je ne côtoie que durant les Fashion c’est un défilé Prada durant lequel, Weeks. Et paradoxalement, il y a également une certaine per- la visionnaire qu’est Miuccia Prada plexité face à des situations que je juge ridicules. Avec l’arrivée a réussi à bluffer l’assemblée avec massive des bloggeuses et bloggeurs – un métier 2.0 qui mérite des tissus trompe-l’œil. Un show Max Mara qui est parvenu à indéniablement sa place dans le paysage médiatique - il y a aussi faire revivre l’âge d’or du cinéma, une collection Fay touchante la venue d’un certain nombre de m’as-tu-vu. Lorsque vous arri- de par la minutie des découpes de chaque pièce. Mais aussi et vez avec joie aux premiers défilés des griffes italiennes, les shows surtout, des silhouettes d’une grande créativité, des stylistes vi- se font, avant d’avoir lieu dans les salles…dans la rue. D’ailleurs, sionnaires et des tenues réalisées avec passion par des artisans vous pourriez sans problème rester sur le trottoir durant une aux doigts de fée. Ce nouveau Profil est dédié à celles et ceux bonne dizaine de minutes, tellement le spectacle est fascinant. qui partagent ma vision de la mode, aux amateurs de bon goût, Sur place, plusieurs photographes dégainent leur mode rafale aux amoureux de belles étoffes. Vous y trouverez les silhouettes et leurs flashs pour shooter ces « personnalités » qui s’exhibent phares du printemps : des tenues d’une allure folle qui ont le devant les sacro-saintes portes des défilés*. Et le palmarès des mérite d’enjoliver le corps des femmes. Car comme le disait si gens les plus photographiées va…aux accoutrements les plus justement Coco Chanel : « Si une femme est mal habillée, on improbables. De la fille « parée » d’un micro-chihuahua teint remarque sa robe, mais si elle est impeccablement vêtue, c’est de la même couleur que ses cheveux en passant par des femmes elle que l’on remarque. » vêtues de robes lego…on assiste à un spectacle au cours duquel Lady Gaga pourrait presque passer inaperçue! Une situation Bonne lecture à vous. que je trouve personnellement terriblement triste. Le comble du bon goût serait-il cette foire aux vanités frôlant le ridicule ? *En effet, la plupart de ces fashion victims portant des affublements à faire Est-ce qu’une industrie qui fait vivre des milliers de personnes pâlir d’envie Cruella d’Enfer ne sont, pour la plupart, pas invitées aux défilés. à travers le monde désire véhiculer ce genre d’image ? La ré- Elles viennent uniquement se faire photographier à l’entrée des shows. LES TROIS INCONTOURNABLES DU MAG Un week-end à Paris, notre Zurich et Londres, deux villes shooting à l’atmosphère qui regorgent de créativité hitchcockienne réalisé à Paris Rencontre avec Narciso Rodriguez, l’homme qui habille Michelle Obama p.38 p.46 p.94 © SHISEIDO © QUENTIN LEGALLO © NICO SCHAERER INTRO Profil 137 8
T4-1377 SUIZA PROFIL 30-04.indd 1 10/4/15 13:59
ÉCRIVEZ NOUS! SOCIÉTÉ SOS WORK ADDICT ! MUSIQUE FOREVER BOWIE MAKEUP EN COULISSE CHEZ ARMANI COUTURE Cher Profil, BIJOUX MESSIKA, LA GRIFFE MODE ACCESSIBLE EVASION La vie est faite de plaisirs simples à savourer au jour le jour. Prendre le temps pour LES ELDORADOS FASHION une petite lecture et pouvoir s’évader un instant fait beaucoup de bien, merci ! Tu as Spécial cette étonnante capacité à proposer des thèmes variés pour satisfaire les goûts et envies du moment. Des articles de société pour la réflexion, de la mode MODE pour la tendance, du luxe pour rêver, de la gastronomie pour saliver, de la nature pour voyager, et j’en passe. Ce doux mélange de plumes m’apporte Courrier des lecteurs Pois, franges, couleurs…Laissez place au style ! légèreté et gaieté. C’est L’ART de vivre ! NOS SIGNATURES: FRANCIS KURKDJIAN, DANIEL ROSSELAT, JULIEN FAVREAU, ALEXIS GEORGACOPOULOS, FRÉDÉRIC MAIRE, HERVÉ LOICHEMOL, BENOÎT VIOLIER, THIBAUT PANAS 137 Stéfanie Huapaya …Et gagnez... Agathe, de l’agence VIP porte un Une montre Ladies Ikon, Boss Watches chemisier et une jupe perforée en co- ton Michael Kors. Photographe Vincent d’une valeur de Fr. 465.- Calmel. Coiffure Quentin Lafforgue le Bal des Créateurs pour l’Oréal Paris. Mise en beauté Danielle Savino pour l’Oréal Paris avec la base de teint Skin Perfection sérum correcteur peau parfaite, Studio secrets base lissante resurfaçante, le teint IN- FAILLIBLE MAT 24 h n0 20 sable, Lumi Magique, stylo touche de lumière n03, le blush 90 Rose éclat et les sourcils avec Brow Artist Genius kit et Brow Artist Plumper transparent. Pour le regard, la © DR palette Nude 02 beige et le mascara False Lash Superstar (black). Pour les lèvres, Rouge Infaillible 404, le tout l’Oréal Paris. Félicitations à Stéfanie, l’heureuse gagnante de cette montre qui, c’est certain, ne la quittera pas cet été ! Profil lui fait gagner ce chronographe Ladies Ikon de Boss Watches en PVD or rose avec un diamètre de 38 mm. Un accessoire indispensable qui apportera à son poignet élégance et modernité. Alors qu’attendez-vous pour nous écrire? Le mois prochain, écrivez-nous à [email protected] pour remporter © DR une paire de lunettes d’une valeur de Fr. 190.-, signée Ray-Ban. Nos coups de cœur, vos envies & des concours, suivez Profil sur Facebook: www.facebook.com/profilmag ÉDITEUR AGEFI SA DIRECTION CEO OLIVIER BLOCH, [email protected] RÉDACTRICE EN CHEF LUCIE NOTARI, [email protected] JOURNALISTE DANNY BAUMANN, [email protected] ADMINISTRATION AGEFI SA, RUE DE GENÈVE 17, CASE POSTALE 5031, 1003 LAUSANNE, TÉL. 021 331 41 41, WWW.AGEFI.COM RÉDACTEURS EXCLUSIFS DANIEL ROSSELAT, FRANCIS KURKDJIAN, BENOÎT VIOLIER, JULIEN FAVREAU, ALEXIS GEORGACOPOULOS, FRÉDÉRIC MAIRE, HERVÉ LOICHEMOL, THIBAUT PANAS CONTRIBUTEURS SYLVIE ULMANN, JULIE DE LOS RIOS, EDITH JEAN, DIDIER BONVIN, RÉMY HAAS, RODOLPH DE MARCO, JORGE S.B.GUEIRRERO, JEANNE DUBUIS, ALEXANDRE LEVEAU, LENAKA PHOTOGRAPHY, GAËLLE SINNASSAMY, CHANTAL-ANNE JACOT, JULIETTE VERGNAUD, VINCENT CALMEL, QUENTIN LEGALLO, MATHIEU SOLAL GRAPHISME BENJAMIN PICHONNAZ, WWW.LAPROD.TV STAGIAIRE GRAPHISME TIAGO LAMEIRO, WWW.LAPROD.TV CONTRÔLE GRAPHISME SIGRID VAN HOVE, [email protected] SECRÉTAIRE DE RÉDACTION RÉMY ARNAUD, REMYARNAUDHAAS4@ GMAIL.COM RESPONSABLE MARKETING KHADIJA HEMMA, [email protected] FINANCES CAROLE BOMMOTTET, [email protected], PATRICIA CHEVALLEY, [email protected] ABONNEMENTS JESSICA MAQUELIN, RUE DE GENÈVE 17, CASE POSTALE 5031, 1002 LAUSANNE, [email protected], SUISSE FR. 29 .-, ÉTRANGER 29 €, ( FRAIS DE PORT INCLUS + TVA 2,5 % INCL. ) PUBLICITÉ SUISSE NATHALIE DI RITO, N.DIRITO@ AGEFI.COM AGEFI SA TÉL. 021 331 41 24 PUBLICITÉ ITALIE STUDIO VILLA MEDIA PROMOTION S.R.L., [email protected], VIA LUCA COMERIO 1, I-20145 MILANO, ITALIE, TEL +39 (0)2 311 662 PUBLICITÉ FRANCE AFFINITY MEDIA, [email protected], 53 RUE DE MAUBEUGE, F-75009 PARIS, FRANCE, TEL. +33 (0)1 53 05 94 04 PUBLICITÉ BENELUX MEDIACONTACT INTERNATIONAL, [email protected], AVENUE BRUGMANN 157, B-1190 BRUXELLES, BELGIUM, TEL. +32 (0)2 343 43 71 PUBLICITÉ GRANDE-BRETAGNE PRIME MEDIA INTERNATIONAL, [email protected], 31, OLD COMPTON STREET, GB-LONDON, W1D 5JT, TEL: +44 207 2872904 IMPRESSION KLIEMO PRINTING, WWW.KLIEMO.BE PARUTIONS 7 X PAR AN DIFFUSION NAVILLE SA ET VALORA AG. PRIX : FR. 4.80 . ( TVA 2,5 % INCL. ). MAGAZINE ADRESSÉ EN PARTIE AUX ADHÉRENTS DU MAMCO À GENÈVE, DU THÉÂTRE VIDY ET DU MUSÉE DE L’ELYSÉE À LAUSANNE, DU MUSEE DE L’ART BRUT A LAUSANNE COPYRIGHT ©. LA RÉDACTION DÉCLINE TOUTE RESPONSABILITÉ POUR LES MANUSCRITS ET PHOTOS QUI LUI SONT ENVOYÉS DIRECTEMENT. LES TEXTES DES JOURNALISTES HORS DE LA RÉDACTION NE PEUVENT ENGAGER LA RESPONSABILITÉ DU MAGAZINE. TOUTE REPRODUCTION, MÊME PARTIELLE, DES ARTICLES ET ILLUSTRATIONS PUBLIÉS EST INTERDITE, SAUF AUTORISATION ÉCRITE DE LA RÉDACTION. ISSN 1661-2248 INTRO Profil 137 10
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ACCESSOIRES Parmi la myriade d’objets et d’accessoires disponibles MAIS INDISPENSABLES dans les échoppes les plus branchées, notre rédaction a sélectionné ses must-have. Par Danny Baumann et Lucie Notari L’art d’avoir du chien Un peu d’humour dans ce monde de brutes. Jimmy Choo lance une collection capsule en mettant à l’honneur les illustrations de Rafael Mantesso, artiste brésilien mondia- lement connu pour faire poser, notamment via son compte Instagram, son bull terrier de compétition avec de multiples poses décalées voire insolites. Sandra Choi, la directrice artistique de la marque Jimmy Choo, a été séduite par la façon dont l’illustrateur donne vie à © JIMMY CHOO son chien afin de créer des scènes amusantes. Le résultat ? Une collection composée de cabas, pochettes zippées, sacs à mains et étuis pour iPhone avec l’animal, posant par exemple sur un divan. Et comment il s’appelle le joli toutou ? Jimmy Choo, évidemment. Collection bull terrier de Rafael Mantesso pour Jimmy Choo, dès Frs. 55.-, en vente en exclu chez Jimmy Choo, Rue du Rhône 30, 1204 Genève BACK TO THE FUTURE Prenez une maison de mode légendaire et avant-gardiste, créez une collaboration avec l’une des plus respectables marques de maquillage : cela donne… un mariage pop et futuriste de Courrèges - Estée Lauder. La collection en édition limitée, composée de 13 produits s’inspire de l’atmosphère joyeuse des années 1960. Faux cils, ombres à paupières audacieuses allant du métallisé au vert menthe et, l’incontournable eyeliner blanc, signature de l’époque Twiggy. Petit plus, les écrins des produits comportent tous la signature de la fameuse griffe parisienne au travers de formes boules et de teintes métallisées. Des produits sur lesquels on craque pour un printemps tout en couleur ! Collection Courrèges Estée Lauder, 13 produits en édition limitée, dès Frs. 28.-, disponible dans les parfumeries représentant Estée Lauder © ESTÉE LAUDER COLORFULL Histoire d’afficher un look radieux même lors des jours pluvieux, Cartier lance le sac C de Cartier dans 8 couleurs qui ne manquent pas de caractère. Allant des poudrés comme le gris souris ou le rose layette, à une palette plus flamboyante telle que le turquoise méditerranéen ou le mandarine, chaque femme trouvera la pièce qui habillera élégamment son bras. Une palette acidulée imaginée pour la maison par l’une des plus anciennes tanneries françaises créée en 1803. Et comme l’important est dans le détail, le sac est doté de surpiqûres selliers ton sur ton, de la signa- © CARTIER ture de Cartier marquée à chaud et de tranches teintées à la main. Un vrai petit bijou de maroquinerie. Sac C de Cartier, disponible en 8 couleurs, dès Frs. 2’160 INTRO Profil 137 12
MASTER Les pièces stars de la saison donnent envie de faire chauffer la carte de crédit. Couleurs vives, jeux de PIECE matières, réinterprétations… Les accessoires et tenues de cet été misent sur la différence pour se faire remarquer… à tous les coups. Show devant ! Par Lucie Notari SANDALE HAUTE MULTI BRIDE « TRIO » EN CUIR COULEUR PASTEL Pierre Hardy, Fr. 903.- PLIAGE « HÉRITAGE LUXE » EN FOURRURE DE VEAU Longchamp, Fr. 1’510.- POLO ET SHORT EN CUIR Dsquared2, prix sur demande BALLERINES « GOMMETTE T-SHIRT POIS » EN VERNIS LUXOR Roger Vivier, Euros 490.- SAC SERPENTI FOREVER FRENCH VANILLA EN CUIR BVLGARI Fr.2’050.- ESPADRILLES EN SHOCKING ROSE PÂLE ORNÉE DE BRODERIES FLORALES VINTAGE Christian Dior, Euros 590.- © DR INTRO 13 Profil 137
PLACES Baroush restaurant TO BE Carrefour de Rive 1, 1207 Genève www.baroush.ch Par Danny Baumann Voyage oriental Envie d’évasion ? L’envoûtant Baroush Restaurant est l’endroit idéal pour savourer de la cuisine aux saveurs libano-marocaines. © BAROUSH RESTAURANT Les couscous faits maison et les incontournables Mezzés libanais dont le traditionnel chich taouk Ce qu’on a adoré : (brochettes de poulet marinés à l’ail) concoctés par le Chef Michel Daher. Temps Forts, avenue de la Gare 1, ArtShop, Rue du Flon 8 1003 Lausanne Quartier Rôtillon, 1003 Lausanne www.temps-forts.ch www.the-art-shop.ch ARTISTIQUEMENT VÔTRE Un vent nouveau souffle sur l’art lausannois. La galerie ArtShop dépose ses toiles en plein cœur du quartier du Rôtillon de Lausanne. Sa fondatrice, Virginie Bridy, nous emmène dans ce nouvel univers et répond à Profil. Tour de piste… © DR Profil : Expliquez-nous le concept d’ArtShop ? TANDEM Virginie Bridy : C’est une galerie qui tend à une démocratisation de l’art. A cet effet, nous avons joué sur un espace très modulable. Nous effectuons un tournus Dans un tout nouvel écrin raffiné et spacieux de toutes les trois semaines. Pour ce faire, nous pouvons compter sur un team de 12 artistes suisses. Et, chaque mois, 140m2, la boutique Temps Forts prend un envol un artiste d’envergure internationale nous fait l’honneur audacieux. La propriétaire, Marisa Zeraschi, de la présence de ses œuvres. En ce moment, il s’agit du plasticien Victor Vasarely. qui habille les femmes depuis 16 ans se lance un nouveau défi : vêtir les hommes, histoire de faire son Comment sélectionnez-vous les artistes présents dans votre galerie ? shopping à deux. En bonus, un espace détente et de En fonction de mes coups de cœur. Certains artistes sont des personnes que j’ai déjà côtoyées et d’autres que je nouvelles marques attendent ces dames. trouve sur les réseaux sociaux ou internet. © DR INTRO Profil 137 14
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L’ÉPINGLEUR Antoine Jaquier, en un roman, est devenu le phénomène de la littérature romande. Son ÉPINGLÉ livre « Ils sont tous morts » est en cours d’adaptation pour le grand écran, scénarisé par Frédéric Recrosio. Son nouveau roman « Avec les chiens » sort cet été. Il sera question d’un tueur d’enfants trop vite libéré. Aujourd’hui il se prête au jeu des questions / Par Didier Bonvin réponses, sans langue de bois ! Profil : Tu t'attendais à un tel succès ? Antoine Jaquier : Je ne m'attendais à rien. J'ai failli publier à compte d'auteur car je © NADIA CORTELLESI ne trouvais pas d'éditeur à Paris. Ça aide la vente d'avoir une bonne gueule et d'être couvert de tatoos ? J'ai l'impression que ça fait partie des raisons qui expliquent l'émulation. Un auteur renfrogné qui ne sort jamais don- nera moins envie d'acheter son bouquin. On a choisi de mettre, sur la quatrième de couv', une photo où on voit mes tatouages. On ne saura jamais ce qu’il se serait passé si j'étais apparu en costard sur cette photo. Déjà un second livre cette année, c'est quoi ton secret ? Tu te drogues ? Vu le succès du premier, l'euphorie m'a boosté. Quand « Ils sont tous morts » est sorti, ça faisait déjà six mois que je bos- sais sur le deuxième. Je bosse le soir et le week-end. Je suis comme un accro au fitness ou à la musique, écrire c'est ma passion. Du moment que c'est un plaisir, je n'ai pas de problème de discipline. Tu es plutôt sympa et souriant comme mec, comment tu fais pour te plonger dans de telles horreurs ? J'ai une fascination pour les faits divers, parfois on n'arrive pas à y croire telle- ment c'est glauque. Quand l'horreur d'un fait divers n'est pas crédible, en faire une fiction permet parfois d'y croire. Tu suis un atelier d'écriture avec Philippe Djian, ça t'aide ? Je me suis amélioré en terme de style, ça se remarquera dans le deuxième livre. J'ai pris tout ce que Djian pouvait me donner pour apporter plus de plaisir au lecteur. Bien écrire ça s'apprend. J’ai une Ça se passe bien l'adaptation du film avec Frédéric Recrosio ? fascination Je le connaissais en tant qu'humoriste, je suis un gros fan depuis ses débuts au 2.21. C'est lui qui a eu un gros coup de coeur pour les pour le livre et qui a proposé de l'adapter à Box Production. Fred travaille seul sur faits divers le scénar', il me contacte pour des pro- blèmes techniques d'adaptation. On ne découvre mes personnages qu'au travers des pensées du narrateur, j'ai dû réécrire un peu pour qu'on les découvre traduites en actes. A paraître cet été, Avec les chiens. Tu vas apparaître dans le film ? Déjà publié aux Editions l’Age d’Homme, Tu es le premier à me poser la question. Je ne me la suis même pas posée. Ça se Ils sont tous morts d’Antoine Jaquier décidera avec le réalisateur. INTRO Profil 137 16
S OCIÉTÉ p.20 Les nouveaux princes charmants © ISTOCKPHOTO.COM - GIORGIOMTB INTRO 17 Profil 137
SOS WORK ADDICT ! Par Jeanne Dubuis On connait les addicts au shopping, au sexe ou à l’alcool mais lorsqu’il s’agit de drogués du travail, il est plus difficile de prendre le problème au sérieux. Et pourtant, ce phénomène se répand aussi vite que sournoisement et pourrait tous nous surprendre… si ce n’est pas déjà le cas. Manque de sommeil, repas écourtés, week-ends consacrés aux dossiers du bureau, le travail peut rapidement prendre le pas sur la vie privée. Connectés en permanence et toujours plus disponibles, il est temps de lever un peu le pied et de savoir si les heures passées au boulot ne risquent pas de nuire à notre santé. e vis dans un état d’épuisement qui me Eviter la compétitivité fait peur. Mais où est la excessive limite ? Impossible de Si la recherche d’une passion harmo- le dire. » Stéphanie*, nieuse pour son travail semble être la «Jtout comme une par- clef du succès, il faut éviter à tout prix tie de ses collègues, travaille de 7 heures à de développer un attachement virant à 22 heures presque tous les jours. Inquiète l’obsession. Dans certains milieux pro- pour sa santé, elle a suivi le congrès or- fessionnels, la compétitivité est très forte. ganisé par Addiction Suisse en début Devenir le meilleur, le premier, peut de- d’année à Lausanne sur le workaholism. venir un leitmotiv et favoriser la nais- À ses côtés dans la salle, des responsables sance d’une dépendance au travail. « La RH, des gestionnaires d’équipe, des méde- passion obsessive amène moins de satis- cins, psychologues et conseillers au tra- faction au travail, les relations avec les vail, mais aussi des employés de banque, collègues ne sont souvent pas très bonnes avocats, administrateurs en début tout et l’interface entre la vie professionnelle comme en fin de carrière ; le sujet inter- et privée devient très difficile à gérer » pelle à une large échelle. Cahier sur les ajoute Nathalie Houlfort. Le travail peut genoux, Stéphanie prend note des recom- apporter le sentiment d’être accepté so- mandations des spécialistes appelés au cialement, de réussir dans la vie mais pupitre. Elle souhaite proposer certains engendrer parallèlement une pression changements à l’issue de la journée : très lourde pour maintenir le cap. Le plai- « Au bureau, l’équipe a été réduite, il y sir se transforme en besoin. Les heures a énormément de travail. Je peux parler supplémentaires s’accumulent, puis le du problème à ma direction, ce qui est stress et la fatigue, jusqu’à l’épuisement. déjà bien, mais rien n’est fait pour amé- Des symptômes de dépression peuvent liorer la situation. J’ai des collègues pour apparaître, tout comme des troubles di- qui c’est plus dur. Ils stressent beaucoup, gestifs ou du sommeil, ainsi que des ma- ont de la peine à dormir. Heureusement ladies cardio-vasculaires. pour moi, j’ai toujours beaucoup de plai- sir dans mon travail. » Le plaisir, un élé- ment essentiel pour faire la différence Opéré à 38 ans entre les heures passées au bureau par « Je ressens une intense satisfaction passion ou uniquement pour répondre quand mon cerveau marche à fond et que aux exigences de la direction. Un collabo- je peux prendre des décisions rapides. Je rateur qui peut passer le même nombre peux faire cela des heures, rester éveillé d’heures supplémentaires, peu importe jusque tard dans la nuit. C’est ce qu’on les domaines sur lesquels il travaille, a de appelle le Flow. » Christian Voirol, Profes- fortes chances de correspondre à la défi- seur à la Haute Ecole Arc Santé à Neuchâ- nition du workaholic. « il faut que la pas- tel, a d’abord été ingénieur avant d’ouvrir sion soit harmonieuse, explique Nathalie un cabinet de psychologie du travail avec Houlfort, Professeur en psychologie in- celle qui deviendra son épouse. Se définis- dustrielle et organisationnelle à l’Uni- sant ouvertement comme workaholic, il versité du Québec à Montréal. Le travail a décidé de s’aménager des moments de doit être valorisant, intéressant. Surtout, pause et de détente après s’être fait opérer il faut comprendre le sens et l’importance d’une hernie discale à moins de quarante de ce que l’on fait. » En d’autres termes, ans. Ce qui le booste particulièrement savoir pour qui et pour quoi on s’active. dans son travail ? « Le plaisir de piloter, SOCIÉTÉ Profil 137 18
d’avoir de la compétence, d’être un expert Quelques pistes Δ Se fixer des objectifs dans un domaine. Et la jouissance d’avoir des solutions à apporter », répond-il. Ha- pour décrocher : raisonnables bitué à des semaines de travail de 6 ou Δ Guetter les signes 7 jours, Christian Voirol a calmé le jeu Δ Définir des plages suite à ses problèmes de santé. La pater- d’épuisement précoce nité l’a aussi fait prendre conscience de horaires sans connexion Δ Développer les l’importance de déconnecter pour être Δ S’octroyer des temps de présent et maintenir les relations avec compétences acquises ses proches. C’est ainsi que ce père de pause suffisants plutôt que chercher à se famille s’est efforcé de passer ses week- ends à la montagne pour lâcher le travail Δ Laisser les dossiers former à tout prix et et profiter des siens ! au bureau en permanence *Nom d’emprunt. Le témoin souhaite rester anonyme. Le plaisir, un élément essentiel pour faire la différence entre les heures passées au bureau par passion ou uniquement pour répondre aux exigences de la direction © ISTOCKPHOTO.COM - KNAPE SOCIÉTÉ 19 Profil 137
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LES NOUVEAUX PRINCES CHARMANTS Par Juliette Vergnaud Chevauchant rarement un cheval blanc, les princes charmants sont actuellement plus difficiles à repérer. Purs produits de la génération moderne ou fervents défenseurs des traditions ? Nous avons passé ces hommes au scanner avec l’aide de Fabienne Kraemer, psychanalyste et auteure de « Solo No Solo* ». C’est qui le prince charmant possible : « Plus personne aujourd'hui C'est le summum de la consommation mais finalement peu différent des soi- n'accepte la surprise de rencontrer d’aujourd’hui ? quelqu'un qui n'est en rien ce que l'on rées au cours desquelles les hommes re- Beau, grand, fort, intelligent. Ces qua- avait fantasmé. On choisit sur catalogue pèrent très vite qui peut les intéresser » lificatifs n’ont peut-être pas beaucoup sur des sites qui proposent à partir d'al- constate Fabienne Kraemer. évolué dans le temps, mais ils n’en- gorithmes des gens qui sont soi-disant Sébastien, connecté en permanence globent plus tout à fait la même chose. compatibles avec nous. » nous confie : « J’ai déjà rencontré plu- Si « engagement » est un mot qui a sieurs filles par l’intermédiaire de Face- toujours eu du sens, l’urgence n’est book parce qu’elles étaient des amies plus la même pour la gente masculine. De quoi il a peur d’amis. Engager la conversation est plus Ces princes charmants se sentent plus Si les princes charmants passent à leur simple par chat. » libres et moins pressés sentimentale- prochaine conquête dès les premiers ment. obstacles, ils ne supporteraient pas Arthur, 28 ans, nous avoue qu’il non plus la routine. Nos princes char- n’est pas pressé de s’installer avec mants confirment. Arthur indique par La vie à deux quelqu’un, de fonder une famille. Pire, exemple que « Se retrouver tous les Passé le cap du fantasme, com- il aurait même déjà quitté une de ses soirs et faire presque la même chose, ment se passe la réalité des ex parce qu’elle demandait plus d’in- cela me donnerait l’impression d’avoir choses au quotidien ? vestissement de sa part. pris un petit coup de vieux. » Alexandre, 22 ans : « Aujourd’hui, les couples sont On imagine toujours le couple Celui qu’on cherche plus indépendants qu’avant, on n’est fort, invincible, mais on ne laisse plus obligés de subir les désirs l’autre. » désormais Fabienne Kraemer nous alerte alors : pas de place à l’erreur. Comme le précise le Dr Kraemer : « Un Fabienne Kraemer nous affirme que « Il y a une dévalorisation de la routine, couple, c'est aussi affronter la « les jeunes femmes se tournent beau- qui est synonyme d'ennui, alors qu'elle coup vers des hommes qui en sont à devrait être apparentée à une forme réalité du quotidien ensemble leur deuxième histoire avec enfants, d'art de vivre. » et ce n'est pas toujours facile. Si parce qu'ils affichent une certaine so- Comment il les jeunes rêvent d' « amour tou- lidité. Ou alors à l'inverse, elles choi- jours », ils sont aussi hyper pru- sissent ceux qui nourrissent le plus leur communique dents et gardent toujours une imagination : des hommes beaux et Ce qui a radicalement changé, c’est bien porte de sortie. » originaux - artistes, aventuriers - mais ça : son mode d’approche. Les gens se souvent plus instables. » rencontrent en soirée, au travail, mais Sébastien, 37 ans, confie d’ail- aussi grâce à différentes applications. Et leurs que dans la plupart de ses Pourquoi il n’est plus contrairement à ceux des générations relations, il en a toujours imagi- précédentes, les hommes d’aujourd’hui comme avant sont complètement décomplexés avec né une après. Actuellement avec Il a changé parce que la vision de ces façons de faire. quelqu’un, il n’imagine pas que sa relation dure toute une vie. l’amour a changé également. Notre « Les nouveaux princes charmants sont psychanalyste nous fait comprendre sur Tinder ! Il existe dans cette appli- que la liste des critères à satisfaire est cation une forme de néo-romantisme, * Solo No Solo, quel avenir pour l’amour? infinie et que par définition, ce n'est pas aussi bizarre que cela puisse paraître. de Fabienne Kraemer, éditions puf. SOCIÉTÉ 21 Profil 137
LE BLOG Jorge S.B. Guerreiro a lancé en juin 2010 le blog jsbg.me. Devenu petit à petit un véritable webzine*, BUZZER le site couvre désormais un choix éclectique de sujets allant de la mode à la musique en passant par les voyages, le design, l’horlogerie ou encore le cinéma. Aux lectrices de Profil, il livre ses états d’ âme. Voici la page du blogueur. Par Jorge S.B. Guerreiro *Contraction des mots magazine et blog internet Le coup de cœur Voyager avec ses costumes est un vrai problème. Que l’on choisisse de les plier dans sa valise ou d’utiliser un porte-costumes séparé, la solution idéale n’existe pas. D’où l’intérêt de la proposition de la marque américaine Combatant Gentleman : un sac weekender s’ouvrant complètement pour permettre d’y transporter deux costumes et deux paires de chaussures. En le refermant, il reprend sa forme et offre encore de la place pour le reste des affaires à emporter. Son prix : $ 100 ! Encore une bonne idée du fondateur de la marque © VÊTEMENTS WEBSITE Vishaal Melwani, qui révolutionne en ce moment Le coup de gueule le marché des costumes pour homme Où va la mode? Dans le mur, probablement. Accélération du cycle en cassant les des collections, multiplication des collaborations, déconnexion totale des prix par rapport au travail nécessaire ou aux matières prix grâce à la utilisées, méthodes de marketing omniprésentes, manque d’esprit verticalisation de critique des prescripteurs d’achat : les jours de la fast-fashion © COMBATANT GENTLEMAN sont comptés. Bon débarras. Les prémices du renouveau sont sa production : il déjà visibles, comme les bibliothèques d’habits permettant la possède et tond location et l’échange de pièces belles et durables ou l’émergence de nouveaux créateurs refusant le star système, tel le collectif ses propres moutons ! anonyme français « Vêtements » qui a fait fureur à la dernière www.combatgent.com fashion week parisienne. Changement bienvenu ! www.vetementswebsite.com Le coup du rien à voir Oui, avoir des câbles qui traînent partout c’est moche ! Oui, devoir chercher en permanence une prise pour recharger son smartphone est une tare des temps modernes ! Fort de ces deux constats, Ikea lance Home Smart, une gamme de mobilier permettant de recharger son smartphone sans le connecter ! Grâce à la technologie Qi, il suffira de simplement poser téléphones ou tablettes sur une surface de recharge indiquée par une croix. Outre lampes et tables de chevet, Ikea proposera également à la vente un kit à installer sur n’importe © IKEA quel meuble. www.ikea.com SOCIÉTÉ Profil 137 22
p.32 Bowie « s’exhibe » à Paris C ULTURE © SUKITA / THE DAVID BOWIE ARCHIVE SOCIÉTÉ 23 Profil 137
L’AGENDA: ÇA SE PASSE PRÈS DE CHEZ VOUS Par Danny Baumann © BÉJART BALLET 1. 2. © THÉÂTRE DU JORAT © RED BULL FLYING ILLUSION 3. 4. © LITHOGRAPHIE « LONDON » De l’angoisse à la joie, des ténèbres à la clarté…vos sens seront tous 2. 1. Envol bluffant. Défier la gravité, est-ce possible ? Selon Isaac Etat de grâce. Après quatre années de préparation et des semaines de répétitions, la troupe du Béjart Ballet Lausanne et celle du Tokyo Newton, la loi est infaillible et pourtant le théâtre du Jorat, avec sa nouvelle pièce La Bibliothèque, nous prouve le contraire. Ballet présenteront la Neuvième Symphonie de Beethoven, du 17 La compagnie EnVol de Vevey raconte ici les mésaventures au 21 juin prochain à la patinoire de Malley à Lausanne. Ce concert dansé, crée il y a 50 ans et joué partout dans le monde, de la place cocasses de Philippe, un promoteur immobilier borné, qui souhaite raser une bibliothèque pour y construire un St-Marc de Venise aux Arènes de Vérone, est d’une modernité folle. hypermarché. Problème ? Un soir, une fois les portes fermées, sollicités durant l’heure et demie de représentation. Les 250 artistes sur scène – 80 danseurs, Philippe souhaite récupérer un livre précieux qu’il avait caché durant son enfance. Il 80 choristes et un orchestre philarmonique – vous emmèneront avec eux à travers ce tombe sur Jules, vieux gardien des lieux, qui lui demande de refaire une partie d’un jeu voyage dont le point culminant est l’Ode à la Joie composée d’après le poème de Schiller. auquel tous deux s’adonnaient autrefois. Pour la suite, la reconquête de l’imagination « Il ne s’agit pas d’un ballet, au sens commun du terme, plaqué sur une partition qui est est au cœur de la pièce avec des éléments qui se déchainent durant 80 minutes. un des sommets de la musique, mais d’une participation humaine profonde à une œuvre La Bibliothèque, Théâtre du Jorat, du 2 au 3 mai 2015. Prix : de 18.- à 58.- qui appartient à l’humanité », dixit le bien nommé Maurice Béjart, brillant fondateur de www.theatredujorat.ch sa compagnie éponyme et créateur de ce ballet. Préparez-vous à en prendre plein les yeux. La Neuvième Symphonie de Beethoven, chorégraphiée par Maurice Béjart, Patinoire de Malley du 17 au 21 juin 2015. Prix : de 25.- à 150.- www.bejart.ch Art urbain. Au 22 rue des Bains à Genève, le street art est à l’honneur. Né de la collaboration entre Nicolas Couturieux et Arnaud Hubert, cet espace présente des sélections exclusives Show devant. La breakdance débarque à Zurich. Le show Red d’art contemporain urbain. En ce mois de mai, les deux passion- Bull Flying Illusion, avec la troupe des Flying Steps - quadruple nés souhaitent nous faire découvrir deux jeunes artistes français championne du monde - vous emmène dans un show où ma- après le duo show de Gris 1 et Kan. Gris 1 manie l’art contem- gie et danse de rue s’entremêlent à la perfection. L’histoire des 4.porain d’une façon poétiquement urbaine comme personne. battles historiques entre les bons et les méchants est revisitée Kan, le second, nous fera découvrir sa collection « London », qui retrace l’histoire à merveille à travers la musique hip-hop, par les 11 danseurs des émeutes à travers le monde, avec des lithographies étonnantes. Frais et original ! 3.présents sur scène. Un show à l’américaine à ne pas manquer ! Exposition du 28 mai au 14 juillet 2015, Atelier des Bains, rue des Bains 22, Red Bull Flying Illusion, Hallenstadion, Zurich, du 5 au 7 juin 2015. 1205 Genève www.atelierdesbains.com Prix: de 61.60 à 121.90 www.flyingillusion.redbull.com CULTURE Profil 137 24
Billet LE LEVER DE RIDEAU D’HERVÉ LOICHEMOL entendu puisque la ville est aujourd’hui classée au Patrimoine mondial de l’Humanité. Je connais Sanaa par les yeux de Pasolini. Rien d’extraordinaire à ça, nous regardons toujours le monde avec les yeux d’un autre, ami, ennemi, parent, inconnu, proche ou lointain, vivant ou Directeur général de la Comédie de Genève, Hervé Loichemol mort. J’ai vu Sanaa avec les yeux de Pasolini. Son regard sur la est né en Algérie. Il fait ses études au Théâtre National de pauvreté, son ouverture pour l’inconnu, son désir d’étranger, son respect pour les humains rencontrés, son attachement à l’égalité, Strasbourg. Metteur en scène, on le retrouve au Festival sa liberté de mouvement, son horizon fraternel. J’aime la ville d’Avignon avec Hamlet-Machine de Heiner Müller ou encore que m’a légué Pasolini. L’Ecole des femmes de Molière. Aujourd’hui, pour Profil, Je désirais aller à Sanaa. Comme je rêve d’aller à Petra, à Samarcande, il nous parle de scènes de vie ou des planches à Tombouctou, à Tamanrasset, à Ghardaïa, à Zanzibar, à Medine, à Bagdad, à Kaboul, à Shiraz, à Antioche, à Qom, à Karbala, et dans qui le marquent. tant d’autres villes. Mes rêves portent la marque des années 70. Quand les intellectuels avaient une audience, quand le monde était sur le point de anaa mon amour. changer, quand l’égalité devait régner. Bien avant que Salman Je ne suis jamais allé au Yemen. C’est loin. Mais je Rushdie ne soit condamné, que les écrivains algériens soient connais les murs de Sanaa, ses énormes remparts, massacrés, et que Voltaire soit censuré . sa couleur, ses couleurs, ses maisons biscornues, ses Le monde a changé mais pas comme l’espérions. Le regard que je ruelles tortueuses, ses chemins de terre. Je connais sa porte aujourd’hui est altéré. Sanaa est désormais – aussi – la ville SBanque Nationale, son Ministère de l’information, son des frères Kouachi où ils se sont formés. Le film de Pasolini est Ministère de la Défense, son Palais du Gouvernement. Je connais sali, la carte postale déchirée, un gouffre s’est ouvert. sa vieille ville, sa forme, son profil, son architecture tourmentée Ce qui s’éloigne aujourd’hui, ce sont les lucioles de Pasolini, et paisible, ses façades ocres aux encadrements blancs. Je connais les Lumières de 68, Charlie, Tahar Djaout et combien d’autres, ses habitants, leurs vêtements, leurs chaussures, leurs pieds, fauchés par le fascisme. leurs carrioles, leurs ânes. Je connais leurs musiciens, leurs instruments, leur joie quand ils jouent. Je ne suis jamais allé En 1994, la mise en scène de la pièce de Voltaire, Le fanatisme ou Mahomet au Yemen, je ne suis jamais allé à Sanaa, mais je connais tout le prophète, prévue pour la commémoration du tricentenaire de la de Sanaa. naissance de l’auteur, avait été empêchée par les autorités de Genève et de En 1971, pendant le tournage du Décaméron au Yemen, Pasolini Ferney-Voltaire. Hervé Loichemol avait alors mis en scène Nos Fantômes, en profita pour réaliser Le Mura di Sana, documentaire d’une pièce commandée à Yves Laplace et publiée aux éditions du Seuil. Charlie quinzaine de minutes qu’il adressa à l’Unesco pour sauver Hebdo avait dénoncé l’acte de censure sur la pièce de Voltaire. cette ville de la destruction en cours. Son appel a sans doute été Sanaa : ville en clair-obscur © SHUTTERSTOCK.COM - OLEG ZNAMENSKIY CULTURE 25 Profil 137
30 BOUGIES Le Musée de l’Elysée fête cette année ses 30 ans. Avec l’arrivée d’une nouvelle directrice et le futur Pôle Muséal en ligne de POUR LE MUSÉE mire, l’institution dédiée à la boîte à images est en ébullition. DE LA PHOTO ! Rencontre avec Tatyana Franck, 30 ans (elle aussi !), nièce d’Henri Cartier-Bresson, qui a repris les rênes du Musée le 1 mars dernier. er Par Jeanne Dubuis Profil : Tatyana Franck, vous venez de té face aux nombreux projets autour du Vous évoquez le Pôle muséal. Cela va être reprendre les commandes du Musée de Musée. Je me suis mise immédiatement un très gros changement pour le Musée. l’Elysée des mains de votre prédéces- au travail, dès que j’ai appris que j’avais Cela fait beaucoup pour commencer, seur Sam Stourdzé. Comment cela se été désignée. non ? passe-t-il ? C’est une grande chance pour Lausanne, Tatyana Franck : C’est une belle aventure Vous avez annoncé vouloir vous inscrire pour le canton et la Suisse. C’est fantas- qui commence et un grand honneur pour dans l’héritage des trois directeurs qui tique des grands projets comme celui-ci ! moi d’être à ce poste depuis le 1 mars. vous ont précédée. Comment ? Quels sont La réflexion autour de ce qu’est un musée er C’est un magnifique musée avec une très vos objectifs ? de l’image est passionnante. On se permet belle équipe. La collection est fantastique. Je succède à trois grands directeurs qui de rêver, d’imaginer les espaces. Ce n’est Je suis très excitée ! ont fait beaucoup de belles choses, c’est pas en trop, au contraire, il faut prendre sûr. Aujourd’hui, il y a énormément de le train en marche ! A présent, tous les regards sont tournés projets à mettre en place. Il y a le grand vers vous. Votre jeunesse est notamment projet du Pôle muséal (ndlr : regrou- Vous avez emménagé à Lausanne, com- pointée du doigt. Mais ce qui a intéressé pement de trois musées, dont celui de ment se passe votre nouvelle vie ? le Conseil d’Etat vaudois au moment de l’Elysée, près de la gare) qui est en train Le déménagement était nécessaire. C’est votre engagement, c’est votre force de de se mettre en place. C’est un immense important d’être proche, de s’inscrire conviction. C’est comme cela que vous défi. Au Musée, nous mettons en place dans le milieu culturel lausannois. J’en vous définissez, comme une femme forte notre nouvelle stratégie numérique avec suis ravie ! et décidée ? le nouveau site pour les 30 ans. Nous Je suis une battante, une femme d’action. sommes vraiment un musée de l’image « Non » n’est jamais une réponse pour et nous aimerions partager encore plus, moi. Quand je crois à un projet, je me bats valoriser nos collections. Nous sommes jusqu’au bout. Je ne ressens pas d’anxié- dotés d’une très riche collection. Le pôle muséal est une grande chance pour Lausanne © RETO DURIET et la Suisse CULTURE Profil 137 26
Billet LES PETITS PAS DE DANSE DE JULIEN FAVREAU D’origine israélo-américaine, le chorégraphe s’est inspiré des batailles intérieures auxquelles l’humain est confronté. Grâce à des danseurs qui infusent chaque geste d’une intensité rare, ce ballet peint méticuleusement un monde à la fois délicat et violent, où chacun doit faire des compromis afin de trouver Julien Favreau est né des chaussons de danse lacés aux pieds. harmonie et équilibre. La pièce s’articule ainsi autour de l’attendrissant personnage d’Harry qui peine à maîtriser Après avoir étudié la danse classique et contemporaine © BÉJART BALLET LAUSANNE sous la direction de Colette Milner, il part rejoindre l’école- difficultés qu’il a à poursuivre ses rêves, à trouver son amour et des puissances autant réelles qu’existentielles, et montre les atelier Rudra Béjart à Lausanne, puis entre au Béjart Ballet par conséquent sa propre personne. En combinant subtilement le folklore israélien, le jazz et la musique traditionnelle avec une Lausanne. Récompensé de nombreux prix prestigieux, il danse dynamique, fluide et remplie d’humour, le chorégraphe danse aux quatre coins de la planète. Aujourd’hui, au travers illustre la capacité de l’homme à surmonter les conflits et de ses mots, il partage ses découvertes. désaccords de l’humanité. Avec peu d’artifices, quelques accessoires et beaucoup d’énergie, le travail des danseurs transpire instinctivement l’univers délicat et sophistiqué de résenté au Théâtre de Beausobre à Morges le 10 Barak Marshall ; délivrant à travers une succession haletante de Février dernier par Les Ballets Jazz de Montréal duos, trios et tableaux d’ensemble le message suivant : « La vie (BJM), le programme était composé de trois est un éternel combat où l’Homme doit continuellement faire pièces issues du répertoire de la compagnie face à des conflits culturels, de genres et d’espèces. » nord-américaine, signées par trois chorégraphes P différents. Au lieu de survoler sans trop d’élan l’ensemble de ce qui a été proposé ce soir-là, j’ai préféré m’attarder Serait-ce la mère de Barak, Madame Margalit Oved, grande sur cette découverte – ou rencontre, devrais-je dire – que fut le danseuse israélienne qui lui aurait transmis cette éblouissante ballet donné en seconde partie et intitulé « Harry ». élégance et cette théâtralité qui m’ont fait songer à Pina Bausch ? Ou bien ses différentes expériences au sein de la prestigieuse Ne sachant rien de cette compagnie si ce n’est sa réputation, Batsheva Dance Company en tant que chorégraphe résident, je savais en revanche une chose : j’allais y retrouver mon invité par Ohad Naharin ? Quoiqu’il en soit, le public amie Céline, ancienne collègue du Béjart Ballet désormais ce soir-là, jusqu’alors réservé, accueillit chaleureusement danseuse des BJM, dont le talent est incontestable sur le « Harry », sensible à cette danse ironiquement sauvage, éclatante nouveau comme l’ancien continent. Sans douter de sa qualité, et humainement passionnante. je ne m’attendais pourtant pas à avoir un réel coup de cœur Je retrouvai quant à moi mon amie côté coulisses pour la féliciter pour ce ballet d’images superbes, à l’écriture très élaborée de triomphalement de sa gracieuse performance et lui faire part Barak Marshall, spécialement créé pour les 13 danseurs de la de mon enthousiasme concernant cette chorégraphie sur le compagnie canadienne. dépassement de soi puis mon ravissement à l’idée de la revoir car oui, « Je suis Harry ». « HARRY » de Barack Marshall © RAPHAELLE BOB GARCIA CULTURE 27 Profil 137
LES HISTOIRES Le Quartier des Bains à Genève, dont Profil est partenaire, propose bon nombre de galeries qui exposent des œuvres DE L’ACRYLIQUE éclectiques issues de l’art contemporain. Focus sur la peinture acrylique, technique à la fois précise et populaire. Par Danny Baumann houchou d’Andy Warhol avec notamment l’œuvre déconstruction. La ligne blanche sépare les briques, la couleur non négligeable Campbell’s Soup Cans (1962), de celles-ci ainsi fragmentée devient plus vive, plus intense, les l’acrylique, démocratisée aux Etat-Unis début espaces blancs du mur entre les toiles augmentent encore cet ef- des années 50 à des fins artistiques, s’est rendu fet visuel, le renforçant, tout en créant un dessin spatial aussi fin rapidement l’allié indispensable des artistes. Sans que déterminé, la composition de briques devient légère et pa- C doute sa simplicité d’utilisation due à son séchage raît danser, on pourrait dire qu’elle perd sa gravité, en apparente rapide lui a-t-elle conféré des contradiction avec la lourdeur du avantages notables face à matériau représenté », nous glisse ses concurrents, parfois plus le maître des lieux. Cette œuvre complexes à manier. Warhol, appelée composition N°26 est l’incontournable, en a fait son composée de huit acryliques sur allié et a certainement aidé à toile. Le reste de l’espace est com- sa popularisation avec cette posé des autres œuvres de l’ar- fameuse sérigraphie, Cam- tiste. Réalisées également à base pbell’s Soup Cans, composée d’acrylique, elles gardent toutes la de 32 peintures en acrylique même géométrie avec des chan- (Liquitex), qui a propulsé le gements de couleurs intenses. Pop Art au rang de mouve- Du bleu au vert en passant par le ment artistique majeur aux jaune, l’artiste nous emmène dans Etats-Unis. C’est donc tout un univers hautement coloré. La naturellement que du côté de galerie Mezzanin, située rue des la Suisse, certains galeristes Maraîchers 63, expose quant à faisant partie du Quartier elle l’artiste suisse Christina Zur- des Bains exposent en 2015 fluh. Ses œuvres font référence des toiles réalisées avec ce pro- à la peinture américaine, mais cédé. C’est le cas de la galerie elle se différencie de ses surfaces Mezzanin ou encore Skopia. monochromes et des champs de La galerie Skopia, menée couleurs disposés en bandes, par de main de maitre par Christina Zurfluh la superposition de couches de M. Pierre-Henri Jaccaud de- DIVIDED violet/ pale green, 2012 couleur. L’artiste crée toujours puis 1989, propose des œuvres © CHRISTINA ZURFLUH au sol et utilise une approche signées Jean-Luc Manz, artiste Acrylique sur toile, 173 x 161 cm marquée par un jeu intense des qui vit et travaille à Lausanne. teintes utilisées, des traces de pas « Son travail est lié à la géomé- et les mouchetures blanches dont trie. Apparemment les pein- elle parsème ingénieusement ses tures de Manz ne racontent pas d’histoire, mais très discrète- toiles. L’œuvre Divided, à l’entrée de l’exposition, marque bien ment, elles dégagent une poésie et une musicalité incroyables », ces différentes techniques et démontre à merveille la capacité nous raconte M. Pierre-Henri Jaccaud. L’œuvre forte de l’expo- qu’a Christina Zurfluh à brouiller les frontières classiques entre sition ? Elle apparait comme une évidence en entrant dans la composition géométrique et geste du hasard… Aux antipodes galerie : les briques rouges, des peintures acryliques sur toile l’une de l’autre, ces deux oeuvres nous démontrent que l’acry- de M. Manz nous accueillent des deux côtés du mur. « C’est un lique permet bel et bien une expression infinie à chaque artiste, travail radical qui joue en même temps sur la construction et la et que l’art du pinceau est plus que jamais indémodable. Jean-Luc Manz, Composition no 26, 06.05.12 2012, 8 acryliques sur toile, 148 x 236 cm Référence : SKOPIA Art contemporain, 9, rue des Vieux-Grenadiers, 1205 Genève Exposition de Jean-Luc Manz jusqu’au 16 mai 2015 www.skopia.ch Galerie Mezzanin, 63, rue des Maraîchers, 1205 Genève Exposition de Christina Zurfluh et © JEAN-LUC MANZ Maureen Kaegi jusqu’au 23 mai 2015 www.galeriemezzanin.com CULTURE Profil 137 28
COUPABLE Après avoir conquis le Palais des Glaces à Paris, Caroline Vigneaux partira en tournée et sera de passage D’ÊTRE DEVENUE en Suisse au Maxi-Rires festival à Champéry le 6 juin 2015. HUMORISTE Avant d’entamer son périple, celle qui a quitté sa robe d’avocate pour embrasser une carrière d’humoriste se confie. Par Danny Baumann Profil : Votre spectacle, intitulé « Caro- ils se sont regardés bizarrement… Mais ils très sympa. Mais surtout je pourrai line Vigneaux quitte la robe », comment sont polis, ils sont restés jusqu’à la fin ! manger à nouveau du chocolat et ça, ça passe-t-on d’avocate à…humoriste ? (Rires) Je suis sortie de scène et j’ai pleuré, compte (rires) ! Caroline Vigneaux : J’ai toujours été « ri- je me disais que c’était une catastrophe ! golote » et ça a d’ailleurs souvent posé des Pour terminer, quels sont vos futurs pro- problèmes lors de réunions entre avocats Cette année vous serez au Maxi-Rires jets après ce one woman show ? (Rires) ! J’ai commencé à faire du théâtre festival… La Suisse, ça vous rappelle un Je suis en pleine écriture d’un film que avec l’association des élèves avocats pour souvenir drôle ? j’espère pouvoir tourner cet été ! Il s’agit le spectacle de fin d’année. La troupe de Ah la Suisse ! (Elle marque une pause) d’une comédie romantique dans le milieu l’UJA (union des jeunes avocats) de Paris Je suis très contente de venir jouer dans des avocats, mais je ne peux vous en dire était dans la salle et m’a proposé de les votre pays ! Vous êtes un peu comme les plus. Je réaliserai également un autre rêve rejoindre. On racontait bien évidemment belges, j’ai l’impression que vous ne vous tout prochainement : je serai à l’Olympia des blagues qui ne faisaient rire que notre prenez pas au sérieux ! C’est hyper ex- les 22-23 avril 2016 ! J’enverrai des photos milieu, un humour très corporatif ! Mais citant d’aller jouer dans d’autres pays. de mon nom inscrit à l’entrée à tous ceux ces premiers pas ont fait naître une pas- D’ailleurs, je suis déjà venue chez vous, qui n’ont pas cru en moi (Rires). sion pour moi qui s’est développée, petit au Montreux Festival, et le public était à petit durant 6 ans ! …6 ans plus tard, un mot qui définirait votre première fois sur scène ? (Elle hésite) Renaissance, non plutôt © SYLVAIN GRIPOIX révélation ! J’ai immédiatement su que j’adorais ça ! Je dois dire que depuis que j’ai changé de métier, je me sens bien plus légère ! J’ai commencé à faire du théâtre avec l’association des élèves avocats ! Sur l’affiche, vous êtes nue…Est-ce pour faire venir plus de monde ? Dans mon premier spectacle, j’incarnais une fée. Je m’étais créée ce personnage pour lui faire dire n’importe quoi, en me disant « c’est pas moi, c’est elle ». Au- jourd’hui je suis plus à l’aise et c’est une façon de montrer que c’est une vraie mise à nu pour moi. Racontez-nous une anecdote qui vous est arrivée lors de vos débuts. La pire (Rires) ! Jouer devant deux hommes dans la salle ! La règle est simple : faire son spectacle tant qu’il y a plus de monde dans la salle que sur scène... Et vu que j’étais seule, j’ai joué ! Maxi-Rires Festival, « Caroline Vigneaux quitte Dans mon spectacle à un moment donné la robe », le samedi 6 juin 2015 à 19h. Plus il y avait cette phrase ça va les filles et ce d’informations sur www.maxi-rires.ch soir là clairement elle n’a pas fonctionné, CULTURE 29 Profil 137
LISA SIMONE Elle est la preuve qu’avec de la volonté, les rêves peuvent se réaliser. Lisa Simone, fille unique de la célébrissime Nina Simone, a attendu SE DÉVOILE AU l’âge de 52 ans pour mettre de côté le poids de son héritage et CULLY JAZZ ! composer ses propres morceaux. Son premier album, All is Well, sorti en octobre 2014, est pour elle comme une libération. Quelques jours avant son passage au Cully Jazz Festival, nous avons rencontré cette Par Jeanne Dubuis femme débordante et sans tabou. Profil : Lisa Simone, pourquoi avoir at- n’attendait que ça ! En France, je n’avais Lorsque vous chantez votre album sur tendu si longtemps avant d’enregistrer pas d’équipe, pas de studio, rien, mais on scène, qu’est-ce que cela représente ce premier album alors que vous avez a fait en sorte que ça marche. Et cela a été pour vous ? baigné dans le milieu de la musique de- le cas ! Je me sens désormais à la maison Je le vis comme un rêve et je peux par- puis toujours ? en France. tager mon cœur avec le public ! C’est un Lisa Simone : Oh, c’est la vie. Nous avons cadeau. J’ai travaillé dur et maintenant je nos rêves et à côté de cela il y a la réalité. Comment s’est passé le travail autour de peux montrer qui je suis. Je n’ai aucune Ce qui est sûr, c’est que la carrière de ma l’album ? crainte sur scène ; c’est là que je dois être. mère a représenté un frein énorme. C’était comme un rêve, je me suis sentie comme une princesse. Le procédé était Vous rendez hommage à votre mère sur C’est si difficile d’être la fille d’une très spirituel. L’énergie des musiciens l’album avec le morceau Ain’t got no, I grande artiste ? était magnifique. La collaboration avec got life. Nina Simone est malgré tout tou- Cela a toujours été difficile pour moi. Et Hervé Samb, compositeur, arrangeur et jours avec vous, en vous ? c’est aussi très difficile pour le reste du guitariste était merveilleuse. Nous avons Je suis l’héritage de ma mère, c’est dans monde de me voir autrement que comme beaucoup ri et beaucoup partagé. Nous mon sang. Même si nous sommes deux la fille de. Pourtant, pendant tout ce sommes tous des grands professionnels personnes différentes, nous faisons par- temps, c’était moi ! On commence enfin dans nos domaines. tie de la même création. Je suis fière d’être à me voir comme une personne à part sa fille. Partout où je vais, je chanterai tou- entière. Aujourd’hui, vous sentez-vous libre, jours les chansons de ma mère, aux cô- comme vous le chantez dans l’album ? tés des miennes. Le public veut entendre Votre enfance a été marquée par les dé- Oui, totalement. Aujourd’hui, j’ai l’im- des chansons de Nina Simone, et qui de placements de salle de concerts en salle pression d’un renouveau. J’ai mis un mieux placé que moi pour le faire ? D’ail- de concerts, de pays en pays ; par le di- terme à mon histoire avec les Etats-Unis, leurs, je me réjouis beaucoup du concert vorce de vos parents également et une re- qui est très intimement liée au passé de au Cully Jazz. J’ai étudié à l’âge de 13 ans lation pas toujours très simple avec votre ma mère. Je n’arrivais pas à être moi- en Suisse et j’espère avoir le temps de me mère. Vous vous sentiez un peu perdue même là-bas. balader autour du Lac Léman et dans la par moment ? région lausannoise ! C’est clair que ce n’était pas facile. Il y a eu trop de changements d’écoles pour moi. Ma mère était dure, elle avait telle- ment d’engagements, de luttes à mener notamment pour les droits civiques des Noirs. Elle voulait que je fasse attention à beaucoup de choses. L’industrie de la musique lui a causé beaucoup de peine. Elle ne voulait pas que je suive ses pas, je devais juste l’observer. Je suis recon- naissante de ses choix. Je sais que c’était difficile pour elle d’être une artiste, une femme black. De mon côté, je me suis for- gée ma propre approche de la vie, avec des rires et des rêves. A l’âge de 18 ans, vous vous engagez dans l’US Air Force pendant 10 ans, avant de vous rendre compte que vous souhaitiez Je suis l’héritage chanter ! Vous êtes ensuite interprète de ma mère, et actrice dans des comédies musicales notamment. Qu’est-ce qui vous a donné c’est dans l’impulsion de finalement vous lancer en solo ? mon sang Ça a été un long chemin ! Mais pour l’al- bum, j’ai eu un déclic lorsque j’ai quitté les Etats-Unis ! C’était en 2012, j’étais à Paris pour un concert. La France avait quelque chose de triste puisque c’est dans ce pays que ma mère est morte (ndlr : en 2003). ©FRANKLORIO, AGENCEVU Mais cette fois-ci, l’ambiance était élec- trique. J’ai appelé mon époux pour lui Lisa Simone, All is Well, Jazz Laborie demander de déménager. Sa réponse ? Il CULTURE Profil 137 30
Billet PAROLES DE MÉLOMANE DE DANIEL ROSSELLAT L’an dernier je me suis laissé entraîner du côté asiatique du globe, en Chine plus précisément, en compagnie de Jacques Monnier, programmateur au Paléo. J’adore retrouver ce pays qui a une culture musicale qui invite presque à la méditation. Les Daniel Rossellat est une figure emblématique du Paléo gens sont très peu démonstratifs mais ils cachent une sorte de pudeur que je trouve remarquable. Durant certains concerts, les Festival Nyon. Depuis ses débuts en 1976, il se dévoue corps gens sont silencieux de bout en bout, même entre les chansons, et âme à son Festival. Aujourd’hui, il nous emmène, en et n’applaudissent qu’une fois le show terminé. Ils entrent dans compagnie de Jacques Monnier, programmateur du Paléo, une sorte de recueillement étonnant. Dans la musique tradition- à la rencontre de l’Empire du Milieu, où l’ancrage musical nelle chinoise, il se passe quelque chose d’extrasensoriel. Malgré la barrière de la langue, on écoute, notre mémoire se rattache à traditionnel est très fort. un souvenir, l’évasion est totale. Au fil des balades de festivals en festivals, nous avons eu deux véritables coups de cœur : le duo sino-néerlandais AM444 et la chanteuse Fifi Rong. Les premiers u fil des mois, des saisons, des années, les voyages donnent à entendre une musique qui résulte de la rencontre enrichissent un être. L’exode du festival est donc entre ChaCha, une figure bien connue de l’underground de également indispensable pour se ressourcer et Shanghai et Jay Soul qui lui, est un producteur très médiatisé trouver de nouvelles idées. Le Village du Monde des mégapoles chinoises. Ils offrent des sons urbains remplis qui mettra le cap cette année sur les mystères d’influences venues du monde entier, une sonorité vibrante et A de l’Extrême-Orient, nous permet de valoriser étonnante. Notre second coup de cœur va vers Fifi Rong, qui est une région du monde bercée par une culture musicale extrê- originaire de Pékin. Chanteuse, compositrice et productrice hors mement riche. Malgré les dimensions prises au fil des ans et pair, elle nous transporte et captive l’attention du public avec sa une notoriété grandissante, le festival a toujours gardé l’esprit voix si chétive, presque enfantine. Sa musique est un mélange de ses débuts : la convivialité, l’évasion et la découverte. Il est de jazz, électro, dubstep et trip hop : un régal pour les oreilles. pour nous indispensable de laisser l’artiste passer un message J’aime l’idée de ces découvertes car je suis toujours surpris par au public à travers sa représentation et ainsi, lui faire partager l’éclectisme et les talents fous qui peuplent la planète. On dit l’univers culturel de son pays. Le succès remporté chaque année souvent que la curiosité est un vilain défaut mais pour moi, en par l’espace réservé au Village du Monde me conforte dans l’idée musique, elle est une richesse. de conserver ce métissage musical au sein du festival. © BENOIT FLORENCON Le duo AM444 se produira le 20 juillet dans le Village du Monde, durant la Paléo Festival de Nyon CULTURE 31 Profil 137
BOWIE « S’EXHIBE » À PARIS Par Rémy Haas Inaugurée en fanfare en 2013 au Victoria & Albert Museum de Londres où elle bénéficia d’un succès phénoménal (plus de 300 000 visiteurs en moins de 6 mois) et après avoir sillonné Berlin, Toronto, Chicago et Sao Paulo, l’exposition itinérante BOWIE IS…se pose à la Philharmonie de Paris et devrait atteindre la barre du million de visiteurs depuis son lancement. Photographie pour la couverture de l'album Aladdin Sane, 1973 Photograph by Brian Duffy David Bowie is… everywhere der, se mélanger de façon kaléidoscopique. Par ailleurs, loin En raison de son lieu d’accueil et de sa qualité scénogra- de la « muséification », cette cathédrale pop est organisée de phique, cette exposition apparaît comme le couronnement façon non systématique, pensée intelligemment en termes d’un artiste hors-norme dont le mystère et l’œuvre pro- d’espaces où se croisent différents axes (chronologique, thé- téiforme ne cessent de nous hanter. 300 objets cultes sont matique, médiatique), faisant apparaître de radicales rup- montrés ici, parmi les quelques 75.000 que compteraient les tures musicales, visuelles et sociologiques. Expérimentant archives de Bowie. Costumes extravagants utilisés sur scène tour à tour le Glam rock, funk, soul, disco, électro, ce touche ©DUFFY ARCHIVE & THE DAVID BOWIE ARCHIVE évidemment extraits sonores: tous les univers de Bowie, de composa-t-il de multiples personnages comme autant de à tout de génie n’aura cessé de se réinventer album après ou dans ses clips, paroles de chansons manuscrites, pochettes album, érigeant sa musique en choc esthétique. Ainsi se d’albums, instruments, photos, vidéos, croquis de jeunesse et ses premiers accords de guitare au dernier album paru en masques à endosser. « J’ai essayé d’être moi-même et ça n’a 2013, en passant par ses tubes, ses influences, ses héritiers et pas marché. Alors je me suis dit que je deviendrai quelqu’un d’autre et y suis parvenu » dira-t-il. ses films sont explorés dans une exposition d’une richesse impressionnante. Multimédias, cette exposition est surtout Petit tour d’horizon en 5 étapes clefs, d’un artiste qui a une expérience ultra-sensorielle : un merveilleux système non-seulement révolutionné l’histoire de la musique mais de sonorisation permet au visiteur, muni d’un casque, de déambuler à son gré et entendre voix et chansons se succé- CULTURE également celle de la mode. Profil 137 32
1972 : « Starman » fait exploser le glam-rock Après un 1 décollage en 69 avec le fameux Space Oddity (référence au film de Kubrick er 2001 : A Space Odyssey et écho au récent alunissage de la mission Apollo), Bowie se 1. réinvente pour l’album The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars. Ziggy Stardust : « l’ultra-violence en tenue liberty » 6 juillet 1972 : la première apparition de Bowie-Ziggy interprétant Starman à l’émission britannique Top of The Pops est la plus fulgurante si ce n’est la plus culte. En Angleterre où l’homosexualité est encore largement taboue, la vision de cet extraterrestre aux cheveux rouges incandescents (sa couleur fut suggérée par sa femme Angie), vêtu d’un accoutrement martien, est restée dans toutes les mémoires. Interrogeant tous les genres, queer avant la lettre, il provoque dans la seconde une fracture générationnelle ouverte entre les vieux conservateurs outrés et leurs enfants qui, subjugués, trouvèrent en Bowie leur nouveau leader. Véritable électrochoc, cette performance va changer la face du rock anglais. Réalisé par Freddie Buretti pour la tournée Ziggy Stardust et porté lors de l’émission, cet ensemble veste-pantalon ajusté a été inspiré au chanteur par le film Orange Mécanique de Stanley Kubrick. Bowie a décrit cette tenue comme de «l’ultra-violence en tissu liberty». Kate Moss, look Ziggy et photographiée par Mert & Marcus fit la couverture du magazine Vogue Paris (décembre-janvier 2012). Ce look, qui marque l’apothéose du style Glam Rock sera également revisité par Jean Paul Gaultier lors de son défilé prêt- à-porter printemps été 2013, hommage aux icônes pop. © DUFFY ARCHIVE 2. 1973 : pochette Aladdin Sane : « Mona Lisa of the pop » (cf photo page précédente) et combinaison « Tokyo pop » Fruit d’une première collaboration avec le déjà très célèbre photographe britannique Brian Duffy (surnommé « The Man who shot the 60’s »), la pochette de l’album Aladdin Sane qui montre le visage de Bowie zébré par un éclair (de génie) entra dans l’histoire sous le nom de Mona Lisa of the Pop, tellement elle fut copiée, déclinée. Kate Moss - encore - fut métamorphosée en Aladdin Sane et photographiée par Nick Knight pour apparaître le visage zébré du fameux éclair en couverture du Vogue UK, Mai 2003. Mais toute aussi excentrique et marquante fut la combinaison «Tokyo Pop» portée en 1973 par Bowie pour sa tournée Aladdin Sane. La combinaison «Tokyo Pop» Inspirée du théâtre Kabuki, cette combinaison noire en vinyle à rayures blanches (striped bodysuit) fut créée par le japonais Kansai Yamamoto dont Bowie avait découvert le travail lors de son défilé londonien en 1971. Il s’agissait au départ © SUKITA & THE DAVID BOWIE ARCHIVE Yamamoto pour le Aladdin Sane tour, 1973. les normes sociales interférer avec ce qu’il veut faire», souligne Victoria Broackes, d’une création pour femme. Mais «Bowie ne laisse jamais les idées des autres ni commissaire de l’exposi- tion et conservateur au Victoria and Albert Mu- Costume de scène dessiné par Kansai seum à Londres. «Bowie représente une idée de li- berté : être qui l’on veut, Photographie de Masayoshi Sukita s’habiller en homme ou en femme, être homo- sexuel ou hétérosexuel, c’est un message extrêmement im- portant et libérateur». 1974-1976 : la periode soul funk « l’homme qui venait d’ailleurs » Installé à Los Angeles depuis 1974 où son album Young Americans 3.aux sonorités soul connaît un vif succès, il tourne la même année dans L’Homme qui venait d’ailleurs. Il y impose son nouveau look : cheveux orange et blonds avec raie au milieu, veste et feutre, et sort dans la foulée ce qui ressemble à une BO du film, Station to Station. L’apparence de son nouveau personnage the Thin White Duke, élégant, épuré, et qui emprunte au cabaret allemand de l’entre-deux-guerres le poursuivra jusqu’à l’album Low. Plus que quiconque, Annie Lennox d’Eurythmics, jouant sur une gémellité tout aussi androgyne, l’imitera dès l’album Sweet Dreams de 83. De même, Tilda Swinton reprendra ce look sous l’objectif de Craig McDean pour le Vogue Italia (2003), © DUFFY ARCHIVE avant d’être l’« épouse » de Bowie dans le clip The Stars are Out Tonight (2013). CULTURE 33 Profil 137
Les années 80 : Scary Monsters et la période David Bowie sur le tournage du « MTV » Le costume de Pierrot vidéo clip « Ashes to Ashes », 1980. 4.Succédant à l’expérimentale et somptueuse trilogie berlinoise Photographie de Brian Duffy. (successivement Low, Heroes et Lodger entre 1977 et 1979), l’al- bum Scary Monsters sort en 1980 et connaît un immense succès; le clip du single Ashes to Ashes passe en boucle sur la chaîne MTV alors en plein essor. Cette photo sera l’ultime collaboration avec Brian Duffy. Finalement retravaillée, peinte par Edward Bell pour devenir la pochette de l’album, on n’en perçoit plus que l’ombre. Le costume de Pierrot, mêlant style Nou- veaux Romantiques et Comedia dell’Arte fut dessiné par Natasha Korniloff qui dira : « Il voulait être le plus beau clown du cirque » ; Bowie l’endossa également pour le clip Ashes to Ashes. Sa carrière prend alors un tournant spectaculaire : ses clips côtoient ceux de Madonna et de Michael Jackson; Let’s Dance en 1983 le hisse en haut des charts et devient un tube planétaire (ses ventes atteignent les 14 millions d’exemplaires, juste derrière Thriller) et sa tournée Serious Moonlight remplit triomphalement les stades. Ne flirtant plus avec la marge et l’avant-garde, les succès mainstream et commerciaux des années 80 offrent à Bowie une visibilité mondiale. Laissant derrière lui frasques et drogues, plus sérieux et affairé que jamais, il s’invente une nouvelle gueule de golden boy : bronzé et peroxydé, il porte désormais le plus souvent des costumes classiques. Photographie originale pour la couverture de l’album Earthling, 1997. Photographie de Frank © DUFFY ARCHIVE W Ockenfels 3 & THE DAVID BOWIE ARCHIVE 5. Les années 90 : la période éléctro « Le manteau Union Jack » Après les années fastes, les nombreux albums qui suivent ne remportent pas le succès cri- tique et commercial escompté. Pourtant, il revient en force en 1995 avec l’album Outside. Deux ans plus tard, l’album Ear- thling prolongera ce retour aux expérimentations sonores et visuelles. Pour la pochette de l’album, Bowie a sollicité Alexander McQueen, alors jeune diplômé, pour ce « manteau Union Jack », création également portée pendant la tournée éponyme en 1997. L’artiste a été inspiré notamment par la veste aux couleurs du drapeau britannique de Pete Town- shend, des Who. « Il a mélangé une esthétique très punk, ces déchirures, ces brûlures de cigarette, avec cette tradition du tailleur britannique classique, ce qui est très Bowie», com- mente Victoria Broackes, l’une des commissaires de l’expo. « A l’époque, Alexander McQueen n’était pas encore très © FRANK W OCKENFELS 3 connu du grand public. Mais Bowie a toujours su travailler avec les gens les plus extraordinaires et intéressants ». owie revient toujours là où on ne l’attend pas et ce, jusqu’à son dernier album. En 2013, retiré de la scène médiatique, alors qu’il n’a rien produit depuis 10 ans et que les rumeurs le disent mourant, il sort, à la stupéfaction générale et simultanément à l’exposition qui le consacre, l’album The Next Day. Se faisant de plus en plus discret au point de B refuser toute interview, au bord de la dématérialisation, son aura paradoxalement ne cesse de croître. Exposition David Bowie is… : du 3 Mars au 31 Mai à Paris à la Philharmonie de Paris CULTURE Profil 137 34
Billet LE COUP DE PROJO DE FRÉDÉRIC MAIRE Amateur de cadres précis, tirés au cordeau, de plans longs, d’une mise en scène d’une extrême rigueur et d’un humour noir très noir, Andersson signe ici un drame en 32 tableaux qui raconte sans doute un peu de la Suède d’aujourd’hui et beaucoup du monde occidental. L’histoire, en pointillé, de deux voyageurs de commerces qui cherchent à vendre quelques produits de farces et attrape qui n’intéressent personne, et de quelques autres figures toute aussi paumées les unes que les autres. Le film n’hésite pas à remonter le temps pour revenir à l’époque de la deuxième guerre mondiale ou même à la campagne ratée contre les Russes de Charles XII de Suède, dans un choc de temporalités Journaliste, réalisateur, Frédéric Maire collabore dès 1986 du plus bel effet. avec plusieurs festivals. Après avoir été directeur du Festival Le film est par ailleurs difficilement racontable. Je peux de Locarno de 2005 à 2009, il occupe désormais le poste de juste vous dire qu’il y a dedans une sorte de cocktail explosif composé (entre autre) de Aki Kaurismäki, Ingmar Bergman, directeur de la Cinémathèque suisse. Andreï Tarkovski et Jim Jarmusch, mâtiné d’humour belge et de froideur danoise. Impossible à raconter, je vous dis. Il faut le voir. Ou plutôt le visiter. epuis pas mal d’années, dans les Festivals, on avait Car on voit le film comme on visiterait un musée. En effet, l’impression que le cinéma suédois se limitait à chaque « tableau » (le mot n’est ici pas usurpé) semble encadré et trois noms. Ingmar Bergman, l’immense maître accroché comme une immense toile devant nos yeux, comme ces (incontesté) du cinéma mondial ; Bille August tableaux de représentations historiques qui pullulent dans les (qui est en réalité danois), son pâle disciple des galeries du monde entier ; ces tableaux censés représenter des D Meilleures intentions ; et enfin Lasse Hallström événements importants qui glorifient, encensent, transforment (Une vie de chien) qui a fini par se perdre à Hollywood. le réel afin d’impressionner ceux qui les regardent. C’était sans compter avec un réalisateur tout aussi suédois De la même manière, Roy Andersson joue de la représentation. qui trace tranquillement, lentement, dans l’ombre, son petit Ses décors qui sentent encore le papier peint, ses personnages bonhomme de chemin et qui se retrouve aujourd’hui lauréat enduits de maquillage, ses images pâlichonnes, tout est construit du Lion d’Or vénitien pour un film au titre impossible à retenir, pour renforcer la sensation de mise en scène, de reconstitution… même en français : Un pigeon assis sur une branche réfléchit à Ce décalage renforce à la fois la terrible ironie – et l’humanité son existence. Son nom, Roy Andersson, né en 1943 à Göteborg. profonde de l’œuvre de ce cinéaste décidément atypique. Un Pigeon assis sur une branche réfléchit à son existence, © FILMCOOPI par Roy Andersson, sortie en Suisse romande le 29 avril CULTURE 35 Profil 137
JOHN BERGER ET JEAN MOHR Jean Mohr et John Berger, Genève, 1974 © Jean Mohr, Musée de l’Elysée Un métier idéal Un spectacle de Nicolas Bouchaud, des lectures, une exposition En collaboration avec Du 22 avril au 13 mai 2015 Au Théâtre de Vidy à Lausanne Un métier idéal Lis-moi quelque chose Spectacle de et avec Nicolas Bouchaud Conversations et lectures de textes de John Berger D’après le livre de John Berger et Jean Mohr / Mise en scène Eric Didry Samedi 9 mai 2015 dès 15h30 Du 5 au 13 mai 2015 Salle La Passerelle / Tarif S À 20h30 (sauf dimanche 10 mai à 18h) Salle La Passerelle / Tarif M 15h30 Lecture par Nicolas Bouchaud d’extraits de Pourquoi regarder les animaux ? Un monologue de Nicolas Bouchaud tiré du livre de John Berger et Jean Mohr : Un métier idéal. Un questionnement sur la présence au monde de chacun, au travers de la vie d’un médecin de campagne dont l’engagement 16h45 résonne avec celui de comédien. Conversation impromptue entre John et Katya Berger sur quelques repro- ductions de peinture, et lecture à deux voix d’un passage de Et nos visages, Exposition de photographies mon cœur, fugaces comme des photos de Jean Mohr d’après le livre Un métier idéal Du 22 avril au 13 mai 2015 18h Dans le foyer de Vidy /Entrée libre Lecture par Yves Berger de Rondo, une élégie pour Beverly Au début des années 1960, le photographe genevois Jean Mohr rencontre l’auteur John Berger qui l’invite à travailler sur un projet de reportage au- 19h tour d’un médecin de campagne anglais. Ensemble, ils partent plus d’un Vernissage de l’exposition de photographies de Jean Mohr réalisées pour mois suivre le docteur durant ses tournées quotidiennes et ses consultations le livre Un métier idéal en présence du photographe médicales. De cette première expérience commune naît en 1967 un ouvrage unique intitulé Un métier idéal. Entre narration textuelle et photographique, En collaboration avec le Musée de l’Elysée ce livre prend une forme toute particulière en laissant une place primordiale à l’image et à sa puissance narrative. L’exposition dans le foyer de Vidy est une sélection de ces photographies et provient du Fonds Jean Mohr conser- En collaboration avec vé au Musée de l’Elysée. En collaboration avec Informations et réservations : 021 619 45 45/[email protected]/www.vidy.ch
M ODE p.56 Let’s dance CULTURE © VINCENT CALMEL 37 Profil 137
NARCISO, CET ESTHÈTE Par Lucie Notari Créateur aussi protéiforme que « people », réinventant par ses collections d’une précision rare une femme aussi moderne que classique, Narciso Rodriguez a posé quelques instants ses ciseaux pour nous livrer ses secrets, de la couture au parfum. es parents l’imaginaient docteur ou avocat…Lui se a fait ses armes dans différentes maisons de renom avant de voyait créateur et il avait raison. Le styliste Narciso lancer sa propre marque. Ses coups de poker ? Avoir imaginé la Rodriguez a construit sa réputation sur la réflexion robe de mariée de feu Carolyn Bessette (épouse de John Kennedy forte qui préside à chacune de ses collections. Cu- Jr.) ou encore voir ses vêtements régulièrement portés par la S rieux, le designer cubano-américain s’amuse, saison First Lady Michelle Obama. Son adage ? Créer d’abord pour la après saison à repenser matières, couleurs et même, définition femme en pensant à la sublimer. Un défi qu’il réussit avec brio. de nouveaux styles. Cet homme qui ne regarde que devant lui Rencontre avec un créateur d’envergure. Profil: Votre collection printemps-été met l’accent sur sur les silhouettes. Pour trouver des broderies originales la féminité avec des touches de luminosité sur chaque je me suis tourné vers les traditionnels tissus adoptés pièce. Parlez-nous de vos inspirations ? pour les Maharadjas. J’ai disséqué chaque pièce pour Narciso Rodriguez : J’avais de superbes visuels de l’ar- n’en garder que les couleurs les plus fortes et les dessins tiste américaine Roni Horn. Elle a réalisé un travail les plus purs. Comme à chaque fois, j’ai réfléchi à très intéressant autour de l’eau et de sa réverbé- quels types de femme je m’adressais et le message ration. Cette réflexion a été le point de départ que je désirais leur communiquer. L’important de ma collection. Nous avons retranscrit cette pour moi est d’imaginer des pièces portables qui trainée de lumière dans les lignes, les coutures suscitent l’envie. Chaque robe, chaque combi- et les broderies de chaque pièce. J’avais envie de naison de cette saison est destinée à une femme repenser la mode, d’expérimenter les envies et urbaine et moderne. désirs évidents des femmes. L’idée était de réali- ser différents univers pour le jour et la nuit qui explorent une nouvelle définition du classicisme. Que retenez-vous aujourd’hui de vos passages Pour ce faire, nous avons injecté des touches de chez Loewe et Calvin Klein ? couleurs claires et foncées et cherché le mariage J’ai trouvé très utile de travailler au sein de idéal entres les deux dans chaque tenue. La com- différentes marques, mais pas uniquement plexité était d’avoir cette mixité pour les pièces aux Etats-Unis, car ma perception de l’esthé- de tous les jours comme pour celles du soir en tisme va au-delà. En tant que styliste, je suis en créant à chaque fois des looks bien distincts. perpétuelle évolution et j’aime me nourrir de Comme l’eau a été notre point de départ, nous différentes cultures et styles. J’ai eu beaucoup avons inclus l’idée du sport et de la plongée. de chance de travailler pour des designers eu- J’ai réinterprété les combinaisons de plongée ropéens tels que Loewe. Cette dernière griffe de manière féminine avec, notamment, des m’a enseigné le savoir-faire et m’a également touches de couleurs ainsi qu’une technique de ouvert beaucoup de portes. Aux Etats-Unis, broderie traditionnelle qui consiste à coller les Donna Karan a eu un gros impact sur mon coutures. J’ai réellement eu envie de surprendre fonctionnement en tant que créateur. J’y ai tra- les femmes au travers de cette collection, tant au vaillé aux côtés de Louis Dell’Olio, un tailleur niveau stylistique qu’au niveau technicité. extraordinaire qui a le sens du travail qu’ont les tailleurs italiens : une coupe impeccable et une Pendant que nous réalisons cette interview, précision hors pair. Auprès de Donna (Karan) j’ai ap- la collection automne-hiver est déjà bien avancée… pris l’amour du tissu, des esquisses de mode et des Avez-vous poursuivi le style printemps-été ? drapés. Le sens des affaires dans l’univers de la mode Je construis chaque collection pas à pas en partant d’une m’a été enseigné chez Calvin Klein. Cette expérience page blanche. En même temps, je regarde également ce fut un peu comme une école de mode pour moi. Zack que je viens de réaliser pour produire une continuité sai- Carr, son directeur créatif à l’époque était un génie et son après saison. Pour l’automne-hiver, les silhouettes sont un homme d’une élégance folle. Il avait un regard très longilignes et fluides à la fois. Aujourd’hui j’ai la chance de aiguisé sur la mode. Il m’a enseigné beaucoup de choses bien maîtriser les matières, c’était donc un défi passionnant © NARCISO RODRIGUEZ sur les contraintes, la pureté et la clarté des lignes d’un de continuer dans l’expérimentation au niveau des tissus et vêtement. Zach m’a appris énormément, tant sur le plan couleurs utilisés. Le point de mire de mon vestiaire hivernal créatif que personnel. s’est dirigé vers les couleurs et broderies que j’ai apposées MODE Profil 137 38
Votre père est cubain mais vous êtes un leurs mains, se rendre belles sans aucun ici. Il y a une grande émergence de jeunes vrai New-Yorkais puisque vous vivez moyen. Cela prouve que lorsque vous le stylistes. Quant aux designers établis, ils aux Etats-Unis depuis tout petit… Défi- voulez, tout est possible. se comptent aussi en grand nombre. La niriez-vous votre style comme étant amé- mode n’a plus la même symbolique qu’au- ricain avant tout ? Votre marque a appartenu à différents paravant. Désormais, elle fait autant par- Mon père est un homme chaleureux, grands groupes comme Aeffe puis Liz tie intégrante de notre culture que de généreux, intègre et franc : j’ai hérité de Clairbone Company. Est-ce difficile pour l’économie financière d’un pays. Elle est ces deux dernières qualités que mes pa- un designer, aujourd’hui, de survivre aujourd’hui un art créatif à part entière. rents avaient acquises à force de persé- dans la jungle de la mode et de répondre vérance. Ce sont tous deux, des immigrés aux exigences du marché ? Peut-on dire que les deux Awards que cubains. Un acte très courageux que je Mon travail est ma passion, c’est ma vie. vous avez obtenus du CFDA* ont été un n’imagine pas pouvoir faire. Je suis, de J’ai eu beaucoup de chance dans ma car- réel tremplin pour votre carrière ? mon côté, un vrai New-Yorkais, mais je rière : j’ai pu collaborer avec de brillants Ce fut un véritable honneur et les deux pense réellement que le style est univer- designers et des artisans d’exception en récompenses représentent beaucoup à sel, il n’existe pas de frontière. Ma culture Europe comme aux Etats-Unis, et j’ai le mes yeux. vient de la manière dont j’ai grandi, au plaisir de pouvoir faire ce que j’aime le De les recevoir deux années de suite sein d’une famille cubaine très éclectique plus au monde, jour après jour. (2002-2003) alors que j’étais si jeune était avec beaucoup de femmes ! Toutes belles, Cela dit, les exigences de ce business extraordinaire (ndlr : il a 41 ans lors du incroyables et fortes. Dans la culture la- sont de plus en plus compliquées et en premier concours). Cela représente beau- tine, les hommes respectent beaucoup la perpétuelle évolution. Ce qui est un vrai coup à mes yeux. Evidemment, cela m’a gente féminine. C’est de là qu’est née ma challenge. D’un autre côté, ces change- énormément apporté dans ma carrière. façon de voir les femmes lorsque je crée ments permettent à la mode de rester en Lorsque vous débutez, être récompensé des vêtements. Elles représentent pour vie et d’évoluer, c’est ce dynamisme que par vos pairs ainsi que par les gens les moi la force. Ma mère, mes sœurs et mes j’aime. Lorsque j’ai débuté ma carrière, plus puissants de l’industrie de la mode tantes ont grandi dans un univers où elles il y a avait uniquement quelques défilés vous aide à avancer et vous conforte dans n’avaient pas accès aux cosmétiques et à à New York. Aujourd’hui, des créateurs l’idée que votre vision de la mode est juste. la beauté, et pourtant, je les ai vues, avec viennent du monde entier pour défiler La mode n’a plus la même symbolique qu’auparavant. Désormais, elle fait autant partie intégrante de notre culture que de l’économie financière d’un pays © SHISEIDO MODE 39 Profil 137
…Et aujourd’hui, le fait que Michelle Obama porte régulière- Cette odeur est devenue une véritable dépendance pour moi ! Ma ment vos tenues doit être également un accomplissement… passion pour cette fragrance est en totale adéquation avec ma J’ai rencontré la Première Dame il y a plusieurs années, lors d’un vision esthétique : le contraste et la juxtaposition des extrêmes. évènement caritatif à Chicago. Elle avait très envie de découvrir C’est à la fois brut et raffiné, classique et moderne. C’est égale- mon travail et de porter mes vêtements durant la campagne. ment vif avec une capacité étrange à refléter la nature de chaque Lorsque je l’ai découverte avec l’une de mes créations le soir personne qui le porte. Ca me ramène également à certains sou- de l’élection, ce fut un véritable choc! J’étais tellement honoré ! venirs d’enfance. Les femmes, dans ma famille, adoraient les Je crois que ce fut l’un des moments les plus forts de ma vie. parfums classiques comme la rose, le jasmin et le gardénia. Je faisais partie d’un moment historique des Etats-Unis, cela Notre maison était entourée de roses et de jacinthes. J’ai toujours a dépassé mes espérances. Aujourd’hui, je continue à habiller été particulièrement fasciné par la jacinthe, le chèvrefeuille, Michelle Obama, c’est un privilège immense de pouvoir vêtir la fleur d’oranger et la tubéreuse ; je trouve qu’il émane de ces une femme qui représente pour moi la force, le courage, l’in- dernières une odeur mystérieuse que j’aime beaucoup. telligence et la beauté. Accessoires, lignes bis, où voyez-vous votre griffe dans dix ans? Vous dites régulièrement que votre style est inspiré par Geof- Au cours de ces dernières années, ma marque a considérable- frey Beene ou encore Cristobal Balenciaga. Des styles centrés ment grandi et je suis particulièrement fier de sa trajectoire. sur l’aspect architectural du vêtement. Est-ce l’une de vos bases Les lancements de notre nouveau sac et de notre collection de de travail ? chaussures ont dépassé mes espérances ! Ce signal est très utile Comme je l’ai toujours dit, je préfère rendre hommage à des pour moi et me renforce dans l’idée que nous prenons la bonne personnalités que j’admire plutôt que de m’inspirer de leurs direction ! Dans le futur, j’ai évidemment travaux. J’ai une grande admiration pour Balenciaga et Geoffrey énormément de projets en tête mais Beene, comme pour Coco Chanel d’ailleurs. Mais créer quelque pour l’instant, ils restent secrets. Une chose de déjà vu ne m’intéresse pas. J’ai envie d’avoir une véri- chose est sûre, nous allons continuer table réflexion stylistique sur la mode d’aujourd’hui, quelque à croître et tracer notre chemin. chose en lien avec l’optimisme d’aujourd’hui et de demain. *le CFDA est le Council of Fashion Desi- gners of America. Narciso Rodriguez a remporté ce prix à deux reprises. Le parfum d’une femme est pour moi Ce fut une première dans l’his- sa signature la plus intime toire de l’institution. Avez-vous un coup de coeur parmi la génération de nouveaux designers ? Je n’ai jamais été vraiment intéressé par le côté « nouveau pour Narciso Rodriguez, le nouveau ». J’aime découvrir les réflexions de créateurs de talent, je trouve ça très inspirant. Les designers auxquels je pense FW 2014-2015 surtout sont Maria Cornejo et Isabel Toledo, je respecte et admire leur travail respectif. Parlons un peu d’un autre univers qui vous est cher, celui du parfum. A-t-il pour vous la même importance que l’accessoire de mode à proprement parler ? Le parfum d’une femme est pour moi sa signature la plus intime. Ca a été un rêve de créer un parfum, je me suis donc entière- ment impliqué dans le processus de création. J’ai trouvé qu’un parfum était la meilleure manière de communiquer ce que représente la maison Narciso Rodriguez. L’idée était de partir sur une fragrance à la fois accessible et ambitieuse. Je désirais quelque chose de fascinant, luxueux et qui fasse en sorte que chaque femme se sente spéciale car c’est la façon dont je vois un bon parfum. …L’élaboration d’un parfum vous rappelle-t-elle celle d’une collection ? Mis à part les différences évidentes comme les matières ou les patrons, je considère qu’il n’y a aucune distinction. Mon proces- sus créatif reste le même. Il est crucial pour moi de ne jamais perdre de vue l’idée que quel que soit le support de création, le but est de créer une émotion forte. Cela prend des années pour © NARCISO RODRIGUEZ concevoir un parfum original. Pour moi, il est essentiel que je m’implique personnellement car chaque senteur doit représen- ter l’esthétique de ma griffe. © SHISEIDO Justement, vos parfums ont toujours des notes olfactives fortes et distinctives. Est-ce que ces notes représentent des souvenirs pour vous ? Le musc est mon parfum depuis qu’un ami me l’a fait découvrir Narciso Rodriguez, For Him et For Her, il y a plusieurs années. disponible en parfumerie. MODE Profil 137 40
FALLING IN LOVE… Par Lucie Notari l s’agit du dernier tour de piste du créateur Christophe Lemaire pour la maison Her- mès et pourtant, peut-être est-ce son meilleur défilé I pour la marque. Sa collec- tion? Un vent de liberté-une envie d’évasion-une bouffée d’oxygène. Di- rection le désert avec des silhouettes aux allures de nomade de luxe qui déambulent avec légèreté, pureté et finesse sur le catwalk. Des drapés et plissés d’une maitrise parfaite qui ne sont pas sans rappeler ceux de l’incontournable Madame Grès. Ici, chaque ligne est sublimée, épou- sée, ceci étant notamment expliqué de par le choix des matières nobles choisies. J’aime cette collection et par- ticulièrement cette tenue pour son élégance naturelle mais surtout pour sa facilité à être portée. Chaque vê- tement, réalisé avec rigueur, vit sans artifice ni fard. Avec une robe comme celle-ci (portable de jour, comme de nuit), ni bracelet, ni boucles ne sont HERMÈS nécessaires. J’imagine facilement Robe asymétrique en soie rayée pain d’épice, une femme la porter avec de belles compensées verts émeraude ou se Sandales KATY sangle kaki, baladant en nu-pieds et maxi po- veau gris éléphant & veau beige chette - au bord du lac. Une tenue qui, Bracelet grand modèle MORS DE BRIDE en argent, au vu de son intemporalité, se portera avec la même élégance aujourd’hui prix sur demande comme demain. Et ça, on aime. MODE 41 Profil 137 © HERMÈS
MOOD Focus sur 4 tendances qui vont déferler sur la saison. La mode s’est imaginée aussi extravagante que délicate pour laisser l’oeil s’étourdir. Préparez-vous à une fashion riot dans votre dressing ! BOARD Par Edith Jean - Illustrations : Marc-Antoine Coulon Graphique La géométrie anime la garde-robe du printemps. Les lignes se croisent à angle droit, imposent leurs paral- lèles, leurs aplats hauts en couleurs et finissent par s’adoucir en courbes sur les silhouettes. CABAS VERTICAL EN TOILE ET CUIR DE VEAU Céline, Fr. 835.- VESTE MAYA Atelier Bartavelle. Fr. . 737.- BRACELET EN CUIR Marni Fr. . 310.- CHEMISE CHESTER Claudie Pierlot, Fr. 145.- SANDALES COMPENSÉES La Halle, Fr. 42.- © DR MODE Profil 137 42
PORTEFEUILLE CUIR JAUNE ET POIS Bimba y Lola, Fr. 162.- ESPADRILLES EN BROCART Dolce & Gabbana, Fr. 295.- PANTALON BEIGE JUPE EN JEAN Des Petits Hauts, Fr. 103.- Kenzo, Fr. 189.- CABAS LAINE ET POIS Vanessa Bruno, Fr. 166.- Pois La géométrie anime la garde-robe du printemps. Les Subtile épidémie, le pois fait pétiller toutes les matières de la saison. Minuscule ou oversize, il s’accompagne parfois d’une colonie pour affir- mer ses intentions fantaisistes. MODE 43 Profil 137
Plumes & franges Tout en légèreté, franges et plumes apportent aux pièces printanières un vague et étonnant mouvement. Et elles attisent de leurs vacillations frivoles les lignes trop définies d’un look. MINAUDIÈRE EN CUIR AVEC EMPIÈCEMENT Rochas, Fr. 2500.- PONCHO DENTELLES ET FRANGES BOTTINES FARROW Alberta Ferretti, prix sur demande Sézane, Fr. 199.- BOUCLES D’OREILLES L’IROQUOISE STRASS SWAROVSKI ARGENT Gas Bijoux, Fr. 163.- CHAPEAU EN FEUTRINE ROUGE © DR plume stilettos, Piers Atkinson, Fr. 1200.- MODE Profil 137 44
PETIT SAC CHARLOTTE MySuelly, prix sur demande BLOUSE BRODÉE BOUTONNÉE DOS Eric Bompard, Fr. 125.- ESPARDRILLES FAÇON BASKETS André, Fr. 48.- ROBE GUIPURE OUVERTURE Mango, Fr. 75.- JUPE BRODÉE Manoush, Fr. 315.- Dentelles & broderies Tendance au charme subtil, la dentelle semble faire apparaître des naïades d’un nouveau genre. Le tissage et la couture se révèlent sur les corps de frêles armures en surimpression. MODE 45 Profil 137
Pull en cachemire ERIC BOMPARD, jupe en coton MADAME AIME, bracelet de perles en obsidienne noire et bagues en argent THOMAS SABO, lunettes de vue OPTIC DUROC
UN WEEK-END À PARIS onchalante, elle déambule dans les rues parisiennes avec ses tenues évoquant les tendances fortes du printemps. Eclats de couleurs, contraste des genres et inspirations rétros s'enlacent N pour proposer des silhouettes estivales à souhait. Photographe : Quentin Legallo Réalisation : Lucie Notari Stylisme : Ilona G. Maquillage : Camille Siguret Coiffure : Ludovic Bordas Assistante photographe : Aaricia Varanda Assistante styliste : Marion Le Troquer Mannequin : Natasha Akhtyamova @ Crystal Model Management
Robe en mikado de soie et laine imprimée MICHAEL KORS, chemise en cotton ERIC BOMPARD, baskets compensées en cuir HOGAN, manchette en plexi et métal EMANUEL UNGARO
Robe en cady de soie et gilet en patchwork de fourrure et cuir GUCCI, bracelet de perles en obsidienne noire THOMAS SABO, lunettes de vue OPTIC DUROC
Pull en soie et polyester, pantalon en soie et sac en cuir VERSACE, chaussures en cuir CHRISTIAN LOUBOUTIN
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