Important Announcement
PubHTML5 Scheduled Server Maintenance on (GMT) Sunday, June 26th, 2:00 am - 8:00 am.
PubHTML5 site will be inoperative during the times indicated!

Home Explore N° 53 Agefi Magazine

N° 53 Agefi Magazine

Published by AGEFI, 2016-12-16 06:08:02

Description: Octobre 2016

Prévoyance

Search

Read the Text Version

BIMESTRIEL No 53 | Octobre 2016 | CHF 5.50 Majid Oukacha. Première interview en français de l’auteur d’un livre événement sur l’ambivalence des dogmes coraniques PRÉVOYANCEPérilleux engagementsTAUX NÉGATIFS MODERNITÉ FISCALITÉLe dérèglement Comment En quoi etprofond révélé s’installe le Big comment RIE IIIpar la situation Brother annoncé concerne toutesactuelle par Orwell les entreprises



SOMMAIRE / 3OCTOBRE 2016BIMESTRIEL | PRÉVOYANCE | PME 14 ÉDITORIAL 24 Tout déséquilibre a un coût��������������������������������������������������������������������������������� 7 OBJECTIVITÉ. Le jeune intellectuel STABILITÉ. Le modèle suissefrançais Majid Oukacha est l’auteur Noël Labelle, rédacteur en chef à trois piliers est considéré internationalement comme de «Il était une foi, l’islam…» PROLOGUE��������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 8 exemplaire en matière Une critique des limites et des de prévoyance et de bon CAPITAL financement. Dr. Marcel Widrig, imprécisions techniques des Crible analytique et bon sens.......................................................................... 13 PricewaterhouseCoopers. discours et des lois du Coran. Eric Blanchard, Harold Alexander Consulting Interview. La critique de l’islam est dangereuse mais nécessaire...................... 14 22 Entretien avec Majid Oukacha, intellectuel françaisPLANIFICATION. Les entrepreneurs ayant contracté un plan de PRÉVOYANCE prévoyance cadres peuvent Recommandations précises en période incertaine������������������������������20 Les taux d’intérêt bas font pression sur les caisses de pension. Ce qui imposebénéficier de solutions alternatives des décisions essentielles pour éviter un affaiblissement de son patrimoine. attractives. Malgré la pénurie de placements rentables. Roland Bron, VZ Suisse Romande Pasquale Zarra, Directeur PensExpert, Lausanne. Comment planifier sa prévoyance en bas de cycle�����������������������������22 Les entrepreneurs ayant contracté un plan de prévoyance cadres peuvent bénéficier de solutions alternatives attractives. Pasquale Zarra, PensExpert, Lausanne Le coût de la stabilité sociale����������������������������������������������������������������������������24 Le modèle suisse à trois piliers est considéré internationalement comme exemplaire en matière de prévoyance et de bon financement. Brigitte Zulauf, Dr. Marcel Widrig, PricewaterhouseCoopers Les conditions-cadres à un qualité de vie durable������������������������������29 Une prévoyance bien planifiée permet de renoncer à une consommation immédiate. Alois Bischofberger, Avenir Suisse Les réalités complexes des conglomérats�������������������������������������������������30 Les chocs importants subis par le secteur de la prévoyance et de l’assurance conduit à s’interroger sur la place de ce secteur dans la stabilité financière. Philippe Trainard, Fédération française des sociétés d’assurance FONDAMENTAL � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � � 34 INTANGIBLE Entrepreneurs, développez votre Web TV !���������������������������������������������37 Jean-Paul Oury, expert en influence digitaleAGEFI magazine est un magazine de l’AGEFI, le quotidien de l’Agence économique et financière à Genève • Administrateur délégué-Rédacteur en chef François Schaller • CEO Agefi SA Olivier Bloch Directeur adjoint, développements Lionel Rouge • Rédacteur en chef Agefi magazine Noël Labelle • Graphisme Sigrid Van Hove • Responsable IT Guy-Marc Aprin • Administration et Finance Patricia Chevalley Tél. (021) 331 41 02 • Marketing Guillaume Tinsel, Tél. (021) 331 41 06 • Abonnements Tél. (021) 331 41 01 – Fax (021) 331 41 10 – [email protected] • Publicité Christian Nicollier, Tél. (021) 331 41 32 – [email protected] • Impression Kliemo Printing, Eupen • Direction et administration Route de la Chocolatière 21, Case postale 61, 1026 Echandens-Denges, Tél. (021) 331 41 41 Fax (021) 331 41 10 – e-mail: [email protected] • Vente en kiosque Naville, Genève. Prix: 5,50 fr. (TVA 2,5% incl.) • Photo couverture © ReutersAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

La prévoyance professionnelle individualisée Solution sociale et instrument d’optimisation patrimonialePublireportage réalisé par Agefi SA - communication LUIGI GALANTE encore pour des raisons de fidélisation à l’entre- Il faut relever également que l’opacité des Administrateur-Président prise, il est donc fréquent qu’un(e) assistant(e), frais de fonctionnement et de gestion d’une fon- de Elite Office SA que des ouvriers qualifiés ou non qualifiés sont dation de prévoyance est souvent décriée dans assurés dans un plan de prévoyance hors-obliga- les médias. La réponse de Elite Fondation de pré- Nous vivons une période agitée en ma- toire dont les cotisations épargne et risque sont voyance est de garantir une transparence totale tière de prévoyance professionnelle, prises en charge généralement entièrement par quant à ses frais d’administration et de gestion notamment avec le projet prévoyance leur employeur, améliorant ainsi parfois jusqu’à qui sont facturés à l’entreprise. Aucun prélève- 2020 du Conseil fédéral, ainsi que les 50%, voire davantage, leurs prestations de ment n’est effectué sur l’avoir de prévoyance débats parlementaires qui suscitent de vives ré- retraite, invalidité et décès. Nous ne contestons des assurés hormis les frais de gestion de fortune actions et critiques aussi bien de la part de nos pas le fait que ce type de solution permet aux re- déduits par les banques. élus que de la part des acteurs du secteur. Il ne venus élevés d’optimiser leur prévoyance et leur s’agit que de thèmes qui gravitent autour de la fiscalité mais ceci ne se fait pas au détriment Enfin, la plupart de nos assurés sont sensibles prévoyance professionnelle obligatoire, c’est- des employés aux revenus inférieurs. Il est ainsi aux aspects successoraux. La flexibilité offerte à-dire pour la partie de salaire se situant entre dommage de relever que ni les partisans par le domaine de la prévoyance hors-obligatoire 24’675.- et 84’600.-. Qu’en est-il de la masse sa- d’une prévoyance plus sociale, ni ceux d’une permet des modifications de l’ordre des bénéfi- lariale excédant ce montant et qui constitue très prévoyance flexible ou à la carte ne soulignent ciaires qui peuvent être intéressantes dans cer- souvent la tranche de salaire la plus importante ces aspects dans les débats. taines configurations familiales. A titre d’exemple de certains collaborateurs et des indépendants? et sous-réserve de conditions spécifiques, il est En outre, une solution hors-obligatoire telle possible de favoriser la concubine ou le concu- S’agissant de cette part nommée hors-obliga- que Elite Fondation de prévoyance, au-delà bin par rapport aux enfants mineurs d’un premier toire, elle n’est que peu abordée dans les débats du choix de la stratégie de placement évoqué mariage ou par rapport aux descendants directs. parlementaires. La raison principale étant que ci-dessus, permet d’accéder à des couvertures Ou encore de favoriser un enfant majeur d’un pour cette partie les institutions de prévoyance de risque décès et invalidité qui sont souvent premier mariage par rapport au conjoint actuel. ont déjà depuis plusieurs années la liberté de supérieures à celles offertes dans les solutions fixer librement les taux de conversion et les taux standard, et ce à des tarifs très concurrentiels. En conclusion, une affiliation à une solution d’intérêts qui ne dépendent pas d’une décision A titre d’exemple, en cas de décès d’un assuré telle que Elite Fondation de prévoyance est un du Conseil fédéral. Nous pouvons aussi relever les bénéficiaires qui auraient droit à une rente instrument efficace en matière de planification qu’à l’heure actuelle les avoirs de prévoyance de veuve, conjoint, concubin ou partenaire enre- de prévoyance, fiscalité et succession. Elle est hors-obligatoires ne sont pas concernés par gistré sont également bénéficiaires de l’entier du surtout une solution, non pas de substitution, l’obligation de percevoir exclusivement une rente capital accumulé au moment du décès de l’assu- mais complémentaire à la prévoyance profes- de vieillesse à la retraite. Par ailleurs, il est permis ré. Il est fréquent de trouver des solutions qui ne sionnelle standard. Cette complémentarité per- depuis le 01.01.2006 de proposer plusieurs stra- permettent pas la restitution du capital accumu- met aux entreprises affiliées d’obtenir un degré tégies de placement à des assurés appartenant lé en plus du versement d’une rente. De plus, le maximal de diversification de leurs avoirs de à un même plan de prévoyance au sein d’une risque de longévité, par conséquent la baisse du prévoyance répartis entre deux ou plusieurs même société pour la part de salaire qui excède taux de conversion n’ont pas d’impact dans cette institutions. En effet, les entreprises mécon- 126’900.-. Ces possibilités de flexibilité, n’en solution hors-obligatoire car le capital accumulé naissent la possibilité de conclure plusieurs déplaise à leurs détracteurs, ont un caractère d’un assuré actif ne sert pas à couvrir le verse- contrats de prévoyance pour un même collectif social totalement en ligne avec l’esprit et la subs- ment des rentes aux retraités. d’assurés en pensant qu’elles doivent se limiter tance de la LPP. Nos années d’expérience avec à un seul partenaire. Dans les faits il n’existe la solution Elite Fondation de prévoyance nous Par ailleurs le rendement net des avoirs de pas de restriction au nombre d’institutions prouvent que la plupart des indépendants ou des prévoyance revient en totalité à la caisse de de prévoyance, seul le principe d’adéquation sociétés qui ont décidé de mettre en place ce type pensions1, respectivement à l’assuré2. Parmi les («surassurance») doit être respecté. de plan pour un ou plusieurs collectifs d’assurés placements à disposition selon les normes de ont inclus dans la plupart des cas des collabo- l’OPP2 et à certaines conditions, des placements Rue Beau-Séjour 10 - 1003 Lausanne rateurs qui étaient assurés uniquement pour la hypothécaires aux assurés sont possibles. A une www.elitefondation.ch partie LPP obligatoire. Par respect du principe époque où les taux d’intérêts sur des actifs sûrs de collectivité imposé par l’OPP2 (ordonnance en CHF sont proches de zéro, voire négatifs, ce sur la prévoyance professionnelle) mais plus type de placement devient très attractif. (Taux d’intérêt à ce jour: 2.25%). (1) Salaires assurés de 0 à 24’675 et dès 84’600.- (jusqu’à 846’000.-). (2) Salaires assurés dès 126’900.- (jusqu’à 846’000.-)

SOMMAIRE / 5 42 INSPIRATION 40 Questions sur le beau�������������������������������������������������������������������������������������������38 COMPÉTITIVITÉ. La Suisse doit UNIVERSITALITÉ. La réforme prévue intégrer de bonnes conditions Eugène Delacroix, peintre français (1798-1863) de l’imposition des entreprises III concerne non seulement les fiscales afin de maintenir PME sociétés bénéficiant aujourd’hui une position économique Les impératifs du nouvel environnement fiscal������������������������������������40 de privilèges fiscaux. Mais aussi toutes les entreprises de Suisse. forte à l’international. Dr Andreas Arni, Credit Suisse Dr Andreas Arni, responsable Denis Colin, LPG Fiduciaire. Entrepreneurs & Executives Nécessaire alignement international�����������������������������������������������������������42 au Credit Suisse. 46 Denis Colin, LPG Fiduciaire PASSATION. Atténuer la double imposition pour les Grands dilemmes des structures familiales���������������������������������������������44propriétaires-gérants d’entreprise Pourquoi les intentions de succession de la génération suivante connaissent unet réduire leur fiscalité permettra déclin progressif depuis plusieurs années. de faciliter les transmissions. Fabrice Lange, Actoria Suisse. Thomas Zellweger et Philip Zieger, Université de St Gall Heinrich Christen, Ernst & Young Les successions fiscalement favorisées������������������������������������������������������46 Fabrice Lange, Actoria CONVIVIAL La fin des civilisations�������������������������������������������������������������������������������������������47 À une ère de confiance tout à fait excessive dans les progrès à attendre du développement des connaissances scientifiques a succédé une tendance souvent excessive au pessimisme. Clément Colson, économiste français (1853-1939) RECENSION Inévitable renouvellement qualitatif����������������������������������������������������������48 Michel Santi, économiste franco-suisse PERFORMANCE Le voyage compte autant que le résultat�������������������������������������������������50 Larry Legault, Directeur Technique Geneva SeahawksConseil du jour angebault.ch / letizialocher.chSi vous cherchez régularité de rendement etplus-value à long terme, demandez La Foncière,le fonds immobilier de référence.Performance au 30.09.2016 1 an 3 ans 5 ans La performance historique ne www.lafonciere.chLa Foncière 5,59 % 37,14 % 46,87 % représente pas un indicateur deSXI Real Estate Funds TR 10,39 % 29,89 % 32,79 % performance actuelle ou future. Source : Bloomberg / BCGE Asset Management – Advisory.

Au cœur del’actualité économique et financière avec Nina dos Santos Du lundi au vendredi dans The Business View à 12h sur CNN International

ÉDITORIAL / 7Tout déséquilibre a un coûtLe gouvernement japonais incite financièrement les entreprises nationales à mettre leurs employés au repos. Rédacteur en chef NOËL LABELLE Un cinquième des Japonais actifs risquent de décéder d’un surmenage, qu’on dénomme au Japon «karoshi». C’est un très sérieux rapport gouvernemental qui le dit. Le document fait partie du premier livre blanc sur ce fléau et il a été validé début octobre par le cabinet du Premier ministre, Shinzo Abe. Le phénomène préoccupe les au- torités car des centaines de morts liées à l’épuisement au travail, par crise cardiaque, accident vasculaire cérébral ou suicide, sont recensés chaque année sur l’archipel. Sans parler de nombreux problèmes de santé considérés comme graves. Stress. D’après le rapport, 22,7% des firmes nippones sondées entre décembre 2015 et janvier 2016 ont affirmé que certains de leurs salariés faisaient plus de 80 heures supplémentaires chaque mois – 80 étant officiellement considéré comme le chiffre à par- tir duquel le risque de mourir de surmenage est élevé. L’étude démontre aussi que 21,3% des employés japonais travaillent 49 heures ou plus par semaine en moyenne, contre 16,4% des sa- lariés aux Etats-Unis, 12,5% en Grande-Bretagne et 10,4% en France. Le rapport indique également que les employés japonais déclarent des niveaux élevés de stress en rapport avec leur travail. Culture. Si les Japonais passent plus de temps au travail qu’ail- leurs, c’est parce que, dans les services en particulier, la producti- vité y est inférieure de moitié par rapport à celle des Etats-Unis. Ce phénomène s’explique culturellement. Les Japonais sont conditionnés à respecter la force du groupe avant celle de l’in- dividu, par l’éducation scolaire évidemment, mais aussi via l’en- vironnement sociétal au quotidien. La planification de projet est plus longue et minutieuse avant de lancer la production. Chaque tâche doit être définie au millimètre et surtout chaque action doit correspondre à un individu. L’ensemble des intervenants doivent connaître précisément leurs tâches, durée et champ d’action. La place à l’initiative est souvent nulle, ce qui implique une hiérar- chisation de l’information et du retour très forte et aussi beaucoup de micro-management. Loyauté. Du coup, de nombreux salariés sont employés à ne rien faire. Mais ils restent consciencieusement au bureau au-delà des heures légales, de peur d’être accusé de manquer de loyauté envers leur patron. Ce qui n’est pas du goût du gouvernement. La solution? Inciter les entreprises à les mettre au repos. Celles qui parviendront à persuader leurs employés de réduire leur nombre de journées de travail bénéficieront d’une subvention publique. Ce nouveau système pourrait être introduit l’an prochain. Le montant de la récompense financière accordée aux entreprises dépendra du nombre d’heures de repos qu’elles parviendront à imposer à leurs salariés. Comme quoi, un temps de travail trop élevé peut aussi peser sur les finances publiques. ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

8 / PROLOGUESANTÉ jalonné d’instances publiques qui admi- compte tenu des contraintes économiques nistrent l’autorisation de mise en marché du secteur.Le rôle majeur mais aussi le remboursement et le prix du Ainsi, pour l’auteur de l’étude, Pierredes acteurs médicament. Qu’il s’agisse de l’ANSM, de Bentata, il existe probablement deuxdécentralisés l’UNCAM ou du CEPS, le prix fait l’ob- voies en matière de prix. Celle empruntée jet d’un contrôle constant par les pouvoirs par les pouvoirs publics visant à réguler Les laboratoires et assureurs publics. Par ailleurs, la réglementation sans cesse des procédures de fixation de doivent s’assurer que le prix des contraint les laboratoires à financer une prix imparfaites, et celle s’appuyant sur médicaments soit le plus faible pos- partie des déficits de l’Assurance Maladie une réelle mise en concurrence dans la sible compte tenu des contraintes en cas de dépassement imprévu des ventes fixation des prix, faisant confiance à des économiques du secteur. de leurs médicaments. acteurs décentralisés. La dernière voie est La réglementation des prix ne peut cepen- sans aucun doute la plus prometteuse, CÉCILE PHILIPPE dant être arbitraire et se fonde sur les spé- mais elle constituerait une rupture avec la cificités de l’industrie. Celle-ci est marquée pratique actuelle. Institut économique Molinari par un fort besoin de R&D qui est par na- ture risquée. En effet, les investissements DÉMOGRAPHIEDans les derniers mois, la Ligue contre en R&D sont longs – en moyenne douzele cancer, Médecins du Monde et un années entre la découverte d’une molé- Le poids desgroupe de 110 cancérologues se sont éle- cule et sa commercialisation – et le taux migrationsvés contre les prix des médicaments inno- d’échec est très important – seule une mo- internationalesvants. Cette révolte alimentera sans doute lécule sur 10.000 criblées sera finalementles discussions autour du prochain projet commercialisée. En conséquence, seuls La population de la Suisse a pro-de financement de la sécurité sociale dont 14% à 20% des médicaments innovants gressé de 1,1% en 2015. Soit moinsl’objectif affiché est de maîtriser les coûts. commercialisés seront rentables et ces fortement qu’en 2013 et 2014.Pourtant cette démarche est superficielle, derniers doivent couvrir l’ensemble desà l’image de la dernière campagne de Mé- échecs de l’industrie sans quoi les innova- Fin 2015, la population résidante per-decins du Monde. Elle laisse entendre que tions futures seraient impossibles. manente de la Suisse a atteint 8 327 100ce sont les seuls laboratoires qui fixent le À cela s’ajoute le fait que les pathologies personnes, selon l’Office fédéral de la sta-prix du médicament. Ils estimeraient pour qui ne sont pas encore soignées sont par tistique. Elle a augmenté de 89 500 per-nous «le prix de la vie» en fonction de définition les plus complexes, nécessitant sonnes (+1,1%) par rapport à 2014. Cetteleurs critères de rentabilité. D’où l’appel toujours plus d’investissement en R&D progression est moins importante quede l’organisation en faveur d’une inter- pour découvrir un traitement. Ainsi, de- celles enregistrées en 2013 (+1,3%) et envention de l’État pour faire baisser le prix puis 2008, les investissements en R&D 2014 (+1,2%). L’augmentation de la popu-des médicaments. des plus grands laboratoires ont augmenté lation résulte essentiellement de l’apportCe discours passe sous silence le fait qu’en de 22%, alors que le nombre de médica- du solde migratoire. Il faut cependant no-France le prix du médicament est déjà un ments commercialisés est resté stable. ter que l’accroissement naturel, soit la dif-prix administré. Il est fixé par des pou- Au total, le coût actuel d’un médicament férence des naissances et des décès, contri-voirs publics en situation de monopole, à innovant s’établit à plus de quatre mil- bue également à l’augmentation de lapartir de leur perception des apports des liards d’euros. population en Suisse, contrairement à denouvelles molécules et de leurs coûts de Par ailleurs, ces médicaments ciblant un nombreux pays de l’Union Européenne.développements et de production. Si le nombre de plus en plus restreint de pa- En effet, des pays tels que l’Allemagne,prix de certains médicaments peut pa- tients, la logique économique contraint à la Grèce, l’Italie ou le Portugal, affichentraitre élevé, c’est davantage en raison de fixer un prix par patient de plus en plus plus de décès que de naissances.facteurs économiques, sanitaires et régle- élevé. Neuf cantons enregistrent une évolutionmentaires. Au-delà des contraintes économiques, les démographique supérieure ou égale àIl est impossible de conclure que ces prix délais d’autorisation ainsi que l’incertitude celle de la Suisse (+1,1%). Zoug, Vaud etadministrés sont «indécents» et qu’il y a relative aux modalités de remboursement Genève sont ceux dont les augmentationsnécessairement une marge de manœuvre impliquent des coûts supplémentaires qui sont les plus importantes – respective-significative pour les faire baisser à court peuvent expliquer en partie l’importance ment +1,7%, +1,6% et +1,5%. Neuchâtelterme, sauf à assumer le risque de nuire des prix. et Grisons affichent les progressions lesà l’innovation pharmaceutique. De même, La régulation actuelle des prix semble plus faibles (+0,4%). Uri est le seul cantonil est impossible de conclure que plus de imparfaite et pourrait mettre en péril la où la population diminue.régulation générerait plus d’économies. pérennité du système car elle ne permet La migration internationale est le premierBien au contraire. La question d’une orga- pas en même temps d’assurer l’innovation facteur de croissance démographiquenisation plus concurrentielle du système médicamenteuse, de fournir un accès aux dans notre pays. En 2015, la Suisse en-de santé pourrait offrir des pistes d’amé- thérapies nouvelles à tous et de maîtriser registre 188.500 immigrations, 116.600lioration. les dépenses publiques. Dans ce contexte, émigrations, soit un solde migratoire deEn France, commercialiser un médica- une autre voie est possible qui mettrait 71.900 personnes de nationalité suisse etment est un long parcours réglementaire, en concurrence la fixation du prix par les étrangère. En baisse depuis 2013, le solde acteurs décentralisés – laboratoires et as- sureurs – afin de s’assurer que le prix des médicaments soit le plus faible possibleAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

PROLOGUE / 9 taux négatifs? Quelle en est la significa- l’euro) qui, un jour, ne pouvaient qu’im- tion? Que faut-il en attendre? Telle est la ploser (Mervyn King). Cette implosionmigratoire recule de 5,7% en 2015 par seule et véritable question qui aujourd’hui s’est produite sous l’effet singulier d’unrapport à 2014. Les principaux groupes interpelle les économistes du monde en- événement marginal et localisé: la crisede personnes qui arrivent ou qui quittent tier. Elle est inséparable du problème de des subprimes. Les interventions massivesnotre pays sont italien, français, allemand, savoir quelles sont les raisons de l’échec des gouvernements et banques centralesportugais et espagnol. des gouvernements et des banques cen- ont sans doute contribué à éviter que neC’est à Genève, Bâle-Ville et Vaud qu’on trales, au bout de neuf années, à effacer se déroule dans l’immédiat le schéma tantrelève le plus grand nombre d’immigra- les pertes de la Crise et à ramener leurs redouté d’un processus massif de défla-tions et d’émigrations par rapport à la po- économies sur un sentier de croissance tion-dépression (quoique l’on puisse aus-pulation de chacun de ces cantons (51, 38 «normal». si soutenir la thèse inverse: à savoir queet 37 immigrations pour 1000 habitants; Le moins que l’on puisse dire est que c’est la réaction de panique des autorités34 et respectivement 23 émigrations la profession des économistes est au- américaines, conditionnées par le narra-pour 1000 habitants). Le solde migratoire jourd’hui profondément divisée quant tif traditionnel donné des événements derapporté à la population est donc le plus aux réponses proposées. Nous vivons une l’entre deux guerres, et non la crise desélevé dans ces cantons. Appenzell Rhodes- passionnante période où, poussés par ces subprimes par elle-même, qui a déclenchéIntérieures tient le bas du classement et interrogations, des chercheurs et de nou- l’engrenage systémique de la Grande Ré-affiche les taux les plus bas, soit neuf im- velles écoles de pensée émergent et boule- cession – Hertzel, Beckworth, Stockman,migrations et six émigrations pour 1000 versent l’acquis traditionnel des enseigne- Selgin). Mais les mesures prises ensuitehabitants. Par conséquent, son gain net de ments de la macroéconomie.population dû à la migration internatio- Ces nouvelles recherches se partagent en Au cœur même du systèmenale est l’un des plus bas de Suisse (4‰), gros en deux groupes – sans parler des de pensée normative se situeau même titre que celui de Schwytz ou théoriciens d’une économie alternative la source d’une accumulationd’Uri. d’extrême gauche. systémique de déséquilibres D’un côté il y a ceux qui privilégient l’ex- internes et externes.TAUX NÉGATIFS plication par l’évolution de long terme de facteurs structurels (démographie, tant pour activer une reprise qui tardaitL’ultime message technologie et productivité) ou par l’in- trop à se manifester (les QEs) que pour tervention de chocs exogènes non anti- réduire les risques futurs d’une nouvelle La situation actuelle est hautement cipés, perturbant le concert des grandes grande crise financière (Prudential Regu- anormale. Elle suggère la présence relations statistiques et économétriques lation) font que l’économie mondiale se d’un dérèglement profond représentatives du fonctionnement nor- retrouve aujourd’hui de nouveau piégée porteur de graves inquiétudes mal de l’économie moderne – comme dans une inextricable et mortelle combi- pour l’avenir. par exemple la dévaluation de la mon- naison d’effets pervers dont la situation naie d’un pays concurrent, des erreurs de actuelle sur les marchés financiers, en HENRI LEPAGE politique monétaire, des changements de particulier celui des valeurs fixes accapa- comportement psychologiques, la capture ré par les achats des banques centrales (au Institut Turgot du pouvoir par des groupes d’intérêt do- point d’y nourrir une spéculation sans li- minants…). mite puisque les QEs offrent à tout inves-Le fait nouveau de la période actuelle est De l’autre, des visions qui suggèrent que tisseur quasiment la garantie de pouvoir,l’épidémie de taux négatifs qui s’étend ce que nous vivons est le produit para- demain, tout revendre à l’acheteur publicdans le monde – pas seulement au niveau doxal de processus endogènes déclenchés avec profit), est l’un des révélateurs lesdes taux courts gérés par les banques cen- par les caractéristiques d’un environne- plus manifestes.trales, mais aussi et surtout sur le marché ment idéologique, monétaire et institu- Paradoxalement, les politiques poursui-des obligations à plus ou moins long terme. tionnel particulier: celui qui a émergé au vies depuis neuf ans ont eu pour effet,Les rendements négatifs représentent au- lendemain de l’effondrement du régime d’une part, d’assurer le retour en force dejourd’hui près d’un tiers du volume glo- de Bretton Woods et progressivement comportements de casino, pourtant tantbale des titres de dette publique détenues donné naissance à la glorieuse illusion décriés, fondés sur la recherche du risquedans le monde (13.000 milliards de dol- d’un nouvel ordre économique stable et (yield search), et donc de recréer les condi-lars, alors qu’à la fin du premier trimestre durable (the Great Moderation) partici- tions d’un nouvel accident; d’autre part,2016 on ne parlait encore que de 7000 pant de cette «Fin de l’Histoire» évoquée d’autre part, de provoquer un mouve-milliards; la proportion est même de près par Françis Fukuyama en 1992. ment de réduction globale des robinets dede la moitié pour l’ensemble des valeurs à Personnellement, l’idée que je retiens est la liquidité monétaire mondiale (le mar-taux fixes – dettes souveraines, quasi-sou- que c’est au cœur même de l’alpha et omé- ché mondial du refinancement) qui s’estveraines, covered and corporate bonds – ga du système de pensée normative qui amorcé dès 2008 avec la contraction desnégociées sur le marché européen). Cette détermine l’action, les réactions et les dé- activités de Shadow Banking, mais s’estsituation est absolument sans précédents cisions des banques centrales depuis l’ar- accentué ensuite avec le durcissementdans l’histoire. C’est aussi une situation rivée d’Alan Greenspan aux commandes progressif des mesures d’encadrementhautement anormale qui suggère la pré- de la Fed américaine à la fin des années réglementaire des banques et organismessence d’un dérèglement profond porteur 80, que se situe la source d’une accumula- financiers non-bancaires (Dodd-Franck,de graves inquiétudes pour l’avenir. tion systémique de déséquilibres internesComment expliquer cette épidémie de (endettement) et externes (la crise deAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

10 / PROLOGUE Peut-être cela se soldera-t-il un jour par avant (il faut tenir compte des évolu- la négociation d’un nouveau grand ac- tions de long terme, comme la démogra-Basle III), l’alourdissement du coût de cord monétaire international (pourquoi phie, ou encore le nouveau contexte deleurs activités (en particulier celles asso- pas le retour à une forme d’étalon-or «bonne» déflation lié à la technologie etciées à des opérations de tenue de marché) conçu pour mettre fin au vaste désordre aux effets de la globalisation – sur lequelet, à partir de 2013/2014, le retournement monétaire suscité par l’aveuglement et insiste souvent Alain Madelin). A condi-du dollar (taper tantrum). l’irresponsabilité de nos banques cen- tion aussi et surtout de ne pas connaîtreCette fermeture du robinet monétaire trales? Ou même, rêvons! La conversion d’ici là un nouvel effondrement financierinternational est très difficile à mesurer, à un régime de free banking à la Selgin?). de première grandeur en raison même demais, selon certaines recherches (Jeffrey Mais avant d’y arriver il est à craindre la dramatique impasse théorique et opé-Snider), elle serait d’une ampleur relative que nous n’ayons à traverser des heures rationnelle dans laquelle se retrouventinsoupçonnée. Elle reste en effet invisible très difficiles, marquées notamment par aujourd’hui piégées les politiques de(incompréhensible) si on ne prend pas en un resserrement des contraintes et disci- ceux qui prétendent précisément toutconsidération le fait qu’au cours des vingt plines mortifères d’une monnaie et d’une faire pour nous protéger contre un tel dé-dernières années le processus de mon- finance administrées (nationalisation du nouement (conséquence de l’implosion,dialisation s’est accompagné d’une mu- crédit, suppression du cash), ainsi que le conceptuellement inévitable, de la mégatation profonde et radicale, à l’échelle de retour de grandes inflations (comme cela bulle obligataire fabriquée par les grandesla planète, des mécanismes et circuits de se produit généralement dans de telles cir- banques centrales).financement et de refinancement global. constances).Dans cette perspective, l’acharnement de Dans cette optique, l’année 2008 n’est pas CONJONCTURE seulement l’année d’un accident, d’une L’année 2008 marque la rupture grosse récession dont, pour de multi Embellie dans le fonctionnement des ples raisons structurelles (comme l’ab- à nuancer chaînes de rouages complexes sence de réformes) ou circonstancielles qui ont émergé aux marges (à cause des erreurs, de la stupidité ou de L’indice des directeurs d’achat de la monnaie mondiale. l’incompétence des dirigeants) nous n’ar- poursuit sa progression. Mais la riverions pas à récupérer aussi rapidement production reste ralentie.la plupart des économistes – notamment que c’était le cas dans le passé – mais dontceux des banques centrales – à continuer nous sortirons bien un jour (théorie des L’indice suisse des directeurs d’achatsde penser les phénomènes macroécono- cycles). Bien plus fondamentalement, elle (PMI) a poursuivi sa progression enmiques à partir d’une grille de lecture marque le déclenchement d’une rupture, septembre, après un premier redressementstatistique, territoriale et nationale qui d’une fracture dans le fonctionnement des en août. L’indicateur a pris 2,2 points surempêche de reconnaître le rôle monétaire chaînes de rouages complexes qui, au fur un mois à 53,2 points, un niveau supé-que remplissent les rouages complexes et à mesure de l’extension/approfondisse- rieur aux prévisions, ont annoncé, débutde la finance internationale contempo- ment du processus de mondialisation, ont octobre, procure.ch et Credit Suisse. Horsraine (BRI), est sans doute l’un des princi- émergé aux marges de la monnaie mon- effets saisonniers, l’indice se hisse à 54,2paux facteurs responsables de l’échec des diale (le dollar) pour répondre aux besoins points. L’amélioration sur le front desbanques centrales à atteindre leur objectif. en liquidités de la nouvelle économie glo- entrées de commandes (55,2 points) etAutrefois (il y a cinquante ans), dans de bale (offshore banking, eurodollars). l’allongement des délais de livraison (57,9telles circonstances, on aurait parlé de crise C’est à la lumière de ce dérèglement – qui points) ont contribué à dépasser pour lemonétaire internationale, ce qui faisait les peut être de longue durée – qu’il faut in- dixième mois consécutif le seuil de crois-gros titres des journaux. Aujourd’hui, ce terpréter le message que nous envoie le sance de 50 points, ont précisé les auteursvocabulaire n’est plus de mode. Pourtant comportement inhabituel des taux d’in- de l’étude.la situation actuelle n’est pas fondamen- térêt. A leurs niveaux actuels, ceux-ci Selon procure.ch et Credit Suisse, l’embel-talement différente. Ce que nous vivons traduisent moins la persistance d’une po- lie est néanmoins à nuancer: la productioncorrespond aux manifestations d’une crise litique de relance monétaire ultra-accom- reste en berne à 52,8 points, soit la plusde fin de régime monétaire analogue à modante (comme persistent à le croire les faible croissance depuis novembre 2015 etce qui s’est passé à partir du moment où médias) qu’ils ne sont l’indice d’une ten- les suppressions de postes se poursuivent,l’ordre international d’après-guerre an- sion inverse (Milton Friedman et Le para- le sous-indice «emploi» se repliant à 47,0cré dans les accords de Bretton-Woods a doxe des taux). points.commencé à s’effriter sous les coups de Tant les experts de la BRI (avec leur théo- Les stocks de matières premières se sontboutoir de la nouvelle concurrence des rie des cycles financiers) que Kenneth Ro- renforcés pour la première fois depuiseuro-dollars. goff (l’auteur de This Time is Different) trois mois à 53,2 points, ce qui peut êtreCe vers quoi nous nous dirigeons à travers estiment autour d’une douzaine d’années interprété de deux manières différentes.le désordre de la situation économique le temps nécessaire pour que, à la suite Soit les entreprises s’attendent à unemondiale, et notamment sa manifestation d’une grande crise financière, l’économie hausse de la demande dans les semaines etdans l’émergence d’un univers de taux commence à se recaler sur une nouvelle mois à venir, soit la production est atone,négatifs, est une inévitable remise à jour «normalité». C’est l’ordre de grandeur qui précise l’étude. Les stocks de produits finiset réinitialisation (ce que les anglo-saxons ressort, semble-t-il, des comparaisons his- ont clôturé en dessous du seuil de crois-résument par le terme reset) des condi- toriques et que l’on peut retenir. A condi- sance à 47,0 points.tions fondamentales de l’ordre monétaire tion, toutefois, de ne pas s’imaginer quemondial. tout redeviendra nécessairement commeAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 



12 / PROLOGUE HIGH TECH pérenniser un savoir-faire reconnu mon- tuateurs en forme de concombre peuvent dialement, porté par un personnel qualifié. s’étirer sur près de cinq à six fois leurMICRO-CONNECTIQUE «Nous avons embauché une quinzaine de longueur et se plier de manière bidirec- personnes entre 2015 et 2016. Et nous en- tionnelle, selon les modèles. «Nous avonsMarché visageons d’en recruter une vingtaine en procédé à de nombreuses simulations etdynamique 2017», confie le dirigeant du groupe. établi un outil pour prédire la déforma- tion des actuateurs, en fonction de leur Le groupe lémanique Nicomatic ROBOTIQUE forme, de leur épaisseur ou des matériaux s’implante au Canada en 2017 dont ils sont composés», explique Gunjan pour développer sa partie Innovation Agarwal, première auteure de l’étude, citée aéronautique spatiale. majeure dans le communiqué. L’une des variantes consiste par exemple à habiller l’actuateurDéjà présent dans 54 pays, Nicomatic L’EPFL développe des softs robots d’une carapace en papier épais, plié grâces’est imposé comme un leader dans la mi- pouvant servir comme outils de à la technique des origamis.cro-connectique à haute valeur ajoutée réhabilitation. «Les constructions en élastomères sont trèsdans le secteur des connecteurs pour en- résistantes mais difficiles à contrôler. Il estvironnements sévères. Nicomatic avance Une équipe de l’EPFL a développé des ro- nécessaire de pouvoir prédire commentun chiffre d’affaires consolidé de 30 mil- bots flexibles, mous et reconfigurables, qui elles se déforment et dans quelle direction.lions d’euros pour l’année 2016, dont 85 peuvent servir d’outils de réhabilitation. Notre outil pour fabriquer les robots est% à l’international. Pour répondre aux exi- Mis en mouvement par injection d’air, ils maintenant disponible en ligne et téléchar-gences du marché, Nicomatic a augmenté imitent les muscles et peuvent être pro- geable par tout roboticien ou étudiant quisa voilure. Le site de Bons-en-Chablais est duits à large échelle. Traditionnellement, le souhaite», poursuit la spécialiste.ainsi passé de 4500 m² à 7000 m² après on attend d’un robot qu’il soit rigide, ra- Outre ce travail de simulation, d’autresla construction d’un nouveau bâtiment pide et performant. Il en va tout autre- chercheurs du RRL ont développé des spé-qui représente un investissement de cinq ment des robots développés au sein du cimens destinés au domaine médical, quimillions d’euros: «Nous avons, en outre, Laboratoire de robotique reconfigurable ont quant à eux été décrits dans le journalinjecté un million d’euros supplémentaire (RRL) de l’Ecole polytechnique fédérale Soft robotics. C’est le cas d’une ceinturedans l’acquisition de nouvelles machines de Lausanne (EPFL), a indiqué cette der- faite de plusieurs éléments gonflables, quid’usinage», explique Olivier Nicollin, nière le 12 octobre dans un communiqué. vise à soutenir et guider les mouvementsdirigeant de Nicomatic. Composés d’élastomères, tels que la sili- de patients lors d’exercices de réhabilita-Sur les douze derniers mois, le nombre cone et la gomme, ces «soft robots» ont été tion. «Nous travaillons avec des physiothé-de salariés est passé de 240 à 260 dont créés pour côtoyer l’humain de très près et rapeutes du CHUV, qui s’occupent de per-une centaine à l’étranger, répartis dans l’accompagner dans ses mouvements, tout sonnes ayant subi une attaque cérébrale»,huit filiales, situées pour l’essentiel sur le en préservant sa sécurité. Leurs moteurs explique Matthew Robertson, scientifiquecontinent asiatique (Corée du Sud, Japon, sont inspirés des muscles et leur corps est en charge du projet. «L’idée est d’utili-Chine, Singapour, notamment): «Une neu- composé de plusieurs «ballons». ser la ceinture pour soutenir le tronc duvième ouvrira début janvier 2017 au Ca- Les mouvements sont contrôlés en faisant patient et lui redonner une sensibilité dansnada où nous avons le groupe Bombardier varier la pression de l’air dans les diffé- les mouvements».comme client majeur», précise Olivier Ni- rents ballons. Les chercheurs du RRL ont Les modules de la ceinture sont faits decollin. Cette nouvelle filiale, qui sera ma- développé un modèle informatique qui tubes de gomme rose et de fil de pêchenagée par Clément Favrat, ingénieur, sera permet de prédire et contrôler précisé- transparent. La disposition du fil permetinstallée à Montréal, une «zone-clé dans ment le comportement mécanique de dif- de guider la déformation, lorsque l’airl’économie canadienne» au niveau aéro- férents modules. Il vient d’être publié dans est insufflé. Pour l’instant, la ceinturenautique. L’objectif de Nicomatic est de Nature - Scientific reports. est rattachée à un mécanisme de pompesdévelopper sa partie aéronautique spatiale Les applications générales pour les soft externe. La prochaine étape consistera àsur le marché dit du «Milaero» (contrac- robots vont de la réhabilitation des patients miniaturiser et intégrer ce système direc-tion de militaire et aéronautique), avec un à la manipulation d’objets fragiles en pas- tement sur la ceinture.chiffre d’affaires attendu de 500.000 euros sant par la fabrication de systèmes biomi- Les possibilités offertes par les robotsd’ici trois ans. Nicomatic envisage aussi de métiques ou l’assistance à domicile. «Nos mous ne s’arrêtent pas là. Les chercheursrecruter des représentants, sur les trois ans robots sont principalement conçus autour utilisent aussi les actionneurs par insuf-qui viennent, sur les villes de Vancouver, de la sécurité de l’utilisateur», explique flation d’air pour développer des robotsOttawa et Toronto et «d’ouvrir un bureau Jamie Paik, directrice du RRL. «Les risques capables de se déplacer dans un environ-de R&D au cœur d’un foyer de compé- de se blesser sont moindres si l’on porte un nement étriqué et hostile. De par leurtences très élevé sur ce territoire», détaille exosquelette composé de matériaux mous, structure entièrement molle, ces derniersClément Favrat. par exemple», illustre-t-elle. Dans leur pu- devraient aussi être capables de résister àL’entreprise chablaisienne surfe ainsi sur blication, les chercheurs montrent qu’ils des compressions, et des écrasements.la croissance des marchés de l’aéronau- peuvent prédire précisément les mouve- «Grâce aux actuateurs soft, nous pouvonstique (Airbus), de la défense (Dassault) et ments d’une gamme de modules, dont la inventer des robots aux formes multiples.de l’aérospatiale. Elle bénéficie d’une crois- structure est faite de compartiments et de Les matériaux qui les composent sont peusance régulière à deux chiffres (20% cette chambres placées en sandwich. Ces ac- chers et une construction à large échelleannée). L’entreprise de Bons-en-Chablais est facilement envisageable», conclutinvestit 20% de son chiffre d’affaires dans Jamie Paik. ///la recherche et le développement afin deAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

CAPITAL / 13Crible analytique et bon sens PAR ÉRIC BLANCHARD Associé-gérant Harold Alexander ConsultingAlignement. «C’est cohérent», dit l’ingénieur général che- situation saine est globalement cohérente, il y a là le premiersvronné au jeune financier, avant d’ajouter: «je ne sais pas si pas d’une analyse de risques. N’est pas d’ailleurs ce que nousc’est juste, mais c’est cohérent!». Ainsi se conclut la présenta- faisons dans notre vie de tous les jours? Lorsqu’un spécialistetion d’un dossier de plusieurs milliers de pages instruisant une nous tient deux discours différents à quelques temps d’inter-réclamation de plusieurs milliards. Au-delà du trait d’esprit, la valle, lui conservons nous notre confiance?recherche de la cohérence interne est un point fondamental La démarche pour l’entreprise est la même. Elle offre une bé-de nombreuses démarches. Les fonds de pri- DR quille facile pour un haut dirigeant amenévate equity de culture anglo-saxonne l’ont à prendre des décisions sur des sujets dontbien compris. Ils l’appellent l’alignement la technicité ne lui est pas familière. Géné-des intérêts. L’idée est simple. Il s’agit d’as- ralisons. Les projections financières d’unsurer un maximum de cohérence entre les business plan sont-elles cohérentes avec lesactions des principales parties prenantes à hypothèses sous-jacentes? Les nouveauxune reprise d’entreprise. Concrètement, ils développements d’une entreprise sont-ilssouhaitent que les managers des entreprises cohérents avec son positionnement actuel?dans lesquels ils investissent se comportent Une société qui n’a jamais mis les pieds horsen actionnaire (comme eux) et pas unique- de son pays peut-elle valablement ambition-ment en salariés. Le moyen: faire investir ner de lancer une franchise internationaleles dirigeants aux côtés du fonds avec des sans ressources nouvelles? D’une manièreperspectives de gains alléchantes en cas de générale, plus les sujets seront complexes,succès lors de la revente de l’entreprise. La plus la recherche de cohérence permettrapossibilité d’une perte en capital en cas de d’éliminer des options aberrantes ou peucontreperformance, complète l’aiguillon. crédibles. Cela ne signifie pas que les solu-Identification. Dans les groupes, cer- La recherche de la tions restantes seront les bonnes et que l’on cohérence interne des pourra baisser la garde! Simplement noustaines fonctions vont se prêter plus naturelle- projets ou des situations tenons là un filtre qui permet de gagner dument à la recherche de la cohérence globale. offre un outil simple temps et de concentrer ses efforts là où c’estC’est le cas de la trésorerie, par exemple. En nécessaire.effet, que penser d’un groupe multinational Nous pouvons même «jouer» à passer auoù chaque filiale va adopter sa propre poli- permettant d’éliminer crible du test de la cohérence la politiquetique de change? Les uns vendent du dollar rapidement les solutions de certains Etats. Les environnements lé-contre franc, les autres achètent du dollar peu praticables ou gislatifs et sociaux sont-ils cohérents aveccontre euro… Un capharnaüm, si personne dangereuses. les ambitions économiques? Un des plusn’y met de l’ordre, de la cohérence. brillants analystes géopolitiques expliquaitEn matière de communication également. l’échec de la guerre du Vietnam par l’incohé-Certains politiques l’illustrent parfois à rence fondamentale entre la volonté affichéemerveille. Lorsqu’il n’y a pas de cohérence entre les discours, des Etats-Unis d’imposer «son» système démocratique et lal’image travaillée par les agences spécialisées et le compor- culture profondément confucéenne du pays.tement du «produit» qu’est l’homme politique, l’effet est dé-vastateur. De la même manière, une entreprise qui voudra Base. Sans prétendre porter un jugement sur le fond, il estcommuniquer en surfant sur l’air du temps, mais en étant intéressant de noter que l’analyse est basée sur la rechercheloin de son ADN prendra des risques. Un «jeunisme» aven- de la cohérence. Certains sujets sont tellement complexestureux pour une entreprise vieillotte ne pardonne pas. Les qu’une étude systématique devient coûteuse en temps et/ouclients traditionnels ne se reconnaitront pas dans la nouvelle en moyens. La recherche de la cohérence interne des projetsimage et la nouvelle clientèle cible ne sera pas si facilement ou des situations offre un outil simple permettant d’éliminerconvaincue. Cette recherche de cohérence peut devenir une rapidement, sans trop de risque, des solutions qui s’avére-véritable grille de lecture. En première approche, elle permet raient peu praticables ou dangereuses. En réalité, une fois lad’identifier rapidement et de façon pragmatique des situations démarche rationalisée, la conclusion semble souvent releverpotentiellement dangereuses. En partant du principe qu’une du simple bon sens. Et c’est plutôt rassurant! ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

14 / ENTRETIEN MAJID OUKACHA, ESSAYISTELa critique de l’islam est dangereuse mais nécessaireLe jeune intellectuel français Majid Oukacha est l’auteur de «Il était une foi, l’islam…». Une critique des limiteset des imprécisions techniques des discours et des lois du Coran.Propos recueillis par Grégoire Canlorbe comprendre que ce que je pensais être une bénédiction d’être né dans un foyer islamique, qui me transmettrait cette foi capable deM ajid Oukacha est un jeune essayiste qui est me préserver de l’Enfer n’épargnant que les musulmans (dixit le né et a grandi dans une France qu’il recon- Coran), s’est aussi avéré être un fardeau permanent. Quand on naît de moins en moins à mesure que les est un musulman, chaque action anodine de la vie quotidienne années passent. «Ancien musulman mais est codifiée, de la façon de boire un verre d’eau au réveil à la éternel patriote» comme il aime parfois façon d’aller se coucher. Je me soumettais à Allah pour éviter les à se définir, il est l’auteur de «Il était une tourments de sa colère dans le monde de l’au-delà alors j’obéis-foi, l’islam...» (titre français de son ouvrage qui sortira prochai- sais à des codifications rituelles qui me semblaient parfois êtrenement en version anglaise), une critique systémique des lois une pure perte de temps ou un non-sens naturel. Mes amis non-islamiques les plus dangereuses, inapplicables et incohérentes, musulmans avaient l’habitude de m’entendre leur dire que jesans jugement de valeur ni moralisme manichéen. Sa méthode, devais interrompre une partie de football ou de cartes avec eux pourcensée dépoussiérer la critique exégétique de l’islam, ambitionne aller à la mosquée. Là-bas, j’apprenais essentiellement à faire lade démontrer que l’auteur du Coran serait tout sauf un dieu salât ainsi que le puits sans fond des codes comportementauxomnipotent, omniscient et à l’intelligence supérieure. Loin du élevés en vertus par la figure mythifiée du prophète Muhammad.politiquement correct et de la diplomatie du compromis, cet écri- Au milieu du troupeau uniformisé dans l’imitation d’un spectrevain au verbe fort et au parler vrai porte une démarche intellec- lointain qui ne faisait en définitive que nous soumettre à ses obli-tuelle salutaire apportant un éclairage nouveau sur une réalité gations et ses interdits, j’étais du genre à ne pas avoir peur deinquiétante, souvent plus facile à ignorer qu’à accepter. lever la main parmi l’assistance afin de poser des questions qui fâchent. J’avais beaucoup d’imagination, je ne m’interdisais rienPourriez-vous commencer par nous rappeler les circonstances et les de croire et mon esprit critique me rendait difficilement suppor-motifs de votre apostasie et de votre décision de prendre la plume table la compagnie de ceux qui aiment que d’autres réfléchissentpour démystifier l’islam auprès du grand public? à leur place. Pourquoi dans la loi coranique indiquant qu’il faut couper la main duComme tout Français qui est né et a grandi dans la France de la voleur ou de la voleuse (sourate 5, verset 38) Allah ne précise-t-Il pasfin du XXe siècle, j’ai la chance d’appartenir à une nation paci- quelle main du voleur est à couper (celle de droite ou celle de gauche)?fique qui m’a permis de jouir de droits et de libertés pour lesquels Et pourquoi ne précise-t-Il pas non plus la valeur minimum du larcinje n’ai jamais eu à me battre personnellement. Mes parents, des à partir de laquelle la main d’un voleur peut être coupée? Un vol decitoyens français d’origine algérienne et de confession musul- pomme commis par un voleur qui vole pour la première fois de sa vie,mane, m’ont transmis une culture et une éducation religieuse qui est-ce que ça mérite vraiment d’avoir la main coupée? Et pourquoime destinaient à demeurer durablement un musulman convaincu Allah ne précise-t-Il pas l’âge minimum du voleur devant avoir uneet concerné par le livre du Coran. A côté de cette éducation théo- main coupée? Un voleur âgé de douze ans et qui vole pour la pre-logique qui m’a été donnée, j’ai aussi reçu d’eux une éducation mière fois de sa vie est-il vraiment aussi responsable et responsabilisablecivique, sociale et éthique basée notamment sur le respect total de qu’un voleur multirécidiviste âgé de 40 ans?la France et de ses valeurs (incarnées par la devise républicaine Pourquoi tourner sept fois autour de cette pierre noire lors du Hajj et«liberté, égalité, fraternité»). pas 6 ou 8 fois? Que se passera-t-il si je tourne huit fois autour d’elle?J’ai commencé à fréquenter la mosquée dès l’âge de huit ans. Le Le prophète Muhammad nous explique dans sa Sunna que la femme,premier imam qui m’y a formé et qui venait d’un pays étranger, le chien noir ou l’âne passant devant un musulman en train de prieravait un accent français impeccable, un grand sourire qu’il exhi- peuvent chacun annuler la prière de ce dernier, mais, comme à sonbait allègrement et il prenait soin de ne jamais donner d’ordres à habitude dans la Sunna, Muhammad n’explique rien et se contenteses élèves en dehors des murs de la mosquée. Il lui est cependant d’avancer un jugement dénué de toute explication sur les causes d’ordredéjà arrivé une fois de me reprocher, devant les autres enfants pratique le motivant. Comment a-t-il pris connaissance de cette réalitésuivant les mêmes cours coraniques que moi, de quitter mon à l’apparence superstitieuse pour celui qui ne croit pas en l’islam? Soitdomicile avec ma chechia à la main et de ne la mettre sur ma il l’a comprise tout seul, mais dans ce cas, pourquoi ne pas en donnertête que lorsque j’étais suffisamment loin de mon quartier et que le cheminement intellectuel ou les raisons scientifiques, au lieu de sej’arrivais à quelques pas de l’entrée de la mosquée. Je n’ai jamais contenter de lancer cette sentence dogmatique? Si c’est dieu lui-mêmeeu honte de ma foi islamique mais j’ai toujours estimé que j’avais qui lui a transmis ce savoir mettant en cause l’âne, le chien noir ou lale droit de marcher dans la rue sans que l’on m’identifie d’abord femme passant devant celui qui prie, alors pourquoi le hadith citanten fonction de mes croyances religieuses.Les cours théologiques auxquels j’assistais deux à trois fois parsemaine (le mercredi, le samedi ou le dimanche) m’ont vite faitAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

ENTRETIEN MAJID OUKACHA, ESSAYISTE / 15«Partout où l’islam domine culturellement et politiquement,il n’y a que des conflits de cultures, des femmes culpabiliséesde plaire, infériorisées, maltraitées, et surtout une extinctioncontinuelle de la créativité et de l’imagination.»ce récit prophétique n’est-il pas devenu un verset du Coran, le Coran © DRétant censé représenter les messages d’Allah que le prophète Muham-mad se doit de transmettre à ses contemporains afin de les avertir et les Les problèmes ne se fuient pas indéfiniment. Ils s’affrontent à uninformer sur ce que leur créateur attend d’eux? Et si une femme passe moment ou un autre. Je me dois de convaincre le maximum deun kilomètre devant le prieur, la prière est-elle annulée? À partir de mes contemporains que l’islam est un danger pour nos droits etquelle distance maximale le pouvoir d’annuler une prière se résorbe-t-il libertés individuelles à tous, et j’ai choisi de le faire avec la litté-complètement? rature car l’écrit, les mots et la communication verbale sont lesLa suite logique, induite par l’effet domino de ces quelques ques- armes qui font ma force.tions, n’est qu’une infime partie des nombreuses réflexions qui ont Je suis, à ma connaissance, le seul auteur ayant réalisé unemaintenu mon cerveau vif et alerte durant les derniers temps de étude critique, globale et systémique, des principaux aspects ju-ma foi, loin du corset de l’endoctrinement, imperméable au doute ridiques et dogmatiques de l’islam, à partir d’une méthode ori-et au pragmatisme. Parce que je n’ai jamais obtenu de réponses ca- ginale: critiquer les limites et les imprécisions techniques depables de contenter mon regard critique sur les limites de cet Islam discours et de lois sans jamais utiliser le moindre jugement dejuridique auquel j’avais pourtant toujours prêté allégeance avec valeur ni la moindre considération morale pour cela. Je n’aiconviction, j’ai un jour décidé de chercher ces réponses direc- aucun tabou et les sujets les plus explosifs y passent: escla-tement auprès de dieu lui-même, tout simplement. Après avoir vage, pédophilie, criminalisation de la liberté de conscience…obtenu mon baccalauréat et juste avant d’entrer à l’université, j’ai Je pense que c’est la méthode la plus efficace pour démontrer au-mis à profit les longues journées calmes et ensoleillées de longues près du plus large public possible la caducité et la dangerosité devacances d’été pour commencer à étudier le Coran dans le but l’islam, une législation universaliste qui ne sait pas coexister avecde le comprendre avec un regard neutre, plus que de l’apprendre la différence.avec la confiance animant la foi du croyant.J’avais décidé de lire entièrement le Coran, de la première à la Le travail de critique rationnelle des limites techniques des lois du114e sourate, loin du devoir de mémorisation mécanique que je Coran fait de votre essai Il était une foi, l’islam... un genre d’étudem’étais imposé jusqu’alors, afin de consigner dans un cahier mes rare et original. Est-il possible de faire le même travail avec desimpressions, mes doutes, mes interrogations vis-à-vis de ce texte. livres religieux respectifs au christianisme ou au judaïsme?Cette lecture m’a non seulement forcé à devoir admettre que laquasi-totalité des dogmes et lois islamiques n’avaient aucun fon- Pour les musulmans, le livre du Coran est censé être, de la pre-dement scientifique ou rationnel, mais en plus, elle a mis en évi- mière à la dernière phrase, un récit ayant pour auteur dieu lui-dence le fait que l’Islam voulu par son fondateur est une religionmisogyne, esclavagiste et ennemie de la liberté de penser. J’étaistombé de haut. Ma confiance en ce qui était à la fois évident etintangible m’avait trompé tout ce temps. Et ce sont les valeurslibertaires et égalitaires de la France laïque et humaniste (que j’aiappris à respecter par mon éducation familiale et que j’ai apprisà aimer par mon éducation scolaire) qui m’ont donné la force derefuser de céder à la peur face au chantage à l’Enfer.Quitter l’islam m’a conforté dans mon inquiétude de toujours devoir le peuple français perdre toutes ces libertés et cet art de vivrequi en font un pays aimé et envié partout dans le monde. Toutesles révolutions ne commencent ou ne finissent pas nécessaire-ment dans un bain de sang. Dans une démocratie, la majorité ale pouvoir de faire ou de défaire une révolution sous un tonnerred’applaudissements et dans le tumulte émulateur des vivats dela foule, loin de l’anarchie et de la guerre. Le jour où la majoritéislamique de la France votera pour un président et des parlemen-taires capables de définir pour mes compatriotes et moi-même cequi sépare le vrai du faux, le bien du mal et le juste de l’injuste,quels choix me restera-t-il alors?AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

16 / ENTRETIEN MAJID OUKACHA, ESSAYISTE«La critique théorique de l’islam est une responsabilitépolitique. Car les fruits de cet arbre de la connaissanceproduisent du chaos partout où il s’enracine.»même, un dieu démiurge, omnipotent, omniscient et parfait. Ce N’est-il pas paradoxal d’affirmer que l’islamisme pourrait gouvernerdieu y proclame beaucoup de lois universelles liberticides qui ne une France de demain principalement peuplée de Musulmans alorssont pas limitées par le moindre cadre temporel ou géographique. même que la majorité des Musulmans qui y vivent semblent avoirCette base rend la critique exégétique du Coran beaucoup plus une pratique modérée, tolérante et pacifique de leur religion?claire et simple que celle consistant à critiquer des textes sacrésdes différentes formes de religions issues du judaïsme ou du chris- Si vous prenez les Français de confession musulmane un par untianisme. Le Talmud cite des récits originaux ou interprétations et que vous les interviewez sous l’œil d’une caméra, l’écrasantepensés par des humains, peu importe le rôle qu’ils se donnent par majorité d’entre eux vous sortira les slogans les plus capables derapport à dieu. Libre aux Juifs d’aujourd’hui de vouloir y adhérer résumer les grands principes promus par les Droits de l’Homme.ou de vouloir y opposer une approche critique. On peut se faire Ils vous parleront de liberté, d’égalité et de paix. Je me contente dela même réflexion vis-à-vis du Nouveau Testament, si cher aux faire des constats cliniques et de voir que la réalité s’acharne à im-Chrétiens. Dans la réalité du monde d’aujourd’hui, les pays où on poser des hasards beaucoup trop nombreux et récurrents pour devit le mieux lorsque l’on est une femme ou un libre penseur ce simples événements censés être aussi imprévisibles qu’aléatoires.sont précisément les pays ayant des racines ou une histoire chré- Les Français de confession musulmane ont beau se déclarer majo-tienne et/ou juive: la France, les États-Unis d’Amérique, Israël, ritairement pacifistes, l’Islam est le point commun culturel de lal’Australie, l’Angleterre… Ces pays défendent les libertés indivi- totalité des Français qui m’ont dit que les caricaturistes de Charlieduelles des plus faibles et des plus différents plus que n’importe Hebdo assassinés durant la tuerie du 7 janvier 2015 «ont bienlequel des pays musulmans du monde ne l’a jamais fait. Si un cherché ce qui leur est arrivé». Un autre sujet: le verset 34 de laMusulman veut critiquer un passage misogyne de la Bible ou de sourate 4 du Coran, qui autorise les hommes à frapper les épousesla Torah par exemple, grand bien lui fasse! Je juge un arbre à ses dont ils auraient à craindre la désobéissance. En général, lorsquefruits. La critique théorique du christianisme ou du judaïsme ne je parle avec un Musulman qui me dit que la femme n’est pas unsera jamais autre chose pour moi qu’un loisir intellectuel. La cri- être inférieur à l’homme selon le Coran, je lui pose la questiontique théorique de l’islam est en revanche une responsabilité po- suivante «Le verset 34 de la sourate 4 du Coran autorise ou inter-litique car les fruits de cet «arbre de la connaissance» produisent dit de frapper une épouse désobéissante?».du chaos partout où ce dernier s’enracine. Tandis que partout en Aussi loin que je m’en souvienne, aucun Musulman ne m’aFrance où le christianisme et le judaïsme forment la force cultu- jamais répondu que ce verset interdit de frapper une épouserelle dominante en des quartiers ou villes, je sais que les femmes désobéissante. Je n’obtiens que des tentatives de justification depeuvent s’y promener plus tranquillement qu’ailleurs et que les cet acte (déclaré illégal par les lois françaises) visant à amoindrirlibres penseurs comme moi peuvent y mécroire librement. Avez- sa portée ou défocaliser son impact de son but originel. Je nevous donc déjà entendu parler d’un ancien chrétien ou juif qui, compte même plus le nombre de Musulmans qui m’ont dit queau XXIe siècle, doit vivre caché car il a critiqué son ancienne re- les maris musulmans doivent frapper doucement leurs épousesligion? désobéissantes ou les frapper avec un petit bâton de bois comme un siwak. La loi française interdit de frapper une épouse désobéis-Vous tenez à rappeler que l’islamisation démographique du peuple sante, tout court. Frapper doucement une épouse désobéissante,français est galopante et que la capacité des Musulmans à représen- c’est quand même la frapper et l’humilier !ter un jour la majorité des électeurs de notre pays nous expose au Quoi que racontent les Musulmans de France tiraillés entrerisque d’une islamisation juridique et du pouvoir politique français. les codes culturels occidentaux et le Coran, la majorité des Musulmans se sent plus proche d’un Musulman islamiste qui veut Journaliste indépendant appliquer à la lettre les lois du Coran que d’un non-Musulman qui ignore le Coran. Il y a les discours et il y a la réalité des faits. Grégoire Canlorbe vit actuellement à Paris. Quand un pays musulman est dirigé par un islamiste, aucune Il a mené différentes interviews pour le compte révolution populaire ne renverse ce dernier au profit d’un chef de journaux tels que la revue scientifique Man d’État droit-de-l’Hommiste. Les révolutions populaires dans le and the Economy, fondée par le lauréat du Prix monde musulman ne déchoient en général de leur pouvoir que Nobel d’économie Ronald Coase, et des think des dictateurs aux mœurs occidentales, tels Mouammar Kadhafi tanks tels que Gatestone Institute et Founda- ou Ben Ali. L’islamiste Mohamed Morsi a été victime d’un coup tion for Economic Education. d’État militaire, dont d’ailleurs peu de dirigeants occidentaux se sont indignés. La paix, ça se vérifie dans les actes plus que dans les prétentions.AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

ENTRETIEN MAJID OUKACHA, ESSAYISTE / 17«Les problèmes ne se fuient pas indéfiniment. Ils s’affrontentà un moment ou un autre.»Les pires endroits au monde où vivre quand on est athée ou conserver leurs postes dans une logique du «diviser pour mieuxquand on est une femme, ce sont précisément les pays où l’islam régner», mais aussi de détourner l’attention des Français vis-à-visest la force culturelle dominante. Pourquoi nier ce qui n’est pas leurs manquements face aux défis économiques majeurs contreun hasard? L’islam est consubstantiellement un problème du fait lesquels leurs idées nouvelles sont restées de vaines promesses.du caractère divin que voient les Musulmans en ce livre escla-vagiste, liberticide et misogyne qu’est le Coran. Un leitmotiv contemporain de la part des idéologues et des diri- geants dans le monde Islamique consiste à fustiger le déclin de laQuand il s’agit d’évoquer la progression rampante de l’islamisation spiritualité parmi les Occidentaux et à présenter l’Islam comme ledes mœurs et de la loi en démocratie française, à quels symptômes remède à la décadence matérialiste censée mener notre civilisationde la mainmise de l’Islam sur le territoire pensez-vous en priorité? à sa perte. Sayyid Qutb, référence philosophique de Ben Laden,Qualifieriez-vous de suicide culturel l’inertie française face à l’isla- écrivait ainsi dans Ma’alim fi al-Tariq, publié en 1964: «L’humanitémisation? est aujourd’hui au bord d’un précipice. […] Le monde Occidental se rend compte que la civilisation occidentale est incapable deLoin des discours politiques, il suffit d’écouter directement le présenter des valeurs saines pour indiquer aux hommes la ligne àpeuple décrire des problèmes qui n’existaient pas en France suivre. […] L’Islam est le seul système qui possède ces valeurs etil y a encore cinquante ans et qui deviennent de plus en plus ce mode de vie.» Que répondez-vous à ce discours de haine enversrécurrents. La plupart de ses élus locaux y courtisant les votes le prétendu individualisme permissif et consumériste des sociétésdes Musulmans pour les élections locales bafouent la laïcité, Occidentales?ciment du pacte de stabilité sociale et culturelle liant les citoyens.Les mosquées poussent partout sur tout notre territoire, trop sou- J’ai parfois l’impression que nos dirigeants ont de moins en moinsvent grâce aux impôts des Français ou aux terrains appartenant honte de justifier la sauvegarde de la fin morale par des moyensà des collectivités territoriales. Le sapin de Noël qu’il y avait dans immoraux. Par exemple, au prétexte de lutter contre «la radicalisa-l’école maternelle de mon enfance est dorénavant devenu, dans tion de l’islam », beaucoup de nos hommes politiques voudraientla France d’aujourd’hui, une offense envers la foi religieuse de que la laïcité française laisse sa place à un système reconnaissantcertains. Je vous laisse deviner qui sont ces «certains»... juridiquement et socialement une version «sous contrôle d’État»De même, dans la France d’aujourd’hui, des Français chrétiens, d’un islam adoubé, financé et promu par les pouvoirs publics.athées ou agnostiques, qui mangent ou boivent dans la rue du- Le seul islam que pourrait reconnaître l’État français actuel seraitrant le ramadan peuvent se voir reprocher (parfois violemment) bien évidemment une religion définie comme pacifique et tolé-de manquer de respect envers les Musulmans en osant consom- rante par son fondateur, le prophète Muhammad. Les Musulmansmer un sandwich ou une boisson dans un lieu public et en plein sont si nombreux en France et ils représentent un tel poids électo-jour. Je n’ai personnellement jamais entendu le témoignage du ral que cela ferait l’effet d’une bombe dans l’opinion publique demoindre Français non-Juif qui aurait affirmé s’être vu reprocher devoir admettre qu’ils vénèrent un dieu qui estime que l’absencede téléphoner ou conduire durant le jour de shabbat. Que les Mu- de foi en l’islam est un crime méritant un séjour éternel dans lesulmans qui se prétendent pacifistes et républicains commencent feu de l’Enfer. Les islamistes, qui veulent que le Coran créant parpar faire le ménage dans leurs rangs en osant déjà au moins ad- nature la désunion et la guerre reste un sujet à mystères et à fan-mettre que certains problèmes viennent quasi-systématiquement tasmes pour la majorité des foules mécréantes, ne pouvaient pas(pour ne pas dire systématiquement) de gens prétendant à la rêver meilleur cheval de Troie pour avancer masqués.même allégeance religieuse qu’eux. La France est de plus en plus la victime d’une forme d’ironie duL’islam n’est en soi qu’un concept et pas un être pensant capable sort dans laquelle ses propres valeurs et principes fondateurs luid’agir ou de s’abstenir d’agir. On a à présent du recul en France sont retournés contre elle-même. Je suis un défenseur de la libertéet on peut observer en toute objectivité que dans des quartiers de croyance et de l’égalité entre tous les Hommes, peu importeou villes de France où l’Islam est la force culturelle dominante leur sexe, couleur de peau ou religion. Mais je n’ai pas envie que lasur plusieurs générations, le vivre-ensemble n’existe pas. L’islam sauvegarde de ces idéaux impose de remplir de propagandes isla-qui domine culturellement et socialement des territoires français mophiles les manuels scolaires publics lus par les enfants Français.qui n’ont pas toujours été islamisés donne envie à la majorité des Le système politico-médiatique, qui fait la pluie et le beau tempsnon-Musulmans de fuir ces zones lorsqu’ils en ont les moyens en France et qui a de plus en plus de mal à nier les vérités quifinanciers. Les politiciens français qui nous gouvernent actuel- dérangent, aime les mensonges qui rassurent. Hier encore, il nouslement n’ont aucun intérêt à reconnaître et solutionner ce pro- disait que «l’invasion migratoire musulmane est un fantasmeblème car il est un sujet de clivages électoraux qui leur permet de d’extrême-droite». Aujourd’hui, il sous-entend que «de touteAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

18 / ENTRETIEN MAJID OUKACHA, ESSAYISTE«Le sapin de Noël dans l’école maternelle de mon enfanceest dorénavant devenu une offense envers la foi religieusede certains.»façon, ils sont là durablement, on ne peut rien y changer car ils criminalisée par un Coran qui envoie dans l’Enfer éternel toussont à présent trop nombreux, nous devons donc faire avec afin ceux qui n’ont jamais étés musulmans dans la vie d’ici-bas, m’im-d’éviter la guerre civile». porte plus que tout. Je suis contre le sacrifice d’innocents qui enJe n’ai pour ma part pas envie de faire des compromis politiques sauveraient d’autres, au nom de la liberté, tout comme je suisavec des politiciens islamistes qui vénèrent un livre esclavagiste et contre la défense de ce même idéal en me servant du mensonge.misogyne qui criminalise la liberté de croyance. Je préfère l’indi- Je ne crois en ce moyen qu’est la liberté que lorsqu’il défend la vievidualisme des idéaux intellectuels et valeurs morales de la civili- et la vérité des Hommes, tout simplement. L’islamisation crois-sation occidentale moderne au système big-brotherien islamique sante du peuple français n’est pas une vague de liberté célébrantqui criminalise des libertés qui n’ont d’impact que sur les seuls et accomplissant la raison. Cet ordre socio-culturel dominateur,auteurs adultes et indépendants qui en jouissent. Liberté de faire dogmatique et impérieux qu’est la foi en l’islam est une prisonl’amour avant le mariage, liberté de mécroire en une religion ou intellectuelle qui ne tient que sur la peur et l’ignorance d’espritsde se convertir à une autre religion à tout moment de sa vie, liber- perpétuellement infantilisés et domestiqués. C’est clairement parté de se moquer des puissants (ce qui inclut ces éternels puissants les naissances et l’immigration massive que l’islam deviendrade l’islam que sont Allah et Muhammad). la foi majoritaire en France. Pour un converti qui pense que le bouddhisme des bédouins le sortira de son spleen baudelairien, ilQuand il s’agit de mettre au jour ce qui apporte le succès dans les y a 999 Musulmans qui sont nés et ont grandi dans un foyer mu-rapports de force militaires ou commerciaux entre nations, l’histoire sulman. J’invite les Français à juger l’arbre de l’islam aux fruitsde l’islam semble remettre en question les libertés censées être à la pourris qu’il produit systématiquement dans la réalité. Partoutsource de la puissance de nos sociétés Occidentales. où l’islam domine culturellement et politiquement, il n’y a queComment expliqueriez-vous que l’islam soit parvenu à s’imposer des conflits de cultures, des femmes culpabilisées de plaire, infé-face aux sociétés occidentales au point de perdurer depuis plus d’un riorisées, maltraitées, et surtout une extinction continuelle de lamillénaire, tandis que les régimes fascistes et soviétiques se sont créativité et de l’imagination. Les (relativement) rares artistes eteffondrés en moins d’un siècle? scientifiques du Monde Musulman qui réussissent à sortir du lot et à se faire connaître mondialement ont tous reçu une éducationLe nazisme ou le communisme le plus totalitaire sous l’URSS ou une instruction occidentale, loin de l’optimum des possibilitésavaient à leur tête des hommes faillibles qui pouvaient connaître que leur aurait offert leur terre d’origine qui uniformise et essen-des défaites militaires, des trahisons qu’ils n’avaient pas su prévoir tialise les êtres humains. Les Français qui redoutent l’islamisationet, en définitive, la mort. L’islam est un totalitarisme qui a à sa tête de la France, par la politique ou par la guerre, ne peuvent plusun dieu éternel qu’on ne peut ni vaincre ni soumettre. se taire. L’heure est grave. Il faut oser, parler, agir. Que ceux quiDu point de vue des musulmans, le Coran a pour auteur un dieu attendent et qui espèrent, secrètement, derrière une porte close,parfait, omnipotent et omniscient, qui impose comme législa- loin du concours de l’action, ne se plaignent pas le jour où leurtion suprême des lois valables en tous temps, en tous lieux, et ce droit de garder le silence deviendra un devoir de se taire. ///jusqu’au jour du jugement dernier. Le totalitarisme le plus abou-ti et efficace au monde est de loin l’islam et ses fanatiques les Majid Oukacha tient à remercier les entreprises comme Google et Twitter,plus dangereux ne cesseront jamais de se battre en son nom parcequ’il est impossible de triompher de leur dieu inexistant. Ce qui qui mettent à la disposition du plus grand nombre des outils gratuits qui pro-n’existe pas ne peut pas perdre ni mourir!Une fois qu’Hitler était mort, il était beaucoup plus facile pour meuvent la pluralité des opinions et la liberté d’expression comme aucun médiabien des nazis de fuir le front ou de retourner leur veste. Tuer ledieu d’un totalitarisme universaliste est un des moyens les plus mainstream français ne le peut aujourd’hui.efficaces de nuire aux ambitions des dévots qui souhaitent ledéfendre. Encore faut-il que ce dieu puisse n’être qu’un Homme... https://twitter.com/MajidOukachaJusqu’où seriez-vous prêt à aller au nom de la liberté? MAJID OUKACHA IL ÉTAIT UNE FOI, L’ISLAM…L’anarchie totale, ce système horrifiant où règne la loi du plus fort L’histoire de celui qui voulaitet l’instabilité permanente, n’est-ce pas finalement cela la vraie diviniser pour mieux régnerliberté d’un point de vue politique? Je suis un défenseur des li- Editions Tatamis, 450 pagesbertés individuelles fondamentales, celles qui n’ont d’impact quesur les seuls auteurs qui décident d’en jouir. La liberté de penser,AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

PRÉVOYANCE / 19 © REUTERS Périlleux engagements L a forte chute des taux d’intérêt ne fait pas les af- faires des institutions de prévoyance. Elle se traduit en effet pour ces organismes d’assurance porteurs d’engagements longs par l’alourdissement de la charge des prestations futures et la nécessité de pro- visionner davantage. Les performances des caisses de pension ont diminué en 2015 suite à l’abandon du cours plan- cher de l’euro et l’introduction des taux négatifs. Le déséquilibre entre actifs et retraités s’accentue, avec en sus des réductions de prestations. La politique monétaire menée par la BNS a fait pas- ser la performance moyenne des instituts de prévoyance de 7,31% en 2014 à 1,13% l’an dernier. Ils ont ainsi manqué le rendement moyen visé de 3,9% et les prescriptions minimales de 1,75%. L’environnement de taux bas voire négatifs a entraîné une hausse des placements risqués. Dans le même temps, les taux de cou- verture des caisses de pension ont diminué. Celui des caisses de pension privées est passé de 113,6% en 2014 à 110,4% fin 2015 pour se retrouver au niveau de 2013 (110,3%). L’évolution est analogue dans les caisses de pension publiques, avec un taux de couverture de 92%, contre 97,9% en 2014. Malgré ce contexte défavorable, la plupart des caisses de pension disposent encore d’environ 10% de réserves pour réagir aux fluctuations à court et moyen terme. Cela explique la stabilité actuelle de la situation de financement des caisses de pension suisses. Jusqu’à quand? ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

20 / PRÉVOYANCERecommandations précises en période incertaineLes taux d’intérêt bas font pression sur les caisses de pension. Ce qui impose des décisions essentielles pour éviterun affaiblissement de son patrimoine.V u le bas niveau des taux Étudiez donc minutieusement les deux ROLAND BRON d’intérêt, de plus en options, afin de déterminer si le départ à la plus de caisses de pen- retraite anticipé vous garantit réellement VZ Suisse Romande sion doivent réduire des revenus plus élevés. les rentes. En cause? 2. Faites-vous verser votre avoir auprès de Voici cinq points à considérer avant de La baisse du taux de la caisse de pension ou une grande par- prendre cette décision cruciale:conversion et du taux d’intérêt LPP. tie de celui-ci sous forme de capital avantPrenons un exemple: en 2002, une per- votre départ à la retraite. Vous pourrez 1- COMPAREZ LES RENTRÉES ET LESsonne de 55 ans avec un salaire assuré de ainsi aborder sereinement une baisse du120.000 francs pouvait encore escompter taux de conversion. Dans ce cas, il est DÉPENSES COURANTESune rente de 46.100 francs par an de la essentiel de bien analyser les avantages etpart de la caisse de pension. Si cette même les inconvénients d’un retrait sous forme C’est la règle d’or: les dépenses fixes cou-personne avait 55 ans aujourd’hui, elle de capital. rantes doivent être couvertes par les reve-toucherait probablement 14.200 francs 3. Réduisez votre taux d’activité de 100 nus courants comme les rentes, les intérêtsde moins une fois à la retraite. Cela en à 50%, à l’âge de 63 ans par exemple. La et les autres rentrées régulières.supposant que les bonifications de vieil- plupart des caisses de pension acceptentlesse s’élèvent à 18% et que son avoir au- 2 - CONSIDÉREZ QUE LE TAUX DEprès de la caisse de pension se monte déjà D’autres baisses du tauxà 250.000 francs, dont 125.000 francs de conversion semblent CONVERSION DEVRAIT ENCORE BAISSERd’avoir obligatoire LPP. actuellement inéluctables. Il pourrait osciller d’ici quelques Le taux de conversion actuel, qui figure enCompliqué. Les taux d’intérêt bas font années autour de 5. principe sur votre certificat de prévoyance, pourrait encore baisser d’ici votre départ àpression sur les caisses de pension. Le taux de vous verser la moitié de votre rente de la retraite. Il est donc important d’élaborerde conversion légal s’élève actuellement à vieillesse au taux de conversion actuel. un solide plan financier qui tienne compte6,8%. C’est le taux que les caisses de pen- À 65 ans, vous pourrez retirer le reste de différents scénarios.sion doivent appliquer à l’avoir obligatoire de votre avoir sous forme de capital oupour le calcul de la rente de vieillesse. sous forme de rente. Le nouveau taux de 3 - NE VOUS BASEZ PAS UNIQUEMENTComme l’espérance de vie augmente, ce conversion – plus bas – sera appliqué àtaux est de plus en plus difficile à finan- cette partie de la rente. SUR LA FISCALITÉcer. Par ailleurs, les taux d’intérêt très bascompliquent encore la tâche des caisses de Réflexion. Avez-vous avantage à reti- Les rentes sont entièrement soumises àpension. Les institutions de prévoyance l’impôt sur le revenu, tandis que le capitalpeuvent déterminer elles-mêmes le taux rer votre deuxième pilier sous forme de n’est imposé qu’une seule fois et à un tauxde conversion qu’elles appliquent à l’avoir capital, ou à percevoir une rente de la inférieur. Le retrait en capital est donc plussurobligatoire. Ces dernières années, de caisse de pension? Cette décision mérite intéressant d’un point de vue fiscal. Maisnombreuses caisses de pension l’ont abais- mûre réflexion. Selon la loi, tous les as- d’autres facteurs, par exemple l’espérancesé sous la barre des 6%. Et vu le bas ni- surés ont le droit de percevoir au moins de vie et la sécurité financière des survi-veau des taux d’intérêt, d’autres baisses un quart de leur avoir de vieillesse obliga- vants, sont tout aussi importants.semblent inéluctables: selon l’institution, toire sous forme de capital. Mais de nom-ce taux pourrait osciller d’ici quelques an- breuses caisses de pension permettent à 4 - ÉVITEZ LES PRODUITS DE CAPITAUXnées autour de 5%. Voici trois conseils pour leurs assurés de retirer la moitié, voireéviter une réduction de votre rente LPP: la totalité de leur capital. Or, le montant IMPOSABLES1. Prenez votre retraite avant l’entrée en accumulé durant la vie active s’élève sou-vigueur de la baisse du taux de conver- vent à plusieurs centaines de milliers de Si vous choisissez de retirer votre capital,sion. Ainsi, votre rente sera encore calcu- francs. Il est donc essentiel de bien peser vous devez déterminer la manière dontlée selon le taux actuel. Mais attention: si les avantages et inconvénients des deux cet argent sera investi. Cela requiert unevous touchez votre rente de manière an- formes de retrait. stratégie de placement sur mesure. Enticipée, cela entraîne aussi des réductions. particulier, il convient de réduire au mini- mum les produits de capitaux imposables. Les revenus d’intérêts et les dividendes sont entièrement soumis à l’impôt sur le revenu, tandis que les gains en capital sont exonérés. 5 - COMBINEZ RENTE ET RETRAIT SOUS FORME DE CAPITAL De plus en plus de futurs retraités optent pour un retrait «mixte»: ils se font verser une partie du capital et touchent le reste sous forme de rente. La rente sert à assu- rer les besoins de base jusqu’au décès. Et avec le capital versé, il est en tout temps possible de satisfaire certains vœux parti- culiers. ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

moserdesign.ch A 23 ans, Benoît ouvrira sa première entreprise de jardinier-paysagiste. Nous serons là pour lui ! Comme Benoît, vous avez toujours suivi votre propre voie et rêvé d’entreprendre. Le Fonds interprofessionnel de prévoyance est une institution de prévoyance professionnelle gérée par le Centre Patronal. Le FIP vous accompagne et vous facilite la tâche en vous proposant des formalités administratives simplifiées et des prestations supérieures à la moyenne, parfaitement adaptées à vos besoins comme à ceux de votre entreprise. www.centrepatronal.ch/prevoyance

22 / PRÉVOYANCEComment planifier sa prévoyance en tempsde quasi récession chroniqueLes entrepreneurs ayant contracté un plan de prévoyance cadres peuvent bénéficier de solutions alternatives attractives.Malgré la pénurie de placements rentables. PASQUALE ZARRA Directeur PensExpert, LausanneAlors que les rendements tefeuilles dont les niveaux de rendements ser ses éventuelles lacunes de cotisations des obligations sont au plus bas et que la Banque sont plus ou moins élevés, selon leur par des rachats. Lesquels sont par ailleurs Nationale Suisse (BNS) maintient son taux d’in- profil de risque. Ainsi, le patrimoine cou- fiscalement attractifs. En effet, un rachat térêt négatif, les caissesde pension (CP) font face à un dilemme vert par le plan «cadres» peut être investi peut être extrêmement rentable. Il estgrandissant: comment satisfaire leurs en-gagements envers les assurés tout en ré- jusqu’à 50% en actions à hauts dividendes. entièrement déductible de l’impôt et bé-duisant les coûts en jugulant les risques?De nombreuses institutions de pré- De plus, cette part peut être complétée en néficie des rendements du portefeuille.voyance doivent se résoudre à baisserleur taux de conversion dans la partie y ajoutant des titres immobiliers et alter- Le calcul de la déduction fiscale se basesurobligatoire. Toutefois, certaines caissesde pension parviennent à maintenir leur natifs. sur le taux marginal d’imposition. Partaux de conversion. Et parmi elles, cellesqui proposent des plans de prévoyance exemple, un rachat de 100.000 francs.cadres avec libre choix de la stratégie deplacement pour les tranches de revenus si- Potentiel. Cette démarche lui per- avec un taux de 30% ne coûtera en réalitétués au-delà du montant limite du Fonds mettra non seulement de mieux planifier que 70.000 francs. Il faut toutefois garderde garantie LPP, soit 126.900 francs. Untel plan donne le libre choix de la stratégie sa retraite et d’obtenir des déductions à l’esprit que le but premier d’un rachatde placement de ses avoirs, ainsi qu’uneplus grande responsabilité individuelle fiscales, mais également de bénéficier des est d’investir dans sa prévoyance, pour sasur ses comptes. Une opportunité dontde nombreux entrepreneurs, chefs et pro- plus-values d’une relance boursière, en retraite. L’attrait fiscal est la résultante depriétaires d’entreprises profitent. fonction de ses choix de placements. cet investissement. L’horizon de temps, laAnalyse. Mais avant de procéder au Reste que cette disposition est un réel capacité de rachat et l’existence éventuellechoix d’une stratégie, il importe de faireune analyse poussée et minutieuse de l’as- atout, surtout par rapport aux caisses de d’avoirs de libre passage sont détermi-suré. Il faut analyser sa situation familiale(marié, divorcé, enfants), son patrimoine pensions classiques, dans lesquelles la ges- nants pour calculer le montant des rachats(immobilier, actions, etc.), l’horizon detemps à disposition et son train de vie, afin tion des fonds est déléguée aux conseils de et les planifier.de définir le niveau des prestations.Selon ces différents éléments, la personne fondation, peu à même de répondre aux Libre. Il est toujours difficile de stopperintéressée pourra ainsi bénéficier de pres-tations améliorées, telles qu’une meilleure besoins individuels des cadres.protection en cas de décès pour les survi-vants ou une meilleure rente d’invalidité. Plutôt que d’opter pour un revenu à di- sa carrière du jour au lendemain lorsqu’onEnsuite de quoi, il est possible de réfléchirà la meilleure stratégie à adopter. videndes élevés et un salaire moindre, un est entrepreneur dans l’âme. TransférerLa gestion des avoirs au sein d’un plande prévoyance cadres s’apparente à celle salaire supérieur permettra de compen- son 2e pilier auprès d’une institution dedu «private banking». Dans les limiteslégales, les assurés peuvent décider libre- libre passage, plutôt que de le re-ment de placer leur capital dans des por- tirer sous forme de rente ou de ca- RÈGLES DU JEU POUR LES RACHATS pital, est une solution qui a la cote.  Après un versement anticipé (OEPL*): Au-delà de la possibilité du trans- aucune possibilité de rachat fert du 2e pilier à une fondation de  Assuré en provenance de l’étranger dès 2006: libre passage et de choisir la stra- restriction de rachat pendant 5 ans tégie de placement de ses fonds,  Choix du versement en capital: dans les limites fixées par la loi, délai de blocage de 3 ans après le dernier rachat il y a aussi la possibilité du split  Prévoyance de base et pour les cadres: du capital auprès de deux institu- application commune de la règle du délai de tions de libre passage. Il n’en reste blocage pas moins que la liberté leur est  Divorce: offerte de retirer leurs avoirs selon les rachats suite au divorce sont à effectuer avant leurs besoins, au plus tôt cinq ans les rachats ordinaires avant l’âge ordinaire de la retraite  Comptes de libre passage: AVS et au plus tard cinq ans après. prise en compte de tous les avoirs de prévoyance Ce qui présente également un accumulés intérêt fiscal.  Prévoyance de base: Flexibilité. Comment gérer prise en compte de la surcapacité des avoirs de la CP le droit aux prestations en cas de *Ordonnance sur l’encouragement à la propriété du loge- décès? Dans certains cas, un plan ment au moyen de la prévoyance professionnelle. pour cadres offre une plus grande flexibilité dans l’ordre de succes-AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

PRÉVOYANCE / 23Le but premier d’un rachat est d’investir dans sa prévoyance.L’attrait fiscal est la résultante de cet investissement.sion que ce que stipule la loi. Ainsi, la à un contrat de prévoyance pour cadres, ficier d’un plan de prévoyance cadres.législation en matière de prévoyance pro- divorcé, vivant seul, père d’un enfant de Procurant plus de transparence aux assu-fessionnelle fait la différence entre les 24 ans qui suit une formation et d’un rés et des opportunités d’investissementenfants qui ont le droit à une rente et ceux autre de 26 ans. En cas de décès, ses avoirs à long terme, un tel plan permet surtoutqui ne l’ont pas. Concrètement, seuls les de retraite seront par défaut entièrement aux cadres de verser des primes qui finan-enfants âgés de moins de 18 ans révolus légués à son cadet. Pour éviter un tel cas de ceront uniquement les prestations qui lesont le droit à une prestation de survivant figure, mieux vaut s’assurer que la caisse concernent directement. Par les tempsou ceux de moins de 25 ans, s’ils sont de pension prévoit dans sa réglementation qui courent, c’est un avantage qui est loinencore en formation. la possibilité de modifier la répartition de d’être négligeable. l’héritage, afin que celui-ci soit équitable- Reste que gérer sa retraite devrait pou-Transparence. Dans le domaine de ment distribué parmi les descendants. voir être aussi personnel que gérer son Ces différents exemples, soulignent à quel entreprise, qu’on soit patron de PME,la prévoyance pour les cadres, il existe point il est nécessaire et judicieux de se indépendant ou cadre. C’est le cas lorsquequelques possibilités légales offrant une pencher attentivement sur les différents l’économie est florissante, cela devraitplus grande flexibilité afin d’éviter une aspects de sa prévoyance. Et ce d’autant être d’autant plus le cas lorsque les choixrépartition de l’héritage non voulue. plus si l’on a la chance de pouvoir béné- d’investissement se restreignent. ///Prenons l’exemple d’un homme affilié Bien sûr que vous pouvez ... mais avec une invitation inviter vos clients par courrier en plus, en ligne... vous attirez plus d’invités. <wm>10CAsNsjY0MDQx0TUxMDE1MQMASJtMpw8AAAA=</wm> <wm>10CFWLKQ6AQBAEXzSb7mEOYCXBEQTBryFo_q84HEmXquplqV7wMc3rPm-VoJkYzC2qD140g7WLvjiMr4aCMZIIZGb8HqKqdAztbYR41kiBC7L1gXId5w1mXlBKdAAAAA==</wm> C’est l’impact qui fait la différence. En tant que PME, accomplissez davantage avec votre publicité en misant sur la lettre publicitaire. Nous vous montrons comment: poste.ch/impact-pme

24 / PRÉVOYANCELe coût de la stabilité socialeLe modèle suisse à trois piliers est considéré internationalement comme exemplaire en matière de prévoyanceet de bon financement. BRIGITTE ZULAUF, DR. MARCEL WIDRIG PricewaterhouseCoopersL e modèle à trois piliers de vaises expériences des mouvements poli- supérieures à ce dont elles auraient besoin la prévoyance suisse a pour tiques totalitaires de l’entre-deux-guerres pour se constituer leur propre retraite. objectif d’assurer une cou- était encore très présent. Le concept d’éco- Rien de tout cela ne devrait changer pro- verture financière lors de la nomie sociale de marché, qui complète la chainement. Cependant, si la numérisation vieillesse et de prévenir les libre concurrence par une couverture so- entraîne ces prochaines années autant de risques en cas d’accident, de ciale, remporta un large consensus. L’AVS suppressions d’emplois dans le secteur desmaladie et de décès. Le premier pilier se est financée par les cotisations des em- services que dans l’industrie au cours descompose de l’assurance-vieillesse et sur- ployeurs et des salariés, qui représentent dernières décennies, les taux de cotisationvivants (AVS). En font également partie actuellement plus de 10% du salaire brut. à l’AVS ne suffiront plus. Pour maintenir lel’assurance invalidité (AI), les allocations Pour le premier pilier, le financement par niveau actuel des retraites, il faut soit aug-pour perte de gain en cas de service et les employeurs est légèrement supérieur à menter l’âge de départ à la retraite et lesde maternité (APG) ainsi que l’assu- celui des salariés. Ils doivent en effet s’ac- cotisations, soit diminuer les prestations.rance-chômage (AC). Toutes les assurances quitter seuls des coûts administratifs et les Du fait des mutations structurelles, l’AVSsociales du premier pilier sont obligatoires charges imputées sont différentes selon les pourrait devenir, au fil du temps, un reve-et visent à garantir un minimum vital. Le caisses de compensation. Les employeurs nu minimum. Et si cela arrivait, la solida-deuxième pilier comprend la «prévoyance doivent également régler les cotisations rité pourrait être mise à rude épreuve. Lesprofessionnelle» et se fonde sur la «loi fé- taux de cotisation à l’AVS sont les mêmesdérale sur la prévoyance professionnelle La garantie du minimum vital et pour tous les revenus du travail. En re-vieillesse, survivants et invalidité» (LPP). la solidarité sont d’autres idées vanche, la rente AVS est actuellement pla-Il est également obligatoire et couvre les fondamentales du premier pilier. fonnée à 28.200 francs pour les personnesrisques de décès et d’invalidité. Il contient Elles ont conduit à l’étendre à non mariées et à 42.300 francs par anen outre les économies du capital vieil- plusieurs reprises par le passé. pour les couples mariés. Aujourd’hui déjà,lesse, qui doivent permettre de maintenir beaucoup de personnes avec de hauts re-un niveau de vie équivalent après le dé- aux caisses d’allocations familiales, dont venus – notamment les étrangers qui nepart à la retraite. Le troisième pilier repose les prestations sont versées aux familles travaillent que temporairement en Suissed’une part sur une prévoyance facultative, avec enfants. Là aussi, les montants va- – considèrent le premier pilier comme unbénéficiant d’un traitement fiscal privilé- rient selon le canton et la caisse. impôt supplémentaire sur le revenu.gié et, d’autre part, sur des économies in- Aujourd’hui encore, la rente AVS estdividuelles sans avantage fiscal. considérée par la plupart des Suisses Individualité. La prévoyance profes- comme une récompense bien méritéePositif. Garant d’un niveau de sécurité pour le travail fourni. La garantie du mi- sionnelle vise à compléter la couverture nimum vital et la solidarité sont d’autres des besoins vitaux garantie par l’AVS etsociale élevé, le modèle de prévoyance à idées fondamentales du premier pilier et l’AI. Son objectif est de permettre aux per-trois piliers influence positivement la paix ont conduit, par le passé, à l’étendre à plu- sonnes concernées de garder leur niveausociale. Mais en comparaison internatio- sieurs reprises. Lorsque les rentes et autres de vie, même à la retraite et en cas de ma-nale, il est cher. Les pays d’Asie du Sud- revenus ne suffisent pas à couvrir les be- ladie, d’invalidité ou de décès de celui quiEst et d’Amérique du Sud ne disposent soins vitaux, il existe un droit légal à des subvient aux besoins de la famille.pas d’institutions de prévoyance, ou bien prestations complémentaires. La prévoyance professionnelle est finan-elles sont très limitées. Seuls une majorité Le principe de solidarité ancré dans l’AVS cée par un système de capitalisation. Lesde pays d’Europe occidentale et d’Europe se manifeste sous deux formes. D’une salariés dont le salaire annuel est comprisdu Nord ou des États comme le Cana- part, la génération active finance les re- entre 21.150 et 84.600 francs, qui ontda ou l’Australie, qui faisaient autrefois traites de la génération précédente et part plus de 17 ans et n’ont pas encore atteintpartie du Commonwealth britannique, du principe que les générations suivantes l’âge ordinaire de la retraite sont obliga-couvrent leurs citoyens à la retraite aussi en feront de même. D’autre part, les per- toirement assurés dans le cadre de la LPP.bien que la Suisse. sonnes avec des salaires élevés soutiennent Toute personne qui perçoit plus de 84.600L’AVS a été introduite en 1948, l’AI en les travailleurs à plus faibles salaires en francs de salaire annuel peut se faire assu-1960. À cette époque, l’Europe était en payant à l’AVS des cotisations nettement rer à titre surobligatoire, dans la mesure oùpleine reconstruction après la Seconde l’employeur souscrit une assurance corres-Guerre mondiale. Le souvenir des mau- pondante.AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

 UN MAINTIEN SOUPLEPour le domaine obligatoire, les em-ployeurs et les salariés versent générale- La prévoyance professionnelle sous toutes ses formes.ment les mêmes cotisations aux caisses Les entreprises évoluent constamment. Leur capacité d’adaptation estde pension. Au cours de la vie profession- vitale. Nos solutions de prévoyance sont souples et proposées exclu-nelle, ces cotisations augmentent selon sivement par des partenaires de vente. En tant que partenaire de vente,quatre niveaux. Combinées aux presta- vous êtes entre de bonnes mains chez nous. Nous nous occuponstions du premier pilier, les prestations des personnellement de vous et vous proposons précisément ce qui saurapersonnes seules couvrent jusqu’à 60% convaincre les entreprises de toutes tailles: des solutions de prévoyancedu dernier salaire et jusqu’à 75% pour les professionnelles flexibles et solides.personnes mariées. www.pax.ch/courtier-prevoyance-proDepuis 1985, la prévoyance profession-nelle est obligatoire et elle joue désor-mais un rôle important dans l’économienationale. Les fonds accumulés dans ledeuxième pilier sont beaucoup plus éle-vés que ceux du premier pilier. Les caissesde pension comptent aujourd’hui parmiles investisseurs de Suisse qui ont le plusgrand poids financier.En 1993, le Parlement suisse a combléune lacune majeure de la prévoyance pro-fessionnelle en complétant la LPP par la«Loi fédérale sur le libre passage dans laprévoyance professionnelle vieillesse, sur-vivants et invalidité» (LFLP). Depuis lors,les salariés ont un droit de libre passageintégral lorsqu’ils changent d’emploi. Ilspeuvent ainsi faire transférer leurs avoirsde vieillesse sans préjudice financier dansl’institution de prévoyance de leur nouvelemployeur. La LFLP a permis de libérercertains salariés des «entraves dorées» quiles liaient à leur emploi. Avant l’introduc-tion de cette nouvelle loi, en cas de dé-part d’un collaborateur, les fonds versésn’étaient soit pas du tout disponibles, oubien ils l’étaient seulement partiellement,en fonction de la durée d’appartenance àl’entreprise et des dispositions du plan dela caisse de pension.Scepticisme. Bon nombre de jeunessalariés, qui ne gagnent bien souvent en-core pas beaucoup d’argent, considèrentla prévoyance professionnelle avec scep-ticisme. Ils se demandent si les réservesimposées par le législateur sont investiesdans leur retraite de manière rentable ou,AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE

26 / PRÉVOYANCELes étrangers qui ne travaillent que temporairementen Suisse considèrent le premier pilier comme un impôtsupplémentaire sur le revenu.du moins, sans perte de valeur. Et ces pré- sont plus disponibles une fois le versement pas intéressante. Elles peuvent toutefoisoccupations augmentent encore en raison effectué. s’affilier à une institution de prévoyancedes taux d’intérêt actuellement bas. La Le troisième pilier s’articule en deux par- de leur organisation professionnelle et bé-LPP accorde une marge de manœuvre ties, a et b. Le pilier 3a donne droit à des néficier ainsi des mêmes privilèges fiscauxpour les ajustements individuels, sur- avantages fiscaux, dans la mesure où les que ceux qui exercent une activité lucra-tout dans le domaine surobligatoire. Les cotisations sont acquittées à une forme tive dépendante.employeurs peuvent ainsi proposer une de prévoyance reconnue. Les montants Le pilier 3b se compose de l’épargne in-solution LPP moins étendue et couvrir annuels exonérés d’impôts augmentent dividuelle faite d’espèces, de propriétédes risques tels que la maladie, l’accident, au même rythme que la hausse des rentes d’actions et d’autres actifs. Il s’agit d’unel’invalidité ou le décès par une assurance maximales AVS. En 2016, les salariés prévoyance libre et individuelle, qui peut àcomplémentaire. Dans la pratique, bien disposant d’un deuxième pilier peuvent tout moment être dissoute et ne bénéficiedes modèles différents existent. Selon la verser le montant de 6.768 francs et le pas d’un traitement fiscal avantageux.structure de l’âge et des revenus des sala- déduire des impôts directs. Les personnesriés et la philosophie de l’entreprise, l’em- exerçant une activité indépendante, qui Entrave. Le système à trois piliers as-ployeur peut prendre en charge entière- n’ont pas de caisse de pension, peuvent co-ment, partiellement, voire pas du tout les tiser au maximum cinq fois ce montant en sure la cohésion des partenaires sociauxcoûts complémentaires. sur le marché du travail suisse, mais il Les cotisations de prévoyance a aussi son prix: les cotisations de pré-Privilèges. Pour les assurés du do- obligatoires des premier et voyance obligatoires des premier et deu- deuxième piliers représentent xième piliers représentent environ 20 àmaine surobligatoire, le deuxième pilier environ 20 à 30 % des 30% des revenus bruts. Les charges sala-peut s’avérer très intéressant. Les moyens revenus bruts. riales élevées entravent la compétitivitédisponibles pour les cotisations des caisses des entreprises, favorisant ainsi l’automa-de pension augmentent avec la hausse étant exonérées d’impôts. Ceci représente tisation et la suppression des emplois. Etdes revenus. Les cotisations peuvent être 33.840 francs et la cotisation effective ne cette tendance devrait encore s’amplifierintégralement déduites des impôts sur le doit pas dépasser 20% du revenu net. Le avec la numérisation du secteur tertiaire.revenu et la fortune. Les plus gros salaires versement de l’argent économisé dans le Les premier et deuxième piliers de-parviennent à mettre de côté plusieurs pilier 3a suit les règles en vigueur pour le mandent beaucoup de travail adminis-millions de francs au cours de leur carrière. deuxième pilier. tratif. Les entreprises doivent évaluer desDes cotisations déductibles à un taux d’im- Bon nombre d’entrepreneurs individuels solutions d’assurance adaptées pour leurspôt de 40% et une rente ou une prestation n’ont pas de prévoyance étendue. Ils sont collaborateurs, enregistrer correctementen capital moins imposée au moment de d’avis que leur entreprise est, pour ainsi les entrées et sorties ainsi que les absences,son versement permettraient de réaliser dire, leur institution de prévoyance. De- décompter les cotisations et traiter les pres-des économies d’impôt considérables tout puis 2011, la deuxième réforme de l’im- tations d’assurance. Les décomptes du pre-au long de la vie professionnelle. position des entreprises permet de liquider mier pilier paraissent simples à premièreLa LPP offre aux salariés présentant des une fortune commerciale en bénéficiant vue. Mais ils peuvent devenir complexes,lacunes dans leur prévoyance profession- d’avantages fiscaux. Si, avant 2011, la surtout pour les cotisations des collabo-nelle la possibilité d’effectuer des rachats dissolution d’actifs de l’entreprise était rateurs sous contrats flexibles ou à tempsexonérés d’impôts. De telles lacunes imposée à un taux nettement supérieur partiel. Et la situation se complique encoreexistent, par exemple, lorsque des colla- à 50%, aujourd’hui la charge fiscale peut pour le deuxième pilier, car la LPP offreborateurs percevaient en début de carrière être comparée à celle d’un versement de de nombreuses alternatives individuelles.un faible revenu, qui est aujourd’hui éle- capital dans le cadre de la prévoyance pro- Certaines entreprises ont beaucoup de malvé, ou parce qu’ils n’ont pas cotisé pendant fessionnelle. à calculer le salaire déterminant pour lesun certain temps à la prévoyance profes- Pour les personnes exerçant une activité cotisations des assurances sociales.sionnelle du fait de séjours à l’étranger libérale, comme les avocats ou les méde- Les avantages du système à trois piliersou d’interruptions professionnelles. Celui cins, qui n’ont pas beaucoup d’actif im- supplantent cependant ses inconvénients:qui, par un achat facultatif, entend profi- mobilisé, la prévoyance du pilier 3a n’est la prévoyance vieillesse et risque suisseter d’avantages fiscaux devrait cependant garantit une sécurité sociale qui n’existetenir compte du fait que ses liquidités ne que dans très peu d’autres pays. NotreAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

PRÉVOYANCE / 27Les compagnies d’assurance représentent d’importantsinvestisseurs institutionnels détenteurs de plus de 24.000milliards de francs d’actifs internationaux.système de prévoyance favorise la paix so- du système financier se trouveraient dans au-delà de la protection contre les risquesciale et peut répondre avec souplesse aux la même impasse. Les faibles taux d’intérêt d’insolvabilité et de contagion des compa-besoins de chacun. Aussi devrions-nous en actuels représentent également une source gnies d’assurance prises individuellement,prendre le plus grand soin. de risque non négligeable pour les compa- pour tenter de remédier à la vulnérabi-Les compagnies d’assurance constituent gnies d’assurance et, plus les taux seront lité croissante de ces acteurs aux mêmesd’importants investisseurs institutionnels, bas, plus les assureurs seront vulnérables risques que d’autres segments du systèmedétenteurs de plus de 24.000 milliards face à leur évolution future. financier.d’actifs internationaux et d’engagements Il ressort de notre analyse que les organesà plus long terme, dont l’exposition aux de surveillance et de réglementation de- Origines. D’après le FMI, l’évolutionfluctuations des cours des actifs s’est vraient aborder ces risques en examinantaccentuée au cours des dernières années. de manière plus systématique le rôle que des pratiques d’investissement des com-De ce fait, en cas de choc de grande am- joue le secteur de l’assurance dans le sys- pagnies d’assurance ne constitue pas lapleur, par exemple un effondrement des tème financier en général, à travers une principale explication de cette augmen-cours, les assureurs ne pourraient certai- approche macroprudentielle. tation du risque systémique. Bien quenement pas s’acquitter de leur mission de Le FMI a déjà recommandé que les déci- la part des actifs plus risqués soit restéetransfert de l’épargne vers les emprun- deurs politiques ainsi que les organes de à peu près constante dans le temps pourteurs, juste au moment où d’autres acteurs réglementation et de surveillance, aillent les assureurs des pays étudiés, on note des différences sensibles d’une compagnie Discover our story on jsafrasarasin.com YEARS

28 / PRÉVOYANCELa longue période de taux bas que nous connaissonsactuellement a encore accentué la vulnérabilité aux États-Uniset en Europe.à l’autre: les sociétés plus petites, moins porter préjudice. Selon le FMI, la longue miques de marché vont sans doute s’ins-puissantes et moins bien capitalisées d’un période de taux bas que nous connais- taller de manière permanente.»certain nombre de pays semblent en ef- sons actuellement a encore accentué cette D’autres facteurs peuvent égalementfet avoir misé sur des placements plus vulnérabilité, en particulier aux États- contribuer à la montée du risque systé-risqués ces dernières années en vue de Unis et en Europe. mique, d’après le FMI: l’évolution dereconstituer leurs actifs. l’offre de produits, par exemple le poidsEn outre, les assureurs proposant une Variations. «Au vu des facteurs agis- croissant des contrats de rentes aux États-plus large part de produits à rendement Unis, pourrait expliquer la sensibilité ac-garanti, tels que les contrats d’assurance sant à l’échelle du marché tout entier, tels crue des assureurs aux taux d’intérêt bas,vie à but patrimonial assortis de garanties que la montée des corrélations observées tandis que le recours aux instrumentsminimum ou certains types de rentes, et entre les différentes catégories d’actifs, on dérivés pourrait constituer une cause dedes niveaux de garantie plus élevés, ont constate que d’importantes variations des leur exposition plus forte aux fluctua-davantage d’actifs risqués en portefeuille. cours tendent à affecter les compagnies tions des marchés financiers à la hausseLes engagements des compagnies d’as- d’assurance-vie de manière de plus en comme à la baisse.surance-vie présentant une échéance plus similaire», explique Gaston Gelos, Quelles politiques mettre en place enplus longue que leurs actifs, tout décro- chef de la Division analyse de la stabi- conséquence? Une telle situation nécessitechement des taux d’intérêt tend à leur lité financière mondiale du FMI. «Dans de mettre davantage l’accent sur les poli- une certaine mesure, ces nouvelles dyna- La Suva sur les bancs de l’écoleChaque année, quelque 19 000 jeunes en Les apprentis ont un risque d’accident professionnel Nouveau journal gratuit en Suisseapprentissage dans une entreprise assurée au- plus élevé que les autres travailleurs. La Suva a élaboré, Les supports de cours se composent du jour-près de la Suva subissent un accident profes- avec un groupe d’enseignants, différents supports de nal gratuit «top TODAY» ainsi que du manuelsionnel, dont trois sont mortels. Cela signifie cours pour que les écoles professionnelles puissent sen- «Risques et compétence en matière de risque».que, chaque année, un apprenti sur huit est sibiliser les jeunes et leur faire prendre conscience des «top TODAY» présente les différentes facettesvictime d’un accident. La Suva juge la situa- risques de leur métier. Le journal gratuit «top TODAY» des risques à travers des exemples concrets quetion inacceptable et veut réduire de moitié les au format tabloïd en constitue la pièce maîtresse. les jeunes peuvent rencontrer dans la vie deaccidents chez les apprentis tout en accroissant tous les jours. Ils sont tirés de divers domainesleur compétence en matière de risque à travers tels que la sécurité au travail, durant les loisirs,la campagne «Apprentissage en toute sécurité». etc. Le manuel «Risques et compétence en ma- tière de risque» permet aux apprentis de se sen-De l’entreprise à l’école professionnelle sibiliser aux dangers et d’acquérir le savoir-faireDepuis trois ans, la Suva propose des supports nécessaire pour la prévention des accidentsde travail aux entreprises pour les aider dans dans le cadre des cours de culture générale.la sensibilisation et la formation des jeunes. LaSuva invite maintenant les écoles profession- Préserver 250 viesnelles à participer à la campagne «Apprentis- La campagne «Apprentissage en toute sécurité»sage en toute sécurité». «Notre initiative vise s’intègre dans la «Vision 250 vies», qui vise àune nouvelle baisse des accidents profession- réduire de moitié, en dix ans, le nombre d’acci-nels et non professionnels avec l’aide des écoles, dents professionnels mortels enregistrés chaquequi constituent un canal de sensibilisation année, c’est-à-dire à préserver 250 vies et à évi-supplémentaire auprès des apprentis», déclare ter tout autant de cas d’invalidité grave d’ici àErwin von Moos, responsable de la campagne 2020.à la Suva. Des enseignants ont collaboré avecla Suva afin d’élaborer une série de supports de Suvacours. Ces documents sont destinés à toutes les Communication d’entrepriseécoles professionnelles de Suisse. Jean-Luc Alt

PRÉVOYANCE / 29 Les conditions-cadres pour une qualité de vie durable Une prévoyance bien planifiée permet de renoncer à une consommation immédiate. L e scepticisme au sujet des ALOIS BISCHOFBERGER prestations financières fu-tiques macroprudentielles. Les instances tures des institutions de pré- Avenir Suissede surveillance du secteur de l’assurance voyance s’accroît au sein dedevraient s’intéresser non seulement aux la jeune génération. Cette économisent selon leurs moyens. Par ladifférentes compagnies prises individuel- méfiance vis-à-vis de la pré- suite, d’autres intérêts émergent, commelement (approche microprudentielle) mais voyance vieillesse est renforcée par une d’assurer une bonne éducation à ses en-aussi aux points communs et aux effets détérioration des rendements de place- fants. Posséder son propre logement peutressentis au niveau des assureurs et des ments, à la suite de taux d’intérêts nomi- être un autre objectif, comme en témoignepays. Il pourrait se révéler utile d’élaborer naux très bas, voire même négatifs. En pa- la forte augmentation de la dette hypothé-des mesures visant à empêcher les assu- rallèle, les exigences matérielles, ainsi que caire au cours des vingt dernières années.reurs de restreindre en même temps leur la volonté d’avoir une plus grande marge Finalement, l’attention se porte sur l’indé-financement au reste du système. de manœuvre financière augmentent. pendance financière après la retraite: les«On pourrait ainsi mettre en place des vo- Les exigences à l’égard des employés, no- personnes qui vieillissent souhaitent resterlants de capitaux que les assureurs accu- tamment concernant la disponibilité au ni- mobiles. Malgré des états de santé parfoismuleraient en période de croissance éco- veau des horaires et le degré de qualifica- difficiles, elles désirent se faire soigner aus-nomique, pour y recourir lors des phases tion, n’ont pas diminué, bien au contraire. si longtemps que possible à leur domicilede ralentissement», suggère Gaston Gelos. En conséquence, des revendications pour et déménager, si le besoin se fait sentir, plus de responsabilités, de marge de dans une résidence pour personnes âgées Il est nécessaire de s’intéresser manœuvre, de droits de codécision et une de leur choix. Quel que soit la phase de vie, de près à la performance et évolution de la rémunération, basée sur les personnes renoncent à consommer au- au comportement des assureurs des salaires élevés, émergent. Les femmes jourd’hui pour économiser pour l’avenir. moins puissants et de taille veulent exploiter leur savoir et leurs com- Bien entendu, la prévoyance vieillesse plus réduite. pétences dans le monde du travail et as- n’est pas au sommet de la liste des priorités pirent à une nouvelle répartition des rôles pour les jeunes. Pourtant, l’intérêt encorePour le FMI, évaluer les actifs et les enga- au sein de la famille. Mais les hommes sou- mineur pour le sujet va devoir évoluer bongements des assureurs aux prix du mar- haitent également pouvoir mieux concilier gré mal gré vers un examen plus poussé.ché pourrait améliorer la transparence vie de famille et vie professionnelle. En ce Les interruptions de carrières tout commeet encourager une meilleure adéquation qui concerne la prévoyance vieillesse, les les divorces devraient pouvoir être com-actif-passif. Les instances de réglemen- employés souhaitent avoir la possibilité de pensés financièrement. Le scepticisme en-tation devront toutefois assortir leurs choisir une stratégie d’investissement in- vers les prestations financières futures desrègles d’évaluation de mesures contra- dividuelle, adaptée aux préférences en ma- organismes de prévoyance augmente chezcycliques, en s’inspirant par exemple des tière de risques de chacun. Cependant, le la jeune génération. La politique de tauxajustements prévus dans la directive euro- rapide changement économique et sociétal d’intérêts très faibles, voir même négatifs,péenne Solvabilité II, pour éviter la vente a occasionné beaucoup d’insécurité. C’est qui détériore les rendements et se pour-forcée des actifs des assureurs en période une des raisons pour lesquelles beaucoup suivra probablement encore longtemps,de récession. des gens réclament le maintien de leurs ac- modifie également le comportement faceL’analyse souligne également la nécessité quis. Les revendications à l’égard de l’Etat à l’épargne: on a tendance à mettre plusde s’intéresser de près à la performance augmentent en conséquence, tandis que la d’argent de côté. Et cela, car il faut pluset au comportement des assureurs moins volonté d’introduire des réformes, dans le de temps pour atteindre des objectifspuissants et de taille plus réduite. Même si domaine de la prévoyance vieillesse juste- d’épargne et d’investissement puisque l’in-leur importance systémique individuelle ment, diminue. térêt composé des placements est moindre,est moins marquée, ils n’en restent pas Les parcours de vie ne sont plus aussi li- si l’on ne veut pas se lancer dans des pla-moins susceptibles de propager les chocs néaires qu’autrefois. Les buts évoluent cements plus risqués, qui présupposent desdans l’économie s’ils en viennent à tous selon les cycles de vie: pour les jeunes la connaissances en finances poussées.agir de manière identique. Ajoutons que mobilité, une formation solide et des ex- La qualité de vie est toutefois la préoc-ces petites compagnies sont «trop nom- périences à l’étranger jouent un rôle im- cupation essentielle. Elle est caractériséebreuses pour faire faillite». /// portant. Afin de réaliser ces objectifs, ils par la sécurité financière ainsi que l’indé- pendance. En ce sens, elle n’est possible qu’en ayant des conditions-cadres qui per- mettent aux personnes de réaliser leurs objectifs personnels. ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

30 / PRÉVOYANCELes réalités complexes des conglomératsLes chocs importants subis par le secteur de la prévoyance et de l’assurance conduit à s’interroger sur la place de ce secteurdans la stabilité financière et sur le potentiel de risque systémique qu’il comporte. PHILIPPE TRAINARD Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA)Dans une perspective de macroéconomiques. Ce qui ne veut pas transférer des liquidités résultant d’une stabilité financière, il dire non plus qu’il n’y ait pas de phéno- création de richesse antérieure par les faut se demander dans mènes de contagion tant à l’intérieur du assurés. Il en résulte que, au plan macroé- quelle mesure l’assu- secteur de l’assurance que vers l’extérieur, conomique, la défaillance d’un assureur rance peut, à l’instar de notamment vers le secteur de la banque, ne fait que consolider une réallocation la banque, être source de comme on l’observe à l’occasion de «situa- du capital et de la richesse aux dépens desrisque systémique et à l’origine d’une crise tions extrêmes». Mais, ces phénomènes assurés, réallocation qui était implicitede liquidité. Dans le système bancaire, le n’ont jamais pris l’ampleur qu’ils ont pu mais non perçue avant la défaillance, tan-risque systémique renvoie à un sinistre qui, prendre dans la banque et leurs canaux de dis que la défaillance d’une banque limiteinitialement circonscrit à quelques institu- transmission ne sont pas clairement iden- directement le potentiel de création detions peu nombreuses, a ensuite tendance tifiés, dans la mesure ou ils ont tendance à richesse de l’économie par rapport à ceà se propager à l’ensemble du secteur fi- changer d’une crise à l’autre. qu’il était avant la défaillance.nancier, indépendamment de la solvabi-  La faible rotation des passifs de l’assu-lité des institutions concernées, avec, in Absence. On ne connaît pas d’exemple rance par rapport à la banque. La liquidi-fine, le risque d’un collapsus du système té à court terme des dépôts bancaires estdes paiements et d’une crise économique historique de faillite d’assurance ou de impérative, dans la mesure ou ceux-ci sontgénérale. L’onde de choc se propage par le réassurance ayant induit une crise macroé- utilisés par leurs détenteurs pour vivre.biais du crédit interbancaire et du crédit conomique. Le seul cas connu sur lequel Au quotidien, tandis que celle des créancesaux entreprises, sans lesquels le finance- on pourrait s’interroger est intervenu à la des assurés sur les entreprises d’assurancement de l’économie et, par voie de consé- Jamaïque en 1996. Mais cet incident est ne l’est que pour un sous-ensemble de cesquence, l’activité sont interrompus. Le moins imputable à un risque systémique créances. En assurance non-vie, le besoinrisque systémique ne doit pas être confon- de liquidité résulte de la survenance desdu avec un choc général affectant toutes La contagion qui est en cause sinistres, qui est a priori indépendanteles banques simultanément et mettant en dans le risque systémique du comportement des assurés concernés,danger leur solvabilité (par exemple un peut être assez largement alors qu’en banque les mouvements surchoc de taux d’intérêt, un choc inflation- psychologique. les dépôts ont toujours un caractère vo-niste ou un choc boursier). La contagion lontariste. En assurance-vie, les montantsqui est en cause dans le risque systémique inhérent à l’assurance qu’au fait que la placés par les clients sont finalement toutpeut être assez largement psychologique, compagnie d’assurance concernée appar- aussi stables que les montants déposés parles agents se contentant, dans un univers tenait à un conglomérat bancaire en posi- les clients des banques de l’assurance, maisd’information imparfaite, d’interpréter la tion de monopole sur le marché local. On pour des raisons radicalement différentes:défaillance des premières banques comme a donc de bonnes raisons de penser que la stabilité des dépôts bancaires résulteune menace pour les autres banques jus- l’économie est moins exposée à un «risque de flux d’entrée qui ont tendance à com-tifiant un mouvement de défiance à leur systémique» provenant de l’assurance que penser statistiquement des flux de sortieégard. Elle est, de ce fait, imprévisible provenant de la banque. Il y a cela quatre importants tandis que la stabilité des pla-dans son ampleur et éventuellement au- raisons principales. cements d’assurance-vie résulte tout sim-to-réalisatrice. Si le sinistre initial peut  L’inversion du cycle de production dans plement de la faiblesse des flux de sortie.très bien avoir la nature d’une «crise de l’assurance par rapport à la banque. Dans  La moindre liquidité des créances dessolvabilité», la propagation de la crise par la banque, ce sont les crédits qui font les assurés par rapport aux dépôts bancaires.contagion a, en revanche, la nature d’une dépôts: la liquidité que la banque injecte Les déposants ont le droit de se retirer«crise de liquidité»: les agents ne font tout dans l’économie, sous la forme de crédit, d’une banque à tout instant et immédiate-simplement plus confiance au système. n’est la contrepartie d’aucune création ment sans aucune pénalité, ni financière niA l’examen, on ne perçoit pas de risque de richesse antérieure mais seulement fiscale. En assurance, en revanche, les pos-systémique pouvant avoir son origine l’anticipation d’une création de richesse. sibilités de retrait sont moins aisées et plusdans l’assurance. Ce qui ne veut pas dire Au contraire, dans l’assurance, ce sont en coûteuses pour le client. Elles sont de faitque ce secteur ne connaisse pas de situa- quelque sorte les «dépôts» qui font les «cré- quasi inexistantes en assurance non-vie. Entions de crise et que les compagnies ne dits»: la liquidité que l’assurance injecte assurance-vie, elles sont liées aux retraitspuissent pas être affectées par des chocs dans le système économique ne fait que anticipés qui peuvent, certes, présenterAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

des similitudes avec la banque mais dontl’ampleur et la portée sont néanmoins trèsfortement atténuées grâce aux trois méca-nismes dissuasifs suivants: les pénalités engénéral prévues au profit des assureurs (enFrance, ces pénalités peuvent aller jusqu’à5% de la valeur du contrat); la perte desavantages fiscaux habituellement accordésà ce type de contrat en Europe (en France,un retrait avant huit ans entraine taxationdes revenus à un taux forfaitaire sensible-ment supérieur au taux de 7,5% qui s’ap-plique après huit ans); le délai nécessairepour récupérer effectivement ses fonds,qui empêche tout retrait immédiat (enFrance, l’assureur a deux mois pour verserla valeur de rachat du contrat). Le réseau d’interdépendances moinsdense de l’assurance par rapport à labanque. Indépendamment des relationscapitalistiques dans le cadre des groupes etdes conglomérats financiers, sur lesquellesnous reviendrons, les relations financièresdes entreprises d’assurance avec d’autresinstitutions financières sont beaucoupmoins denses que celles des entreprisesbancaires et transitent essentiellement parla réassurance et la gestion d’actifs. Dansl’assurance, on n’observe rien de semblableau réseau extrêmement dense et mouvantdu crédit interbancaire qui constitue unélément de fragilité propre aux établisse-ments de crédit. Si l’on exclut les primespouvant avoir un caractère d’épargnepour ne retenir que les primes couvrantun risque d’assurance, la part des primes,et donc des risques, cédés par les assureursà d’autres assureurs ou à des réassureursne représente pas plus de 13% du total (cf.SwissRe, 2003).De fait, lors de la crise immobilière dela fin des années quatre-vingt et du dé-but des années 90, l’assurance, contraire-ment à la banque, n’a pas cédé ses actifsimmobiliers précipitamment sur le mar-ché. Lors de la crise japonaise des annéesquatre-vingt-dix, les assureurs ont été enmesure de continuer à contribuer à laAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE

32 / PRÉVOYANCELa liquidité que l’assurance injecte dans le systèmeéconomique ne fait que transférer des liquidités résultantd’une création de richesse antérieure par les assurés.liquidité de l’économie pendant dix ans inversement, comment les chocs ayant dernières années (1989-2004). Elles sontavant de connaître de sérieuses difficultés, leur origine dans le reste de l’économie se extraites de la base Ecowin. On noteraalors que la banque a connu des difficultés transmettent à l’assurance, en comparant que ce ne sont pas les données brutes quigraves dès le début de la crise et a pesé sur ces résultats à ceux que l’on obtient dans sont retenues mais le logarithme de leurl’économie nationale tout au long de la dé- les mêmes conditions pour la banque. Il écart à la tendance. Cette transformationcennie, en dépit d’un soutien massif tant est possible, par ce biais, d’acquérir une permet d’éliminer de la mesure de la vo-de la politique monétaire que des finances certaine idée de l’ampleur des phéno- latilité la tendance qui n’est pas l’objet depubliques. mènes tant de contagion que d’absorption la présente étude. Elle permet, ce faisant, des chocs par le secteur financier. Inutile, de disposer de séries dont les rapportsAmplification. La question de la naturellement, de souligner les limites de d’interdépendance peuvent être mesurés ce type de travail qui simplifie outranciè- par la technique économétrique des Vec-stabilité financière ne se restreint pas à rement la réalité et qui réduit la contagion teurs Auto Régressifs (VAR), ou chaquela question du risque systémique. L’assu- à des rapports d’antériorité temporelle variable dépendante est une fonction re-rance peut aussi contribuer à la stabilité ou entre les variables. tardée d’elle-même et des autres variables.à l’instabilité financière en fonction de sa A titre exploratoire, sans prétendre épui- Les résidus de ces équations sont alors dé-capacité d’absorption, de création ou d’am- ser les possibilités de l’analyse économé- composés en des chocs élémentaires quiplification de chocs macroéconomiques. trique, on présente ci-dessous les résultats affectent chacune des quatre variables etLa mesure de cette capacité est moins une d’une étude empirique sur les interdépen- qui leur sont donc spécifiques en ce sensquestion théorique qu’empirique. Malheu- dances entre le secteur financier, décom- qu’ils n’ont pas leur origine dans le com-reusement, nous ne disposons pas de don- pose en deux sous-secteurs de l’assurance portement des autres variables. Les chocsnées économiques permettant de tester et de la banque, et son environnement spécifiques aux taux d’intérêt à trois moisavec rigueur cette capacité. Les seules don- macroéconomique, ramené ici aux deux sont assez largement déterminés par la po-nées qui pourraient permettre de la tester, dimensions de l’économie agrégée et litique monétaire. Les chocs spécifiques àau moins partiellement, sont les données de la politique monétaire. Le secteur de l’indice boursier du marché représententboursières. Sans aller jusqu’à reprendre l’assurance, le secteur de la banque et les chocs communs à l’ensemble de l’éco-la théorie des marchés efficients, on peut l’économie agrégée sont représentés par nomie, hors chocs de politique monétaire.affirmer que ces données véhiculent beau- les indices boursiers des secteurs corres- Les chocs spécifiques aux indices boursierscoup d’informations pertinentes et actua- pondants et de l’ensemble du marché. des secteurs de la banque et de l’assurancelisées. De fait, on constate, par exemple, La politique monétaire, dont on a pensé correspondent aux chocs communs à cha-que ces données constituent d’assez bons qu’elle devait être intégrée à l’étude en cun de ces deux secteurs, hors chocs deindicateurs avancés de la performance raison de son indépendance, est représen- politique monétaire et chocs communs àdes banques américaines, par rapport à tée par le taux d’intérêt à trois mois. Les l’ensemble de l’économie.l’évaluation des contrôleurs bancaires no- données utilisées sont les indices DJ Eu- On utilise alors les équations estimées ettamment. On peut penser, par similitude, roStoxx journaliers et le taux d’intérêt à la décomposition de leurs résidus, pour si-qu’elles offrent des indications impor- trois mois de la zone euro pour les quinze muler les conséquences des quatre chocstantes sur la performance des compagniesd’assurance. Ce que ces données ne sont, Décomposition de la variance des cours (en %)en revanche, probablement pas en me-sure d’offrir c’est une information fiable Part imputable aux chocs Entreprises d’assurance Entreprises de banque Ensemble du marchésur les risques de faillite et les risques sys-témiques dans la mesure ou ces risques Spécifiques aux entreprises 13 25 12mettent en jeu la responsabilité limitée desactionnaires et l’intervention des fonds de Communs à l’assurance 12 9 10garantie qui biaisent l’évaluation de l’actifnet de l’entreprise par le marché. Communs à la banque 2 54On propose ici d’utiliser les données bour-sières pour étudier dans quelle mesure les Communs au marché 42 50 37chocs, ayant leur origine dans l’assurance,se transmettent au reste de l’économie et, De taux d’intérêt court 31 11 37 Lecture: en moyenne, 13% de la variance historique des sociétés d’assurance étudiée est imputable à des chocs spécifiques à ces sociétés. Sources: Ecowin et calculs auteurAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

PRÉVOYANCE / 33La stabilité́des placements d’assurance-vie résultetout simplement de la faiblesse des flux de sortie.spécifiques aux quatre variables retenues. banques que celles-ci ne l’ont été par les babilité d’un mouvement extrême surDeux types de simulations sont réalisés. Le chocs communs aux assureurs; les rendements des banques croît avec lepremier reproduit l’historique 1989-2004  les sociétés d’assurance et les établisse- nombre de mouvements extrêmes surpour calculer la contribution de chacun ments bancaires ont été plus affectés par les rendements des assurances. A titredes quatre chocs aux variations des quatre les chocs communs à l’ensemble du mar- d’exemple, aux Etats-Unis, la probabilitévariables au cours de la période. On a ajou- ché que par les chocs de taux d’intérêt, les d’une absence de mouvement extrême surté aux quatre variables présentées ci-des- premières marquant toutefois une plus les cours bancaires s’élève à 90% lorsquesus, une cinquième variable représentative forte sensibilité aux taux d’intérêt que les l’on n’a observé aucun mouvement ex-du cours de quelques grandes sociétés seconds. trême sur les cours des sociétés d’assurance.européenne d’assurance et de banques, de En revanche, lorsque l’on a observé quatrefaçon à estimer l’impact moyen des chocs Interdépendances. Les relations mouvements extrêmes dans l’assurance, ouspécifiques à ces entreprises prises indivi- plus, cette probabilité chute à 10%.duellement. Le second type de simulations de l’assurance avec la banque méritent Les résultats du deuxième type de si-recourt à la méthode Monte-Carlo pour une attention particulière, d’autant que mulation, c’est-a-dire des simulationsprocéder, à chaque période, à un tirage les données boursières étudiées ci-dessus Monte-Carlo de chocs aléatoires repartisaléatoire de chocs et calculer, sur cette ont fait ressortir un résultat apparemment sur six mois et sur quatre ans, dans unbase, la marge d’incertitude qui entoure la contradictoire. D’une part, sur la période intervalle de confiance de 99% méritentcontribution de ces chocs aux fluctuations 1989-2004, les sociétés d’assurance ont l’attention. Dans le prolongement des si-des quatre variables, durant une période été moins affectées par les chocs com- mulations historiques, ils font ressortirtout d’abord courte (six mois environ) muns aux banques que celles-ci ne l’ont que les scénarios de chocs extrêmes liéspuis plus longue (quatre ans environ). Il été par les chocs communs aux assureurs; à l’environnement macroéconomique re-permet de tester l’impact de scénarios de d’autre part, la banque semble receler un cèlent un potentiel de déstabilisation pluschocs plus extrêmes. potentiel de déstabilisation pour l’assu- élevé pour l’assurance que pour la banque.Le tableau en page précédente résume les rance plus important que l’assurance pour En revanche, contrairement aux simula-résultats du premier type de simulations, la banque. tions historiques, ils montrent que les scé-c’est-a-dire des simulations historiques. Il Ce constat apparemment contradictoire narios de chocs extrêmes liés à l’assurancemontre que les sociétés d’assurance ont ab- doit être précise. C’est ce que permet une sont potentiellement moins déstabilisantssorbe au cours des quinze dernières années étude de la banque centrale des Pays-Bas pour le marché que ceux liés à la banqueplus de chocs macroéconomiques qu’elles (cf. Minderhoud, 2003). Les conclusions et que celle-ci peut être plus déstabilisanten’en ont produits et, en cela, elles se sont de cette étude reposent sur un ensemble pour l’assurance que l’assurance ne l’estdifférenciées assez clairement des institu- de simulations Monte-Carlo, à partir de pour elle. Comme les variables macroéco-tions bancaires: données boursières sur les plus grandes nomiques n’ont pas d’effets aussi marqués la part de la volatilité historique du sociétés d’assurance-vie et les banques au cours des périodes correspondantes,cours de chacune des sociétés prises indi- américaines, anglaises et allemandes, ces ceci suggère un effet de contagion de l’as-viduellement, qui s’explique par des chocs dernières étant choisies parmi celles qui surance vers la banque.spécifiques à ces sociétés, a été sensible- ne comportent guère ou pas d’activité Ce résultat doit cependant être interprétément moins importante dans l’assurance d’assurance. Elle fait ressortir que la pro- avec prudence dans la mesure ou il retientque dans la banque; babilité d’un effet de contagion signifi- une définition strictement statistique de la part de cette volatilité historique qui catif de l’assurance vers la banque croît la causalité alors même que l’on ne voits’explique par des chocs communs à l’en- fortement dans les situations extrêmes. La pas très bien par quels canaux l’effet desemble du secteur est restée faible dans contagion en situation extrême y est défi- contagion pourrait transiter, surtout versles deux secteurs financiers; ceci confirme nie comme la fraction des co-mouvements des groupes bancaires qui ne possèdentla difficulté de prévoir la réalisation d’un extrêmes des rendements dans le secteur pas de sociétés d’assurance. A ce stade, ilrisque systémique à l’aide des données de la banque qui est expliquée par les n’en subsiste pas moins une présomptionboursières; co-mouvements extrêmes des rendements sur la possibilité d’effets de contagion, qui les sociétés d’assurance, contrairement dans le secteur de l’assurance, en l’occur- justifie une vigilance des autorités finan-au reste du marché boursier, ont été moins rence ceux qui correspondent aux 5% des cières sur la situation dans le secteur deaffectées par les chocs communs aux co-mouvements les plus élevés. l’assurance. /// Notamment, l’étude montre que la pro-AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

34 / FONDAMENTALRELATIVISME tion de rien, dimension de dimension et fonction de fonc-La multiplication du réel tion, dimension et fonction pures. Tel se révèle un système de relativité vraiment générale. A cette philosophie créée parLe réel n’a pas de valeur absolue. Il n’est pas une les machines des physiciens, qui vaut ce qu’elle vaut, qui estessence permanente sous une diversité d’attributsrelatifs. Il n’est qu’une fonction de relations. jeune mais qui mûrira et qui sera dépassée à son tour, le ci- nématographe apporte maintenant son énorme puissance de divulgation.JEAN EPSTEIN, Essayiste et cinéaste (1897–1953) Que tout ne soit que pensée, l’idéalisme pur le soutient avec constance depuis quelques millénaires. Cependant, en s’ajou-Partout, toujours, la réalité d’un phénomène apparaît tant à ce vieux corps de doctrines, l’idéalisme machiniste et comme fonction directe d’une certaine pluralité de comparaisons, de relations spatiales et temporelles. relativiste peut lui apporter renouvellement et précision, en s’écartant de la formule classique qui nie l’existence matérielle de la matière, considérée comme une illusion ou une halluci-Et, de même qu’il existe un seuil d’excitation, en deçà du- nation. L’idéalisme nouveau prétend, au contraire, que la subs-quel aucune sensation ne se produit, il y a un seuil de loca- tance est un produit réel de la pensée.lisation, c’est-à-dire de relation dans l’espace-temps, en deçà La matière, expliquent les physiciens, se fait d’énergie, quandduquel la conscience n’enregistre pas de réalité. Chacun de celle-ci se condense en grains, c’est-à-dire quand son actionnos sens n’est capable de connaître qu’une gamme limitée de se trouve quantifiée et située par un nombre suffisant de me-certains mouvements. De part et d’autre de l’infrarouge et de sures, de relations. L’énergie se transforme en matière, dès quel’ultraviolet, il n’y a qu’une nuit, dans laquelle cette machine l’esprit peut la penser dans le cadre complet de l’espace-temps.à démultiplier les rythmes des ondes à photons, cette boîte de Ainsi, c’est la pensée qui, en dé-vitesses qu’est la rétine, ne sait plus calculer. De part et d’autre Le cinématographe finitive, opère la miraculeuse détient un pouvoir transmutation de l’immatérielde l’infragrave et du supra-aigu, il n’y a que silence. Pareille- de multiplication en matériel; c’est, soumise à du réel. Supérieur à certaines limites, la multiplici-ment, notre esprit n’est accordé à concevoir le réel que dans celui de tout autre té de l’idée qu’on peut se faire de quoi que ce soit se trouvantune certaine zone quantitative de données spatio-temporelles.S’il n’y a pas assez ou s’il y a trop de références, de part etd’autre de ces bornes de la réalité, rien ne peut exister pour instrument jusqu’ici connu et utilisé.nous. Entre les deux zones extrêmes de réalité naissante et de encore à l’état de rien matériel, qui fait, de ce plus ou moinsréalité évanescente, on peut tracer une courbe où se situent irréel, quelque chose de plustous les degrés du réel, qui, d’abord croissants puis décrois-sants, varient de façon d’abord directement puis inversement ou moins réel. Tout n’est queproportionnelle au nombre de références, de dimensions, de pensée, mais non pas toujours et partout de la même espècerythmes que cumule un phénomène. de pensée. Quand une idée atteint une certaine densité, unToute réalité – et celle du temps – apparaît comme un phé- certain nombre, elle émerge du domaine de l’esprit, elle cessenomène quantifié et variable, fonction de sa pluralité. Le de paraître un phénomène purement intérieur, une réalisationréel n’a pas de valeur absolue; il n’est pas une essence per- mentale et immatérielle; elle se produit dans le monde exté-manente sous une diversité d’attributs relatifs; il n’est, lui- rieur comme une réalité physique; elle devient une penséemême, qu’une fonction de relations. La plus extrême réalité matérielle, un objet.que nous sachions atteindre d’un objet, c’est une fonction, ce Cette création de la réalité par la pensée apparaît très claire-sont des relations. Au-delà de cette existence fonctionnelle et ment dans les résultats auxquels a abouti la mise en œuvrerelative, non seulement on ne réussit à rien établir de plus de l’importante instrumentation dont, de plus en plus, se sert ferme, mais encore on a le la science. Par exemple, les instruments qui ont multiplié les sentiment, comme d’évidence, composantes pensables de la vague idée qu’était l’électrici- qu’il est vain de chercher, qu’il té, impondérable et à peine mesurable il y a deux siècles, en n’y a rien à découvrir. Telle ont fait un groupe de corps quasi tangibles: les électrons. De est la fin de non-recevoir, à la- même, dans la mesure où se compliquait le faisceau de réfé- quelle aboutit la quête de l’ob- rences permettant de situer des maladies, celles-ci quittaient jet: il n’y a pas d’objet, pas de le rang de pures entités, aspects du courroux des dieux et de support, pas de permanence. la virulence des démons, pour se transformer en actions de Ce qui en tient lieu, ce qui en vapeurs, de fluides, d’humeurs peccantes – conception déjà fait fonction, c’est aussi une semi-matérielle – et, enfin, en intoxications microbiennes, fonction, un nœud de rapports en floculations de colloïdes. Tant que la fonction visuelle ne variables, de simultanéités et pouvait être pensée que confusément dans son ensemble, les de successions approximatives, vitalistes trouvaient à y placer une âme de l’œil. Mais, parce un multiple de relations mo- que, dans cette âme, peu à peu, se trouvèrent définis d’assez biles dans l’espace et le temps, nombreux rapports spatio-temporels, bientôt elle ne fut plus © DR décorées en liens de nécessité, qu’un complexe de réactions bio- et photo-chimiques. Dans en enchaînement de cause à tous ces cas et des milliers d’autres, ce sont des instrumentsJean Epstein: «L’idéalisme effet. Mais où est la substance qui, en créant de nouvelles apparences et de nouvelles rela-nouveau prétend que la qui tendrait ce réseau de me- tions, ont étoffé la pensée au point de lui permettre de créer desubstance est un produit réel sures, c’est-à-dire de pensées? nouvelles réalités. Que celles-ci gardent quelque chose du ca-de la pensée.» Tout est dimension et fonc- ractère imaginaire des mythes auxquels elles succèdent, nul neAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

FONDAMENTAL / 35 PROGRESSISME peut sérieusement le contester. Cependant, nul ne peut, non Le nouveau totalitarisme plus, sérieusement nier que les sécrétions de l’hypophyse et du corps jaune soient tout de même des symboles plus chargés Le mal n’est jamais toléré par les hommes de réalités fonctionnelles que la métaphore du carquois et des de courage s’ils comprennent clairement quel flèches d’Éros. Les instruments, en multipliant la pensée, ont diable se dresse devant eux. multiplié le réel. A cette prolifération de la réalité matérielle par alourdissement NELSON HULTBERG, Afr.com quantitatif des représentations idéales, l’instrument cinéma- tographique apporte sa part qui n’est pas des moindres. En Il est vital pour les Américains de bien comprendre que effet, le cinématographe distingue dans la pluralité du temps la dictature collectiviste du futur (contre laquelle nous et y ajoute une nouvelle espèce de temps, extrêmement défor- ont mis en garde les écrivains Aldous Huxley et George mable. Ce temps-là n’est nécessairement ni uniforme, ni uni- Orwell) ne sera pas mise en place d’un seul élan comme en formément accéléré ou ralenti, et les figures qui se trouvent Allemagne nazie, ou par la violence comme en Russie sovié- déplacées dans un tel mouvement, ne restent pas semblables tique, et encore moins par une simple déclaration de prise à elles-mêmes. Ainsi, dans un film de ralenti, enregistré de de pouvoir. Elle sera établie très lentement, subtilement, au sorte que la valeur temps y passe, en cours de prise de vues, du travers de l’adoption d’idées fausses et de l’établissement d’un rapport 2 au rapport 14, on voit bien que les images succes- aveuglement subconscient des intellectuels qui dirigent notre sives d’un même geste ne sont pas superposables. En utilisant, pays, par la corruption des symboles que nous utilisons, et pour la représentation d’un même modèle, des dispositifs qui par la distorsion de la réalité qui les entoure. De telles cor- fassent jouer non seulement le ralentissement variable mais ruptions d’idées poussent les gens à croire que ce qu’ils ob- encore l’accélération variable et l’inversion du temps cinéma- tiennent n’est qu’une nouvelle forme de liberté, une sorte de tographique, on verrait aussi que, des apparences ainsi obte- gouvernement progressiste, créatif et bénévole qui élèvera nues, aucune n’est égale à une autre. Inconstante mobilité des leur pays au rang d’utopie de capital matériel, au sein du- formes, qui, d’abord, rencontre naturellement la méfiance de quel tous les Hommes seront perpétuellement en sécurité et notre esprit empiriquement dressé, depuis on ne sait combien perpétuellement prospères, quelles que soient leurs capacités, de siècles de siècles, à rationaliser l’expérience d’un continu leur intelligence et leur énergie. euclidien, plutôt galiléen même que newtonien, cartésien Le tyran des temps modernes tire son pouvoir de ses pro- aussi, c’est-à-dire homogène, non déformant et indéformable, messes de rendre la vie de ses citoyens plus belles et plus satis- partout et toujours identique. Mais, d’autre part, comme une faisantes que s’il n’était pas là. Et dans la plupart des cas, c’est prodigieuse richesse, l’écran révèle un foisonnement d’êtres aussi effectivement ce qu’il croit. Il proclame que le besoin qui n’avaient pas encore existé. Le temps, sans lequel il n’y de liberté de son peuple est «dépassé», qu’il doit voir au-delà a d’idée complète, ni vraie ni fausse, de rien, vient à être lui- de désirs si simplistes, pour viser une grande société planifiée même diversifié à un point qu’on ne savait jusqu’ici imaginer. dans laquelle les rois bureaucrates et philosophes pourront les Désormais, une pluralité supplémentaire peut compliquer, guider dans leurs décisions et leurs tribulations, les libérer de alourdir, matérialiser une foule de symboles, en les dotant la responsabilité de leurs actes tout en satisfaisant à leurs be- d’innombrables réseaux de relations inédites, toujours modi- soins de base. C’est un chant de sirène aussi basique que la soif fiables, sans cesse renouvelées. de pouvoir dont il découle, qui attire le peuple d’un pays vers Ainsi, le cinématographe détient un pouvoir de multiplication un esclavage collectiviste aussi certainement que les ténèbres du réel, supérieur à celui de tout autre instrument jusqu’ici de la nuit laissent place à la lumière du jour. connu et utilisé, parce qu’à l’écran, nous rencontrons, pour «Le monde est stable, à présent.» a dit le Contrôleur à M. Sau- la première fois, une représentation visuelle d’un univers vage dans «Le Meilleur des mondes» d’Aldous Huxley. «Les transcartésien, d’un espace-temps hétérogène et asymétrique, gens sont heureux; ils obtiennent ce qu’ils veulent, et ils ne veulent d’un continu à quatre inconstantes, où la forme est fonction jamais ce qu’ils ne peuvent obtenir. Ils sont à l’aise, ils sont en d’un mouvement variablement varié, dont elle suit la mobi- sécurité, ils ne sont jamais malades; ils n’ont pas peur de la mort; lité. Cet étonnant pouvoir ; il est vrai, on ne l’emploie encore ils sont dans une sereine ignorance de la passion et de la vieil- que par le détour du spectacle amusant, timidement, d’abord lesse… Ils sont conditionnés de telle sorte que, pratiquement, ils ne par ignorance, ensuite par une sorte de crainte obscure, de peuvent s’empêcher de se conduire comme ils le doivent. Et si par vague répugnance devant un mystérieux danger. Danger il y hasard quelque chose allait de travers, il y a le soma.» a. Souvent, ce n’est pas impunément que l’on met en œuvre Les contrôleurs étatistes de notre époque ont recours aux aides la puissance et l’intelligence de machines à peine nées, mal sociales plutôt qu’au soma pour asservir les masses, mais le domestiquées, sauvages, qui obéissent plus ou moins à la gou- principe reste le même. Les esprits les plus faibles abandonnent verne humaine et qui, plus sûrement, gouvernent l’homme. toujours leur liberté entre les mains de gouvernements gar- On ne sait pas encore ce que fera ou ne fera pas la bombe diens qui leur promettent de les libérer des vicissitudes de atomique et si la désintégration ne dévorera pas, d’un coup, l’existence. Et les moyens employés pour parvenir à une telle ses dompteurs avec toute leur espèce. L’extraordinaire force renonciation se font invariablement au travers du sophisme et réalisante, matérialisante, du cinéma rayonne déjà à travers de la manipulation du langage par les tyrans comme par leurs la banalité des scénarios, au récit desquels on l’emploie, pour victimes – les tyrans parce qu’ils souhaitent contrôler la vie brûler de conviction des populations entières. Avant d’écraser des Hommes, et les victimes parce qu’elles désirent être gou- le Japon, les électrons mobilisés se sont contentés de percer un vernées. C’est ce que voulait dire Ayn Rand par «la sanction petit trou dans le gilet de Pierre Curie. des victimes». Nous avons donc un processus en deux parties Extrait du Cinéma du Diable (1947)AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

36 / FONDAMENTALqui permet à l’Etat collectiviste de gagner du pouvoir: 1) Les forment en des collectivistes amoureux de leur servitude. Huxley poursuit ainsi: «A moins que nous choisissions de décen-esprits les plus faibles de la société, sous l’influence de l’élite traliser et d’utiliser les sciences appliquées, non pas en tant que fin dont les Hommes sont les moyens, mais en tant que moyens dontintellectuelle collectiviste, joignent leurs forces pour former une race d’individus libres serait la fin, nous n’aurons à choisir qu’entre deux alternatives: un certain nombre de totalitarismesdes factions d’électeurs qui votent pour prendre le contrôle nationaux et militarisés, tirant leur pouvoir de la peur de l’arme atomique et de leur conséquence qu’est la destruction de la civilisa-des appareils gouvernementaux et mandater des privilèges, tion (ou, si l’armement est limité, d’un militarisme perpétuel); ou un totalitarisme supranational… qui se développe en parallèle audes faveurs et des assistances en leur faveur aux dépens de besoin des gens en stabilité et en efficacité, pour devenir une utopie d’Etat-providence tyrannique.»ceux qui sont productifs et dépendent d’eux-mêmes. 2) Ces Huxley a écrit ces mots en 1946, et notre monde d’au- jourd’hui nous prouve qu’il ait vu juste. Ne savons-nous pasfactions sont formées au fil des années au travers de la distor- aujourd’hui que la perpétuation du militarisme s’est engagée dans une guerre limitée sans fin, et avance peu à peu vers unesion des concepts qui définissent la liberté et la tyrannie, et qui utopie d’Etat-providence supranational, c’est-à-dire un monde similaire à la Suède, dont les nouveaux totalitaires prônerontconstituent les droits des individus. un égalitarisme morbide qui videra nos vies de tout leur sens? Nous n’avons pas encore vu établi de gouvernement global,Le mal n’est jamais toléré par les Hommes de courage s’ils mais tout ne sera qu’une question de temps. Quand il sera établi, les mots de Tocqueville deviendront réalité: il sera «dif-comprennent clairement quel diable se dresse devant eux. férent de tout ce que nous aurons pu voir jusqu’à présent». Il représentera un pouvoir charitable qui «compresse, énerve,Mais les plus ineptes, à qui on apprend depuis la naissance essouffle et stupéfie un peuple» jusqu’à ce qu’il se trouve «ré- duit à rien de plus qu’un troupeau d’animaux timides et in-que l’étatisme est bon pour eux alors que l’individualisme dustrieux, dont le gouvernement est le berger». Imaginez un Etat-providence similaire à la Suède (quileur nuit, votent en faveur de leur propre esclavage. Beau- taxe les revenus jusqu’à 75%) mélangé à un néo-fasciste de corporatisme global qui ne serait pas sans rappeler le filmcoup acclament la servitude et l’abandon de liberté qui leur «Rollerball», et qui se trouvera confronté à des secteurs recu- lés et désolés à la «Mad Max».sont demandés. C’est un fait. Les groupes humains acceptent Il est évident qu’Huxley avait raison. Depuis 1913, la Répu- blique américaine a évolué pour devenir le rouage central depar nature une vie règlementée et obéissante afin d’obtenir l’autoritarisme global que nous avons pu lire dans «Le Meil- leur des mondes», et s’éloigner du pays libre et souverain forgéplus de sécurité personnelle, ce qui fraie un chemin à la mons- par ses Pères fondateurs. Huxley l’a vu venir, mais n’était pas spécifique au point de nous expliquer précisément commenttruosité du Léviathan. Les Hommes qui ont une certaine force «décentraliser» et mettre fin à l’expansion du gouvernement. Avec la publication d’«Atlas Shrugged», d’Ayn Rand, et lade caractère ne souhaiteraient jamais abandonner leur liberté popularisation des écrivains libertaires comme Ludwig von Mises et Henry Hazlitt dans les années 1950 et 60, nous avonset se battraient jusqu’au bout pour éviter un tel destin. Ce en revanche pu apprendre comment le faire. Si nous voulons mettre fin à et renverser la destruction de nossont les soumis qui élisent les tyrans par leurs votes emplis libertés, nous devrons en revenir aux sources de cette destruc- tion. Nous devrons en revenir à l’année 1913 et débarrasserd’anxiété. Et c’est au travers de la destruction de la langue des notre pays des deux institutions établies cette année-là, qui ont donné au gouvernement fédéral le pouvoir de prendre leHommes et de la mauvaise interprétation de la réalité que dessus sur nos vies – l’impôt progressif sur les revenus et la Réserve fédérale.le bien et le mal se mélangent au point de devenir indiscer- Ce n’est qu’après que ces deux outils marxistes auront été abolis que nous pourrons mettre fin à l’élargissement du gou-nables, pour établir une justification philosophique à la crois- vernement qui détruit la liberté et la raison aux Etats-Unis. Toutes les causes politiques qui ignorent ces deux sourcessance d’un tel monstre gouvernemental. d’expansion gouvernementale sont futiles. Ce n’est qu’en re- fusant au Dracula bureaucratique de Washington le sang dont Les groupes Les masses obéissantes sont ce il se nourrit que nous pourrons restaurer ce que voulaient humains acceptent que recherchent les tyrans, et pour nous nos Pères fondateurs. Le monstre bureaucrate ne par nature une l’oblitération de la raison est la pourra grandir sans les impôts sur les revenus et les politiques vie règlementée contagion qu’ils répandent. Ils monétaires inflationnistes. Mettons fins à ces pouvoir établis et obéissante afin par Washington en 1913 pour sauver la République. Igno- d’obtenir plus de recherchent à propager leurs rons-les, et notre destin sera un gouvernement mondial. /// sécurité personnelle. idéologies au travers de la na- tion à la manière de microbes qui infectent des organismes, en les enseignant dans les écoles, les églises et les médias, en nousdisant qu’être libre et indépendant, c’est être égoïste; que fairedes profits, c’est exploiter; et que le capitalisme du laisser-fairene peut pas fonctionner. Ils nous disent que la soumission dela majorité est la vraie liberté. Une audience avide de ces pro-pagandes naît des rangs des conformistes et des craintifs. Lesconcepts du collectivisme et d’Etat-providence sont glorifiéspar la jeunesse, et les plus soumis parmi elle grandissent endésirant plus que tout devenir des collectivistes. Ils souhaitentplus que tout devenir les serviteurs du gouvernement. Cequi est le plus alarmant, c’est qu’un tel processus d’endoctri-nement subtil et sophistiqué prend place aujourd’hui danspresque toutes les universités des Etats-Unis.Dans son introduction de «Le Meilleur des mondes», Huxleyécrit ceci: «Un Etat totalitaire vraiment efficace est un Etat au seinduquel tous les chefs politiques et judiciaires les plus puissants, ain-si que leurs armées d’administrateurs, contrôlent une populationd’esclaves qui n’ont plus besoin d’être contraints, parce qu’ils ai-ment leur servitude. Les pousser à aimer cette servitude est la tâcheassignée aujourd’hui, dans les Etats totalitaires, aux Ministres dela propagande, aux éditeurs de journaux et aux enseignants.»L’armée d’administrateurs que mentionne Huxley s’abatdéjà sur nous. Ces administrateurs sont les intellectuels éta-tistes de nos universités et de nos médias. Ils ont un contrôletrès important sur les esprits de notre jeunesse, qu’ils trans-AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

INTANGIBLE / 37Entrepreneurs, développez votre Web TV! PAR JEAN-PAUL OURY Expert en stratégie et influence digitaleBasculement. Jamais à la traîne pour taxer les innova- que la publicité qui est liée avec, alors ils empochent entretions qui marchent, les députés français viennent de voter 0,40 et 3,5 euros (source Business Insider). On constate égale-«la taxe Youtube», pour viser les revenus publicitaires des sites ment le succès phénoménal du genre humoristique. Certainsqui mettent à disposition des vidéos gratuites ou payantes sur jeunes Youtubers francophones comptent plusieurs millionsInternet. Espérons que cette mesure bien «française» restera d’abonnés sur leurs chaînes. Appréciés d’un public très larges,confinée à ce pays voisin; nous disposons cependant là d’un ils sont également courus par les annonceurs. Ainsi le Créditbon indicateur pour affirmer que la vidéo Industriel et Commercial (CIC) a recruté lesur Internet est devenue un support privilé- blogueur Cyprien pour faire une série degié, susceptible de générer autant de revenus vidéos humoristiques liées aux thématiquespublicitaires, si ce n’est plus, que la télévision bancaires concernant au premier plan leselle-même. Reed Hastings, le bouillonnant jeunes (la colocation, le premier emploi, lepatron de Netflix avait annoncé la mort de jeune entrepreneur…). La web-vidéo poli-la télévision. Nous n’en sommes pas encore tique n’est pas reste et un Youtuber, tel quelà. Mais les chiffres ne trompent pas: Inter- Paul Joseph Watson, par exemple, rivalisenet est en train de devenir le media numéro avec les grands médias US pour sortir desun. En 2014, une étude de Flury analytics scoops liés à la campagne présidentielle(une entreprise appartenant à Yahoo) révé- US. La vidéo du célèbre site Reason «A mi-lait que les individus passent désormais plus lestone for women in politics: libertariansde temps à consulter leur smartphones que reflect on Hillary’s nomination» a suscité unleur TV avec 2 heures 57 minutes, contre véritable buzz et vue plusieurs millions de2 heures 48 pour le «vieil écran». Quand fois si on totalise tous les supports.on sait que 62% des américains utilisent Les PME peuvent Transversale. Jusqu’à présent nousaujourd’hui Facebook pour s’informer… trouver dans la vidéole moment où les GAFA (Google, Apple, un champ d’expression avons essentiellement parlé de Youtube,Facebook, Amazon) absorberont totalement particulièrement mais il est évident que la diffusion vidéo prolifique. Et accessiblela manne publicitaire que les annonceurs avec peu de moyens. est transversale à toutes les plateformesréservent aux chaînes de télévision n’est plus du web. Nous ne pensons pas seulementtrès éloigné. Ce changement fera date dans aux plateformes concurrentes uniquementl’histoire des médias. Aussi, il est d’ores et dédiées à la vidéo, telles que Dailymotion,déjà un signe que l’on peut interpréter: la Viméo ou Periscope. Facebook, Snapchat,vidéo qui a toujours été un support de communication privi- Twitter, Instagram, Pinterest, et LinkedIn, toutes ces plate-légié est en passe de devenir plus que jamais essentielle. formes se sont livrées une véritable course à l’exclusivité pour attirer à elles des contenus vidéos premium susceptibles deAccessible. La bonne nouvelle est qu’elle est devenue créer le buzz. A ce stade, cependant, le marché de la vidéo suraccessible à tous les professionnels. Toute entreprise peut Internet est un peu comme la conquête de l’Ouest au XIXedésormais avoir sa chaîne vidéo en toute simplicité et ce, à un siècle: tout reste à faire. S’il y a de nouveaux entrants qui vontprix raisonnable. Car pour faire un buzz à l’aide d’un conte- pouvoir en profiter, ce sont bien à notre avis, la start-up et lanu vidéo, il n’est nullement besoin d’une superproduction. PME. En effet, alors que ce support était réservé aux grandsIl suffit de voir le succès des Youtubeurs, ces internautes indé- comptes qui, seuls pouvaient s’offrir les coûts exorbitants despendants qui ont créé leurs propres chaînes et inondent le web médias télévisuels, elles peuvent désormais trouver un champd’histoires tournées dans leurs salons, vues par des millions d’expression particulièrement prolifique et chaque entrepre-d’internautes. Le premier Youtuber mondial, PewDieDie, a neur peut aujourd’hui faire son infographie vidéo 3D, filmerpresque 50 millions d’abonnés. C’est en filmant ses réactions sa présentation corporate, faire témoigner ses clients, broad-lors de test des jeux vidéo que ce Suédois a trouvé la voie du caster des questions-réponses, live-streamer une conférence,succès international. On estime ses revenus à plus de 6,3 mil- filmer son entreprise avec un drone, ou même influencer unlions d’euros annuels. Notons au passage que les Youtubers Youtuber, etc. En bref, laisser simplement parler sa créativitésont payés au CPM (coût pour mille affichages publicitaires). pour présenter son entreprise et toucher un large public à peuChaque fois que 1000 internautes affichent leur page ainsi de frais. Ne vous en privez pas. ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

Eugène Delacroix, Jeune orpheline au cimetière (vers 1824). Huile sur toile, 65,5 × 54,3 cm, Musée du Louvre, Paris.

INSPIRATION / 39Questions sur le beauLe beau ne se transmet ni ne se concède comme l’héritage d’une ferme. Il est le fruit d’une inspiration persévérantequi n’est qu’une suite de labeurs opiniâtres.L e sentiment du beau est-il Portrait Eugène Delacroix, Félix Nadar, EUGÈNE DELACROIX celui qui nous saisit à la vue 1820-1910. d’un tableau de Raphaël Peintre français (1798-1863) ou de Rembrandt indiffé- représentation de la forme humaine les remment, d’une scène de accidents naturels et le travail, elles ont il ne se transmet ni ne se concède comme Shakespeare ou de Cor- donné naïvement la preuve que le beau l’héritage d’une ferme; il est le fruit d’uneneille, quand nous disons: «Que c’est pour elles ne consistait que dans une suite inspiration persévérante qui n’est qu’unebeau!» ou se borne-t-il à l’admiration de de recettes. Elles ont pu enseigner le beau suite de labeurs opiniâtres; il sort des en-certains types en dehors desquels il ne soit comme on enseigne l’algèbre, et non seule- trailles avec des douleurs et des déchire-point de beauté? En un mot, l’Antinoüs, ment l’enseigner mais en donner de faciles ments, comme tout ce qui est destiné àla Vénus, le Gladiateur, et en général les exemples. Quoi de plus simple, en effet, à vivre; il fait le charme et la consolationpurs modèles que nous ont transmis les ce qu’il semble? Rapprocher tous les carac- des hommes, et ne peut être le fruit d’uneanciens, sont-ils la règle invariable, le ca- tères d’un modèle unique, atténuer, effa- application passagère ou d’une banalenon dont il ne faut point s’écarter sous cer les différences profondes qui séparent tradition. Des palmes vulgaires peuventpeine de tomber dans la monstruosité, ces dans la nature les tempéraments et les âges couronner de vulgaires efforts; un assenti-modèles impliquant nécessairement avec divers de l’homme, éviter les expressions ment passager peut accompagner, pendantl’idée de la grâce, de la vie même, celle de compliquées ou les mouvements violents, la durée de leur succès, des ouvrages en-la régularité? capables de déranger l’harmonie des traits fantés par le caprice du moment; mais la ou des membres, tels sont en abrégé les poursuite de la gloire commande d’autresReflets. L’antique ne nous a pas exclu- principes à l’aide desquels on tient le beau tentatives: il faut une lutte obstinée pour comme dans sa main ! Il est facile alors arracher un de ses sourires; ce serait peusivement transmis de semblables types. Le de le faire pratiquer à des élèves et de le encore: il faut, pour l’obtenir, la réunionSilène est beau, le Faune est beau, le So- transmettre de génération en génération de mille dons et la faveur du destin.crate même est beau: cette tête est pleine comme un dépôt.d’une certaine beauté, malgré son petit Nature. La simple tradition ne sau-nez épaté, sa bouche lippue et ses petits Fruit. Mais la vue des beaux ouvrages deyeux. Elle ne brille pas, il est vrai, par la rait produire un ouvrage qui fasse qu’onsymétrie et la belle proportion des traits, tous les temps prouve que le beau ne se s’écrie: «Que c’est beau!» Un génie sortimais elle est animée par le reflet de la pen- rencontre pas à de semblables conditions: de terre, un homme inconnu et privilégiésée et d’une élévation intérieure. Encore va renverser cet échafaudage de doctrinesle Silène, le Faune et tant d’autres figures à l’usage de tout le monde et qui ne pro-de caractère sont-elles de la pierre dans duisent rien. Un Holbein avec son imita-l’antique. On concevra facilement que la tion scrupuleuse des rides de ses modèles etpierre, le bronze et le marbre demandent qui compte pour ainsi dire leurs cheveux,dans l’expression des traits une certaine un Rembrandt avec ses types vulgaires,sobriété qui est de la roideur et de la sé- remplis d’une expression si profonde, cescheresse quand on l’imite en peinture. Ce Allemands et ces Italiens des écoles primi-dernier art, qui a la couleur, l’effet, qui se tives avec leurs figures maigres et contour-rapproche davantage de l’imitation im- nées et leur ignorance complète de l’artmédiate, admet des détails plus palpitants, des anciens, étincellent de beautés et de cetmoins conventionnels, et qui s’écarteraient idéal que les écoles vont chercher la toise àencore davantage de la forme sévère. la main. Guidés par une naïve inspiration, puisant, dans la nature qui les entoure etRecettes. Les écoles modernes ont pros- dans un sentiment profond, l’inspiration que l’érudition ne saurait contrefaire, ilscrit tout ce qui s’écarte de l’antique régu- passionnent autour d’eux le peuple et leslier ; en embellissant même le Faune et le hommes cultivés, ils expriment des sen-Silène, en ôtant des rides à la vieillesse, en timents qui étaient dans toutes les âmes:supprimant les disgrâces inévitables et sou- ils ont trouvé naturellement ce joyau sansvent caractéristiques qu’entraînent dans la prix qu’une inutile science demande en vain à l’expérience et à des préceptes. /// Extrait de «Œuvres littéraires», I, Études esthé- tiques, édition de 1923.AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

40 /L’impa- PcMtE -globald’une réformeLes impératifs du nouvel environnement fiscalEn quoi et comment la réforme prévue de l’imposition des entreprises (RIE III) concerne non seulement les sociétésbénéficiant aujourd’hui de privilèges fiscaux. Mais aussi toutes les entreprises de Suisse.L a réforme de l’imposition des entreprises III (RIE ment les sociétés qui perdront leurs privi- III), adoptée par l’Assem- lèges actuels. En raison de la réforme de blée fédérale et à propos de l’imposition des entreprises III, le paysage laquelle les électeurs suisses fiscal suisse va profondément changer. Les nouveaux contours qui se dessinerontse rendront aux urnes selon concerneront au final toutes les entre-toutes prévisions le 12 février prochain, prises, même les sociétés soumises à uneest d’une importance capitale pour la imposition ordinaire aujourd’hui.place économique suisse, car elle garantitune imposition des entreprises compéti- Questions. Les entrepreneurs detive mais aussi acceptée au niveau inter- tous les secteurs à la tête de petites ou denational. Un système fiscal attrayant est grandes entreprises doivent donc dès àindispensable pour préserver la compétiti- présent se pencher sur certaines questionsvité internationale de notre pays. en rapport avec la réforme fiscale, parÀ première vue, la réforme porte princi- exemple la future structure de l’entreprise,palement sur la suppression des privilèges la stratégie en matière de fonds propres oufiscaux cantonaux pour les holdings, les Les nouveaux contours qui sesociétés de domicile et les sociétés mixtes. dessinent concernent au finalPrès de 24 000 de ces sociétés sont au- toutes les entreprises. Même les sociétés soumises à unejourd’hui soumises à une imposition can- imposition ordinaire aujourd’hui.tonale spéciale, dont l’importance pourles recettes fiscales varie toutefois d’uncanton à l’autre: ainsi, la part des bénéficesd’entreprise imposables provenant de so-ciétés avec un statut fiscal privilégié s’est le choix du site. Ainsi, ils pourront profi-élevée au niveau record de plus de 80% ter, le cas échéant, d’avantages résultantdans les cantons de Vaud et de Bâle-Ville, des nouvelles conditions-cadres ou éviterà quelque 70% à Genève, mais à moins de d’éventuels inconvénients. Cela vaut no-10% en Valais. tamment pour la planification de leur for-Toutefois, la réforme aura des consé- tune personnelle. Tant les experts fiscauxquences pour l’ensemble des entreprises que les conseillers bancaires spécialisés lesde Suisse: les différents cantons ayant la conseillent sur ces questions.possibilité d’y réagir avec tout un train de En ce qui concerne le choix du site, onmesures pour rester attrayants du point constate d’ores et déjà que la RIE IIIde vue fiscal, elle ne concerne pas unique- annonce une nouvelle ère de la concur-AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

PME / 41 Dr ANDREAS ARNI Responsable Entrepreneurs & Executives au Credit Suisserence fiscale entre les cantons. Une série fiscaux pour les gains issus de la proprié- veau en importance à plus long terme.de cantons prévoient une nette baisse de té intellectuelle, la comptabilisation de Il convient en outre de tenir compte dul’impôt sur le bénéfice ordinaire pour les jusqu’à 150% des coûts effectifs pour la fait que seuls les cantons dans lesquelsentreprises dans le cadre de la mise en recherche et le développement ou une l’imposition des dividendes pour les parti-œuvre de cette réforme. En particulier en déduction d’intérêts sur les fonds propres cipations qualifiées s’élève à au moins 60%Suisse romande, le taux d’imposition sur excédentaires, ce que l’on appelle l’impôt du taux ordinaire d’imposition sur le reve-le bénéfice doit fortement baisser: dans le sur le bénéfice avec déduction des intérêts. nu pourront appliquer l’instrument de lacanton de Vaud, il doit passer de 21,65% Pour les différents cantons, il s’agit déduction d’intérêts. C’est justement pouraujourd’hui à 13,79%, à Genève de près finalement de définir un mix de mesuresde 24% à 13,49%. adéquat en tant que sites d’implantation Les entrepreneurs doivent seCe sont notamment les entreprises impo- des entreprises. Pour les entreprises, la pencher assez tôt sur ce thème etsées selon le régime normal aujourd’hui, mesure dans laquelle les nouvelles condi- réfléchir aux différents scénarios.donc de nombreuses petites et moyennes tions-cadres fiscales concerneront leurs ac- Cette analyse est notammententreprises du pays, qui profiteront en tivités spécifiques sera décisive. importante pour la planificationprincipe de la tendance à la baisse des de leur fortune personnelle.taux d’imposition cantonaux. Et de nou- Structure. Les entreprises des secteursvelles options pourraient s’ouvrir notam- les entreprises familiales ou pour les en-ment aux entreprises mobiles du secteur à forte intensité de recherche et avec des trepreneurs, pour lesquels les dividendes revenus issus de biens immatériels par représentent une composante importante La possibilité d’une déduction exemple peuvent profiter de la Patent de la constitution de la fortune privée, que d’intérêts sur la partie des Box ou d’un crédit d’impôt en faveur de la situation peut changer et que s’impose fonds propres dépassant la recherche. Les modalités exactes dépen- une vérification de la stratégie de verse- les exigences minimales peut dront de détails qui devront être encore ment: salaire ou LPP ou dividende ou prêt être intéressante pour un large fixés dans les dispositions d’exécution d’actionnaires. éventail d’entreprises. correspondantes. Quels types de produits issus des brevets bénéficieront d’un dé- Concret. Tous les cantons n’ont pasdes services qui ne sont pas liés à un lieu grèvement fiscal? Quelles activités serontparticulier en raison d’installations de pro- considérées comme recherche et déve- encore publié leurs plans de mise enduction. Mais tous les cantons n’ont pas loppement et lesquelles ne le seront pas? œuvre concrets de la réforme de l’impo-encore rendu public l’ordre de grandeur La question qui en résultera notamment sition des entreprises III. Et ce sont lesde la future imposition sur le bénéfice. pour les grandes sociétés présentes dans électeurs suisses qui auront probablementPour les entrepreneurs, il est donc impor- plusieurs régions suisses ou à l’interna- le dernier mot concernant cette réforme,tant de suivre de près les prochains déve- tional sera de savoir si la structure de qui devrait entrer en vigueur à compterloppements dans les différents cantons. l’entreprise doit être adaptée pour être de 2019. Toutefois, les entrepreneurs ne idéalement positionnée dans un nouvel devraient pas attendre et se pencher dèsDéduction. Néanmoins, se baser uni- environnement fiscal. aujourd’hui sur les différents scénarios La possibilité d’une déduction d’intérêts pouvant résulter de la réforme de l’impo-quement sur les futurs taux de l’impôt sur la partie des fonds propres dépas- sition des entreprises III, en faisant appelsur le bénéfice ne suffit pas. Lors d’une sant les exigences minimales peut être aux spécialistes du sujet.analyse de la situation, les nouveaux ins- intéressante pour un large éventail d’en- Si la RIE III concerne les entreprises, cettetruments de politique fiscale, dont dispo- treprises. Une holding immobilière par dernière offre toutefois également desseront les cantons dans le cadre de la ré- exemple, regroupant différentes sociétés opportunités à leurs responsables. A cetforme de l’imposition des entreprises III immobilières, peut examiner dans quelle effet, les entrepreneurs doivent se pencheret qu’ils pourront en partie appliquer dans mesure les fonds propres excédentaires suffisamment tôt sur ce thème et réfléchirdes proportions différentes à l’imposition peuvent être regroupés pour profiter de aux différents scénarios. Cette analyse estdes sociétés, doivent être également pris la déduction d’intérêts. Les effets décou- notamment importante pour la planifica-en considération. À noter en particulier: la lant de cette option devraient certes être tion de leur fortune personnelle. ///Patent Box comprenant des dégrèvements modestes dans le contexte actuel de taux d’intérêt, mais devraient gagner de nou-AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

42 / PMENécessaire alignement internationalLa Suisse doit intégrer de bonnes conditions fiscales pour maintenir une position économique forte à l’international.L a Suisse travaille actuel- ment les couples mariés et les couples à DENIS COLIN lement à la mise en place deux revenus, ont également bénéficié d’une importante réforme d’un allègement fiscal. Avec la deuxième LPG Fiduciaire de sa fiscalité, appelée «Ré- réforme de l’imposition des entreprises forme de l’Imposition des de 2008, il s‘agissait d’alléger les charges des dépenses faites dans la recherche et le Entreprises III» (RIE III), des petites et moyennes entreprises et les développement;qui aura des effets sur le régime fiscal tâches administratives auxquelles celles-ci  Une augmentation des montants desdu pays et sur l’optimisation fiscale dont étaient exposées. déductions accordées sur les dépensescertaines sociétés bénéficient. L’objectif consenties en faveur de la recherche et dude cette réforme fiscale est de permettre Contenu. La Réforme de l’Imposition développement;à chaque canton de proposer de nouveaux  Une diminution des taux d’impositiontaux d’imposition et d’accroître la compé- des Entreprises (RIE III) propose diffé- des bénéfices pour inciter les entreprises àtitivité fiscale de la Suisse. rentes mesures, notamment l’abolition des rester. Genève pourrait passer son impôt privilèges accordés à ces sociétés holding, de 24% à 13%.Compétitivité. Il s’agit de la troi- de domicile et mixte au niveau cantonal. Le canton de Genève est l’un des premiers Mais pour éviter que des entreprises concernés par cette réforme. Comme citésième réforme qui a pour but d’améliorer quittent la Suisse, la réforme examinée ac- auparavant, une diminution du taux d’im-la compétitivité fiscale de la Suisse et de tuellement par le Parlement intègre aussi: position du bénéfice des sociétés est inté-rétablir l’acceptation à l’échelle internatio-  Une suppression des régimes fiscaux grée en Suisse. A Genève, le taux d’impo-nale. En effet, depuis le début des années cantonaux; sition du bénéfice devrait passer à 13,49%2000, le fait que la Suisse soumette les  Une imposition préférentielle des re- et sera appliqué à chaque entreprise: lesrevenus étrangers des sociétés holding, venus issus de produits de «licence box», entreprises à statuts (taxées auparavant àdes sociétés de domicile et des sociétés c’est à dire des revenus générés par l’ex- 11,7%) et les entreprises ordinaires (taxéesmixtes à un impôt avantageux incite les ploitation et l’utilisation d’instruments de auparavant à 24,2%). Le canton genevoisentreprises à s’y installer. Ces sociétés bé- propriété intellectuelle, qui permet aux s’aligne donc sur ses voisins.néficient de régimes fiscaux cantonaux entreprises de bénéficier de diminution de Par ailleurs, le canton envisage d’appli-fortement disparates en fonction de la leurs charges fiscales et de tenir compte quer des prélèvements sur la masse sala-zone géographique d’installation (impo- riale (0,22%) et sur l’impôt sur le bénéficesition sélective). Une telle réglementa- AIDE AU DÉVELOPPEMENT et consent un abattement sur les divi-tion n’est toutefois plus en accord avec les INTERNATIONAL DES PME dendes. Ceux-ci seront désormais imposésnormes internationales. à 70% pour les participations de la fortuneLes objectifs principaux de la réforme La Fiduciaire LPG, créée en 2000 par Denis privée et à 60% pour les participations deen cours, dans le cadre des impôts canto- Colin et Jonathan Beggiato, est un cabinet la fortune commerciale.naux, sont de gommer les différences de luxembourgeois d’expertise comptable à Grâce à cette réforme, Genève maintienttraitement fiscal des bénéfices des entre- vocation internationale dans le domaine son attractivité nationale et internationale.prises suisses et étrangères, d’assurer et de du conseil, de l’audit et de la fiscalité. Il La modification du taux d’imposition durenforcer la compétitivité et l’attractivité a structuré au fil des années un groupe bénéfice des entreprises entraînera un cer-de la Suisse comme pays d’implantation important, le groupe LPG, qui accompagne tain manque à gagner. Ceci n’est certespour les entreprises dans un contexte à moyen et à long terme les PME, PMI pas une bonne nouvelle en soi mais ceinternational. ainsi que les grands groupes francophones changement est essentiel car sans la di- dans la mise en place de leurs projets minution du taux, le canton de GenèveAttractivité. La première réforme de développement nationaux et interna- devrait faire face à une baisse des recettes tionaux en leur apportant des solutions fiscales et du nombre d’emplois.de l’imposition des entreprises de 1997 complètes et sur mesure. LPG contribue(réforme de l’imposition des sociétés), aussi à introduire ses clients dans les Affectées. Les sociétés implantées enqui visait à renforcer l’attrait de la Suisse marchés étrangers à forte croissance pourpour les structures holding, a eu des effets y structurer et y développer une activité Suisse seront, d’une façon ou d’une autre,positifs sur l’implantation des entre- commerciale ou industrielle. affectées par ces nouvelles dispositionsprises, la création d’emplois et les recettes dont l’entrée en vigueur est prévue pourfiscales. Les personnes physiques, notam- 2017. La Suisse doit intégrer de bonnes conditions fiscales afin de maintenir une position économique forte à l’interna- tional. ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

Le savoir-faire d’ingénieurs suisses au service d’uncimentier en Algérie—Le bureau d’ingénieurs PEG situé à Genève, qui compte environ 200 collaborateurs, recourt aux prestationsde conseil et aux produits d’assurance de l’Assurance suisse contre les risques à l’exportation SERV pourminimiser les risques de ses opérations d’exportation. Son dernier projet en date concerne un mandat relatifà des services liés à l’agrandissement de trois cimenteries en Algérie. PEG a conclu à cet effet une assuran-ce de crédit fournisseur auprès de la SERV.—Un grand cimentier public a chargé créance au comptant ou sa créance porte l’avantage que le montant dela société PEG SA de lui fournir des de crédit pour les livraisons effectuées la créance n’est pas versé à PEG parprestations d’ingénierie pour l’agran- et les prestations fournies au titre l’acheteur à l’échéance de la facture,dissement de trois cimenteries exis- d’une opération d’exportation avec mais qu’il lui est dû dès la naissancetantes en Algérie. La commande à un acheteur étranger. Les risques po- de la créance, soit dans ce cas lors laune valeur totale d’environ 14,8 mil- litiques, les risques de transfert, les fourniture des prestations de conseil.lions d’euros et englobe des presta- suspensions de paiement ainsi que le PEG dispose ainsi de meilleures liqui-tions de conseil, des contrôles qua- refus de paiement ou l’insolvabilité de dités pendant la durée de l’assurance,lité, la surveillance des travaux de l’acheteur étranger figurent parmi les un aspect qui est primordial pour lesconstruction et la mise en service. risques pouvant conduire à la défail- PME précisément.Une partie des prestations est assu- lance de créances.rée par la SERV contre le risque denon-paiement de l’acheteur pour un La cession des prétentions d’assu- A propos de PEG SA rance crée des liquidités supplé-montant de 5 millions d’euros. PEG SA est un bureau d’ingéni- mentaires eurs-conseils genevois opérant dansLes créances de crédit et le prix de L’assurance de crédit fournisseur les domaines du ciment, de l’environ-revient sont assurés conclue par PEG porte sur une valeur nement, des infrastructures et desPEG SA a demandé une assurance partielle de la commande et couvre combustibles alternatifs qui, depuis sade crédit fournisseur auprès de la les paiements mensuels convenus. De création en 1959, a mené à bien en-SERV afin de couvrir le paiement de plus, les prétentions relevant de l’as- viron 700 projets dans 95 pays et estses prestations de service relatives à surance ont été cédées à la banque aujourd’hui considéré comme le lea-cette opération. Ce produit permet à qui finance PEG, qui reste cependant der mondial des conseils en ingénierieun exportateur suisse de couvrir sa le preneur d’assurance. Cela com- dans le secteur du ciment.A propos de la SERV SERV Assurance suisse contre les risques à l’exportationLa SERV assure les opérations d’exportation des entre- T +41 21 613 35 84prises suisses contre les risques politiques et commer-ciaux. En tant qu’établissement de droit public de la Confé- [email protected]ération, la SERV propose ses assurances en complément www.serv-ch.comdes offres des assureurs de crédit privés. Séances d’informations gratuites sur la SERV et ses produits:Outre l’exportation de biens de consommation et d’inves- www.serv-ch.com > manifestationstissement, la SERV couvre également les exportations deservices tels que les travaux de construction et d’ingénie-rie, ou les contrats de mise à disposition de savoir-faire. LaSERV ne requiert aucun volume minimal de commande, nitaille minimale de l’entreprise.

44 / PMEGrands dilemmes des structures familialesPourquoi les intentions de succession de la génération suivante connaissent un déclin progressif depuis plusieurs années. THOMAS ZELLWEGER ET PHILIP ZIEGER Université de St Gall HEINRICH CHRISTEN, Ernst & YoungQue se passe-t-il lorsque  DILEMME 2 au bercail et entretiennent des liens étroits des facteurs liés à la avec leur famille? société, à la culture ou Risque entrepreneurial et refus de Comment faire entrer ses enfants dans à la famille créent des l’incertitude l’entreprise familiale? Comment les fa- normes, des pressions et Dans quelle mesure les intentions de milles d’entrepreneurs devraient-elles des contraintes qui s’op- succession sont-elles affectées lorsqu’un présenter l’entreprise pour donner envie à posent aux souhaits et aux préférences du successeur perçoit le fait de devenir en- leurs enfants de leur succéder un jour? Les successeur potentiel? Nous explorons ici trepreneur comme très risque et vit dans enfants devraient-ils travailler dans l’en- trois dilemmes correspondants, dans le une société où le refus des risques et de treprise familiale avant toute succession? contexte de la succession. l’insécurité est très important? Ceci est un L’intensité des intentions de succession élément important, car reprendre l’entre- des étudiants qui ont fait l’expérience du  DILEMME 1 prise familiale constitue un choix de car- travail dans l’entreprise familiale est plus rière professionnelle. forte que celle de ceux qui n’ont pas vécu Volonté de contrôler sa vie et pres- Nous avons constaté que plus la société in- cette expérience. Cela montre que l’expé- sions sociales cite à éviter le risque et l’incertitude, plus rience professionnelle au sein de l’entre- Le désir de vivre la vie qu’on s’est choisie les intentions de succession sont fortes. prise familiale est propice aux intentions peut être mis à rude épreuve dans les so- Cet effet est encore plus prononce lorsque de succession. ciétés où la hiérarchie, l’autorité et le pou- les successeurs potentiels pensent que À quel âge les enfants devraient-ils com- voir des autres sont très importants. Dans devenir entrepreneur est une décision mencer à travailler dans l’entreprise fami- ces cultures, les parents peuvent être en risquée. Il semble alors plus sûr de re- liale? Il est intéressant de remarquer que mesure d’exercer un pouvoir et une auto- prendre l’entreprise familiale que de créer nous n’avons pas constaté de relation entre rité supérieurs sur leurs enfants. sa propre start-up. Il ne semble donc pas y l’âge d’entrée professionnelle dans l’entre- Nos données indiquent que, lorsqu’un avoir contradiction entre les forces institu- prise familiale et l’intensité des intentions successeur potentiel aspire au contrôle et à tionnelles et personnelles. de succession. Il semble que faire entrer l’autodétermination, une forte pression so- son enfant plus tôt ou plus tard dans l’en- ciale d’obéissance à l’autorité (des parents  DILEMME 3 treprise ne joue pas un rôle crucial. par exemple) entraîne un surcroît d’inten- Pendant combien de temps les successeurs tions de succession. Cela peut s’expliquer Envie d’indépendance et collectivisme potentiels devraient-ils travailler dans par le fait que prendre la succession per- Que se passe-t-il alors lorsque les individus l’entreprise familiale? Nous avons deman- mettra aux membres de la prochaine gé- ressentent un fort désir d’indépendance et dé aux étudiants qui travaillent dans l’en- nération d’exercer eux-mêmes pouvoir et d’autonomie, dans une société où la fidé- treprise familiale (mais ne la dirigent pas autorité. Dans ce cas, les forces institution- lité au groupe et la cohésion, au sein de encore): «Au total, combien de mois avez- nelles et individuelles se renforcent réci- la famille, par exemple, sont extrêmement vous déjà passés dans l’entreprise?» proquement, incitant les individus à opter valorisées? Qu’advient-il lorsque les suc- Même si une expérience professionnelle pour la succession. cesseurs potentiels veulent se libérer, mais que la société attend d’eux qu’ils rentrentSUCCESSEURS INTENTIONNELS ET SUCCESSEURS POTENTIELS POIDS DES IDÉES DE CARRIÈRE PRÉCONÇUES SELON LE SEXEEN % DE TOUS LES MEMBRES DE LA PROCHAINE GÉNÉRATION 5.5025 5.00 4.68 4.78 4.94 4.7520 4.5015 19,7 4.0010 Successeurs potentiels 5 3,5 3.50 3.22 2.90 0 4,9 3.00 Successeurs intentionnels Successeurs intentionnels (direct) 2.50 (5 ans après)Source: Ernst & Young 2.00 Attitude envers Efficacité entrepreneuriale Perception la succession personnelle du risque Source: Ernst & YoungAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

PME / 45Plus la société incite à éviter le risque et l’incertitudeplus les intentions de succession sont élevées.plus importante conduit d’abord à renfor- et d’évaluation finit par faire peur aux treprise familiale, combien devriez-vous payer?» Les réponses ont été soustraitescer les intentions de succession, il existe successeurs potentiels (Dehlen et al. 2014). de 100 afin d’établir la remise familiale attendue. Les membres de la générationun point de bascule autour de 65-70 mois, suivante espèrent avoir à payer environ la moitié du prix de l’entreprise familialeoù les intentions de succession sont les Obstacle. L’un des possibles obstacles à par rapport à un acheteur extérieur (uneplus fortes. Au-delà, elles diminuent. Cela la succession intrafamiliale est le prix que remise familiale de 51,8%). La remise familiale attendue varie considérablementpeut s’expliquer par le fait que les succes- les membres de la génération suivante vont selon le pays, pour des raisons qui devront être analysées dans de futures études.seurs potentiels travaillent trop dans l’en- avoir à payer pour acquérir l’entreprise fa- Générations. L’important désir destreprise familiale, sans en prendre la di- miliale. Des études récentes, comme notre familles d’entrepreneurs d’assurer lerection et peuvent avoir l’impression que première étude «Rentrer au bercail ou vo- contrôle de leur affaire au fil des généra- tions est peut-être l’aspect le plus singu-leurs parents ne leur font pas suffisam- ler de ses propres ailes?», suggèrent que les lier en matière d’entreprises familiales. Néanmoins, les intentions de successionment confiance pour être des successeurs transactions intrafamiliales existent bien et de la génération suivante sont faibles et même, en déclin. Divers facteurs influentcompétents; en fait, il a été démontré que que la génération suivante n’hérite pas de sur le fait que les membres de la généra- tion suivante rentrent au bercail ou volentla multiplication des efforts de sélection l’entreprise simplement et gratuitement. de leurs propres ailes. Mais espérons que cette aspiration enrichisse, inspire et guide Toutefois, les successeurs les familles d’entrepreneurs, les membres de la génération à venir et leurs conseillersNOMBRE DE FRÈRES ET SŒURS ET INTENSITÉ 2.84 familiaux sont susceptibles dans la poursuite du succès à long termeDES INTENTIONS DE SUCCESSION de bénéficier d’une remise de leur entreprise. /// par rapport à la transac-2.90 Intensité des intentions (échelle de 1 à 7) tion qui serait proposée à2.80 un acheteur extérieur. Pour2.70 2.60 2.62 éclairer ce point grâce à des2.60 données internationales 2.54 plus élargies, nous avons2.50 2.43 posé la question suivante 2.44 aux étudiants: «Si une per-2.40 sonne externe à la famille2.302.20 1 frère/ 2 frères/ 3 frères/ 4 frères/ 5 frères/ devait payer un montant Enfant sœur sœurs sœurs sœurs sœurs égal à 100 pour acquérir unique la totalité des parts de l’en-Source: Ernst & YoungCARACTÉRISTIQUES DES SUCCESSEURS EN FONCTION REMISE FAMILIALE ATTENDUE PAR PAYS (EN %)DE LA TAILLE DE L’ENTREPRISE FAMILIALE Estonie 73,2 Slovénie 70,5 PologneDifférences significatives à un niveau de 5% Allemagne 62,1 Autriche 58,8 Être dépositaire 5.6 Singapour 58,5 de l'autorité 5.2 Belgique 58,5 57,9Avoir le pouvoir de prendre 5,9 Russie 57,2 les décisions 5.6 Danemark 57,0 Angleterre 56,2Avoir un métier intéressant 6.3 Pays-Bas 53,9 5.8 Moyenne 51,8 51,4Avoir un métier stimulant 5.8 Suisse 51,2Efficacité entrepreneuriale 5.5 Grèce 48,6 Espagne personnelle 5.3 Finlande 45,6 4.9 Argentine 44,2 Malaisie 42,4 Locus de contrôles 5.5 Brésil 42,1Intensité des intentions 5.1 Colombie 40,5 Italie 35,6 de succession 5.5 Mexique 34,1 4.6 (Echelle de 1 à 7) Canada & USA Australie 28,8 0,0 2,0 4,0 6,0 8,0 Successeurs intentionnels Successeurs intentionnels 17,7 dans les petites entreprises dans les grandes entreprises 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0 80,0 (0-1 ETP) (>50 ETP)Source: Ernst & Young Source: Ernst & YoungAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

46 / PMELes successions fiscalement favoriséesAtténuer la double imposition pour les propriétaires-gérants d’entreprise et réduire leur fiscalité permettrade faciliter les transmissions.Si la première réforme, dite de ont des bénéfices faibles durant la phase FABRICE LANGE l’imposition des sociétés, a eu de lancement. pour objet une meilleure fisca- Actoria lité pour les sociétés internatio- ALLÉGEMENTS EN FAVEUR DES SOCIÉTÉS nales en Suisse, la seconde ré- la réglementation relative à l’investisse- forme, vient favoriser les PME. DE CAPITAUX ment portant sur les biens d’équipement, Il s’agit, ici, d’atténuer la double imposition se borne désormais à exiger que le bien ac- pour les propriétaires-gérants d’entreprise  Basculer l’impôt sur le bénéfice vers quis en remploi soit un actif immobilisé. et réduire leur fiscalité. Les 130.000 PME l’impôt sur le capital Grâce à cette modification, les entreprises suisses sont d’un côté imposées au niveau Dans le cadre de la réforme de l’imposition peuvent s’adapter plus efficacement à l’évo- fédéral sur les bénéfices et de l’autre sur des sociétés de 1997, l’impôt sur le capital lution du marché. Avec la réforme, l’en- leurs fonds propres au niveau des cantons de 0,8% sur les fonds propres a été suppri- trepreneur peut réinvestir l’argent tiré de et communes. Les actionnaires déclarent mé. Avec le passage au taux d’imposition la vente d’un actif pour un autre sans que leurs actions (capital) et leurs dividendes proportionnel des bénéfices, l’imposition les deux aient la même fonction comme (revenus). Le bénéfice distribué est donc du capital n’aurait en principe plus de rai- auparavant et sans incidence fiscale. davantage imposé que les autres sources de son d’être. En effet, l’impôt sur le capital  Passage d’un usage commercial revenus: salaires et intérêts. vise à corriger la charge fiscale grevant les à privé d’un immeuble Pour résoudre ces problèmes, la réforme entreprises qui, bien qu’elles disposent de Quand un immeuble est utilisé autant propose un allégement en faveur des dé- beaucoup de fonds propres, ne sont gre- pour un motif commercial que privé par tenteurs de parts. La Confédération n’im- vées que légèrement par l‘impôt sur le bé- une entreprise de personnes, il est possible poserait plus les bénéfices distribués qu’à néfice en raison du faible rendement des de l’amortir étant intégré au patrimoine de hauteur de 60% s’ils sont détenus dans la fonds propres. l’entreprise. S’il n’est plus utilisé de façon fortune privée et à hauteur de 50% s’ils  Diminution du droit d’émission prépondérante à titre commercial, les ré- font partie de la fortune commerciale. Il est l’impôt affairant à l’émission d’opé- serves latentes seront fiscalisées. Grâce à la Cette différence entre les taux se justifie rations pour obtenir des capitaux telles réforme, le paiement de l’impôt relatif au par le fait que les gains en capital sur des que l’émission de droits de participation, transfert de la fortune commerciale vers participations de la fortune commerciale de papiers monétaires ou d’obligations. la fortune privée se fera que lorsque l’im- sont imposables tandis que les gains en ca- En diminuant ce cout, il améliore la levée meuble aura été effectivement vendu. pital sur des participations de la fortune de fonds et donc la croissance. Désormais,  En cas de partage successoral privée ne le sont pas. La condition sine qua les coopératives bénéficient également de Lors d’un héritage, les héritiers devront non de l’imposition partielle serait que la franchise de 1 million de francs pour également payer l’imposition des réserves l’actionnaire détienne 10% au moins des la fondation de droits de participation et latentes seulement lorsque l’entreprise fonds propres de l’entreprise. pour les augmentations de capital. En cas aura été cédée totalement. Bien qu’on ne puisse chiffrer précisément de période de difficulté pour l’entreprise, le nombre de contribuables qui détiennent les augmentations du capital et les subsides CESSATION D’ACTIVITÉ ET LIQUIDATION au moins 10% d’une société de capitaux, sont exonérés du droit d’émission, dans la on peut estimer que les détenteurs de mesure où les pertes sont éliminées et où D’ENTREPRISES DE PERSONNES parts engagés dans l’entreprise sont plus le total des prestations des associés s’élève de 60.000. Pour se financer, émettre des à 10 millions de francs au maximum. Lorsqu’une société est liquidée, toutes les titres était trop onéreux par rapport à réserves latentes sur la fortune commer- l’autofinancement. L’imposition partielle ALLÉGEMENT DE LA CHARGE FISCALE GRE- ciales sont dissoutes, en résulte un béné- des bénéfices distribués vient diminuer la fice pour l’entrepreneur. En l’état actuel différence fiscale entre les deux méthodes VANT LES ENTREPRISES DE PERSONNES du droit, il est imposé en même temps de financement. Cette réalité faisait qu’il que les autres revenus. Avec la réforme, ils était plus difficile d’ouvrir son capital à des LORS DE CERTAINES PHASES DE TRANSITION seront imposés séparément pour éviter investisseurs extérieurs que de s’endetter une trop forte imposition des autres élé- soi-même. Ainsi, cela a affecté la croissance La réforme de l’imposition des entreprises ments du revenu. des entreprises jeunes et dynamiques qui simplifiera ces restructurations par le fait  Bénéfice de liquidation des héritiers que les entreprises de personnes seront dé- Dans le cas où les héritiers ne repren- chargées d‘impôts «tombant à un moment draient pas l’entreprise, ils auront le inopportun». droit à un bénéfice de liquidation parti-  Le remploi: Afin de ne pas entraver les culier grâce à la réforme. Ils auront cinq adaptations économiquement nécessaires, ans après le décès du donateur pour que s’effectue le décompte fiscal. ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

CONVIVIAL / 47La fin des civilisationsÀ l’ère de confiance tout à fait excessive dans les progrès à attendre du développement des connaissances scientifiques asuccédé une tendance souvent excessive au pessimisme. CLÉMENT COLSON Économiste français (1853-1939)Indignation. On s’aperçoit que la maîtrise si rapidement gnement et d’améliorer ainsi le mode d’accès aux emplois deDRcroissante de l’homme sur la nature a beau augmenter le direction. Mais nul homme sensé ne croira que l’on réaliseraitbien-être général, dans une très large mesure, elle ne peut un progrès en y substituant brusquement l’élection des chefsfaire disparaître ni les misères dues aux fautes, aux erreurs par les travailleurs. Une pareille révolution serait, en l’état ac-ou aux mauvaises chances, ni l’écart immense qui subsiste- tuel, singulièrement dangereuse, même si l’on arrivait (chosera toujours entre les désirs de la plupart des hommes et les bien douteuse) à conserver en même temps certaines garan-satisfactions qu’ils peuvent obtenir. Ceux qui arrivent à un ties résultant d’examens et de concours.certain degré d’aisance et de sécurité dans la vie matérielle Elle impliquerait toujours une renonciation complète auxsont toujours la minorité. garanties très différentes, mais non moins, importantes,Or, dans une société dont la mobilité rend infiniment moins qu’offrent, dans notre société, d’une part les responsabilitéssolides les traditions familiales, la place que l’héritage trans- assumées par ceux qui dirigent des affaires où ils ont de grosmis par les ancêtres joue dans la désignation de cette mino- intérêts, d’autre part la sélection des familles où les traditionsrité paraît de moins en moins légitime. Les bénéficiaires de de culture et d’autorité se transmettent pendant plusieurs gé-cet avantage n’ont plus, dans la solidité, de leurs droits, la nérations. Peut-être un jour viendra-t-il où le prolétariat seraconfiance nécessaire à une résistance vigoureuse contre des aussi apte à prendre la direction de la société que l’était leattaques de plus en plus violentes. Ceux La situation ressemblerait plutôt Tiers-État en 1789. Nous n’en sommesque leur intérêt personnel touche seul à celle où le monde antique pas encore là.sont certainement aussi indignés que se trouvait à la fin de l’Empirejamais contre quiconque menace leur romain. La prospérité écono- Avenir. La situation ressemblerait mique avait été détruite commebourse; au contraire, parmi les hommes elle risque de l’être si le mouve- plutôt à celle où le monde antique sequi pensent, beaucoup n’ont plus ces ment actuel s’accentue par trouvait à la fin de l’Empire romain.convictions solidement enracinées qui l’intervention constante de l’État. La prospérité économique avait été dé-créent un milieu de volonté et d’énergie. truite, comme elle risque de l’être si le mouvement actuel s’accentue, par l’in-Substitution. On assimile souvent tervention constante de l’État, nour-cette situation à celle de la fin de l’ancien rissant les prolétaires, réglementantrégime, quand le Tiers-État marchait à le travail, accaparant des industries dela conquête du pouvoir, tandis que la noblesse n’avait plus foi plus en plus nombreuses. La foi chrétienne, comme la foien ses privilèges. Mais, à ce moment, le Tiers-État était déjà socialiste aujourd’hui, développait sans cesse le nombre desen partie initié à la direction de la vie sociale et infiniment citoyens qui n’avaient plus ni attachement pour la civilisationplus capable de l’assumer que les anciens privilégiés; ce qui dans laquelle ils vivaient, ni confiance dans son avenir. Sanss’est fait alors, par une révolution violente en France et peu doute, nous n’avons pas à craindre l’invasion des Barbares,à peu dans le reste du monde, c’est la substitution, à une élite qui donna le coup de grâce à l’Empire: si les peuples d’Ex-hors d’état de continuer sa fonction, d’une autre élite mieux trême-Orient, hier encore étrangers à notre culture, peuventpréparée et recrutée plus largement. Il nous semble bien dif- un jour triompher des moyens de défense que nous donne laficile de croire que, aux yeux de l’observateur impartial, le science, ce ne sera qu’à la condition de se l’être assimilée.quatrième État, qui veut aujourd’hui se substituer au tiers, Mais il fallait une force extérieure pour renverser l’Empiresoit capable dès à présent d’occuper efficacement sa place. romain, puisque les chrétiens, plaçant hors de ce monde leurs espérances, ne cherchaient pas à le bouleverser par la vio-Transmission. Sans aucun doute, on ne peut pas trouver lence. Les ennemis intérieurs de notre état social n’ajournentparfait le mode actuel de recrutement de la classe bourgeoise, plus après la mort la réalisation de leurs rêves. Ils sont toutqui fournit l’état-major des services publics en même temps prêts à nous montrer, réunies en leurs personnes, les deuxque les entrepreneurs assumant l’aléa des affaires privées. sortes d’ennemis dont la conjonction amena la ruine de laCe recrutement résulte, aujourd’hui, de la transmission hé- civilisation antique: ceux que la foi à un paradis futur désin-réditaire des biens, combinée avec l’instruction secondaire, téressait de la conservation de la société existante et ceux quidonnée aux frais d’es familles ayant quelque épargne à leurs voulaient conquérir par la force un bien-être envié. ///enfants, et aux frais de l’État à des sujets choisis dans le pro-létariat. Il est possible d’élargir encore la diffusion de l’ensei- Extrait de «Organisme économique et Désordre social» (1918)AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

48 / RECENSIONInévitable renouvellement qualitatifLa crise économique et morale actuelle n’est que le symptôme de l’effondrement à venir du capitalisme.Il précipite dans sa chute notre système de valeurs occidentales. MICHEL SANTI Economiste franco-suisse Extrait de: «Pour un capitalisme entre adultes consentants»L es banques centrales ont donc nul effet positif sur l’économie. Il que s’ils doivent se financer auprès des les clés de notre réta- suffirait pourtant de considérer ce crédit marchés financiers? Le néolibéralisme blissement économique social sous le même angle qu’un héri- enseigne en effet que la sanction des car elles peuvent se per- tage qui constitue lui aussi un transfert marchés envers les pays peu rigou- mettre de créer de la de richesses n’ayant pas non plus été ga- reux s’exercera sous la forme de taux monnaie en quantités illi- gné par son bénéficiaire. En termes ab- d’intérêt plus élevés censés remettremitées, sans jamais craindre la faillite. solus, l’héritage déroule exactement les les cigales sur le droit chemin, soit parSi elles ne le font pas délibérément pour mêmes conséquences bénéfiques pour l’augmentation des impôts, soit par larelancer la croissance, il est vrai que – à son destinataire que le crédit social, réduction des dépenses. Voilà pourquoileur décharge – elles n’ont pas été fon- si ce n’est qu’il procède des pouvoirs l’orthodoxie est farouchement opposéedées pour réguler la consommation des publics et non du décès d’un proche. à la création monétaire des banquescitoyens. Leur raison d’être fut histori- Comme les récessions n’ont pas d’effet centrales, qui soutiendrait les Étatsquement de se constituer comme bras thérapeutique, comme le chômage ne dans leur folie dépensière; les diversarmé de leur État de tutelle en lui pro- forme pas la jeunesse et comme nous gouvernements n’auraient en effet qu’àcurant de la liquidité, en émettant les revendre leurs obligations à leur proprebillets de banque et – un peu plus tard Nos politiques – incapables banque centrale qui les financerait grâce– en atténuant les paniques bancaires de comprendre l’urgence à sa planche à billets... Pour autant,et les tourmentes financières. Pour- du rétablissement de la il semblerait bien que l’on ait par ail-tant, parvenues aujourd’hui au stade croissance – ne prendront leurs surestimé l’impact des baisses deoù elles doivent reconnaître que les jamais l’initiative d’un transfert taux quantitatives qui disposent certesquantitative easings (QE) ne déploient de liquidités vers les citoyens. d’un pouvoir monétaire (et psycholo-pas les effets bénéfiques escomptés sur gique) indéniable de stimulus par leurl’économie réelle, les banques centrales ne sommes pas censés vivre dans une effet largement positif sur les actifs di-doivent se jeter à l’eau et vaincre ces société où les plus démunis doivent vers et variés, comme l’immobilier, lesrésistances politiques, idéologiques et expier leurs péchés, le crédit social est bourses ou l’art. Comme ces retombéesparfois légales les empêchant de fran- désormais la seule voie de redressement ne concernent pas l’économie dans sonchir le pas. Nos politiques – incapables de l’économie profitant au plus grand ensemble, ces QE n’ont cependant pasde comprendre l’urgence du rétablisse- nombre. Qui pourrait très rapidement atteint les objectifs de redressement dement de la croissance – ne prendront être mis en place par les banques cen- la croissance et de rétablissement dejamais l’initiative d’un transfert de li- trales, sans être retardé par les inévi- l’inflation initialement recherchés parquidités vers les citoyens, sauf à en être tables retards et tempêtes dans un verre les banquiers centraux. La vérité est quecontraints par une révolution qui ne d’eau des consultations parlementaires. les banques centrales comme leurs ins-manquera pas de survenir s’ils main- Qui, contrairement aux effets des ré- truments sont rendus quasi inopérantstiennent leur posture attentiste et éli- ductions de taux d’intérêt et de baisses par les politiques d’austérité de certainstiste. À cet égard, la droite et la gauche de taux quantitatives, déploierait des ef- États. Véritable levier fiscal et budgé-traditionnelles de toutes les nations fets immédiats sur la croissance. Qui ne taire qui autorise les États à emprunteroccidentales ont bien du mal à accepter génèrerait donc pas de bulle spéculative à bon prix pour dépenser et pour inves-le principe théorique même de ce type allant de pair avec la création moné- tir, les baisses de taux quantitatives, lade crédit social. Alors que la droite est taire. Et qui soulagerait des inégalités, création monétaire et les taux négatifsemmurée dans une idéologie incapable sans pénaliser les riches. Il est impéra- ne sont ainsi efficaces que dans le cadrede tolérer que des gens reçoivent de tif que nos banques centrales cessent d’une politique expansionniste du gou-l’argent en contrepartie de nul labeur, d’utiliser des instruments créés il y a un vernement. Si ces mêmes leviers de laalors qu’elle se refuse catégoriquement siècle et qu’elles s’adaptent à notre nou- banque centrale sont largement neutra-à ce que – par ce biais – l’importance de veau millénaire. lisés dans une conjoncture de rigueur,l’État ne s’en retrouve accrue, la gauche Comment se libérer de l’idéologie do- ils deviennent littéralement contre-pro-privilégie pour sa part des mesures fis- minante selon laquelle les États ne ductifs dès lors que l’austérité est im-cales le plus souvent complexes et inau- sont capables de discipline budgétaire posée dans un climat de chômage et dedibles pour le citoyen moyen qui n’ont récession. Ils ne profitent en effet dèsAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016 

RECENSION / 49C’est lorsque les assouplissements monétaires quantitatifsne bénéficient qu’à une infime minorité qu’elles deviennentrégressives.lors qu’à un nombre infime de privilé- des statistiques appartenant au passé vu – un don de 2000 euros par famille etgiés qui deviennent schizophrènes. Op- que de telles expériences n’ont jamais par an ne représente environ que deuxposés jusque dans leur moelle à la créa- été tentées, on peut en revanche analy- mois de baisses de taux quantitativestion monétaire par peur de l’inflation et ser les effets des remboursements d’im- de la part de la Banque centrale euro-pour ne pas assister les moins démunis pôts ayant eu lieu aux USA en 2008 où péenne, qui du coup activerait moinsne devant vivre que du produit de leur des chèques furent envoyés par les ser- sa planche à billets avec des effets spec-labeur, ces nantis sont pourtant parfaite- vices fiscaux aux contribuables au plus taculaires et sur la croissance et sur lesment conscients que c’est à cette même fort de la crise afin de relancer l’écono- inégalités. Ne nous égarons donc paspolitique monétaire qu’ils doivent l’en- mie. Dans ce contexte, l’effet multipli- dans les méandres de la sémantique desvolée de leurs actifs. C’est donc lorsque cateur fut de 1.3. Transposé au don de banquiers centraux qui rechignent à celes QE ne bénéficient qu’à une infime liquidités, ceci reviendrait à en conclure crédit social sous le prétexte qu’il s’agitminorité qu’elles deviennent régres- que 1% du PIB donné aux citoyens se là d’une mesure fiscale du ressort dessives, tandis qu’elles déploient toute traduirait par un redressement de 1,3% exécutifs. Dans un contexte où les gou-leur efficacité et profitent à l’ensemble du PIB, soit une hausse de 2,6% du PIB vernements sont tétanisés par l’ortho-de l’économie si elles permettent de en cas de dons aux citoyens totalisant doxie, et alors que les politiques – et quefinancer des plans d’investissement et 2% du PIB Sachant qu’il a été prouvé la politique – ne sont absolument plusdes programmes de facilités d’accès aux que les sommes restituées en termes crédibles, il est vital que ces transfertsprêts destinés aux entreprises et aux de crédit d’impôts avaient nettement de liquidités en faveur de la populationménages. Pourtant, comment éviter que moins d’impact favorable que l’apport deviennent un instrument à part entièrecette création monétaire ne soit réduite de politique monétaire. Car en effet lesà un banal transfert de richesses encore Il est impératif que nos banques centrales peuvent se permettreet toujours en faveur des plus riches, banques centrales cessent de créer de la monnaie en quantités il-dans un contexte où la pensée domi- d’utiliser des instruments limitées, sans jamais craindre la faillite.nante ne cesse de stigmatiser dettes et créés il y a un siècle et Un État souverain n’a nullement besoindéficits? En opérant des transferts de qu’elles s’adaptent à notre de lever des impôts pour financer sesfonds directement vers les citoyens, afin nouveau millénaire. dépenses publiques. En effet, les États-d’améliorer leur pouvoir d’achat et de Unis – depuis leur création – ont qua-multiplier leur capacité à consommer. d’argent «frais». Il est donc possible d’en siment toujours tourné avec des bud-C’est bien l’«ubérisation» de la dépense déduire que l’effet multiplicateur de ce gets systématiquement déficitaires. Leque doit promouvoir un gouvernement crédit social avoisinera vraisemblable- gouvernement d’une nation indépen-dans une conjoncture de stagnation éco- ment les 1.5, niveau plus qu’honorable dante peut donc dépenser sans avoir ànomique, afin de rétablir l’inflation et en termes macroéconomiques. Un tel s’inquiéter de ses recettes. En théorie ende donner des ailes à la croissance. Tout multiplicateur serait gage de croissance tout cas, car la réalité de fortes pousséesen accompagnant ces dons de diverses et d’une diminution tangible du chô- inflationnistes à laquelle il s’expose simesures protectionnistes afin que cette mage. Ce crédit social peut en outre être son économie opère à plein régime finitconsommation profite aux entreprises optimisé en ne le destinant qu’aux 75% toujours par le rattraper. ///locales et nationales, sans plomber da- des contribuables disposant des revenusvantage le commerce extérieur. Pour- les plus bas. Un tel calibrage aurait à MICHEL SANTIquoi ne pas distribuer 2500 euros par l’évidence des conséquences bénéfiques POUR UNménage et par an et ce tant que crois- immédiates sur la croissance, sans les CAPITALISME ENTREsance et inflation sont en-dessous de effets collatéraux des QE qui sont d’en- ADULTES CONSENTANTS2%? Quant à l’impact de tels transferts fler des bulles spéculatives et d’aggra- Editions Lignesde fonds sur l’état de l’économie, il est ver l’instabilité financière. Par ce biais, de repèrespossible de le calculer en trouvant son la création monétaire elle-même serait 159 pageseffet multiplicateur: autrement, pour nettement moins intensive puisque100 euros donnés, quelles sont les re- – pour reprendre l’exemple ci-dessustombées en termes d’amélioration duPIB? S’il n’est pas possible de s’adosser àAGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016

50 / PERFORMANCELe voyage compte autant que le résultatGagner du temps est sans doute important. Mais pas au point de devenir une obsession. LARRY LEGAULT Directeur Technique Geneva SeahawksTemps. La recherche de la produc- DR totale de petits ajustements amenéstivité est en quelque sorte analogue à en réponse à la réalité compétitive dula recherche d’efficacité car l’élément moment. Avec recul, on se demandeinélastique reste le temps à notre dispo- presque toujours pourquoi on n’a passition. On peut travailler plus mais tra- réalisé ces innovations plus tôt, mais cevailler mieux reste l’option la plus in- point de vue est trompeur pour des rai-telligente. Stephen Covey résume très sons évidentes. Les évolutions se mani-bien ce dilemme avec l’allégorie d’un festent la plupart du temps comme desbucheron qui ne s’arrête jamais pour réponses spécifiques à des problèmesaiguiser sa scie – il y a un moment où spécifiques; c’est par la suite qu’ellestous ses efforts ne serviront à rien. laisseront une véritable trace selon queEn 1930, l’économiste John Maynard leurs bienfaits soient généralisables ouKeynes prédisait qu’avant la fin du non.vingtième siècle, la technologie mène- Processus. Un entraineur veut unrait à une réduction conséquente dutemps de travail hebdomadaire aux certain résultat. Il élabore un processusEtats-Unis et en Grande-Bretagne. Ce et le met en place dans le but d’obte-n’a pas vraiment été le cas. Si on écoute Les conditions du succès (comme nir ce résultat. Le résultat ne suit pas.l’anthropologiste David Graeber, au lieu celui des All-Blacks) ne sont pas Le processus est remis en cause. L’ins-de créer du temps libre supplémentaire, reproductibles dans leur totalité. tallation du processus est remise ennotre économie a simplement remplacé Que ce soit pour des raisons cause. Les qualités de l’entraineur sontle vide par la production d’emplois inu- culturelles, sociétales, logistiques remises en cause. La qualité des athlètes ou simplement humaines.tiles, ce qu’il appelle avec provocation est remise en cause. Et ainsi de suite. Oùdes «bullshit jobs». Quoi qu’il en soit, est la vérité? On ne le saura jamais avecla question d’efficacité, posée sous cet précision et les prédictions sont impos-angle, mène rapidement à une considé- sibles. Il y a une quantité d’exemples deration philosophique bien illustrée par cette question rhéto- systèmes d’entrainement qui ont connu leurs périodes de gloirerique: si je cours pour augmenter mon espérance de vie, à quoi et, par conséquent, ont été disséqués et copiés mais très rare-servira le temps gagné si j’en passe la moitié à courir? ment avec le succès de l’original. On pense à l’école japonaiseMaximisation. Dans le sport, tous les concourants sont de judo, la méthode bulgare d’haltérophilie et le rugby néozé- landais pour n’en nommer que trois. Les conditions exactes deface à une même contrainte: le temps à leur disposition. De ces succès ne sont pas reproductibles dans leur totalité – quepar ce fait, la recherche dans le domaine des méthodes d’en- ce soit pour des raisons culturelles, sociétales, logistiques outrainement place une importance marquée sur le travail qua- simplement humaines. Donc, la transposition d’un modèlelitatif, plus précisément comment maximiser le rendement de performance n’est que rarement une idée gagnante.du temps passé à l’entrainement. Aujourd’hui, les entraineursconsacrent plus de temps à préparer une séance d’entraine- Plaisir. Connaître son champs d’activité en faisant sesment qu’à la diriger. Dans certains sports, on minimise les classes, étudier le passé pour comprendre le présent, choisirretours verbaux sur le terrain pour augmenter l’intensité et intelligemment des collaborateurs de confiance et leur lais-le rythme du travail. L’entrainement est filmé sous plusieurs ser suffisamment d’espace pour travailler librement, ensuiteangles et un feedback détaillé est fourni plus tard lors d’une mettre l’ensemble sur la bonne voie et foncer ! Les gens pro-séance vidéo dans un environnement propice à l’apprentissage ductifs sont compétents, efficaces et gèrent bien leur temps,et aux échanges. L’immobilisme a toujours été ennemi du pro- ça oui. Mais avant tout leur travail n’est pas une corvée, c’estgrès, mais le mouvement irréfléchi peut être encore pire – ini- plutôt un plaisir qui fait que le voyage compte autant que letier un changement juste pour faire un changement n’amène résultat. Gagner du temps est peut-être important, mais pasrien de bon en soi et peut certainement empirer une situation. au point de devenir une obsession. Steven Wright, humoristeLes plus grandes innovations tactiques dans le sport ont rare- américain, a bien caricaturé la situation: «J’ai mis du café ins-ment été le résultat d’une inspiration mais plutôt la somme tantané dans le micro-onde... je suis retourné dans le temps». ///AGEFI MAGAZINE | PRÉVOYANCE - PME | OCTOBRE 2016


Like this book? You can publish your book online for free in a few minutes!
Create your own flipbook