CHAMBRE DES MÉTIERS DU RHÔNE EntreprendreUn déménagement qui diviseLe projet de déménagement du siège de la Chambre des métiers et de l’artisanat du Rhônedu 6e arrondissement de Lyon au quartier de Confluence divise. Un projet à 18 millionsd’euros auquel la chambre régionale des métiers ne souhaite plus être associée.« C’est une hérésie ! », commente Sébastien Fornès, président de la Capeb Rhône. Hautement sensible,le projet de déménager la chambre de métiers et de l’artisanat du Rhône dans une grande maison del’artisanat à la Confluence nourrit les tensions chez les artisans, au sein même de l’assemblée d’élusvoire de la préfecture. Installée depuis 1956 à l’adresse feutrée du 58 avenue Maréchal Foch, dans le6e arrondissement de Lyon, la CMA est à l’étroit dans son immeuble de six étages de 2 500 m². Leslocaux vieillissants s’avèrent de moins en moins fonctionnels pour accueillir, dans de bonnes conditions,les 92 salariés et intervenants extérieurs, ainsi que le millier d’artisans qui suivent chaque année un des98 stages. « C’est l’embouteillage. Ce projet est donc celui du bon sens », juge Frank Lebel, secrétairegénéral de la chambre depuis trois ans.18 MILLIONS D’EUROSAlain Audouard, président de la chambre depuis 2000, en a fait un enjeu majeur depuis huit ans. Deux solutions ont donc été formulées : réhabi-liter les locaux actuels ou trouver un nouveau site d’accueil. La première n’a pas convaincu l’élu. « Nos locaux ne sont plus aux normes d’accessi-bilité. Si nous les réaménageons, nous devrons déménager pendant la période de travaux, pour un coût estimé à quelque quatre millions d’euros,précise le président, passé de la banque au taxi. Je préfère donc déménager dans un lieu fonctionnel et bien desservi en partant avec la chambrerégionale, dans une logique de mutualisation et d’économie de moyens. » Le quartier de Confluence a donc été retenu pour construire une maisondes artisans de 3 300 m². Conçu par le groupe Cardinal, le projet est chiffré à 18 millions d’euros, dont 14 pris en charge par la CMA. Pour lefinancer, le bâtiment de l’avenue Foch doit être vendu pour neuf millions d’euros et un emprunt de quatre millions d’euros devrait être souscrit,avec remboursement sur 25 ans. Un fond de trésorerie disponible complètera le restant. Au moment d’écrire ce dossier, Alain Audouard assureque l’acheteur – rhônalpin – est sur le point de signer après que des investisseurs chinois et des pays arabes ont manifesté leur intérêt, d’autantplus que le préfet du Rhône Michel Delpuech a validé le principe, sous conditions, lors d’une réunion le 7 octobre dernier… contre l’avis du SGAR(Secrétaire général aux affaires régionales) qui depuis soutient le projet, indique un proche du dossier.« LES ARTISANS NE PAYERONT PAS UN EURO »« À un an des élections, il n’est pas bienvenu de dépenser des sommes pareilles. Quelle image va-t-on donner auprès des artisans qui travaillentdur ? Qui va payer la différence ? », demande Gabriel Paillasson, artisan et membre du bureau de la chambre. Et Frank Lebel de rassurer : « Lebâtiment ne va pas coûter un euro aux artisans. » Sur les 28 votants, 15 seulement l’ont approuvé. La chambre régionale et son président AlainBerlioz-Curlet se sont prononcés contre : « En période de crise, le projet est trop cher et arrive trop tard », claque le président comme en défi àson ancien adversaire. Car c’est à la chambre régionale que revenait de régler la somme restante. « Ils auront jusqu’en 2017 pour signer s’ils leveulent », indique Frank Lebel. Si elle ne vient pas, Cardinal pourrait prendre le solde à sa charge, entend-on. À moins que la fusion des deuxchambres régionales Auvergne et Rhône-Alpes ne redistribue les cartes. « Nous devrions parvenir à les faire changer d’avis, soutient activementAndrée-France Contet, présidente d’ADNA. Nous avons besoin de cet établissement. » RCLe talent sur mesure www.algoe-executive.fr www.stantonchase.com Votre solution depuis 40 ans dans 46 pays pour le recrutement de profils rares et de haut niveau Recrutements Executive Searchet le développement de vos Équipes Assessments Top Managers Experts Coaching Lyon :Carole de Chilly - 04 72 18 13 70 - 9 bis, rte de Champagne 69130 Ecully Une entreprise, deux marques Paris :Philippe Palacin - 01 53 02 26 86 - 23, rue Louis-le-Grand 75002 Paris Acteurs de l’économie - La Tribune 51N°128 Décembre 2015
Entreprendre CHAMBRE DES MÉTIERS DU RHÔNE« Ma fonction me permet de côtoyer des hommes politiques et des chefs d’entreprise pouvant faire © DRavancer des choses plus rapidement », souligne Alain Audouard ici aux côtés des personnalitésdu patronat lyonnais.Mais coup de théâtre dans l’assemblée : erreur en plaçant Alain Audouard en fin de © DR Un « coup de poignard » pourau dernier moment, Alain Audouard fait, liste. Il aurait dû, au contraire, le maîtri- Alain Berlioz-Curlet, tête de liste UPAcontre toute attente, acte de candidature. ser. » Un « coup de poignard » pour Alain lors des élections de 2010 etSans reculer, le président sortant, droit Berlioz-Curlet et les cadres des confédé- aujourd’hui président de la chambredans ses bottes, sort le grand jeu. rations de l’UPA si bien que l’événement régionale des métiers. s’est transformé en une affaire nationale« TRAHISON » remontant jusqu’à Paris dans les confé- Malgré ses deux tentatives, Bruno CabutStupéfaction dans sa propre famille syn- dérations et à l’UPA. L’intéressé justifie n’a jamais été élu président de la CMAdicale, et dans une certaine tension, les de manière cinglante son « coup » : « Ils du Rhône contrairement à son père. élus sont donc amenés à choisir entre l’ont cherché. En 2010, personne ne m’al’artisan peintre ou le chauffeur de taxi. associé à la formation du bureau alors que lorsqu’ils s’étripent en public. De plus, pourRebondissement ultime : Alain Audouard j’étais le président de la chambre. Ce sont eux le préfet, une nouvelle élection aurait coûtéremporte l’élection une troisième fois, (les cadres de l’UPA Rhône, NDLR) qui de l’argent. » Pour d’autres, la raison étaitmais de justesse, par 18 voix contre 16. m’ont trahi. Et ensuite, ils osent me deman- politique puisqu’il s’agissait surtout de neÀ ce jeu-là, le président a joué et a gagné. der de démissionner ? Je me suis représenté, pas faire de vagues au regard d’ambitions« Il a réussi son coup, ce n’est peut-être pas et j’ai gagné, je n’ai donc pas volé l’élection, plus personnelles en vue d’autres man-le plus joli. Mais il y est parvenu », analyse et assène comme un coup de grâce : Je dats. Dont acte.un artisan. Coup dur pour une majorité suis capable de faire ce que l’UPA n’a pas sud’élus UPA qui le qualifie de « traître » faire. » N°128 Décembre 2015– aujourd’hui encore – et parle de « tra- Du côté d’ADNA, grand gagnant, ce pactehison » au sein de son propre camp. Il était l’occasion d’obtenir une force impor-faut dire qu’Alain Audouard préparait son tante à la chambre. « Il fallait se rapprochercoup depuis plusieurs semaines. Dans le de nous et il a eu raison. Il a ainsi été élu avecplus grand secret, il avait rencontré, dans nos voix », se satisfait François Turcas.les locaux de la FFB du Rhône, les princi- « Nous avions gagné, soutient Andrée-paux élus d’ADNA afin d'obtenir leur sou- France Contet, qui milite depuis toujourstien durant l’élection, leur promettant, en pour la reconnaissance du conjoint etéchange, deux postes, dont celui de pre- ex-Capeb. J’y suis donc allée non pour unmière vice-présidente à Andrée-France poste, mais pour la défense des artisans. »Contet. « Nous n’allions pas refuser », Mais une question demeure : pour quellesestime un élu ADNA. Auprès de quelques raisons aucune suspension de séance ouélus UPA (sept exactement) résignés à ne démission (alors que des lettres avaientpas suivre la ligne de conduite édictée été écrites en ce sens) n’a été prononcée cepar la direction du syndicat patronal, la jour de décembre 2010 par les membresdémarche a été similaire. « J’étais contre de l’UPA contestataires ? « J’aurais été enle choix de l’homme et le fait que l’on m’im- faveur d’une nouvelle élection, cela aurait étépose de voter pour lui », souligne Carole plus sain », s’exprime Gabriel Paillasson.Peyrefitte. Après cet épisode, plusieurs Rien de tout cela. L’explication, Brunoélus ont rejoint la Confédération générale Cabut la présente ainsi : « Ce n’est pasdes petites et moyennes entreprises. Un dans notre nature de démissionner. Nouscadre d’ADNA analyse le fait d’armes du ne voulions pas réenflammer la chambrechauffeur de taxi : « L’UPA a commis une alors que nous critiquons les politiques52 Acteurs de l’économie - La Tribune
CHAMBRE DES MÉTIERS DU RHÔNE EntreprendreCONFORTER LA PLACE DE LA CGPME consulaires de 2010), les 20 millions d’eu- « En 2010,Cette histoire hante toujours les murs ros de taxes prélevées sur les entreprises l’UPA a commisde la chambre cinq ans après. Et même artisanales. Côté ADNA, cette élection et une erreursi tous disent avoir tourné la page, les son revirement de situation – comman- en plaçantrancœurs et animosités demeurent. dité ? – lui auront permis de grandir plus Alain AudouardQuelques-uns conservent toujours « dans rapidement au sein d’une chambre domi- en fin de liste.un coin de la tête », cet épisode, promettant née des années durant par l’UPA. Et don- Il aurait dû,de « prendre leur revanche » dès que l’oc- nera surtout à la CGPME du Rhône un au contraire,casion se présentera. « Si l’on ressent de la rôle majeur « au plus près des artisans », lui le maîtriser »rancœur, on ne peut pas avancer », souligne offrant un boulevard en vue des futuresJean-Jacques Pilloux qui se dit « construc- élections qu’elle compte bien remporter. Atif » et se veut « non-polémiste », mais ce jour, le syndicat compte 14 présidencesreconnaît « que l’UPA n’a pas rempli son de chambre des métiers en France dontdevoir à l’époque ». À l’UPA, le ménage a une en Isère.été fait et « finalement cela a été un mal pour Quant à Alain Audouard, il poursuit unun bien permettant à notre organisation de chemin plus politique que jamais qui,se restructurer », reconnaît Bruno Cabut, « pragmatique, va là où le vent le mène »,qui collectionne aussi les engagements : souligne Xavier Laroche, ancien secrétairevice-président au Conseil économique, général de la chambre du Rhône. À unsocial et environnemental Rhône-Alpes, an des élections, l’homme, serein et sou-président de la CGAD du Rhône et depuis riant, cristallise cependant toujours les2013 président de l’UPA Rhône-Alpes. tensions, d’autant plus qu’il n’exclut pasAlain Berlioz-Curlet est devenu président une nouvelle candidature. Ce que certainsde la chambre régionale des métiers et de craignent en coulisse préparant déjà acti-l’artisanat Rhône-Alpes et est en lice pour vement une nouvelle stratégie d’attaque.celle de la future grande chambre de l’ar- Au sein de l’UPA, Henri Meunier est déjàtisanat Auvergne-Rhône-Alpes. Et ironie érigé en candidat et validé par le bureau.du sort, c’est à sa chambre consulaire de Seule incertitude : le boucher-traiteur durépartir, entre les chambres départemen- 9e arrondissement de Lyon est égalementtales (depuis la réforme des chambres inscrit à la CGPME…Complémentaire Mutuelle relevant du livre II du code de la Mutualité - immatriculée sous le n°311 799 878.crédit photo : istock. Créa : COMINSTIT ADREA.santé obligatoireQUANDLA LOI CONTRAINTMON ENTREPRISE, Des solutions qui vous libèrent dans vos agences de proximité Des solutioent sauqu0i 9v6o9us39lib7è0r3e9ntAdppaenl nsonvsourstaaxégences de proximitéDes solutions qui voeut saulib0è9re6n9t3d9a7n0s3v9osApapgelenonncsuertsaxdée proximitéwetwawu.a0d9r6e9a3.f9r 7 039 Appel non surtaxéAu 1er janvier 2016, la mutuelle santé devientobligatoire pour tous vos salariés. 039 dAeDlRaÉpAroMteuctutieolnlesvDoocueiasslpersodopeoslsuetioeDntesds aqsonulsiuvvtoioousnssaligqbeuèinrveconeutssaduleib0èp9rreo6nx9itm3a9iut7é0039969Ap3pe9l n7onSpécialiste surtaxéentreprises, Appel non surtaxéDedfefeiscrsaécpseoosn, slaeuvstesiciomunpnlesasc,qcmuoomidpuvalaoegbnutleesdsmeaeltinbnt ès rveonst aague0n9c6e9s 3d9e7p0r3o9ximité Appel non surtaxéepetrsdonananlissév. os agences de proximité Des solutions qui vous libèrent Des remboursements fortifiés Des solutiodnasnqs uviovsoaugselinbcèeresndte proDxeims irteémbdoaurnssevmoesnatsgfeonrtcifeiéssde proximDes solutions qui voduasnlsibvèorseaengt aeunc0eD9se6ds9er3ep9m7rob0xo3imu9risAteéppmel noen sndurttaasxénfos rvtiofisésaegt aeunc0e9s7d3e3p10ro3x1im0 iAtpépel non surtaxédans vos agencesedteapur0ox9i6m9it3é97 0d3a9nAsppvelononssuartagxéencesedteapur0ox9i7m3it3é10 310 Appel non surtaxéet au 0 969 397 039 Appel non surtaxé et au 0 973 310 310 Appel non surtaxéN°1R2H8ONDEé-cAeLmPEbSre_A2C0T1E5URS DE L ECONOMIE_ENTP_Femme_190x119,5_2015.indd 1 14/08/2015 11:19:14 Acteurs de l’économie - La Tribune 53
Entreprendre RUBRIQUE DE NOM ZANNIER, L’ÉTOFFE DE54 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
RUBRIQUE DE NOM EntreprendreLA RECONQUÊTE Acteurs de l’économie - La Tribune 55 Au terme de la cession de son pôle vêtements adultes (IKKS, I-code, One step) et d’un plan social de 220 emplois, Zannier met en œuvre une stratégie de reconquête pour espérer renouer avec la rentabilité d’ici à 18 mois. Le groupe familial basé à Saint-Chamond (Loire), leader européen du prêt-à- porter enfant, mise sur son large portefeuille de marques (Z génération, Catimini, Chipie, Kenzo kids, Paul Smith junior, etc.) pour trouver des relais de croissance à l’international. Le plan d’attaque porté par son jeune directeur général Rémy Baume s'e ectue dans un contexte concurrentiel di cile et ne rassure pas les salariés. DOSSIER, YANN PETITEAUX N°128 Décembre 2015 © DR
Entreprendre ZANNIER© Laurent Cerino / Acteurs de l’économie an après l’annonce d’un PSE, dont les Rémy Baume. D’une part, il était logique négociations ont abouti fin février, le que la marque prenne son indépendance. DE LA BANQUE climat social est encore à vif au sein du D’autre part, cela nous permet de redevenir D’AFFAIRES À groupe Zannier. Le leader européen de un acteur exclusif de la mode enfant. Cette LA DISTRIBUTION la mode enfant, basé à Saint-Chamond cession simplifie notre modèle opérationnel, Rémy Baume, diplômé (Loire), a opéré une profonde restructu- car les secteurs de la mode adulte et de la de l’ESCP et de la Columbia ration qui s’est soldée par 220 licencie- mode enfant ne répondent pas aux mêmes business school (New York), a ments, la fermeture programmée d’une processus ni aux mêmes rythmes, et les four- entamé sa carrière entre Paris douzaine de points de vente et le regrou- nisseurs sont différents. Nous recentrer sur et Londres au sein de la banque pement de plusieurs sites de création. l’enfant nous permet d’être mieux compris de d’a aires Morgan Stanley, puis Ainsi, l’unité de Carcassonne (Aude) qui nos partenaires internationaux. » du cabinet McKinsey. En 2007, travaillait pour la marque Chipie a-t-elle il prend la direction générale été transférée sur le site de la marque UN MARCHÉ EN RECUL de Roule industries (Meaux), Levi’s kids à Beaurains (Pas-de-Calais). DEPUIS DIX ANS spécialiste des stations d’épu- « À 800 kilomètres de distance, les salariés Nommé en novembre 2013 à la direc- ration, puis intègre le groupe de Chipie n’ont pas suivi », déplore Géral- tion générale, Rémy Baume doit relancer LVMH l’année suivante en tant dine Mailler, déléguée syndicale CFDT le groupe dans un contexte de marché que directeur d’investissement. du groupe et secrétaire du comité d’en- difficile. Selon la dernière étude du cabi- Fin 2008, il rejoint Carrefour à treprise. La vingtaine de salariés de la net Xerfi France, la distribution de prêt- la direction de la stratégie et marque Lili Gaufrette travaillant sur à-porter pour enfants a reculé en France des achats non marchands de le site de Saint-Maur-des-Fossés (Val- de 10 % sur les neuf dernières années, le Comex, puis devient directeur de-Marne) a, pour sa part, été invitée budget annuel moyen par enfant tom- exécutif marchandises non à rejoindre l’unité de Rillieux-la-Pape. bant en moyenne de 342 à 315 euros alimentaires pour la France et « Nous avons fait ce PSE pour deux raisons, entre 2009 et 2014. Un constat morose l’international. Ce père de deux souligne Rémy Baume, directeur général assorti toutefois d’une note d’optimisme : filles, passionné de windsurf, du groupe. Tout d’abord, nous souhaitions « La reprise économique dès 2017 boos- de rugby et d’alpinisme, a pris rapprocher certaines de nos marques de leurs tera le pouvoir d’achat des ménages et le les commandes du groupe grandes sœurs afin de leur donner davantage scénario démographique stimulera le sec- Zannier en novembre 2013. de moyens. Ensuite, nous voulions renforcer teur », anticipe Xerfi France. Reste que le la collaboration entre nos marques. Pour contexte concurrentiel se fait également 56 Acteurs de l’économie - La Tribune cela, nous avons notamment changé l’organi- toujours plus dense. Les distributeurs sation des achats. » doivent faire face aux nouvelles pratiques En juillet 2014, les enfants, très discrets, d’achat sur Internet, à l’essor du marché du fondateur Roger Zannier, actionnaires de l’occasion (brocantes, dépôts-ventes, majoritaires du groupe depuis 2005, ont vide-greniers...) et à l’étalement des revendu les marques IKKS, I-code et One achats au gré des soldes et promotions step à leur père. Ce pôle vêtements adultes tout au long de l’année. Les spécialistes du groupe Zannier représentait plus de de la mode enfant doivent aussi rivaliser 300 de ses 730 millions d’euros de chiffre avec des enseignes généralistes disposant d’affaires annuel. Le produit de la vente de concepts dédiés (Mango kid, Muji doit permettre au groupe Zannier de se kids...) et des grandes chaînes de distri- désendetter et de financer sa nouvelle bution particulièrement offensives sur les stratégie de croissance. « La vente d’IKKS prix. D’une manière générale, le modèle group était dans l’ordre des choses, estime économique du secteur de la mode enfant N°128 Décembre 2015
VOUS RUBRIQUE DE NOM Entreprendre // CRÉDIT PHOTO / COLLECTIF ITEM - BERTRAND GAUDILLÈRECRÉEZBVOOTˆITREE? Acteurs de l’économie - La Tribune 57 CONCEPTION-CRÉATION /NOUSVOUSACCOMPAGNONS ! 1 RÉSEAU, 200 EXPERTS RÉUNIS DANS 46 STRUCTURES SPÉCIALISTES DE LA CRÉATION, REPRISE, TRANSMISSION D’ENTREPRISE. BÉNÉDICTE CURAN EST FONDATRICE ET GÉRANTE DE L'ENTREPRISE RECETTES & CABAS. @CREER_A_LYONN°128 Décembre 2015 WWW.LYON-VILLE-ENTREPRENEURIAT.ORG
Entreprendre ZANNIER Un an après l’annonce du PSE,est assez tendu. « Dans le prêt-à-porterpour enfants, les coûts de production sont les le climat socialmêmes que dans la mode adulte, mais les est encore à vif.produits sont vendus en moyenne de 30 à40 % moins cher, explique Rémy Baume. © Laurent Cerino / Acteurs de l’économieDonc ceux qui savent faire fonctionner cemodèle économique plus sensible sont moins « Nous recentrer sur la mode enfantnombreux. » nous permet d’être mieux comprisCAPTER DE LA CROISSANCE de nos partenaires internationaux »AU MOYEN-ORIENT ET EN RUSSIEBaptisée Étoffe 2018, la stratégie que veut En juillet 2014, les enfants © Jean-Claude Moschetti - Réamettre en œuvre la nouvelle direction du fondateur Roger Zannier,s’appuiera sur trois leviers : la redéfini- actionnaires majoritaires du groupetion de l’identité de chacune des quinze depuis 2005, ont revendumarques du groupe, l’amélioration de les marques IKKS, I-code etl’efficacité commerciale et la massifica- One step à leur père.tion industrielle en favorisant les coo-pérations entre marques. Cette stratégie de la marque allemande Esprit kids. Parallèlement à son développement àdoit permettre le retour du groupe à Cette nouvelle licence pourrait rapide- l’international, le groupe Zannier entendla rentabilité d’ici 12 à 18 mois. Rémy ment devenir la troisième marque la plus rapprocher sa boutique en ligne Kidiliz.Baume compte particulièrement sur le importante du portefeuille du groupe com et son réseau de 120 points de ventedéveloppement à l’export. « En France, en terme de chiffre d’affaires. L’opéra- multimarques (Teen factory, Enfance,le marché du prêt-à-porter enfant s’effrite tion se double de la création d’une filiale Mon plus beau souvenir, etc.). « Nous fai-légèrement, mais au niveau mondial, il pro- outre-Rhin, un secteur géographique sons actuellement des tests concernant lesgresse en moyenne de 5 % par an. Il y a de la porteur sur lequel le groupe ligérien possibilités de faire du click-and-collect et ducroissance et nous sommes bien placés pour était jusqu’alors peu présent. « Le marché store-to-web, détaille Rémy Baume. Nousla capturer. » germanophone est très différent du marché présenterons le concept Kidiliz aux affiliésÀ ce jour, Zannier réalise 430 millions latin en matière de style, constate Rémy en espérant qu’un maximum se convertirad’euros de chiffre d’affaires, dont 55 % Baume. Les marques doivent d’abord y faire grâce aux performances supérieures de cesur le marché hexagonal. Le solde est leurs preuves. Entrer en Allemagne avec la modèle alimenté d’exclusivités commer-généré en grande partie par un réseau de marque Esprit kids va également nous per- ciales. » Cette stratégie omnicanale doitfiliales internationales (Italie, Espagne, mettre d’y exporter nos marques Levi’s kids permettre de multiplier les chances dePortugal, Benelux, Royaume-Uni, USA, et Absorba. » toucher un consommateur volatile.Allemagne). L’export hors filiales nereprésente que 8 % des ventes du groupe. N°128 Décembre 2015C’est cette part que le directeur généralentend tripler à l’horizon 2018. Un essorqui passera par la signature de parte-nariats avec des distributeurs. D’ici àcinq ans, Zannier vise l’ouverture d’unesoixantaine de magasins (enseignes Zgénération, Absorba et 3 Pommes) auMoyen-Orient ainsi qu’une trentaine enRussie (Z génération). Des discussionssont en cours en Asie et en Amériquecentrale. « Notre portefeuille de marqueset notre taille sont des atouts très impor-tants face à la concurrence », assure RémyBaume. Présent dans 120 pays, le groupeemploie 3 500 salariés dans le monde etdispose d’un réseau de près de 900 bou-tiques (dont 480 en France). Son offre estconstituée de quinze marques milieu degamme (Z génération), premium (Chipie,Catimini, Jean Bourget...) et de créateur(Kenzo kids, Junior Gaultier, Paul Smithjunior...), dont six licences.UNE NOUVELLE FILIALEEN ALLEMAGNEDébut juin, le groupe Zannier a annoncéla signature d’un partenariat de cinq ansportant sur le développement, la fabri-cation et la distribution de la collection58 Acteurs de l’économie - La Tribune
ZANNIER EntreprendreAu rayon des nouveautés toujours, le plusieurs concepts − parfois assez vente d’IKKS pour rembourser les dettes,groupe a lancé cet été une nouvelle anciens − coexistent actuellement, Géraldine Mailler (CFDT) se demandemarque baptisée Chill around dédiée au manque cruellement de cohérence et de pour sa part si le groupe a encore lessegment des préados et exclusivement lisibilité. « Les clients s’y perdent un peu. » moyens de ses ambitions. « Tout va sedistribuée dans son réseau de boutiques jouer en boutique, estime la déléguéemultimarques. Zannier entend également « LÀ POUR FAIRE LE MÉNAGE » syndicale. Pour y arriver, il faut que lesse renforcer sur le créneau de la petite Selon Matthieu Bruneau de la Salle, deux locomotives du groupe, Z et Catimini,enfance en lançant Myfirstdressing, un délégué syndical CFE-CGC du groupe, redémarrent. »coffret cadeau permettant à la jeune « le plan stratégique est bien perçu par les Le nouveau directeur général devramaman de choisir parmi les différentes équipes − du moins par l’encadrement −, composer avec la défiance des salariés.marques du groupe. « Il y a 800 000 nais- car le projet présenté est clair et ouvre des « Rémy Baume est arrivé avant le plansances chaque année en France et chaque perspectives d’avenir. » L’homme reste pru- social. Dans la tête des gens, il est là pournouveau-né reçoit en moyenne entre 30 et 35 dent, mais voit « des sources d’optimisme ». faire le ménage », constate Marie-Paule decadeaux », justifie Rémy Baume. Chez les autres représentants des sala- Carvalho. « Son nom est associé au PSE »,Enfin, la direction du groupe travaille riés, l’enthousiasme est nettement plus confirme de son côté Géraldine Mailler.sur la rénovation d’ici à deux ans des mesuré. « Il va falloir qu’on aille chercher la Les deux déléguées syndicales dénoncent500 magasins Z implantés en France croissance. Mais les forces du groupe (porte- d’une même voix le manque de présenceet en Italie. « Il faut rajeunir l’enseigne et feuille de marques, réseau de boutiques, du nouveau directeur. « Nous ne l’avonsl’ensemble du parc de magasins, insiste savoir-faire industriel, NDLR) suffi- vu qu’une seule fois durant les négociationsMarie-Paule de Carvalho, déléguée syn- ront-elles à sortir la tête de l’eau ? », s’inter- du PSE, note la représentante de la CGT.dicale CGT du groupe et responsable roge, inquiète, Marie-Paule de Carvalho. Nous avons surtout traité avec le secrétaired’une boutique Z génération à Dieppe « Dans ma boutique, la fréquentation est en général du groupe, Loïc Josse, et la DRH.(Seine-Maritime). Dans la tête des gens, recul par rapport à l’année dernière. Pour- Aujourd’hui, Rémy Baume fait le tour desc’est une vieille marque. Beaucoup ignorent tant le groupe a fait énormément d’efforts sites pour rassurer les gens, mais il arrivequ’elle existe encore. » L’enseigne, dont sur la collection », poursuit-elle. Après la après la bataille. » Le nouveau © Laurent Cerino / Acteurs de l’économie directeur général devra composer Acteurs de l’économie - La Tribune 59 avec la défiance des salariés. « Il est arrivé avant le plan social. Dans notre tête, il est là pour faire le ménage »N°128 Décembre 2015
Entreprendre RUBRIQUE DE NOM© Thierry Gromik 60 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
UN DANDY CHEZ BIBENDUM EntreprendreJEAN-DOMINIQUE SENARDUn dandy chez BibendumPORTRAIT, GENEVIÈVE COLONNA D’ISTRIA Le 11 mai 2012, u’il descende d’un avion avec neuf heures de décalage horaire ou Jean-Dominique Senard qu’il préside l’assemblée générale annuelle des actionnaires à Cler- prenait seul les rênes du mont-Ferrand, Jean-Dominique Senard est toujours impeccable. groupe Michelin, et devenait Grand, mince, la raie sur le côté, l’homme aime les costumes le premier gérant à ne pas sobres et les cravates bien mises. Difficile, également, de le prendre appartenir à la dynastie en flagrant délit de mauvaise humeur. Impossible non plus de clermontoise. Depuis ses l’imaginer sortir de ses gonds. À 62 ans, son allure de dandy lui débuts chez Total, l’homme confère d’emblée celle d'un lord anglais. Le fruit d’une certaine cherche à appliquer des éducation. Ce fils de bonne famille, né à Neuilly-sur-Seine, en 1953, auréolé « principes de respect du titre de comte issu de noblesse pontificale, suit d’abord son et d’humanité » et père ambassadeur aux quatre coins du monde : Le Caire, Rome, à équilibrer rigueur La Haye... Une « ambiance internationale » qui lui a « beaucoup de gestionnaire et appris ». « Cette dimension paternelle m’a donné le goût de l’aven- ture et une certaine capacité d’adaptation », confie-t-il. Le parcours préoccupation de dialogue scolaire est en cohérence avec le milieu familial. Élève brillant et social. De quoi honorer discret, il suit les cours du collège et lycée privé Sainte-Croix-des- l'ADN du groupe de Neiges-d’Abondance en Haute-Savoie, sur les mêmes bancs que 110 000 salariés. son camarade Christophe de Margerie. « Nos parcours professionnels nous ont amenés à nous côtoyer à de nombreuses reprises et j’appréciais,N°128 Décembre 2015 à chacune de nos rencontres, son incroyable énergie », s’est souvenu Jean-Dominique Senard, lors du décès tragique, en octobre 2014, de son ami d’enfance. CHÂTELAIN À SAINT-RÉMY-DE-PROVENCE Diplômé d'HEC en 1979, après une maîtrise de droit, le jeune Senard fait ses gammes chez Total, où il exerce jusqu’en 1987 le poste de contrôleur de gestion et responsable des opérations de gestion des risques financiers. Puis il rejoint Saint-Gobain, occupant les plus hautes fonctions à la direction du financement jusqu’en 1995. « C’est une période où je trouvais encore un peu de temps pour exercer mes fonctions de conseiller municipal à Saint- Rémy-de-Provence », sourit-il. Il faut dire qu’à ses heures perdues, Jean-Dominique Senard se retire dans ce petit village cossu des Bouches-du-Rhône, où se trouve toujours le château de Lagoy, propriété familiale depuis 1677. 1996 marque un tournant dans sa vie professionnelle et une période plus tumultueuse pour cet homme sans vague. Jean- Dominique Senard entre chez Péchiney en tant que directeur Acteurs de l’économie - La Tribune 61
Entreprendre UN DANDY CHEZ BIBENDUM Jean-Dominique Senard « est un homme d’une grande probité qui correspond exactement aux valeurs Michelin » Go financier pour terminer président. Il doit alors composer entreflexible ses « principes de respect et d’humanité », qu’il érige toujours en pare-feu, et « la guerre de tranchées » qui agite le groupe. « J’ai vuOù vos affaires vous mènent, ce qu’était une entreprise mal née, dont la privatisation avait été mal Regus vous accompagne. préparée, se souvient-il. Les diversifications engagées étaient énormes et souvent hasardeuses. Je voyais bien que c’était fou ! », raconte-t-il des années plus tard. Enfin, l’aventure de l’OPA hostile du Cana- dien Alcan signe la fin de Péchiney : « Dans ce type de situation, on se trouve sur une ligne jaune et je m’étais fixé de ne jamais tomber du mauvais côté. Après avoir signé les accords avec Alcan, je suis parti en considérant que j’avais fait mon devoir d’État. » La parenthèse se referme et l’homme décide de prendre quelques vacances en famille. Alors qu’il s’apprête à décoller avec sa femme pour l’Afrique du Sud, son portable sonne. Au bout du fil, un jeune chef d’entreprise au nom de famille évocateur : Édouard Michelin. « Je ne le connaissais pas personnellement, raconte Jean-Dominique Senard. Il voulait absolument me rencontrer le plus vite possible. Il voulait travailler avec moi. Je lui ai dit que je devais partir quelques jours. Mais il a préféré m’envoyer son jet privé pour faire l’aller-retour Paris-Clermont dans la journée ! »Bureaux Coworking Salons d’affaires UNE ASCENSION FULGURANTE Le jeune héritier de la dynastie lui propose de le rejoindre au go-regus.fr sein du groupe. Jean-Dominique Senard part en vacances quand même et finit par céder trois jours plus tard à la proposition d’Édouard. « C’était surréaliste lorsque j’y songe ! J’étais au fin fond de la savane, au milieu des zèbres, au Zimbabwe. Il m’a rappelé. J’ai donné mon accord et c’est ainsi que tout a commencé. » En mars 2005, Jean-Dominique Senard signe le début d’une « aventure humaine extraordinaire ». Il entre au sein du groupe clermon- tois en tant que directeur financier. Laisse Paris et ses tumultes pour s’installer dans un bureau avec vue sur les volcans d’Au- vergne. « À cette époque, je ne pensais pas une seule minute qu’un jour, je deviendrais patron de cette entreprise. Ce n’était d’ailleurs pas le sujet », assure-t-il. « Je l’avoue, au départ, il n’était pas en tête de casting pour succéder à Edouard, car tout simplement ce n'était pas un Michelin, sourit Isi- dore Fartaria, patron du groupe Tittel et président de la chambre de commerce et d’industrie du Puy-de-Dôme. Mais sa capacité de travail, son intelligence et son empathie pour les autres lui ont permis de s'imposer non seulement comme un excellent gérant mais aussi comme un homme de grande valeur humaine. » A l'autre bout de l'échiquier politique, le maire socialiste de Clermont-Ferrand Olivier Bianchi est lui aussi conquis par le style Senard : « Je le connais assez bien puisqu'il siège depuis déjà plusieurs années à la direction de l'Ecole supérieure d'art de Clermont. Jamais il n'a manqué62 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 201510023_REGUS_AP_91x244_tribune_goflexible_globe_BAT_1115.indd 1 04/11/2015 17:01
UN DANDY CHEZ BIBENDUM Entreprendreun seul conseil d'administration, malgré un agenda de folie ! C'est unpatron humaniste, avec qui nous avons engagé un partenariat fécondet intelligent. »Édouard, toujours pressé, l’initie à la galaxie Michelin et lui faitvisiter trente-cinq usines en deux mois. L’ascension du nouvelhomme de confiance est fulgurante. Et accidentellement précipi-tée... L’héritier du groupe familial, âgé de 42 ans, se noie au largedes côtes bretonnes, en mai 2006 lors d’une banale sortie en mer.Destin tragique pour ce jeune capitaine d’industrie à l’avenir pro-metteur qui laisse l’entreprise en état de choc et 110 000 salariésdans le monde totalement désemparés.Michel Rollier, cousin germain de François Michelin, alors cogé-rant, succède à Édouard et nomme Jean-Dominique Senard à soncôté. « J’ai travaillé avec lui pendant six ans avant de le proposer à ceposte. C’est un homme d’une grande probité qui correspond exactementaux valeurs Michelin. » Malgré une apparente timidité, Jean-Domi-nique Senard sait imposer son style, alternant entre sa rigueur degestionnaire et son désir de privilégier le dialogue au sein de la« maison », comme la surnomme les salariés. « Il faut reconnaîtreque, depuis son arrivée, le dialogue social s’est amélioré », assure unreprésentant de la CFTC. Un avis que ne partagent pourtant pastous les syndicats. « Senard-Michelin, c’est bonnet blanc et blanc bon-net, raille Michel Chevalier, délégué CGT à Clermont-Ferrand. Ilnous promet toujours beaucoup, mais rien ne vient, que ce soit à l’usinede Joué-les-Tours ou à La Roche-sur-Yon. »MICHELIN EN CHIFFRES go-regus.fr est le webzine qui vous parleEn 2014, Michelin a produit de « travailler autrement ».178 millions de pneuset édité 13 millions de cartes et guides. C’est-à-dire d’agilité,Un des leaders mondiaux de la fabrication d’efficacité et de proximité.de pneumatiques, avec 13,7 % de parts Il enrichit votre vision et vous aidede marché mondial (en dollars). à générer de nouvelles opportunités.68 sites de production répartis go-regus.frdans 17 paysEn 2013, Michelin a ouvert trois usines Acteurs de l’économie - La Tribune 63géantes au Brésil, en Chine et en Inde.En juillet 2015, le groupe emploie112 600 personnes travaillantsur les cinq continents. 6 000d'entre elles évoluent en R&D.Michelin est présentcommercialement dans 170 pays.N°128 Décembre 2015 10023_REGUS_AP_91x244_tribune_goflexible_globe_BAT_1115.indd 2 04/11/2015 17:02
Entreprendre UN DANDY CHEZ BIBENDUMVERS LA DIGITALISATION « NE PAS SUBIR LE CHANGEMENT »Depuis 2012, Jean-Dominique Senard est non seulement devenu « Michelin a toujours été une entreprise de service, rappelle Jean-Do-le seul gérant de la Manufacture à ne pas avoir de sang Michelin minique Senard. Aujourd’hui, nous ne pouvons pas nous contenterdans les veines, mais il a également réformé le mode de gestion d’être seulement un fournisseur de pneus. » C’est ainsi qu’en 2014,de l’entreprise. Jusqu’en juin 2011, le groupe était géré par un Bibendum a racheté 100 % de Sascar au Brésil pour un total detriumvirat commandité. Quelques semaines après son intronisa- 520 millions d’euros. Avec 870 collaborateurs et un chiffre d’af-tion, Didier Miraton, l’un des trois cogérants, est poussé vers la faires de 91 millions d’euros, la société est le leader brésilien de lasortie. Michel Rollier se retire des affaires un an plus tard, à l’âge gestion de flottes et de sécurisation des biens transportés. « L’ac-de 67 ans et laisse le nouvel homme fort du groupe seul maître à quisition de cette société permettra à Michelin d’accélérer la croissancebord. Du jamais vu en 120 ans d’histoire chez Bibendum. de son activité poids lourds au Brésil », assure le patron.Dans un premier temps, le dirigeant a appliqué les bases indus- Le géant mondial du pneumatique a également annoncé entrielles décidées collégialement « dans la stricte continuité » de ses avril une prise de participation de 40 % dans le site françaisprédécesseurs. Mais progressivement, la patte Senard s’est impo- Allopneus.com. Une opération à 60 millions d’euros. Le prix àsée. Malgré une morosité mondiale et une concurrence exacer- payer pour s’offrir le leader du e-commerce de pneus en France.bée, venue notamment d’Asie, le leader mondial du pneumatique, Idem au Royaume-Uni, où Michelin a racheté la société Blackcir-à la lutte avec Bridgestone et Goodyear, domine le marché. Après cles.com, numéro 1 de la vente de pneumatiques dans le pays,une année 2014 atone, le fabricant de pneumatiques Michelin pour un montant de 50 millions de livres sterling. « Cette opéra-a annoncé pour le premier semestre 2015 un résultat net en tion représente pour Michelin une étape supplémentaire dans la miseprogression de 13,3 %, soit 707 millions d’euros, contre 624 mil- en œuvre d’une stratégie active de e-commerce », commente le servicelions d’euros pour la période correspondante de 2014. Le chiffre communication. Enfin, s’il fallait encore un exemple de cetted’affaires a atteint 10,5 milliards d’euros, contre 9,67 milliards diversification, Michelin et Fives viennent d’annoncer la créationd’euros au premier semestre 2014. Le résultat, aussi, d’une stra- d’une joint-venture pour développer et commercialiser à l’échelletégie de diversification de plus en plus marquée. Certes, de très mondiale des machines et des ateliers de production industrielsimportants investissements ont été consentis dans trois nouvelles via la technologie 3D Métal. Sans aucun doute la future grandeusines du groupe, en Inde, en Chine et au Brésil au cours de ces révolution technologique des prochaines années.dernières années. Mais Michelin a également pris « le virage indis- « Notre stratégie illustre notre ambition : être toujours plus innovant,pensable de la digitalisation ». efficient et performant pour nos clients, en leur procurant des produits et des services adaptés à leurs besoins, analyse Jean-Dominique Senard avant d’ajouter : Il ne faut pas subir le changement, mais le dominer. » Une approche symbolisée par l’ouverture en octobre d’Urbalad, le tout nouveau Centre de recherche et développe- ment Michelin à Clermont-Ferrand. Un investissement de 270 millions d’euros pour la plus importante entreprise de la future grande région Auvergne-Rhône-Alpes.64 Acteurs de l’économie - La Tribune « Senard-Michelin, N°128 Décembre 2015© Hamilton / Réa c’est bonnet blanc et blanc bonnet », raille Michel Chevalier, délégué CGT à Clermont-Ferrand.
QUARTIER CRÉATIUFN DANDY CHEZ BIBENDUM EntreprendreSAINT ÉTIENNEMANUFACTURE OU BIEN :INVESTIR•CRÉER•IMAGINER GARE TGV • MIN DE LYON • H DE PARISN°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 65
Entreprendre CHRONIQUES Par Bernard Gaud, © David Venier - DAVM Universite Jean Moulin Lyon3, Emmanuel Foudrot Président du Medef Rhône-Alpes Vers la naissance d’une NOUVELLE ÉLITE ? Pour une société DE DÉVELOPPEMENTEn parallèle de la forte progression de l’intention comme de la création d’entreprises, ce qui impressionne c’est l’explosion du nombre des RESPONSABLE structures d’accueil et d’accompagnement pour ces jeunes entre- prises. Ces accompagnements plus nombreux sont la promesse de Un principe de précaution inscrit dans la Constitution, une dilution permanente de la res- nouvelles aides pour faire réussir les entrepreneurs, mais ces réus- ponsabilité décisionnelle par la multiplication des concertations, une incapacité collec- sites sont aussi un enjeu majeur pour ceux qui les accompagnent tive à gérer des situations d’une complexité croissante… les causes d’une croissance dans un contexte qui devient concurrentiel. Ceci n’est pas nouveau. atone sont multiples. Si l’on regarde un peu en arrière, le schéma directeur autoroutier, Ce qui l’est, c’est que l’on voit poindre une concurrence pour accueillir le programme nucléaire français, la construction de villes nouvelles ou bien encore les meilleurs projets, déjà détectés dans un cadre d’accompagnement la création ex-nihilo de stations balnéaires sur notre littoral constituent autant de réalisations souvent public et qui ont acquis un début de notoriété. La concur- résultant d’une action volontariste d’un Etat décidé à favoriser le développement économique rence pour faire venir ces projets à potentiel est probablement due à « l’imperfection national. Cela serait-il possible aujourd’hui ? Clairement, non. Car nous vivons malheureusement du marché » de l’accompagnement en entrepreneuriat. Il est en effet très difficile pour l’avènement d’une « Société anonyme à irresponsabilité illimitée ». le plus grand nombre des entrepreneurs de différencier les structures, d’apprécier la Petit à petit, à coups d’indécisions successives, notre société s’est enfoncée dans un immobi- valeur créée par ces offres et d’évaluer si le prix demandé est justifié. Pour répondre lisme certes confortable mais mortel, piégée, via un regrettable effet de balancier, par une judi- à cette imperfection de marché, les opérateurs choisissent d’accréditer leur offre en ciarisation grandissante qui s’intéresse au « coupable » plus qu’au « responsable ». Tout est dit. communiquant sur le succès des entreprises qui ont suivi leur programme, et pour cela Evidemment, cela n’est pas sans conséquence. Une société enkystée comme la nôtre ils veulent sélectionner les meilleurs projets. Mais pourquoi ? dans ses complexités administratives et réglementaires, avec ses contrôles L’explication est à retrouver en partie dans les résultats de l’étude du programme permanents de procédures elles-mêmes déjà certifiées de multiples fois par Growing America Through Entrepreneurship, qui a accompagné plus de 4 000 projets des services « indépendants » dont l’intérêt premier est de faire perdurer le sur sept sites et dans trois États au milieu des années 2000 aux États-Unis. Comparés système, n’a aucune perspective de développement durable. Que pouvons-nous à une population de contrôle qui n’a pas eu d’aide, les entrepreneurs ayant bénéficié espérer de bien avec une croissance (ou plutôt une stagnation) de notre économie autour de du programme ont vu leur performance être significativement supérieure dans les 18 1 % chaque année ? C’est encore pire lorsque l’on sait que, par simple idéologie, certains premiers mois, mais cette différence de performance n’est plus significative passée leaders d’opinion vont même jusqu’à refuser toute sorte de progrès, dénigrant au passage ce cette période et dans la durée. En somme, les qualités intrinsèques des projets et qui a constitué le moteur de l’humanité depuis l’origine des temps : l’inventivité, la découverte, des entrepreneurs priment sur l’accompagnement pour expliquer la croissance de l’enthousiasme de faire toujours plus et mieux. Alors oui, il est plus que temps de procéder à une l’entreprise à terme. véritable révolution copernicienne au sein de notre système organisationnel. C’est même plus globalement notre comportement sociétal qui doit être repensé. Les notions de prise de risque Un modèle à deux vitesses et de capacité de décision doivent revenir au centre du jeu pour redonner le tonus et la vitalité En quoi est-ce un problème ? À vouloir attester de la pertinence d’un accompa- nécessaires à notre société. gnement, on en vient à choisir de manière prioritaire les projets qui en ont le moins besoin. Il n’est pas rare aujourd’hui de voir des projets à potentiel passer d’un dispositif Avec responsabilité à l’autre pendant deux ou trois ans. C’est indéniablement utile pour ces projets qui Mais, à la différence d’une période récente où le progrès se faisait au prix de coûteux gaspil- accumulent les accélérations, mais on concentre alors les ressources, mais aussi lages et au mépris de notre environnement, cela doit se faire avec responsabilité. C’est bien de la communication sur un nombre finalement restreint de bénéficiaires. Inversement, développement durable dont nous avons besoin, mais certainement pas celui derrière lequel les projets qui ne seront pas suffisamment démonstratifs en termes de performance s’abritent trop souvent les « empêcheurs de faire » et autres conservateurs. Un développement pour les programmes d’accompagnement peuvent peiner à être pris en charge s’ils signe de simplicité plutôt que de complexité, de vitesse d’exécution plutôt que de multiplication ne sont pas rapidement solvables, alors que ce sont eux qui en ont le plus besoin. des consultations qui permettent soit d’éviter de prendre une décision, soit de faire porter celle-ci On risque de voir émerger un modèle à deux vitesses, avec d’une part sur un collectif tellement large que personne ne se sente porteur de responsabilité. des programmes détectés plutôt par des structures capables de tra- A quelques encablures d’échéances électorales importantes, à l’heure où la libéralisation de vailler sur une large diversité de projets et sur de grands volumes, et notre économie, donc la prise de risque, fait encore débat, il est essentiel qu’intellectuels, d’autre part un accompagnement élitiste qui vient puiser dans cette décideurs économiques, acteurs institutionnels et politiques admettent que notre société ne peut base avec un dispositif très sélectif. On reconnait un modèle hexagonal dont continuer à s’affaiblir dans un marécage glauque d’irresponsabilité illimitée pour retrouver l’eau on pourrait craindre qu’il s’installe dans l’entrepreneuriat qui était pourtant jusque-là un claire et énergisante d’un développement dynamique et responsable devant les générations à espace où les cartes pouvaient être rebattues. Attention à ce que le développement si venir : en bref, passer d’une « Société anonyme à irresponsabilité illimitée » à une enthousiasmant de l’entrepreneuriat ne se contracte pas sur une nouvelle élite, aussi « Société de développement responsable ». stimulante soit-elle. N°128 Décembre 2015 Par Alain Asquin, Vice-président de l’université Jean-Moulin Lyon 3, directeur de l’innovation et du développement 66 Acteurs de l’économie - La Tribune
TRIBUNE EntreprendreLE TAUX DE Les cultures existent. Pour quelqu’un comme moi dont la fibre anti-natio-CRÉATIONS naliste traverse tout le corps, cette réalité culturelle, de prime abord,D’ENTREPRISES dérange : un individu est un individu et peu importe où il est né. LaEN FRANCE seule culture devrait être celle de l’humanisme. Mais en y réfléchissant enDÉPASSE CEUX profondeur, la notion de culture ne peut être disqualifiée. Parce que factuel-DE L'ESPAGNE, lement les cultures se voient, c’est donc que, sans doute, elles existent.DE L'ITALIE… Mais aussi parce qu’on peut accepter leur existence, y compris philosophi-ET DE quement dans la mesure où les cultures sont une mise en situation et non uneL'ALLEMAGNE détermination. Autrement dit, on peut s’en détacher. Poser la question de la culture de l’entrepreneuriat en France est donc justifié. En fait, la question se pose en deux temps. Les Français sont-ils « culturellement » fâchés avec l’entrepreneuriat ? Si c’est le cas, comment les arracher à ce mauvais subs- trat culturel ? Si ce n’est pas le cas, avec quoi sont-ils fâchés ? Que n’a-t-on entendu sur les Français et l’entrepreneuriat ! La musique d’am- biance du débat public en France nous chante que les Anglo-saxons sont des entrepreneurs et pas les Européens, encore moins les Français. Souci : ce n’est pas ce que nous disent les chiffres. Les Français entreprennent beaucoup et pas avec moins de succès que les autres s’ils y sont incités ou point trop découragés. Depuis les Lois Dutreil de 2003 qui ont considérablement simplifié la création d’entreprises, les Français entreprennent beaucoup. L’autoentre- preunariat a renforcé ce phénomène, mais ne lui a pas donné naissance. Le taux de créations d’entreprises dans notre pays tourne autour de 10 % à 11 % selon les années (source INSEE). C’est plus qu’en Allemagne, qu’en Espagne et qu’en Italie et c’est proche des chiffres britanniques.LES FRANÇAIS SONT FÂCHÉS AVECL’ÉCONOMIE, PAS AVEC L’ENTREPRENEURIATNicolas Bouzou, INADAPTATIONS DE NOS POLITIQUES PUBLIQUES © DRessayiste,fondateur d’Asterès Cet esprit d’entreprises, il n’est pas difficile de le voir aussi à l’œil nu.et directeur d’études Ainsi, dans cette immense révolution industrielle qui s’est amorcée, celleau sein du MBA des NBIC (Nanotechologies, Biotechnologies, Information et sciences cogni-Law & Management tives), les startups françaises fleurissent, sur le plateau de Saclay, entrede l’université Paris II Assas Lyon et Grenoble ou dans le quartier Euromediterranée à Marseille. Ce qui est vrai, c’est que ces startups sont minuscules et ne grandissent pas en France,N°128 Décembre 2015 mais ailleurs, et notamment aux États-Unis. Le problème économique français n’est donc pas l’entrepreneuriat, mais le fait que nos entreprises sont lil- liputiennes. Ainsi, les créations d’entreprises avec au moins un salarié sont à, population comparable, deux fois plus faibles en France qu’en Allemagne et huit fois plus faibles qu’au Royaume-Uni (source Eurostat). Cette pauvreté en emplois est parfaitement documentée et est liée à une surfiscalisation des entreprises, une surréglementation (notamment un droit du travail qui est un frein colossal à l’emploi) et un sous-financement en fonds propres. Ce n’est donc pas un problème de réticence face à l’entrepreneuriat qui pose problème, mais l’inadaptation de nos politiques publiques elle-même liée au désordre démocratique qui affecte notre pays : le primat des passions sur la raison. De la fiscalité aux OGM en passant par AirBnB ou Uber, nos débats sont dominés par la peur et la jalousie, là où il faudrait parler compétitivité ou emploi. Mais cette mauvaise passe démocratique est contingente et non culturelle. Au contraire même puisque notre tradition, celle que nous avons non pas perdue, mais simplement perdu de vue, c’est celle de la rationalité, qu’elle soit cartésienne (assise sur des certitudes logiques) ou pascalienne (assise sur des preuves empiriques). Ainsi, la France ne devrait avoir aucun problème pour se réconcilier avec la croissance et l’entreprise si elle combat ses mauvais démons, notamment sa peur devant l’avenir. Elle est sur le bon chemin : elle a déjà réussi à devenir un pays d’entrepreneurs. Reste à redevenir un pays de progrès et de travail. Acteurs de l’économie - La Tribune 67
LE RÊVE Inventer LE RÊVE, PÈRE GUY GILBERTout ce qui vient de l’humain dans ce qui le resserre avec les autres est bon et beau. Les villes ont un besoin urgent de renouer avec leur part d’humanité, sans exclure personne. L’économie solidaire restaure le sens du partage qui nous fait tant défaut.‘‘ Les politiques urbaines récentes accordent davantage d’attention à la nature. Il s’agit d’établir une nouvelle alliance entre l’Homme et la Terre. Le symbole de cette alliance est le jardin. Des petits jardins sont créés partout, au cœur des villes comme en banlieue. Au lieu de faire de nouveaux bâtiments qui repoussent sans cesse les classes populaires un peu plus loin, on réserve un espace pour un jardin. L’homme sème, plante, arrose… Les habitants des villes aménagent même leurs balcons. Faites du covoiturage, prenez les transports en commun, faites le tri de vos déchets. Chaque geste contribue à restituer notre lien à la Terre. Mettons-nous à l’écoute de notre environnement, tirons-en quelques leçons de vie quotidienne. Méditons l’enseignement clair et large du pape François sur l’écologie. Vivons simplement. C’est un signe d’ouverture qui doit être amplifié. Je m’en réjouis fortement. Le futur des villes a besoin d’accompagner l’humain. Je le bénis avec enthousiasme.T ’’PèreGuyGilbertN°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 69
Inventer TRIBUNE70 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
RUBRIQUE DE NOM Inventer Échanges de services basés sur le temps et non l’argent, habitats groupés ou coopéra- tifs, jardins partagés, fablabs citoyens, monnaies locales, boîtes d’échanges d’objets entre voisins, tiers lieux, gestion collective des ressources et de l’énergie, etc. Autant d’initiatives construites et gérées en commun qui connaissent un regain d’intérêts auprès des adeptes d’une autre façon de vivreLA VILLE, la ville. À tel point que les communs pourraient bien, à terme, transformer durablement l’espace urbain.UNE CAUSE COMMUNE FEUILLETON, STÉPHANIE BORG Acteurs de l’économie - La Tribune 71 © FotoliaN°128 Décembre 2015
Inventer LA VILLE, UNE CAUSE COMMUNE« Les villes e Temps des communs, festival francophone des communs auto-constituent un organisé et autogéré, accompagné par l’association Vecam,environnement programmait, en octobre, 250 événements dans cinq pays franco-fertile pour phones. Après Brest la pionnière, Lyon (et la région Rhône-Alpes)les communs fait partie des villes françaises les plus actives en la matière, danssociaux en raison un pays légèrement en retrait sur la question. Il faut se tourner vers le nord de l’Europe, la Suisse, l’Espagne (et notamment Barcelone)de la grande diversité ou l’Italie, « un pays avec un rapport au territoire différent, où la villeet de la densité dispose d’un fort impact », souligne Claire Brossaud, sociologue etde leurs habitants » chercheuse au laboratoire EVS-LAURE (Lyon Architecture Urba- nisme Recherche) et membre du comité d’organisation du festival,72 Acteurs de l’économie - La Tribune pour trouver des initiatives avancées et abouties en la matière. Si la multiplication des initiatives locales démontre un regain d’in- térêt, la notion de communs ne date pas d’hier. Ils désignent tradi- tionnellement l’eau, l’air et les ressources naturelles, trouvent leurs fondements dans les sociétés agricoles et rurales, où la gestion des espaces communaux était régie par les droits coutumiers. « L’émer- gence des communs est apparue avec les mouvements écologiques et altermondialistes en Amérique Latine, aux États-Unis et en Italie. La crise climatique, l’appropriation des terres et des ressources par quelques individus ont favorisé la propagation du phénomène », explique Chris- tian Laval, sociologue, professeur à l’université Paris Ouest Nan- terre et co-auteur, avec le philosophe Pierre Dardot, de nombreux ouvrages, parmi lesquels Commun, Essai sur la révolution au XXIe siècle (Éd. La Découverte, 2014). N°128 Décembre 2015
LA VILLE, UNE CAUSE COMMUNE InventerIRRUPTION DU NUMÉRIQUE Dans le quartier de la Guillotière, à Lyon, la galerie Roger-Tator© DR« Ces nouvelles pratiques collaboratives, inventives et structurées se sont a investi un terrain délaissé pour y créer une œuvre non figée.accélérées avec l’arrivée du numérique », poursuit Christian Laval.L’avènement de l’ère digitale a donné un nouvel élan aux communs, les jardins partagés. Nés d’une envie de verdure dans un quar-les acteurs du secteur prônant le format ouvert de la connaissance tier en devenir, les jardins ont progressivement envahi les fricheset le logiciel libre. « Le bien commun de la connaissance a ainsi donné délaissées, se déplaçant au gré des constructions. Dans le cadre dunaissance à Wikipedia », rappelle Claire Brossaud. projet d’aménagement de la place Mazagran, la structure de l’îlotLes communs ont donc pris une forme nouvelle : la connaissance, a été rénovée, les jardins partagés intégrés à l’espace urbain. L’en-les revues en ligne, les cartes collaboratives. Par concomitance, ils semble a été pensé et rénové avec le concours des habitants. « Nousont engendré de nouveaux espaces sociaux, les communs sociaux, avons réussi à imposer le jardin par l’accoutumance en invitant le quar-concrétisés par des laboratoires de fabrication ouverts à tous, les tier à participer à nos actions. C’est une véritable appropriation du pay-« fablabs », des boutiques des sciences, de l’habitat ou des jardins sage urbain par les habitants », explique Évelyne Bonny. Désormais,partagés et des tiers lieux, protéiformes, ouverts à tous. À l’image l’îlot est accessible tous les après-midi et chaque fois qu’un jardinierde la Cartonnerie de Saint-Étienne, gérée par l’association Car- est présent. Ces collectifs qui émergent peuvent donc changer leton Plein, qui se définit comme « un espace public atypique devenu visage de la ville, « grâce à l’interaction des initiatives privées et de laun lieu d’expérimentation où se succèdent workshops, jeux, diffusions collectivité », ajoute-t-elle.artistiques, résidences, événements divers mêlés à la vie du site et à ses RÉAPPROPRIATION DE L’ESPACE PUBLICusagers multiples ». Cette réappropriation physique de l’espace par les habitants modi-Ces pratiques collectives instituées sont le fondement des com- fie, de fait, les pratiques urbaines. Ces collectifs impliquent, àmuns. Elinor Ostrom, prix Nobel d’économie en 2009, théori- terme, une recomposition économique des territoires, qui com-cienne des biens communs, a démontré comment « les biens mencent à se différencier avec les monnaies locales. Dans leur sil-communs, surtout les ressources naturelles, peuvent être efficacement lage, une autre façon de consommer. « Dans la logique des communs,gérés par les usagers ». « Le processus des communs n’existe pas s’il n’y l’alimentation doit être durable et de proximité. L’agriculture en villea pas une action de mise en œuvre commune des choses. In fine, peu influence la politique au sens général et réaménage l’urbanité », estimeimporte ce que l’on produit, l’essentiel étant la dynamique collective des Béatrice Maurines. Les communs restructurent aussi socialement laindividus pour le projet », confirme Béatrice Maurines, socioanthro- ville, qui devient un espace de débat, voire de délibération. « Si lespologue et chercheuse au centre Max-Weber de l’université Lyon jardins partagés sont synonymes de mieux-être, de lutte contre l’exclusion2. De l’idée collective, le processus de gestion se doit lui aussi de et de création de liens pour certains, ils sont pour d’autres catégories, avecrester commun. « Personne n’est propriétaire de quoi que ce soit. Le des moyens financiers et culturels, un moyen de réinventer l’usage de laprojet doit se construite de manière autogérée », ajoute Claire Brossaud. ville en un autre avenir, plus collectif. En cela, les communs sont une cri- tique sous-jacente de la pensée néolibérale », indique Christian Laval.LA VILLE, TERRAIN DE JEU DES COMMUNS Ces règles de collaboration animent, à Lausanne, à Bruxelles ou auSi les communs trouvent leur fondement dans la ruralité, « les villes sein du quartier Vauban de Freiburg, en Allemagne, des écoquar-constituent un environnement fertile pour les communs sociaux en raison tiers entièrement gérés selon cette gouvernance particulière, « unede la grande diversité et de la densité de leurs habitants », écrit David structure économique au format distinct qui formalise les différentesBollier, chercheur indépendant américain, dans son livre La renais- règles », explique Claire Brossaud.sance des communs. Car si le rôle des municipalités, des élus et desadministrations est essentiel dans la gestion et le développement Acteurs de l’économie - La Tribune 73d’une ville, les habitants la façonnent et la co-construisent aussi àleur manière.Dans le quartier de la Guillotière, à Lyon, la galerie Roger-Tator ainvesti, en 2003, un terrain délaissé pour y créer une œuvre nonfigée, avec une ligne graphique orange caractéristique, l’îlot d’Ama-ranthes. L’estimant terminée, la galerie en confie la gestion à Brind’Guill, association cofondée par Évelyne Bonny et qui œuvre pourN°128 Décembre 2015
Inventer LA VILLE, UNE CAUSE COMMUNELe Temps des communs, festival francophone des communs autogéré, © Bernadette Forest - Ensalprogrammait, en octobre, 250 événements dans cinq pays francophones.Lyon fait partie des villes françaises les plus actives en la matière.Autant d’éléments qui affectent physiquement la ville, offrant un « Les communs sontnouveau terrain de jeux aux architectes, qui doivent désormais la une critique sous-jacentepenser avec les habitants et non plus à leur place. « Nous devonsrendre l’espace libéré aux habitants », estime Yannick Hoffert, archi- de la pensée néolibérale »tecte à l’Atelier 43 et enseignant titulaire à l’École nationale d’Ar-chitecture de Montpellier. Des architectes qui doivent réinventer DU LOCAL AU GLOCALl’habitat, surtout lorsqu’ils sont sollicités pour inventer les nou- Ces communs ne risquent-ils pas néanmoins de demeurer confinésveaux espaces communs nécessaires aux ambitions de l’habitat à l’échelle d’un minuscule territoire, voire de glisser vers une formecollaboratif. À Villeurbanne, le Village Vertical – premier immeuble de repli identitaire ? « Tout dépend des règles de fonctionnement queabouti dans la région, fait référence en la matière. Mais partout le collectif s’impose pour se développer au-delà du local. La victoire dedans la région les projets se multiplient, comme dans le quartier l’équipe municipale de Barcelone, qui s’est constituée sur les règles desBeauvert, à Grenoble, où un immeuble de 12 logements indivi- communs, peut laisser penser que cela fonctionne », ajoute Christianduels avec espaces communs devrait voir le jour à l’orée 2018. Il Laval. La pression du collectif peut influer sur le territoire et chan-s’agit donc de sortir du local à vélo traditionnel pour aller vers des ger le rapport à la ville. « Si les demandes se multiplient, le secteurespaces de réunion, des jardins collectifs, des ruches sur le toit public est obligé de le prendre en compte », estime Claire Brossaud.ou des chambres d’amis partagées. « Désormais, poursuit Yannick Souvent, on vient de loin pour s’inspirer de ces pratiques locales :Hoffert, notre dimension de conseils et d’accompagnement sur un projet « De nombreuses délégations étrangères nous rendent visite et je suisprend tout son sens. Nous devons, plus que jamais, prendre en compte souvent invitée à témoigner de notre expérience », confirme Évelynel’usager et l’habitant dans la construction d’habitat, surtout si elle est Bonny. « Les organisations paysannes ont bien compris que les circuitsportée par un collectif. » courts ne pouvaient fonctionner que dans un mouvement de fond interna- tional. Tous s’associent pour créer une dynamique territoriale, de l’Amap74 Acteurs de l’économie - La Tribune lyonnaise au sud du Chili, où les expériences de production ont démontré qu’il n’y avait pas de repli sur soi », explique Béatrice Maurines. Ces îlots communs implantés au cœur des villes traditionnelles ont permis l’émergence d’une nouvelle façon de gérer l’espace et la ville. Ils ont donné naissance à des assemblées des communs – celles-là mêmes qui ont remporté les élections municipales de Barcelone en mai dernier ou gagné la petite mairie de Saillans (Drôme). « C’est un véritable retour à la démocratie participative, ini- tiée par les habitants. Un faire autrement qui reconfigure le rapport aux gens », souligne encore Christian Laval. Le pragmatisme alors l’emporte : le fait de partager un usage ou une expérience rend le citoyen légitime. Il est désormais un acteur de et dans sa ville. À part entière. N°128 Décembre 2015
Inventer TRIBUNE76 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
MARQUE DE FABRIQUE InventerMARQUE DE FABRIQUEN°128 Décembre 2015 IMMERSION, ROMAIN CHARBONNIER PHOTOGRAPHIES, LAURENT CERINO / ADE Travailler le bois de manière artisanale afin de concevoir des objets de qualité, tout en s’inscrivant dans une démarche d’innovation sociale, c’est ce qui réunit depuis 2008 un ingénieur et un ébéniste autour du projet de La Fabrique. Un atelier installé au cœur de Francheville (Rhône) où les mots « bienveillance », « collaboratif », « partage » et « écoute » imprègnent les murs jusqu’à la relation entre les salariés et le tandem de dirigeants. Acteurs de l’économie - La Tribune 77
Inventer MARQUE DE FABRIQUEVildan, cuisinière depuis quatre ans. Audrey, apprentie ébéniste. Marie, secrétaire comptable. e 20 octobre, il est un peu plus de 12 h conçoivent des petites séries d’objets en 30 lorsque l’ensemble des salariés de La bois, du prototype au mobilier d’agen- Fabrique se rend dans la salle à manger cement à des pièces d’artistes. À chaque de l’entreprise. Comme tous les jours, commande, des projets originaux. Les du lundi au vendredi, tous se retrouvent matériaux (bois de merisier et de chêne, autour du repas préparé, depuis le matin, entre autres) proviennent des régions par la cuisinière Vildan. Les uns mettent Rhône-Alpes, Bourgogne et Franche- le couvert tandis que d’autres servent Comté. Les copeaux sont recyclés et le repas ou débarrassent la table avant les chutes mises à disposition du grand de reprendre leurs activités respectives. public. Une entreprise unique en France Telle une cantine scolaire, mais avec le où les candidats se pressent pour décro- bruit en moins. Un moment convivial cher un emploi ou un apprentissage. « J’ai d’une heure auquel les deux dirigeants attendu cinq mois avant de pouvoir intégrer Fabrice Poncet et Nicolas Autric prennent l’équipe », se rappelle Audrey, 26 ans, part et qui symbolise, à lui seul, la phi- entrée en juillet dernier et élève apprentie losophie de l’entreprise de fabrication à l’Institut de formation professionnelle de mobilier, pas tout à fait comme les de Haute-Loire (IFP 43). Sans jamais autres. Son ADN pourrait se résumer à démarcher le client ni manquer de main- trois critères que Fabrice Poncet, à l’ini- d’œuvre, refusant même des demandes, tiative du projet, présente avec convic- dans un secteur du meuble qui a perdu tion : « Une place pour tous, un respect de plusieurs milliers d’emplois et vu fermer l’environnement, et des objets beaux et de de nombreux établissements en l’espace qualité. » Depuis son lancement en 2008, de quelques années, La Fabrique prouve ce triptyque transpire à tous les niveaux. la solidité de son concept avec sa bonne Ici, l’homme et son savoir-faire sont la santé financière, son chiffre d’affaires clé de voûte de La Fabrique plutôt que ne cessant de progresser. Dépassant les la machine à commande numérique. Ils 920 000 euros en 2014, elle conserve78 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
MARQUE DE FABRIQUE Inventer « Nous ressentons véritablement les émotions de l’autre et même ses états mentaux. C’est comme si nous étions à sa place »Nicolas Autric et Fabrice Poncet, Thomas, 26 ans. Stéphane, ébéniste depuis sept anstandem fondateur de La Fabrique. à l’atelier de Francheville.sa rentabilité originelle ainsi qu’un car- faisons, confirme Nicolas Autric, ébéniste était en congé parental et réfléchissait aunet de commandes rempli à trois mois. et associé. Nous dépoussiérons le métier et concept quand le second souhaitait fon-« J’avais en tête de montrer qu’il était possible lui donnons une autre image. » La Fabrique der une association valorisant le diplômede créer une vraie entreprise manufacturière se révèle être un petit ovni. d’ébéniste. Une sensibilité et des basesen France, dans une logique d’utilité sociale, communes scelleront le concept, figurantraconte Fabrice Poncet, à l’origine du pro- VALEURS HUMANISTES en bonne place dans le dossier de mon-jet. C’est donc faisable même si tout n’est pas ET CHRÉTIENNES tage de l’entreprise. « Nous ne voulionsrose, comme dans toute entreprise. Il faut Projet conçu au milieu des années 2000, pas créer une association, mais une véritableque tout le monde s’imprègne du concept. » il naît d’une idée de Fabrice Poncet, entreprise afin de prouver que l’innovationPreuve que cela fonctionne, sensibi- ingénieur de l’école Télécom de Saint- sociale est compatible avec la logique écono-lise et « parle », lors de l’inauguration Étienne. L’homme, passé par Saint-Go- mique », se souvient, convaincu, Fabricede ses nouveaux bâtiments de 900 m² à bain et le Burkina Faso où il enseignait, Poncet en charge de la gestion, du com-Francheville (Rhône), le 25 septembre, s’est toujours imaginé dans la peau d’un mercial et de la communication. De quoi700 personnes ont répondu à l’invitation. chef d’entreprise. « Je suis un entrepreneur refroidir certains esprits critiques jugeantEn sept ans d’existence, l’entreprise a de nature », se définit-il. Mais un entre- le projet un brin utopique. Au lancement,réussi à se faire une place dans la grande preneur innovant qui « souhaite faire en six investisseurs feront confiance auxfamille rhônalpine de l’économie sociale sorte que les gens soient heureux d’aller au deux hommes. Depuis, ces derniers ontet solidaire, s’est fait connaître du grand travail ». Qui aime la matière et le fait repris la majorité du capital afin de menerpublic, des institutionnels et du milieu main, portant des valeurs « humanistes » de la meilleure façon la trajectoire de laculturel grâce, entre autres, à un travail et « chrétiennes » affirmées. Son credo : SARL. Les financiers « sont toujours là, caractif de communication sur les réseaux « Créer de l’emploi en donnant la chance à nous avons besoin d’eux ». Mais si le modèlesociaux et d’interventions régulières tous, autour d’un métier valorisant le tra- de La Fabrique est probant, pas questionsur des événements phares (Biennale vail fait main. » Une vision à laquelle de le développer dans une démarchede design Saint-Étienne, Nuits sonores, Nicolas Autric, en charge de la gestion, capitalistique. « Nous devons encore faireBiennale de Lyon). Des initiatives singu- de la conception et de la production, a tourner l’entreprise et ensuite nous envisa-lières dans le secteur. « Dans l’ébénisterie, adhéré dès les prémices, lorsque les deux gerons de dupliquer le modèle d’innovationpersonne ne communique comme nous le hommes se sont rencontrés. Le premier sociale dans le même état d’esprit que ce queN°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 79
Inventer MARQUE DE FABRIQUEnous avons fait ici. L’objectif étant toujours de « La Fabrique « participent à la bonne ambiance générale »,créer de l’emploi », rappelle Fabrice Poncet. remet en question le relève Marie. « Autonomie », « bienveil-DES SALARIÉS ACTEURS DU MODÈLE principe de l’entreprise lance », « collaboratif », « écoute », « par-C’est d’ailleurs ce modèle d’entreprise tage » qualifient l’atmosphère des lieux.qui séduit à l’extérieur les clients et par- et privilégie Résultat d’un management doux, au plustenaires, mais surtout à l’intérieur. Ici le capitalisme près des collaborateurs, instauré par lespeu ou pas de différence entre salariés humain à l’aspect dirigeants et qui se traduit, entre autres,et dirigeants. Outre le déjeuner pris en économique » par un accord d’intéressement égalitairecommun, les bureaux se situent tous sur le bénéfice de l’entreprise, un pota-au même niveau, en espace ouvert. Une ger partagé, « qui a du succès », ou encoreproximité qui rompt avec le schéma tra- des réunions régulières durant lesquellesditionnel patron/salarié. « Venant d’un chacun participe et peut s’exprimer.cabinet d’expert-comptable, je ne pensais pas « Nous pouvons dire ce que nous pensons »,que cela puisse exister », remarque Marie, se satisfait Audrey, très sensible à l’espritsecrétaire comptable. « Nous pouvons ESS qu’elle retrouve à La Fabrique. Dediscuter très facilement avec nos directeurs, plus, avec une moyenne d’âge d’une tren-la barrière est ténue. Surtout, notre parole taine d’années, les liens se créent pluscompte », ajoute Thomas, 26 ans, ébéniste facilement et le message de l’entrepriseen CDI qui retrouve pour la première porte davantage. « La Fabrique remet enfois ses propres valeurs dans une entre- question le principe de l’entreprise et placeprise. Entre les 12 ébénistes, trois chargés en son centre le capitalisme humain avantd’études, la cuisinière et une administra- l’aspect économique », souligne Audrey.tive, pas de différences non plus : tous Une philosophie à laquelle les salariés adhèrent et participent. « Avec eux, nous80 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
MARQUE DE FABRIQUE Inventertransformons le modèle constamment », se qu’ils ont réussi à faire me motive pour allerréjouit Nicolas Autric. « Grâce à des pro- dans la même direction et créer, un jour, mafils différents, nous le construisons ensemble propre structure », projette Thomas, passéet l’inculquons à ceux qui nous rejoignent », d’une licence en qualité environnement àdéclare Stéphane, 31 ans, dont sept à un CAP ébéniste. D’autres suivront-ils ?l’atelier de Francheville. Ébéniste passé Sans doute. « Notre objectif est de faire enpar la fabrication de billards, il fait partie sorte que notre vision essaime dans l’en-des premiers à avoir rejoint l’entreprise treprise et au-delà », reconnaît Nicolaspour « son concept et son travail à la main ». Autric. De fait, les sollicitations abondent, mais les deux dirigeants avancent pru-SAVOIR-FAIRE demment. « Nous n’avons pas de catalogue,Un autre pan de la notoriété du fabricant nous vendons seulement un savoir-faire. C’estfranchevillois repose sur le travail arti- pourquoi, sur ce modèle, nous n’allons passanal du bois. « Le métier a évolué, s’est dépasser les 25 personnes, précise Fabricestructuré, notamment autour de l’agence- Poncet. Nous ne serons jamais 50 ni n’au-ment avec des machines ultras performantes, ront de filiales partout. » Une remarquequi mettent de côté la créativité. Elle n’existe comme pour rassurer que la pérennitéplus, explique Nicolas Autric. Avec La du concept s’écrit dans une démarcheFabrique, nous voulions redonner un sens entrepreneuriale viable, durable et rai-aux beaux objets en travaillant le bois à la sonnable, dans un secteur en quête demain. » Une pensée à laquelle adhère sens. Des fondamentaux inscrits dans lesl’ensemble de l’équipe d’ébénistes. « Le gènes du duo de dirigeants, qu’ils ont « àtravail n’est plus le même aujourd’hui. La cœur » de transmettre à leurs salariés.conception des meubles est de plus en plussimplifiée et le savoir-faire manuel se perd.À La Fabrique, c’est tout le contraire. Nouspouvons ainsi réaliser de très belles choses »,se satisfait Stéphane, qui se souvient de sapremière pièce à son entrée dans l’entre-prise : « Un prototype pour l’artiste israélienItamar Burstein » auquel La Fabrique étaitassociée.Redonner ses lettres de noblesse à uneprofession en difficulté, La Fabriquey parvient à sa manière, suscitant des« envieux », mais surtout des « envies »,notamment d’entreprendre. « Observer ce La Fabrique redonne ses lettres de noblesse à une profession d’ébéniste en di culté.N°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 81
Inventer TRIBUNEPARLONS DES Il suffit de visiter les mégalopoles chinoises ou des autres pays émer-SOLUTIONS gents, où des milliers d’immeubles de 50 étages sont en pleine construc-EXISTANTES tion, pour comprendre que la décroissance est impossible. Rien ne pourraPLUTÔT QUE DES arrêter l’expansion des cités tentaculaires dans les pays émergents, même laPROBLÈMES. conscience que l’humanité se met elle-même en péril. Il y a là-bas un dan-IL Y A ger beaucoup plus immédiat, celui des troubles sociaux, si le développementAUJOURD’HUI économique n’est pas assez rapide pour sortir la population de la pauvreté.ASSEZ DE Mais en les visitant, j’ai aussi constaté que tous ces gratte-ciels pourraientTECHNOLOGIES être construits avec des matériaux isolants et des circuits électriquesPROPRES POUR intelligents, avec des systèmes d’éclairage, de chauffage et d’air conditionnéAUGMENTER efficients, qui leur permettraient d’économiser 80 % de leur consommationL’EFFICIENCE d’énergie et de produire le reste avec des sources renouvelables. Et toutÉNERGÉTIQUE cela de façon parfaitement rentable financièrement, avec la création de mil-AU POINT DE lions d’emplois à la clé. C’est pour cela que le discours écologique devraitDIVISER PAR changer. On ne motivera jamais personne à limiter son développement avec lesDEUX LES menaces catastrophistes démontrant que les changements climatiques repré-ÉMISSIONS sentent un énorme problème qu’il faut résoudre à coup de milliards pour évi-DE CO2 ET ter une fonte des pôles dans 50 ans.L’UTILISATIONDE RESSOURCESNATURELLESDES VILLES DU FUTUR GRANDESET PROPRES, C’EST RÉALISABLEDr Bertrand Piccard, PARLONS DES BÉNÉFICES PLUTÔT QUE DES DÉPENSESinitiateur, présidentet pilote de Solar Impulse Parlons des solutions existantes plutôt que des problèmes. Il y a aujourd’hui déjà assez de technologies propres pour augmenter l’efficience énergétique au point de diviser par deux les émissions de CO2 et l’utilisation de ressources © Jean Revillard / Rezo / Solar impulse naturelles. Ce que nous devons demander à nos dirigeants, c’est un cadre légal qui oblige à remplacer les vieux procédés polluants par les nouvelles technologies propres. Parlons des bénéfices engendrés par ces technologies propres et les économies d’énergie, plutôt que des dépenses nécessaires pour protéger l’environnement. Ce sont des investisseurs en quête de rentabilité qu’il faut intéresser, pas des donateurs résignés. Montrons que les avantages d’une transition énergétique propre toucheront déjà la génération actuelle, pas seulement les générations futures, et que les bénéficiaires seront autant les consommateurs que les industriels et les politiciens qui l’auront promue. Les villes du futur seront grandes, parce rien ne pourra entraver leur expan- sion, mais elles pourraient être propres, si nous comprenons assez vite que l’efficience énergétique représente un nouveau marché mondial, une nouvelle révolution industrielle.82 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
“ L’INTELLIGENCERUBRIQUE DE NOM Inventer ÉCONOMIQUE EN DIRECT ” www.agefi.com/abo 10 parutions 6 parutions 6 parutions 11 parutions 2 parutionsEncarté dans L’Agefi Kiosque / Abonnement Kiosque / Abonnement Kiosque / Abonnement AbonnementOffre découverte 1 mois au prix de CHF 29.-Accès numérique à L’Agefi quotidien (parution du lundi au vendredi)+ Inclus Indices, Agefi Magazine, Agefi Life, Agefi Immo et Work+ Inclus l’ensemble de nos publications sur App IpadRecherchez: agefi-geneveIndiquez code promo: AQ_Tribune N°128 Décembre 2015 SOCIÉTÉ DE L'AGENCE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE À GENÈVECette offre est valable toute l’année et non renouvelable. TVA et frais de port inclus. Conditions sur www.agefi.com/abo agefi.comActeurs de l’économie - La Tribune 83
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CÉCILE GALOSELVA, la réconciliatrice PORTRAIT Comprendre ANGLO-SAXONNE © Laurent Cerino / Acteurs de l’économieC’est en Angleterre que Cécile Galoselva découvreN°128 Décembre 2015 l’entrepreneuriat social. Encore naissant au début des années 2000, les initiatives pleuvent - bien plus qu’en France - ce qui l’amène à passer un MBA à l’université d’Oxford. Puis dès 2004, elle intègre Ethical Property Company. Là-bas, elle développe le principe de la location de bureaux à loyer modéré prônant des valeurs de « justice sociale et de protection environnementale » sur tout le territoire jusqu’en Écosse. Dix ans passés de l’autre côté de la Manche avant d’adapter le concept d’immobilier responsable en France avec Etic®- Foncièrement responsable. Une société installée à Vaulx-en-Velin qui emploie aujourd’hui 11 personnes, et ouvrira son sixième centre dès 2017. IDÉALISTE « Je n’étais pas très heureuse dans mes précé- dentes expériences car je ne retrouvais pas mes valeurs quelque peu idéalistes. » En quête de sens, Cécile Galoselva trouvera son bonheur dans l’économie sociale à la sauce anglaise, puis en France avec son entreprise et surtout dans ses nombreux engagements dans les réseaux d’entrepreneurs sociaux (Mouves, Entrepreneurs d’Avenir, etc.). « J’ai le souhait que toutes les éner- gies se transforment en action. Pour nous, nous ne voyons plus de compétition mais préférons les collaborations et le partage de savoir-faire. Soyons intelligent pour résoudre les problèmes de société. Et grâce à la nouvelle génération, les pratiques sont en train véritablement d’évoluer ! » ETHIQUE « Pour moi, le profit n’est pas un vilain mot, au contraire, je vois l’argent comme un moyen de développer des actions et non forcément comme une multinationale. » La finance éthique, la chef d’entreprise y croit. Avec Etic®, elle propose ainsi aux investisseurs de ses structures un placement « éthique et citoyen » avec retour sur investissement de 4 à 5 % annuel. Cette caractéristique respon- sable qu’elle décrit comme l’ « ESS 3.0 », Cécile Galoselva l’applique aussi dans la stratégie de l’entreprise puisque chaque décision repose sur le triptyque : impact économique, environ- nemental et sociétal. Acteurs de l’économie - La Tribune 85
Comprendre LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGIONFUSION RÉGIONALELES SAVOIESÉCARTELÉESENQUÊTE, DIDIER BERT Allier GenèvePassé l’étonnement du ralliement Vichy Rhône Ain Haude leur territoire à des villes Savaussi lointaines que Montluçon Clermont-Ferrandou Aurillac, les décideurs de Savoie Loire Lyonet de Haute-Savoie s'interrogent, Puy de Dôme CAPIperplexes : quel sort la fusionAuvergne Rhône-Alpes leur Vienne Isèreréserve-t-elle ? Ils ne dédaignentpas les opportunités, réelles, Saint Étiennemais comptent en premier lieusur la coopération endogène Cantal Haute loire Grenobleet avec leurs voisins de l’Est.Tandis qu’en Suisse, partenaire RÉGION AUVERGNE-RHÔNE-ALPEShistorique, l’inquiétude grandit.L’heure est à l’union régionale, Ardèche Drômemais l'application des synergiesterritoriales ne coulera pas de source. N°128 Décembre 201586 Acteurs de l’économie - La Tribune
LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGION Comprendre Lausanne De Chamonix- Mont-Blanc àGenève Aurillac, comptez six heures de Haute route, soit autant Savoie que pour se rendre à Paris Zurich ou à Trieste, à la frontière Berne entre l’Italie et la Slovénie !Lausanne SUISSE Pourtant ces deux villes ferontute L’ARC, futur Pôle métropolitain partie de la mêmevoie du Genevois français entité Auvergne- Le Grand Genève Rhône-Alpes, Savoie une des treize Pôle métropolitain de Lyon futures régions administratives, Métropole Clermont – Vichy – Auvergne mises en place après les élec- Pôle métropolitain Grenoble tions régionales Voironnais – Grésivaudan (en construction) de décembre. © Syndicat mixte de l'Arc Cette distance a contribué à susciter l’incompréhension qui avait accueilli la réforme territoriale de 2014, prévoyant le redécoupage des régions, et la fusion de l’Auvergne et de Rhône-Alpes. « La région Rhône-Alpes n’est qu’un regroupe- ment administratif et technocratique, et pas historique, martèle Hervé Gaymard, le président du conseil départemental de la Savoie. La région fusionnée Auvergne-Rhô- ne-Alpes, ce sera le pompon. » La fusion des deux régions déplace mécaniquement le centre de la nouvelle région vers l’Ouest. Alors que les métropoles de Rhône-Alpes se regroupent dans un pentagone (Lyon, Saint-Étienne, Valence, Grenoble, Pays de Savoie), la future région ouvrira cetteN°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 87
Comprendre LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGION« Nous voulons garder les centres de Denis Varaschin voitdécision chez nous pour pouvoir gérer une tendance naturelleles enjeux de près », insiste Hervé Gaymard. des milieux économiques et académiques des Savoies à se rapprocher de la Suisse.© DR © Yannick Perrin futur exécutif régional aura intérêt à utili- représente la moitié du PIB de la Savoie.figure géométrique sur un large flanc ser ce qui existe plutôt que de détruire et de Rien qu’en hiver, le chiffre d’affaires duouest. refaire », poursuit-il, en misant sur une tourisme dans les deux Savoies s’élève àÀ la fusion s’ajoute la mise en œuvre de délégation de compétences économiques plus de six milliards d’euros.la loi sur la Nouvelle organisation ter- régionales en direction des départements Et c’est bien pour soutenir ce secteurritoriale de la République (NOTRe) au savoyards. vital que les deux départements ont créé1er janvier 2016, dont les conséquences une marque commune : Savoie Montinquiètent en Pays de Savoie. « Seules LE REGROUPEMENT DES FORCES Blanc Tourisme (SMBT), une associationles régions pourront consentir des aides La fusion régionale représente un dan- qui regroupe les efforts de marketing,aux entreprises, alors que jusqu’à présent, ger pour les Savoies, renchérit René Nan- de communication et de promotion. Etc’est nous qui le faisions », souligne Hervé tua, président d’honneur de Thésame et qui prétend conserver ses prérogatives,Gaymard. En Pays de Savoie, les dépar- ancien directeur du pôle de compétitivité malgré le transfert des compétences entements sont depuis longtemps aux Arve-Industries. « Mieux représentées au tourisme à la région en vertu de la loimanettes en matière d’aménagement conseil régional, les métropoles prennent NOTRe… « Auvergne-Rhône-Alpes n’est paséconomique. La Savoie est actionnaire davantage de poids. Or nous n’avons aucune une destination touristique comme la Bre-majoritaire de stations de renommée métropole dans nos départements. Le risque tagne ou l’Alsace », glisse Vincent Rolland,mondiale, telles que Courchevel et Val- est de ne plus faire entendre notre voix. » coprésident de SMBT, qui ne souhaite pasThorens. Ce schéma ne devrait pas être La réponse des Savoies pourrait bien se une communication touristique sous laremis en cause par l’application de la loi situer dans le droit prolongement de la bannière régionale. Il attend de la futureNOTRe. Par contre, que restera-t-il des stratégie commune mise en place depuis région qu’elle offre de nouvelles possibi-possibilités d’intervention du dépar- la création de l’Assemblée des Pays de lités aux destinations territoriales pourtement sur ses zones d’activité écono- Savoie (APS) en 2001. Aujourd’hui, cet communiquer leurs offres. « Aujourd’hui,mique ? « Nous voulons garder les centres établissement public regroupant les nous manquons de moyens financiers pourde décision chez nous pour pouvoir gérer les élus des deux départements ne dispose aller sur les marchés étrangers », indique-choses de près, insiste Hervé Gaymard. Le que d’un budget guère supérieur à 2 % t-il. L’appellation « Savoie Mont Blanc » de ceux des deux conseils départemen- a aussi été retenue par l’Université de88 Acteurs de l’économie - La Tribune taux. Mais l’APS mutualise déjà certaines Savoie, quand elle s’est renommée « Uni- compétences telles que la culture et le versité Savoie Mont Blanc » (USMB) au patrimoine, l’enseignement supérieur, début de l’année 2015. Tout comme les la recherche et le développement écono- business angels des deux départements mique, l’agriculture, la forêt et l’environ- avaient choisi l’appellation « Savoie Mont nement, etc. Mais aussi le tourisme, un Blanc Angels » comme nom commun lors pilier de l’économie locale : ce secteur de leur fusion. N°128 Décembre 2015
RUBRIQUE DE NOM ComprendreProfessionnels de la montagne Nos chargés d’affaires vous accompagnent au quotidienen basse comme en haute saison*. Présence permanente dans les stations : • Carroz d’Araches • Morzine, les Gets, Châtel • Chamonix • Moûtiers, Val Thorens, Méribel, Courchevel • Bourg-Saint-Maurice, Val d’Isère CIC Lyonnaise de Banque - RCS Lyon - SIREN 954 507 976. N°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 89* Pour connaître les jours et horaires d’ouverture, consultez cic.fr cic.fr
Comprendre LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGION Les dotations VERS UNE COOPÉRATION Si les outils d’intervention doivent être financières affectées pensés au niveau de la région, leur uti-au développement des RENFORCÉE lisation doit être déléguée aux zones derelations économiques Et c’est cette appellation qui pourrait proximité, poursuit-il. « Il faut disposer bientôt regrouper les forces des deux de relais locaux, sinon cela ne fonctionne avec la Suisse, Savoies en matière de développement pas », assure-t-il, fort de l’expérience des partenaire stratégique économique. « La logique serait d’harmo- business angels qui ont appris à travailler niser nos outils d’attractivité économique en réseau au niveau régional. La coordi- des Savoies, dans un Savoie Mont Blanc Économie », nation régionale, qui regroupe 11 asso- avance Hervé Gaymard, également pré- ciations régionales de business angels, a seront-elles sident de l’Assemblée des Pays de Savoie. sélectionné les bonnes pratiques, conden- sacrifiées « Savoie Mont Blanc Économie est déjà sur sées dans une charte de fonctionnement. au profit les rails », annonce-t-il, prévoyant une Ce document est devenu la référence de concrétisation au début de l’année 2016. chaque structure locale, qui elle-même des territoires Cet outil économique commun pourrait l’utilise pour mieux aider son territoire. « pauvres» être utilisé pour gérer des compétences « Lorsque tout le monde travaille avec les d'Auvergne économiques déléguées par la région aux mêmes outils et la même méthode, c’est plus départements savoyards ou à un dépar- facile de se comprendre et de trouver des Rhône-Alpes ? tement savoyard unique. Promoteur de synergies. La méthodologie d’instruction de la fusion des deux départements, Hervé nos dossiers est la même. » Cette coopéra- Gaymard indique que des études seront tion bénéficie désormais aussi aux inves- menées en matière d’endettement, de fis- tisseurs auvergnats, puisqu’Auvergne calité et d’organisation administrative, Business Angels a rejoint la coordina- afin d’identifier le meilleur scénario entre tion régionale en juin dernier. Un signe le renforcement des compétences de l’APS que la fusion régionale peut créer des et la fusion des deux départements. « Les synergies ? deux Savoies doivent être cohérentes et unies pour peser dans ce grand ensemble », affirme ROBOTIQUE COMPLÉMENTAIRE l’élu. Si les deux exécutifs départemen- Dans d’autres domaines, à la pointe de la taux décident de fusionner, il leur fau- recherche, des complémentarités pour- dra l’aval de l’État. Mais la grande région raient aussi émerger plus facilement Auvergne-Rhône-Alpes, elle, n’aura pas avec cette fusion régionale. « Nous avons son mot à dire. Un département fusionné beaucoup de choses à développer entre l’Au- demeurerait au sein de la région, précise vergne et Rhône-Alpes, s’exclame André Hervé Gaymard. Montaud, directeur général de Thésame, Alors que les politiques savoyards réflé- le centre de compétences spécialisé en chissent à développer la coopération mécatronique-robotique. Il existe une entre leurs départements, les acteurs éco- vraie complémentarité entre les deux régions nomiques ont eux-mêmes dessiné leurs en robotique. » La distance géographique propres cartes géographiques. Dans les entre les confins est et ouest de la future nouvelles technologies, les Vallées du région ne doit pas faire oublier que, par numérique – basée à Annecy – et Digital temps clair, on voit le Mont-Blanc depuis Savoie se concertent régulièrement avec le Puy-de-Dôme, illustre l’ingénieur. Digital Grenoble, labellisée French Tech. L’Auvergne dispose d’acteurs de haut En octobre, le ministère de l’Économie, niveau en robotique mobile, comme les de l’Industrie et du Numérique a même véhicules dédiés à l’agriculture, alors que reconnu l’appellation commune French Rhône-Alpes est spécialisé dans le robot Tech in the Alps, qui doit permettre de fixe, utilisé dans l’industrie, détaille fédérer les efforts déployés dans la pro- André Montaud. Chaque région a son motion des startups des trois territoires. propre pôle de compétitivité actif en Hors de ce réseau tripartite, des contacts robotique : Viaméca et Mont-Blanc Indus- existent avec les métropoles French tries. La recherche n’est pas en reste avec Tech de Lyon et de Saint-Étienne, confie l’université Blaise-Pascal de Clermont et Audrey Ghozael, déléguée générale des l’Institut national de recherche en infor- Vallées du numérique. « Mais nous n’avons matique appliquée (Inria). Et l’Auvergne, pas de contacts avec des acteurs auver- c’est aussi Michelin, avec son potentiel de gnats », ajoute-t-elle. robotisation de la production, encore lar- Cette approche coopérative entre ter- gement réalisée manuellement, qui pour- ritoires de proximité est une condi- rait ouvrir des perspectives aux acteurs tion nécessaire à l’efficacité de la future régionaux de la robotique. Et lorsqu’on grande région, affirme Dominique lui demande en quoi la fusion régionale Favario, président de Savoie Mont pourrait accélérer le secteur robotique, Blanc Angels, également président de la André Montaud rappelle que les moyens Coordination régionale Rhône-Alpes. N°128 Décembre 201590 Acteurs de l’économie - La Tribune
LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGION Comprendreà mettre en œuvre dans ce domaine sont tourné vers la Suisse est l’USMB, qui a Populationtrès élevés : « Cela nous simplifiera la tâche engagé des discussions avec la Haute Pays de Savoie :dans le montage de projets. Et les actions école spécialisée de Suisse occidentale 1 177 000 habitants,menées serviront à une base d’entreprises (HES-SO) en vue de mettre en place des soit 15 % de la région Auraplus importante, ce qui contribuera à une plateformes thématiques, voire d’adopter (7 695 000 habitants)meilleure efficacité de l’argent public. » un logo commun. Des actions partagées Aires urbaines en formation continue sont aussi prévues Lyon : 2 214 000 habitantsLE REGARD TOURNÉ VERS L’EST avec l’Université de Genève. « Les milieux Chambéry-Annecy-Genevois français :Il n’en reste pas moins que si tout reste économiques et académiques ont le souhait 731 000 habitantsà construire avec une Auvergne éloignée de travailler ensemble dans les deux pays, Grenoble : 680 000 habitantsà l’ouest, la Savoie et la Haute-Savoie souligne Denis Varaschin, président de Saint-Étienne : 513 000 habitantssont habituées depuis longtemps à col- l’USMB, qui voit une tendance naturelle à Clermont-Ferrand :laborer avec leurs partenaires proches se rapprocher de la Suisse, voire de l’Italie 470 000 habitantsde l’Est. Et la plupart des projets à venir du Nord. En Suisse et en Savoie, nous parta- Géographiesont bien tournés vers la Suisse voisine, geons le même pragmatisme. Nous construi- Pays de Savoie : 10 416 km2,plutôt que vers l’Auvergne. Par exemple, sons des projets ensemble, créons des liens soit 15 % de la région Aurale Grand Genève rassemble 212 com- d’amitié dans une relation de proximité qui a (69 711 km2)munes françaises et suisses (dont le syn- un rôle considérable. »dicat mixte de l’ARC qui regroupe 120 Qu’adviendra-t-il de cette proximité alorscommunes françaises du Grand Genève, qu’un pôle régional universitaire se tissesituées sur les départements de l’Ain et sur l’ensemble de la région Auvergne-de la Haute-Savoie. Il évoluera en pôle Rhône-Alpes, sous la forme de l’Alliancemétropolitain en 2017) – constitue la de l’Université Rhône-Alpes (Aura),seconde agglomération de Rhône-Alpes, visant à renforcer le partenariat entre lesderrière Lyon, et la seconde aggloméra- établissements régionaux ? « Les structurestion de Suisse, derrière Zurich –, pour les plus efficaces ne sont pas les plus grandes,œuvrer à l’amélioration de la qualité de estime Denis Varaschin. Ce sont cellesvie de cette agglomération à cheval sur de tailles petite ou moyenne, vivant dansdeux pays. Un autre acteur résolument des réseaux, et disposant ainsi de moyensN°128 Décembre 2015 Acteurs de l’économie - La Tribune 91
Comprendre LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGION La Savoie est actionnaire majoritaire de stations de renommée mondiale, telles que Courchevel. © Rètoimportants. Et c’est bien la qualité de la for- LA PROBLÉMATIQUE FRONTALIÈRE craignons une perte de connaissance de lamation qui leur permet de marcher sur leurs Sur le plan économique, la Suisse est un spécificité frontalière », explique Jean-Fran-deux jambes. » Quand on lui demande de partenaire considérable pour les Savoie. çois Besson, le secrétaire général duregarder plus à l’ouest, le président uni- « La Suisse est un vrai poumon pour l’éco- Groupement transfrontalier européen,versitaire observe que l’USMB a « peu nomie de la Haute-Savoie, souligne Pas- qui regroupe 60 000 travailleurs fron-de relations avec les universités et les éta- cal Marchetti, directeur général de la taliers. Le responsable connaît déjà lesblissements clermontois… Peut-être pour- Banque Populaire des Alpes. Ce n’est pas inconvénients d’une vision éloignée de larions-nous collaborer davantage avec eux sur un gadget. C’est une réalité économique et zone frontalière. « À Paris, on nous dit déjàle thème de la montagne ? », esquisse-t-il. sociale. » Comment cette réalité sera-t- que nous n’avions pas besoin d’aides puisque elle perçue dans l’Allier et dans le Cantal, la région frontalière a un des plus faibles taux« Cette grande quand il faudra contribuer au finance- de chômage en France, rapporte Jean-Fran-région facilitera ment d’infrastructures de transport en çois Besson. Quand il faudra expliquer les-t-elle le rebond région frontalière, afin de soutenir l’ac- problématiques du logement en zone fronta-des territoires tivité économique dans le Genevois ? lière à un représentant du Cantal, on ne sera Acceptera-t-on d’investir dans un terri- pas du tout sur les mêmes problématiquesou bien nivellera-t-elle toire riche ? Bien plus riche que d’autres que celles qu’il rencontre sur son territoire. »les atouts territoriaux ? » zones de la grande région Auvergne- Le secrétaire général du Groupement Rhône-Alpes ? « Cette grande région faci- transfrontalier européen craint également92 Acteurs de l’économie - La Tribune litera-t-elle le rebond des territoires ou bien que la fusion régionale diminue encore nivellera-t-elle les atouts territoriaux ? » la réactivité de la collectivité dans son résume Pascal Marchetti. Du côté des tra- intervention économique, lui qui sait que vailleurs frontaliers, l’inquiétude est de les Suisses confient la compétence écono- mise. Ils sont près de 100 000 résidents mique à leurs cantons. de la Haute-Savoie à gagner leur vie en Suisse. Et à bien la gagner : leur salaire N°128 Décembre 2015 médian s’élève à 6 500 francs suisses – soit autant en euros. Mais l’élargissement de la région sème le scepticisme. « Nous
UNION RÉGIONALE Comprendre Venez tenterl’expérience en Haute-Savoie !Rejoignez une terre d’innovation et de talents, Direction de la Communication Institutionnnelle / Départemental de la Haute-Savoie. Photo : © Dep74 - T. Shusur un site naturel exceptionnelPôles de compétitivité et centres d’innovation, proximité de Genève,infrastructures routières et dispositifs alternatifs à la voiture, espaces naturelssensibles, vue imprenable sur le Mont-Blanc, sports outdoor, vie culturelle,soutien aux équipements jeunesse et petite enfance,le Département participe à l’attractivité et au dynamisme de la Haute-Savoie !N°128 Décembre 2015 hautesavoie.fr Acteurs de l’économie - La Tribune 93
Comprendre LES SAVOIES DANS LA NOUVELLE RÉGION Le Conseil d'état du Ces mêmes Suisses que Jean-François ALOURDISSEMENT canton de Genève Besson décrit « un peu inquiets ». « Dans EN VUE les réunions transfrontalières, vous avez un mettra-t-il à Suisse, représentant du canton, et face à lui, des Les premiers e ets de la fusion exécution sa représentants du département, du préfet, de la régionale pourraient être plus menace de ne région… qui se passent tous la patate chaude limitants que créateurs de syner- plus verser les quand personne ne veut traiter le dossier ! » gies. Ainsi, le changement de 230 millions Inquiets les Suisses ? Il suffit de lire l’in- périmètre risque de compliquerd'euros de fonds terview de François Longchamp, pré- la tâche de certains acteurs, le frontaliers ? sident du Conseil d’État du canton de temps que la future collectivité Genève, accordée au début de l’année à régionale prenne ses marques. l’hebdomadaire Le Messager. Le respon- « La mise en œuvre sera sans sable politique brandit la menace de ne doute longue et compliquée, plus verser les fonds frontaliers – 230 prévient Patrick Eveno, direc- millions d’euros en 2014, soit le tiers teur de Citia, la cité de l’image en du budget de la région Auvergne — qui mouvement, basée à Annecy. Cela contribuent à financer les infrastructures risque de gripper certains dispo- des communes françaises où résident les sitifs de la région. » Pour autant, travailleurs frontaliers. « Quand on voit que il ne se montre pas inquiet quant les départements sont amenés à disparaître, à l’avenir. « Cela ne changera et que la région de référence, Rhône-Alpes, rien pour le Festival international va fusionner avec une Auvergne plus modeste du film d’animation d’Annecy ni et en déclin, nous sommes inquiets. Si nous pour le Marché international du n’avons pas la certitude que les sommes film d’animation. Cela peut même importantes reversées par Genève sont pré- favoriser les possibilités de travail- cisément utilisées à ces fins de voisinage, ler avec des acteurs auvergnats évidemment nous mettrons fin à cet accord. que nous connaîtrions mal. » Il s’agit de construire des infrastructures à Reignier et Annemasse, pas de déneiger les volcans d’Auvergne. » CCI RHÔNE-ALPESRéalisation : CCI de région Rhône-Alpes / Direction de la Communication - Illustration : © opolja / fotolia.com - Novembre 2015 Appui aux entreprises N°12803D/1é1c/e20m1b5re120:02915 10 000 BONNES RAISONS DE VOUS FIER À VOTRE CCI Développement commercial, appui en matière d’innovation et de compétitivité, accompagnement à l’export, recherche de financements, intelligence économique… les Chambres de Commerce et d’Industrie sont au service des entrepreneurs. Chaque année, plus de 10 000 entreprises de Rhône-Alpes sont conseillées et accompagnées dans leurs projets de développement par le réseau régional des CCI. Au service des entreprises et des territoires, la Chambre de Commerce et d’Industrie de région et les 11 CCI territoriales de Rhône-Alpes s’activent pour faire avancer toutes les envies d’entreprendre.94 AAPcAtceteuurrss ddeell'e’é́coco19n0oxm11i9e,5-.inLdadTr1ibune
RUBRIQUE DE NOM ComprendreRencontrons-nous au SIMI Salon de l’immobilier de l’entrepriseau palais des congrès à Paris du 2 au 4 décembre #ChambéryGrandLacUn territoire, quatre espaces dédiés à l’innovation, un cadre de vie PHOTEC / CHAMBÉRY MÉTROPOLE LAURENT MADELON PHOTEC / SAVOIE TECHNOLAC SAVOIE HEXAPOLECASSINE ALPESPACE SAVOIE TECHNOLAC SAVOIE HEXAPOLEInnovations technologiques Ingénierie et aménagement Pôle d’excellence Pôle d’excellence dédié àet sociétales. de la montagne Énergie et Réseaux l’outdoor et au bien-êtreLes partenaires : Chambéry métropole, Grand Lac (nouveau nom de la Communauté d’Agglomération du Lac du Bourget), Coeurde Savoie, Métropole Savoie (Syndicat mixte en charge du SCOT), les Syndicats mixtes gérant des parcs d’activités économiques(SNa°v12o8ieDTéececmhbnreo2la01c5, Savoie Hexapole, Alpespace), ainsi que l’Agence économique de la Savoie. Acteurs de l’économie - La Tribune 95 CONTACT@CHAMBERYGRANDLAC.FR
Comprendre RUBRIQUE DE NOM Formations sur mesure, mécénat, chaires ou contrats de recherche, participation à la définition du contenu pédagogique : l’entreprise pousse grand les portes de l’enseignement supérieur. Les partenariats entre grandes écoles et entreprises se multiplient et ne se limitent plus aux terrains de stage et aux missions de recrutement. Face à l’apparition de nouveaux enjeux (génération Y, transfor- mation digitale, etc.), ces partenariats dépoussièrent l’image traditionnelle de l’enseignement supérieur à la française, avec, à la clé, des accords qui se veulent gagnants-gagnants. Notamment pour les étudiants.96 Acteurs de l’économie - La Tribune N°128 Décembre 2015
RUBRIQUE DE NOM ComprendreÉCOLES-ENTREPRISESPARTENAIRES PARTICULIERSDOSSIER, MARIE LYANN°128 Décembre 2015 Linkedin est venu présenter son programme de forAmcatetiuornssde l’économie - La Tribune 97 aux étudiants de Grenoble école de management. © DR
Comprendre ÉCOLES-ENTREPRISESfin d’assurer l’employabilité de leurs étudiants dans un contexte des entreprises. Selon Agnès Brandy, directrice de la relationinternational de concurrence accrue, mais aussi pour diversifier commerciale et entreprises à GEM, l’école cultive près de 300leurs sources de financement, les établissements d’enseignement partenariats, sous différentes formes : recrutement, pédagogie,supérieur opèrent des rapprochements de plus en plus étroits recherche, formation continue. « Si toutes les portes d’entrée fonc-avec le monde de l’entreprise. En témoigne la présence croissante tionnent, celle du recrutement représente encore 60 % des demandesd’entreprises au sein des comités pédagogiques : à l’Inseec de de premier contact. »Chambéry, des professionnels participent au comité de sélec- Alain Asquin, vice-président de l’université Jean-Moulin Lyon 3,tion des étudiants pour identifier les pépites de demain, tandis se refuse quant à lui à les compter : « Ce que je regarde, c’est leurqu’à l’IAE Lyon, un comité réunissant les délégués généraux des qualité et le fait que ces partenariats deviennent de plus en plus glo-branches d’activités économiques a été constitué pour adapter au baux. Car pour faire face aux défis actuels, les entreprises doivent semieux l’offre de formation. « Ce sont parfois les entreprises qui nous repenser elles-mêmes. L’université est un espace de réflexion bienveil-demandent d’insister sur les compétences qui, demain, deviendront lant, où l’on réfléchit sans regarder la montre. » Selon lui, la dicho-clés », souligne Philippe Kopcsan, directeur du campus Alpes tomie entre universités et entreprises est révolue : « Si nous avonsSavoie de l’Inseec. À Grenoble École de Management (GEM), cer- longtemps considéré que le savoir ne devait pas être finalisé par rapporttains diplômes, tel le master big data, sont nés sous l’impulsion à un besoin, l’université doit former des jeunes capables de s’intégrer dans le marché du travail. » Alexandre de Gmeline, chef du service98 Acteurs de l’économie - La Tribune développement des ressources humaines du Crédit Agricole Sud- Rhône-Alpes, constate que les universités et écoles se profession- nalisent : « C’est devenu une question de survie. Si nous sommes à la recherche de talents, elles aussi. » STARTUPS ET PME : ÉTABLIR LA RELATION Pour structurer ces échanges et rendre leur offre plus lisible, les écoles ont créé des directions entreprises ou de l’innovation, chargées des contrats de développement, des dispositifs de thèse Cifre, des plans de formations ou encore de l’intervention de professeurs en entreprise. « Lorsque les chefs d’entreprises nous contactent, ils s’attendent à trouver une transversalité des pratiques N°128 Décembre 2015
LA RÉPORUNBRSIQUEE DE NOM Comprendre AUX BESOINS DES ACTEURS ÉCONOMIQUESLA MISE À DISPOSITION LA FORMATIONDE COMPÉTENCES TOUT AU LONG DE LA VIEDES DIPLÔMÉS FORMATION CONTINUE■ De tous les secteurs et à tous ■ Journées de formation les niveaux de diplôme (bac+2 à ■ Formations diplômantes bac+8) ■ Certifications internationales ■ Formations sur mesure■ Issus de formations élaborées avec ■ Reprises d’études les acteurs socio-économiques CPF / CIF / PLAN DE FORMATION /D’ÉTUDIANTS PROFESSIONNALISATION sufcep-annecy@univ-smb.fr■ Avec des formules adaptées aux 04 50 09 22 50 besoins des entreprises : stages, missions, alternance, etc. VALIDATION DES ACQUIS DE L’EXPÉRIENCE (VAE) JOB DATING DE L’ALTERNANCE ET DES ACQUIS PROFESSIONNELS 26 mai 2016 / 9h - 17h ET PERSONNELS (VAPP)DES CHERCHEURS Cellule VAE/VAPP vae@univ-smb.fr■ Issus de 19 laboratoires couvrant de 04 79 75 91 77 nombreux domaines Les 7 structures de formation de l’Université■ Issus de la cellule de valorisation Savoie Mont Blanc sont habilitées à percevoir de la recherche pour faciliter la la taxe d’apprentissage : Faculté de Droit, relation entreprises/laboratoires IAE Savoie Mont Blanc, IUT d’Annecy, IUT et le transfert d’innovation de Chambéry, Polytech Annecy-Chambéry, UFR Lettres, Langues et Sciences Humaines, UFR Sciences et Montagne*. * Regroupement du Centre Interdisciplinaire Scientifique de la Montagne (CISM) et de l’UFR Sciences Fondamentales et Appliquées (SFA).Annecy-le-Vieux ■ Chambéry / Jacob-Bellecombette ■ Le Bourget-du-LacN°128 Décembre 2015 Avec le Clubdes 04 79 75 85 85 www.unAcitveu-rss dme l’ébco.nformie - La Tribune 99 You Entreprises Tube
Comprendre ÉCOLES-ENTREPRISES DES SOURCES DE FINANCEMENT NÉCESSAIRESentre nos départements », estime Alain Asquin. En contrepartie, Huit ans après la loi LRU (Libertés et responsabilités desdes fonctions de « campus manager » ou même des « directions universités) qui avait accordé une certaine autonomiedes relations écoles » voient le jour au sein des grands groupes aux universités, force est de constater que le financementpour structurer ces échanges. Mais tout l’enjeu reste de toucher de l’enseignement supérieur est encore en déséquilibre.les petites entreprises, qui représentent 96 % des sociétés rhônal- D’après un rapport présenté à la Cour des comptes à lapines, selon les chiffres de la CCI Rhône-Alpes. « Certaines ren- rentrée 2015, les universités seraient encore trop dépen-contres avec les entreprises de taille modeste ne se font pas », regrette dantes des financements publics. Et la réforme de laMarc Pérennès, responsable du pôle employabilité à EMLYON. taxe d’apprentissage ne va pas faciliter la donne, en ren-Pour y remédier, l’école de commerce va créer un « Start-up Cor- dant la collecte plus morcelée. Au Crédit Agricole Sud-ner » ainsi qu’un « Village des PME » à l’occasion de son Forum Rhône-Alpes, les 500 000 euros versés annuellementemploi, à « un tarif abordable ». dans le cadre de la taxe d’apprentissage sont redistribuésUn autre moyen de créer du lien consiste à faire intervenir les au sein des écoles partenaires : « Nous essayons de ne pasentreprises au sein des cursus, en sollicitant l’intervention de trop nous disperser, pour que les écoles continuent leurleur direction pour échanger avec les étudiants. « Cela permet à travail de qualité, car tout le monde s’y retrouve», estimela fois un partage de connaissances, une promotion de l’entreprise et le Alexandre de Gmeline, chef du service développementdébut d’un dialogue avec les étudiants », explique Philippe Kopcsan, des ressources humaines du Crédit Agricole Sud-Rhône-à l’Inseec Chambéry. La méthode revêt un avantage supplémen- Alpes. « Lorsque nous développons des actions avec unetaire pour l’entreprise susceptible de repérer de jeunes talents entreprise depuis plusieurs années, elle aura tendance àavant ses concurrentes. À l’Inseec Lyon, une grande partie du faire un choix plus sélectif lors du versement de la taxe»,major en webmarketing est enseigné par des professionnels. « Par veut croire Marc Pérennès, responsable du pôle employa-conséquent, les étudiants n’ont pas de mal à trouver un stage ! », glisse bilité à EMLYON. D’autres, comme Thierry Rolando, àSophie Fortuna, en charge des relations entreprises et des stages. l’IAE Université Savoie Mont Blanc, misent sur le volet deSi dans ces accords, les partenaires ne s’engagent pas directe- la recherche, « que n’ont pas d’autres établissements»,ment sur un nombre de places en stage, les entreprises peuvent pour se distinguer et collecter la taxe. « Nous ne sommesparfois réserver une partie de leurs offres ou les flécher sur les pas une entreprise : une bonne partie de nos dotationsprogrammes qu’elles jugent les plus adaptés. « Nous savons que viennent de l’État, mais si nous nous en contentons, nousl’évolution du nombre de stages est un indicateur de l’importance assurons tout juste notre fonctionnement», constate Alaind’un partenariat », rappelle Agnès Brandy, à GEM. Pour autant, Asquin, vice-président de l’université Jean-Moulin Lyon 3.Alain Asquin estime que « même si ce volet est en augmentation, Avec 20 % de ressources propres, l’université vise à déve-ce n’est pas forcément ce qui rend particulier un partenaire ou une lopper la formation continue et les contrats de recherchecollaboration. » et à percevoir davantage de taxe d’apprentissage. Un dynamisme forcé ?« Pour faire face aux défis Bien que la structure de leur financement ne soit pas laactuels, les entreprises même, les écoles privées sont aussi touchées et doiventdoivent se repenser elles- s’avérer créatives. À Grenoble école de Management, lemêmes. L’université est un cumul des ressources issues des entreprises (formationespace de réflexion bien- continue, alternance, participation à des chaires et pro-veillant, où l’on réfléchit jets de recherche, versement de la taxe d’apprentissage)sans regarder la montre » représente de 25 % à 33 % du budget de l’école. Même contexte à l’Université Catholique de Lyon, où 80 % desVISIBILITÉ ET RECRUTEMENT revenus proviennent de l’inscription des étudiants, tan-Présentations de métiers, présence lors des forums de recrute- dis que les dotations de l’État représentent encore 12 %.ment, business weeks et autres serious games : les occasions ne « Nous devons jouer davantage sur le mécénat, les pro-manquent pas pour rapprocher les entreprises des étudiants. grammes de recherche et les chaires, car nous ne pou-Mais le recrutement n’est pas forcément le premier objectif. Au vons pas augmenter nos frais de scolarité », estime OlivierCrédit Agricole Sud-Rhône-Alpes, priorité est donnée au déve- Frérot, vice-recteur. À EMLYON, où les financements deloppement de l’image employeur du groupe. « Parce que nous la CCI se réduisent aussi, Marc Pérennès voit dans cesrecrutons en nombre depuis l’an dernier, nous devions développer notre contraintes un moteur pour innover : « C’est l’explication duattractivité afin que les jeunes pensent à nous lorsqu’ils recherchent un dynamisme des grandes écoles. Nous devons être perfor-emploi », explique Alexandre de Gmeline. Il s’agit, selon lui, d’un mants pour attirer de nouvelles ressources. » L’école a déve-travail de longue haleine, les résultats n’étant pas de suite percep- loppé des partenariats avec des entreprises comme IBM,tibles. « Nous participons à la fois aux forums, aux job datings, ainsi qui lui ont permis de rénover un hall (rebaptisé depuis IBMqu’au parcours Ulysse qui engage une dizaine d’écoles partenaires. » Hall) en janvier dernier et de s’o rir un accompagnementCes collaborations sont essentielles pour les secteurs d’activité personnalisé vers la digitalisation. Financée par le Créditpeinant à attirer les jeunes : l’IAE Lyon a monté un salon (Sud Agricole Centre-Est, une bibliothèque de nouvelle généra-Expert) avec les professionnels de l’expertise comptable pour tion, proposant un espace de travail innovant et digitalisévaloriser les métiers du secteur auprès des étudiants. (le Learning Hub), a également vu le jour. Autre modèle, l’Inseec Chambéry se positionne davan-100 Acteurs de l’économie - La Tribune tage sur la formation continue, le développement de l’alternance et la taxe d’apprentissage, tandis que la pré- sence des entreprises à des événements (business week, job dating) ainsi que les cas apportés par les entreprises constituent des prestations gratuites. N°128 Décembre 2015
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