acteurs DE L’ÉCONOMIE SSR MALR’OCDGYHSISLAÉLNEEDDSEaudace LA NOUVELLE ANNECY révolution YVES MICHAUD opportunité BUSINESS DU HANDICAP Auvergne-Rhône-Alpes [ www.acteursdeleconomie.com ] N°135
ENTRÉE EN MATIÈRE DialoguerENTRÉE EN MATIÈREFRANÇOIS GABART‘‘L’Optimist était le nom de mon premier bateau. Cela ne s’invente pas. Bien plus qu’un nom, ce mot est celui qui me caractérise le mieux. Un état d’esprit qui a pris racine très tôt, au cours de ma jeunesse et qui ne m’a jamais quitté depuis, me guidant en mer durant une course ou sur terre lors de la construction d’un bateau. Être optimiste est un leitmotiv, une façon de voir la vie, une philoso- phie qui conduit à se dépasser et à aller toujours de l’avant. Lorsque l’on se retrouve au large, seul aux commandes de son embarcation qui avance à grande vitesse, confronté à des problèmes, une nature capricieuse, des doutes quotidiens, et des inquiétudes, car rien ne se passe comme prévu, l’optimisme permet de garder la tête haute et le sourire, de conserver la confiance en soi malgré les obstacles et les défis à relever. On doit ainsi trouver la solution au plus profond de soi-même pour avoir la force de continuer et de ne pas abandonner afin d’aller toujours de l’avant. Cela demande un e ort à la fois physique et mental. Quand je suis au milieu des océans dans un environnement extraordinaire, mais dangereux, l’optimisme est ainsi mon seul guide. C’est lui qui me donne cette espérance. En outre, lors de ces expériences, je me rends compte que seul, je ne pourrais pas être à ce niveau et m’ac- complir pleinement si je n’étais pas entouré par une équipe dont le travail est fondamental. Ces per- sonnes qui la composent me ressemblent, portent des valeurs communes et disposent de compé- tences que je n’ai pas. Elles m’apportent ainsi la substantifique moelle qui me manque et font que le projet peut se concrétiser avec la satisfaction du travail accompli. A l’image d’un dirigeant qui souhaite que son entreprise vive. Un challenge de chaque instant pour lequel l’optimisme est un formidable allié. Se plaindre serait une perte d’énergie alors que sourire permet de mieux gérer les impondérables. Être positif n’est pas un doux rêve utopique, cette force est en nous, il su t de la saisir. Elle demande néanmoins un travail de chaque instant en se fixant des objectifs, en se donnant des petits défis à résoudre qu’il ne faut surtout pas négli- ger pour en observer les bénéfices pour soi et pour les autres qui vous entourent. Ce que j’espère réussir à faire auprès de mon équipe présente à tous les stades du projet, de l’amont à l’aval d’une course. La force de l’optimisme doit enfin caractériser cet esprit d’en- treprendre et d’initiative qui anime tout entrepreneur. Cette vision, ce projet pour lequel il faut savoir construire et se donner les moyens pour parvenir à ce qu’il prenne forme. Une dimension qui, à force de travail et d’abnégation, d’obstination, et d’acharnement, peut concrétiser le projet qui nous anime. L’optimisme aide ainsi à y parvenir, à réaliser ses rêves. Le mien n’est pas encore atteint : accomplir un tour du ’’monde en solitaire, le plus vite possible, en tentant de voler au-dessus de l’eau. Un défi que je veux relever avec ceux qui m'entourent. François Gabart Navigateur et skipperN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 3
Communiqué Dialoguer RUBRIQUE DE NOM INAUGURATION LE 22 MARS 2017 Le Village by CA-Centre-est a été inauguré le 22 mars dernier en présence de plus de 250 invités. Rencontres avec Sophie Bonhomme, Maire du Village by CA-Centre-est, avec des partenaires et des startups qui travaillent au Village.Les partenairesMerci de nous dire en une phrase pourquoi vous êtes partenaire du Village by CA Centre-est ? SOPRA STERIA Le Crédit Agricole est un des grands clients de notre groupe et le concept du Village est raccord avec notre stratégie locale d’accompagnement digital de nos clients. Nous nous devions d’être partenaire et renforcer encore le tissu des entreprises d’Auvergne-Rhône-Alpes. Alexandre Bonnard LINKCITY (Bouygues Bâtiment Sud-est) Nous voulons travailler de manière innovante et notamment avec des startups. Lors des appels d’offres, nous recherchons régulièrement de nouveaux partenaires pour offrir une solution complète. Le Village va nous permettre de découvrir le monde des startups, leur façon de travailler, ainsi, nous pourrons les associer mais aussi les accompagner dans leur développement. Roseline Legrand FIDAL Pour accompagner les startups, c’est la suite logique de notre offre interne commerciale, avec une équipe pluridisciplinaire dédiée aux startups, mais aussi renforcer nos liens avec le Crédit Agricole. Et, en restant à l’écoute de l’innovation, nous pouvons proposer des solutions novatrices adaptées à nos clients.Gwladys Chanal Frédéric Storck CNR Dans une démarche d’innovation globale, un des axes stratégiques de notre entreprise est de devenir un laboratoire des énergies du futur. Nous devons innover dans tous les métiers de l’entreprise, les historiques comme les nouveaux. Nous avons besoin d’ouverture vers l’extérieur, au monde des startups, au financement et à l’accompagnement de l’innovation du territoire, et l’aménager durablement.PHILIPSPartenaire du Village de Paris, nous souhaitions être présents dans les régions, en créant un écosystèmeauprès des innovateurs :• car le Village est un environnement inspirant et innovant, place de présentation de l’innovation.• pour le partage et la collaboration entre startups et grands partenaires, aussi bien dans des secteurs privés que publics. Laurence Di Russo• pour créer une place stratégique de prescriptions innovantes et d’un écosystème relationnel.4 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
Le Village by CA Centre-est se positionne comme France. 14 sont déjà ouverts.accélérateur pour les 12 startups accueillies. Il s’inscrit Les 17 partenaires qui nous accompagnenRt aUuBjoRurIdQ’hUuEi DE NOM Dialoguerdans l’écosystème de notre territoire et se veut une sont des grands groupes nationaux, qui peuvent êtreoffre complémentaire aux nombreux incubateurs en déjà partenaires d’autres Village by CA, à Paris parrelation avec le Crédit Agricole. C’est aussi et surtout un exemple, ou bien des ETI de notre région qui souhaitentlieu de vie pour les startups et pour les partenaires du s’associer à la démarche du Crédit Agricole pourVillage, avec sa place, lieu de rencontres, de travail, et l’innovation et participer à la vie de ce Village.d’échanges. Le Village by CA Centre-est est installé dans la Grande duSoVpilhlaiegBeobnyhCoAmCmeen,trmea-eirset.Les startups peuvent installer leur bureau au Village, de Maison du Campus Crédit Agricole à Champagne aumanière permanente ou temporaire. Certaines ne sont Mont d’Or. Cet ensemble se compose d’espaces de co-pas résidentes mais, comme les habitants permanents, working, de sa place de Village, d’un auditorium de 250elles viennent régulièrement puiser des idées, places, et d’un LAB où les entreprises viennent coopérerrencontrer des gens sur la place du Village et profiter et partager leurs problématiques de transformationde conseils, d’accompagnement et d’un programme digitale.d’accélération. Cela veut aussi dire que ces startupssont, par nature, habitantes du réseau Village by CA de A très bientôt au Village !Les startupsMerci d’exprimer pourquoi avoir intégré le Village by CA Centre-est ? Romaric TILKEE Laurence Medioni Gouedard-Comte Je crois en une accélération commerciale et aux partages constructifs entre startups ; UBI TRANSPORTS SMASH mais aussi à l’écosystème Nous souhaitons Pour bénéficier du Crédit Agricole pour monter en maturité sur plusieurs d’accompagnement rassurer mes clients. sujets : l’accélération en France,et d’accélération de notre busines, mais l’accompagnement à l’international etsurtout pour être mis en relation avec Sylvain Tillon réfléchir autour de la levée de fonds. Jel’écosystème entrepreneurial de l’innovation, pense trouver mes réponses ici grâce àpouvoir échanger avec les partenaires et Mathilde Yagoubi l’écosystème du et des Villages !avec l’équipe d’expert du Village. Pour cela,le choix d’être résident s’est imposé, pour FUNDY Rudy Assalpouvoir partager au quotidien avec d’autres Le Crédit Agricoleentrepreneurs. est notre partenaire WAS LIGHT depuis la création de l’entreprise et nous Pour ouvrir les chakras, BAGUETTE ACADEMY a permis d’ouvrir dans ses murs à l’espace rien ne vaut les espaces Actuellement à l’incubateur de l’EM Lyon, éphémère notre première boutique. Notre de co-working avec j’ai vraiment découvert l’intérêt des présence au Village est la suite logique de d’autres startups innovantes ! La synergie échanges et mutualisations avec les autres notre partenariat. Je compte aujourd’hui sur avec les partenaires est très intéressante startups. Toute notre équipe vit donc au le tissu du Village, son réseau, sa dynamique pour notre activité, mais aussi pour notre Village, pour éviter la routine, et bénéficier pour nous aider pour notre déploiement développement, entre autres à l’international. de l’ouverture aux autres, pour des national et une levée de fonds. La présence de Villages en France et dans le benchmarks, développer son ADN, échanger monde nous permet également d’avoir des et découvrir des nouveautés. Le Village est espaces à disposition pour travailler partout. un vrai support de développement grâce à ses partenaires en AFYREN Nicolas Sordet France et dans le Notre activité est dans l’économie circulaire, la valorisation des Monde. déchets à majorité d’origine agricole. Travailler avec le Crédit Agricole a donc un vrai sens. Après avoir été résident du Village Emmanuel Tertrais parisien, qui nous a permis d’acquérir une notoriété importante, nous avons souhaité nous rapprocher de la clientèle et de l’écosystème du Rhône. Nous apprécions également la taille humaine de ce Village.N°135 Mai 2017 Découvrez le Village by CAcAteuCrsednetl’réeco-neosmtie - La Tribune 5
Dialoguer RUBRIQUE DE NOM ENTRETIEN, DENIS LAFAY YVES MICHAUD PHOTOGRAPHIES, HAMILTON / RÉA N°135 Mai 20176 Acteurs de l’économie - La Tribune
RUBRIQUE DE NOM Dialoguer“ RÉ-VO-LU-TI-ON ! ”N°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 7
Dialoguer YVES MICHAUD « Le système est à bout. » Yves Michaud produit st-elle celle de la démocratie ? « Ce n’est un examen implacable de la société et même de la civilisation pas certain », estimez-vous (Citoyenneté contemporaines, auscultées dans le prisme d’une citoyenneté et loyauté, Kéro). Celle de l’identité ? « Ce qu’il estime défigurée par l’accumulation de manquements, de n’est pas certain non plus. » Celle de la lâchetés, d’inconséquences plus ou moins sournois et délibérés, citoyenneté ? « C’est une certitude. » Laplus ou moins visibles et cyniques. Cette citoyenneté que fondent crise est partout, mais c’est celle de la citoyenneté qui concentre, à vos yeux, la loyauté et le serment, le philosophe déplore qu’elle cède l’essentiel des maux et de l’enjeu socié- sous les coups insidieux d’une déliquescence acceptée, taux, et même civilisationnels. Quels sont l’origine et les symptômes de cette crise ? d’une soumission concédée qui s’expriment (presque) partout : Quels périls sécrète-t-elle ? dépérissement des élites politiques et intellectuelles, laxisme La « crise de citoyenneté » que traverse protéiforme, autorité lézardée, victimisation triomphante, notre temps est effectivement plus aiguë que les crises de la démocratie et de l’iden- aseptisation de la liberté d’expression… par la faute desquels la tité. Parce qu’elle met en jeu et surtout en considération et l’appropriation du fragile équilibre des droits cause les fondements même du vivre-en- semble, qui font la communauté politique. et des devoirs vacillent. Ainsi l’État de droit défaille « parce que Aujourd’hui, les citoyens n'ont plus le l’État-guichet s’est substitué à l’État-providence », l’incivisme sentiment de partager une même commu- meurtrier prospère « parce que l’incivisme mou est toléré », les nauté. Et l’origine, la raison premières de ce constat résident dans la composition figures populistes brillent « parce que les racines et les des programmes et des actions publics publics de leur consécration ont été méprisés », la démocratie qui, particulièrement depuis l’accession de de citoyenneté se disloque « parce que les systèmes éducatif Jacques Chirac en 1995 à la présidence de et fiscal se décomposent », le vivre-ensemble s'érode « parce la République, relèvent de logiques pure- que l’organisation de la société est toute entière catégorielle »… ment catégorielles. Une fois le moment L’identité républicaine se délite, elle est même en grand danger, électoral passé – qui porte le phénomène alerte l’ancien directeur de l’École nationale des beaux-arts de à son paroxysme –, que constate-t-on ? Paris conscient du « choc » que peut susciter sa stigmatisation Un éventail de propositions, de compen- du substrat idéologique de l’islam ou de la vague migratoire en sations, de dispositifs, de lois adaptés à Europe. Rétrograde ? Visionnaire ? Conservateur ? Provocateur ? chaque catégorie de personnes : fonc- tionnaires – d’État, de la filière hospita- Courageux ? L’exploration intellectuelle et sociologique lière, des collectivités territoriales… –, d’Yves Michaud ne résulte pas « que » d’un raisonnement enseignants, professions libérales, jeunes, et de convictions endogènes ; elle se fonde empiriquement, N°135 Mai 2017 dans les faits, dans la confrontation au réel qu’assure son expérience de l’enseignement dans un collège des Hauts-de-Seine. Voilà pourquoi sa parole ébranle. Et crédibilise son exhortation révolutionnaire.8 Acteurs de l’économie - La Tribune
YVES MICHAUD Dialoguerretraités, chômeurs – de courte, moyenne, nombre de fonctionnaires coûte cher non du XVIIIe siècle auquel j’ai consacré unelongue durées… –, travailleurs pauvres, seulement directement, mais aussi indirec- grande partie de mon existence, etc.habitants des banlieues classées « diffi- tement via l’excès de soins qu’il convoque. Mon identité, votre identité, l’identité deciles », etc. À force d’apporter une offre En effet, plus l’offre sociale grandit, plus chacun est par essence formidablementspécifique à chaque catégorie, on atomise le nombre de personnes appelées à l’exer- diverse, formidablement dense, formida-la communauté humaine et politique, on cer grandit, plus la nécessité de les occu- blement complexe parce qu’elle est l’im-segmente puis on enferme la population per grandit, plus les besoins d’être assisté brication d’une multitude d’identités ; ordans des cloisonnements, alors on encou- grandissent… Une mécanique folle et plus la mondialisation « contamine » lesrage chaque membre de chaque catégorie sans fin, une diffusion effrénée de « care » pans de notre existence, plus nous prenonssociale à jalouser les particularismes des qui a pour nom « bureaucratie » et que conscience de cette diversité, et plus alorsautres catégories, in fine on légitime donc l’administration scolaire illustre particu- nous sommes en peine de définir ou deles postures de victimisation. En effet, cha- lièrement. Elle-même tentaculaire et mala- circonscrire une, notre identité. Certes,cun apparaît – ou plutôt se pense – « vic- divement centralisatrice, elle se consacre à comme l’illustre le secteur de l’hôtellerietime » de quelque chose ou de quelqu’un, créer des obligations et conséquemment à qui propose une offre quasi similaire dec’est-à-dire de ce qui caractérise, privi- susciter l’appât du soin puis à justifier les Shanghai à Buenos Aires, les outils suscep-légie, embellit le fonctionnement de ces dispositifs ad hoc. Halte à la prolifération tibles d’aplanir ou d’égaliser les différences« autres » catégories. métastatique de l'État ! Y compris dans ses d’identités révélées par les disparités géo-L’origine de ce mal est lointaine et plurielle. manifestations paraétatiques, c’est-à-dire graphiques, culturelles, cultuelles neDeux causes fondamentales émergent. dans la délégation de ses compétences aux manquent pas. Toutefois, ils ne sont pasEn premier lieu la lente transformation associations – notamment d’aide sociale ou suffisants pour effacer la force des leviersde l'État-providence en État-guichet. La de santé – copieusement subventionnées. d’identité locale. Et c’est notamment là, enprovidence pour tout le monde est devenue Dans le sillage de ce constat, deux autres affirmant que l’identité est exclusivementun guichet pour chacun, et ce mouvement phénomènes sont à considérer – qui d’ail- politique, que l’on commet la plus lourdede transformation catégorielle de l’État a leurs le consolident. A force de profiter des erreur. « Les identités sont en danger »,écarté ce dernier de sa vocation première : compétences de l’État-providence, d’au- « reconstruisons les identités »… que n’en-servir l’intérêt de toute la communauté cuns au sein de la population s’assimilent tend-on pas comme ineptie ! Les identi-républicaine plutôt que celui de chacune à des « petits Dieux » auxquels ce welfare tés ne sont pas seulement politiques maisdes catégories qui la composent. Ainsi, au state francisé doit, sans limites. D’autre elles ne doivent pas contaminer le champlieu de demeurer le socle assurant univer- part, et qui prend racine dans les années politique.salité, équité, justice, l’État s’est lézardé, se 1990 marquées par la disparition du com-muant peu à peu en producteur de par- munisme, l’effacement de la guerre froide, Comment l’état du monde : formidable-ticularismes qui compartimentent, frac- l’espoir d’une démocratie universelle, ment mondialisé, décloisonné, inter-turent et donc désunissent la société. La l’aspiration à un monde multipolaire, le dépendant, uniformisé, instantané,générosité de l’État n’est plus au service de mythe trompeur des ONG et autres justice déstructuré, marchandisé, mobile boule-tous, elle se morcelle au profit des groupes ou tribunaux internationaux, se sont peu à verse-t-il l’identité ?d’individus. En second lieu, la crise de peu imposées une sorte d’idéalisme aussi Qu’elle porte sur les échanges commer-citoyenneté prend sa source dans un inepte que dangereux, une utopie cosmo- ciaux, le tourisme, la finance, la consom-éclatement multiple : ethnique, religieux, politique aussi mensongère que délétère, mation, les technologies ou encoreprofessionnel, familial, résultant d’une qu’a incarnées mieux que personne le plus l’enseignement, la mondialisation formemobilité protéiforme et en réponse auquel incompétent et le plus néfaste Président de un mouvement incontestable. Mais unil manque cruellement un sens de la com- la République que la France ait connu sous autre mouvement tout aussi incontes-munauté républicaine. la Ve République : Jacques Chirac. Lors- table est celui de la (re)localisation. Nous qu’on se souvient de l’opportunité, histo- sommes à la fois de plus en plus mondia-Concession, répression, soin : voilà l’éven- rique, que la victoire inespérée de 2002 lisés et de plus en plus localisés, illustranttail de vos réponses à l’incivisme, symbole lui offrait d’engager la France dans une ainsi le terme désormais largement usité,du déclin de la citoyenneté. Toutes ont réforme radicale, courageuse, profonde, on de glocalité. Pourquoi nombre d’entre-pour point cardinal justement cet État – ne peut qu’être en colère. prises dites internationales peinent tantde droit, « providence »… – dépérissant. à mettre en œuvre le principe d’« intel-Sont-ce la nature de ses prérogatives ou La citoyenneté, c’est disposer des droits ligence culturelle », c’est-à-dire à mettresa manière d’exercer l’autorité qui le dis- civils et politiques dans une communauté en harmonie, en sympathie, en symbiosequalifient ? Tout comme l’avocat pénaliste politique donnée. La crise de citoyenneté même les intelligences issues du mondeEric Dupond-Moretti fustige le dogme de ne peut donc pas être disjointe de celles entier qui composent le corps social ? Parcela victimisation dans le domaine de la jus- d’identité et de démocratie. Qu’est-ce que les identités demeurent très locales,tice, l’État est-il allé « trop loin » dans la que l’identité ? et elles s’imposent à la nécessité suprêmeconsidération du care, de la bienveillance, L’identité constitue un sujet d’étude émi- de s’accorder entre et avec toutes. Essayezde la sollicitude – dénoncée dans votre nemment complexe, malheureusement de faire collaborer un ingénieur indienessai Contre la bienveillance ? maltraité par les raccourcis, les incom- avec un homologue russe, un gestionnaireEn France – ce qui le distingue de la plu- pétences ou même les détournements. arabe et une consoeur brésilienne… Etpart des autres pays européens et même Nationale, linguistique, libidinale, affec- cette réalité corrobore un constat sociolo-occidentaux –, l’État est tentaculaire. Il tive, religieuse… l’identité englobe une gique et même anthropologique extrême-rayonne, ramifie, domine dans un nombre multitude de réalités, de situations, de ment intéressant, qui met en lumière lesexcessif de domaines. Or, lorsqu’il y a concepts. Et chaque individu est lui-même incohérences, et même les écartèlements« trop d'État », ledit État a pour préoccu- la juxtaposition, ou plutôt la confluence auxquels l’aspiration à et le rejet de la mon-pation première d’occuper la cohorte, infi- de toutes ces identités. Qui suis-je ? Un dialisation placent les citoyens. La polé-nie, de ceux qui le composent. L'excès du Lyonnais, un intellectuel, un « vestige » mique sur le goût supposé différent desN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 9
Dialoguer YVES MICHAUDpots de Nutella distribués en Italie et en « La providence pour © Ludovic / Réa « Sa gestion du rôlePologne, ou les réactions, contrastées, à la tout le monde est de l’État l’incarne :découverte des mêmes enseignes de mode devenue un guichet © Pascal Sittler / RéaJacques Chirac auraà Barcelone et Prague, l’illustrent : dans le pour chacun ; été le plus incompétentconcert de la mondialisation tous azimuts, voilà à quoi a conduit © Witt-Damourette / Pool / Réaet le plus néfasteles populations à la fois veulent et conspuent le processus de Président del’uniformité. Et souvent elles peinent à s’af- transformation la République sousfirmer devant le dilemme. catégorielle de l’État, la Ve République. » hier État-providence « La polémique sur le goût supposé différent des potsToute identité est une et indivisible, et désormais de Nutella distribués en Italie et en Pologne,notamment parce qu’elle est une dyna- État-guichet » l’illustre : les populations à la fois veulent etmique en marche, elle est le fruit « en conspuent l’uniformité. » partie construit en partie subi des enga- avec l’esprit républicain – comment « Aux Pompidou, Mitterrand et autres Rocard pétrisgements que nous prenons et des expé- pourrait-on contraindre une femme à de connaissances historiques, littéraires ou artis-riences que nous faisons au cours de notre l’impudeur que traduit au fond d’elle- tiques a succédé une « élite » d’une pauvreté intel-vie. » A l’instar « des » France supposées même la nudité du visage ? –, le prosé- lectuelle et culturelle désespérante. » « chrétienne, gauloise, révolutionnaire », lytisme ou les pressions de groupe sont,n’est-il pas fantasme, et même danger en revanche, parfaitement inadmissibles. Il N°135 Mai 2017de croire en la possibilité d’une identité est, à ce titre, insupportable d’entendre lanationale ? résignation d’une partie du cénacle poli-Absolument. L'« identité nationale » a tique devant les manœuvres de ce type ;pu, par le passé, correspondre à une réa- il existe des lois, grâce auxquelles sanc-lité, lorsque les populations étaient peu tionner et condamner le propriétaire d’unmobiles, demeuraient et se reproduisaient bar refusant l’accès des femmes ou s’op-dans un territoire, partageaient un langage poser aux exigences d’un mari refusantcommun à leur ascendance et à leur voi- que son épouse soit auscultée à l’hôpitalsinage. Ces identités extrêmement locales par un médecin homme est aisé. Encorepouvaient avoir pour frontières le village faut-il le vouloir…– et d’ailleurs le hooliganisme contem-porain dans le monde du football épouse « On ne gagne rien à rendre solidairescette même logique, qui met aux prises citoyenneté, nationalité et identité. » Lesdes « identités » de club. Sous la IIIe Répu- trois items semblent pourtant interdépen-blique, les « efforts » – y compris dans la dants, ou plus exactement la rhétoriqueviolence – pour diluer les identités locales politique les entremêle communément…ont produit leurs effets ; mais du Pays La classe politique fait totalement faussebasque à la Bretagne, de la Savoie à l’Avey- route. Elle cultive sans retenue le fantasmeron, ces identités régionales demeurent fallacieux d’une identité synonyme deune réalité, qu’il faut simultanément res- communauté, de nation, de citoyenneté.pecter et contenir afin qu’elles n’empiètent Et elle détruit ce qui constitue l'identitépas sur l'identité politique collective. politique abstraite, minimale, volontariste, républicaine par des mesures catégorielles,Dans un environnement à ce point mou- aussi iniques que productrices de tensions.vant, instable, disruptif, individualisant, L’exemple des portiques de l’écotaxe estest-il possible de façonner une identité édifiant : sous la pression des « bonnetscollective, commune ou partagée ? rouges » bretons, la ministre de l’ÉcologieLa notion d’« identité collective » a un Ségolène Royal décida en 2014 de mettresens. Mais peut-on seulement la déli- fin – en procédant au démontage des 172miter ? Une définition est possible, qui infrastructures déjà installées – au dispo-constitue une reconstruction au moins sitif appelé à contrôler l’équipement desa minima des identités : l'identité répu- poids lourds et à taxer les plus polluants ;blicaine. Tout étranger peut faire un ce faisant, elle déclencha la colère descitoyen français s’il souscrit aux prin- Alsaciens qui, eux, se réjouissaient d’unecipes de liberté, d'égalité et de solidarité, mesure permettant de limiter le trafic ens’il agit conformément à la manière dont provenance d’Allemagne.les « pères » de la Révolution Française,de la Constitution et de la Convention Cet antagonisme a-t-il une signification,admettaient que des Allemands ou des qui constituerait une clé de lecture sup-Espagnols les rejoignent sur la base de plémentaire de la société contemporaine ?la croyance dans les idéaux de laditerévolution. Et à ce titre on peut formerun « bon citoyen français » sans chan-ter la Marseillaise, sans manger de sau-cisson, et sans lire Marivaux ! Au nomde ces principes, le port du voile – nonintégral – me semble tout à fait compatible10 Acteurs de l’économie - La Tribune
YVES MICHAUD DialoguerCe double faisceau antithétique est le grâce auxquels chaque étudiant détenteur la fiscalité, qui doivent faire l’objet d’unereflet d’une classe politique française d’une identité dite nationale revient enrichi révision complète…mais aussi, au-delà, d’une classe intellec- de sa confrontation à d’autres identités ditestuelle en déclin. Ce déclin cristallise une nationales – ne les atténuent qu’à la marge. Examinons d’abord le premier. Quelle res-capacité de réflexion déliquescente, une La résurgence des revendications identi- ponsabilité dans la crise de citoyennetéperte dramatique de conceptualisation. taires locales ou régionales dans certains l’évolution du corpus éducatif endosse-Observez la classe politique : aux Pompi- pays d’Europe est une réalité… d’ailleurs t-elle ? L’humus de l’obscurantisme,dou, Mitterrand et autres Rocard pétris de contrastée. En effet, lorsqu’elle est conte- de l’intolérance et de l’incivisme étantconnaissances historiques, littéraires ou nue au folklore, elle est inoffensive. Mais l’ignorance, dans quelle direction, à partirartistiques a succédé une « élite » d’une lorsqu’à l’instar des Catalans appelant à de quelles exigences, avec quels moyenspauvreté intellectuelle et d’une ignorance ne pas partager les eaux de l’Èbre avec les l’enseignement de la connaissance doit-ilculturelle désespérantes. Andalous, des mouvements séparatistes en être développé pour qu’il soutienne l’ap- Belgique, ou de certaines élites d’Italie du propriation citoyenne ?Qu’elle domine les débats publics donne Nord déterminées à ne plus financer l’éco- L'institution scolaire doit être reconsidéréed’ailleurs le ton, en matière d’exigence nomie des Pouilles ou de la Calabre, elle de fond en comble. Rien n’y fonctionne.et de perspectives, du « climat général » devient extrêmement dangereuse. J'ai repris mes expériences de formation àdans lequel s’inscrit la construction des la philosophie, dans un établissement deindividus. La médiocrité intellectuelle, L’exercice de la citoyenneté et du civisme Gennevilliers aux réalités sociales, com-culturelle, et morale de cet aréopage tout implique notamment la considération de portementales, éducationnelles bien diffé-à la fois résulte de et conditionne celle l’autre, de chaque autre constituant le rentes de celles qui font le quotidien desde toute la communauté humaine qui lui périmètre où elle s’applique. Cette consi- collèges du 6e arrondissement parisien.est liée, car elle constitue un curseur, et dération, qui s’étage du respect à l’amour, Qu’y constaté-je ? Les moyens alloués etmême une norme… est-elle, de tous les virus qui atteignent la la qualité des enseignants sont tout à faitC’est une triste réalité. Toutes ces médio- citoyenneté, celui qui la place le plus en corrects. Et pourtant, les résultats sontcrités se font reflet et s’entretiennent sou rance ? désolants, qui expliquent la colère ou lamutuellement. Une dérive générale, La compétition catégorielle, désormais démobilisation de professeurs. En cause,« acommunautaire », s’est imposée. Et ce omnipotente, nourrit l’égoïsme, sans doute en premier lieu des programmes pure-marasme nouveau porte les germes d’une le principal obstacle à l’exercice citoyen. ment illusoires, comme l’attestent celuipré-révolution. Tout individu est ligoté à un mélange, d’histoire, absolument ubuesque, ou la étrange, de compassion et d’égoïsme. Il boulimie de langues étrangères, vivantesPeut-on se considérer citoyen du monde est capable de grande empathie – osons ou mortes, saupoudrées au long du cur-sans être citoyen de la nation à laquelle même : des larmes de crocodile – mais sus et qu’in fine personne ne maîtriseon est lié ? Citoyen d’Europe davantage préoccupé à défendre en premier lieu et convenablement. L’amplitude de ces pro-que citoyen de France ? Citoyen de la bio- coûte que coûte son seul intérêt. La société grammes, aujourd’hui pensés pour satis-diversité plus que de la ville où l’on habite manque de sociabilité et de règles com- faire politiques, médias, syndicats, et quiet travaille ?... Existe-t-il une hiérarchie munes, ces règles communes qui sont des ne peuvent être enseignés que de manièrefactuelle ou morale « des » citoyennetés ? conditions non de sympathie mais sim- caricaturale et superficielle, doit êtreEn 1948, le militant pacifiste américain plement de respect d'autrui. « Donner sa réorientée vers l’essentiel, l’utile, l’appli-Gary Davis rendit son passeport et s’au- sympathie » ne signifie pas que celle-ci cable, vers ce qui en premier lieu assure latoproclama « premier citoyen du monde » soit une quelconque vertu politique, et sociabilisation et l'intégration ; maîtriseravant de fonder le mouvement éponyme. l’aspiration première à l’application una- politesse et civisme, savoir lire et comp-Quelques années plus tôt, d’aucuns déjà nime de règles communes lorgne la quête ter, posséder du vocabulaire. Mais aussirevendiquaient le droit à l’apatridie. Cet de justice, d'égalité et de solidarité. savoir raconter une histoire, avoir le sensidéalisme cosmopolitique, très complexe Ne nous méprenons pas : ce n’est pas des enchaînements, aimer découvrir, culti-à mettre en œuvre, convoque la condition l'amour qui fait la société, mais l'organisa- ver la curiosité, prendre goût à l’appren-de « pur sujet de raison » chère à Kant. tion raisonnable et humaine des échanges. tissage. Pour cela, le rythme scolaire doitUn « pur sujet de raison » sans attache, Fonder la politique sur l'amour est un être, lui aussi, revisité en profondeur. Aporté exclusivement par la volonté de échec assuré. l’instar des modèles du nord de l’Europe et« faire le bien » et par un intellect déter- notamment de Scandinavie, les après-mi-miné à ne rien croire qui dépasse la rai- La citoyenneté ne s’exprime pas par dis doivent être intégralement consacrésson, peut être cosmopolite. Or la réalité le sang ou par le sol mais par l’enga- aux activités socialisantes et culturelles :est que nous sommes constitués de chair, gement civique. Celui-ci résulte de la arts plastiques, musique, théâtre, travauxde sang et d'émotions qui forment notre loyauté qu’on manifeste à l’égard de la manuels, sport, etc. Comment peut-onidentité en partie issue de l’endroit où nous communauté dont on attend les droits imaginer, comme c’est le cas aujourd’hui,sommes nés. Personne (ou presque) ne et dont on accepte les devoirs, et cette qu’une heure par semaine suffit pourpeut s’affranchir de cette relation physique, loyauté est elle-même commandée par enseigner des disciplines de ce type, dites« géographique. » un serment. Quelle organisation démo- de « sensibilité », par ailleurs si précieusesTout aussi idéaliste doit être considéré le cratique faut-il dessiner qui favorise pour diffuser de l’humanité donc de lavœu d’une « identité européenne » quand cet accomplissement ? L’e cacité de la démocratie dans la conscience d’adoles-bien même la notion de « citoyenneté démocratie et l’e cacité de la citoyen- cents cernés dans leur quotidien ou sur lesnationale » est durablement contestée. Les neté s’apportent-elles dans les mêmes écrans par la violence ?égoïsmes locaux et nationaux demeurent proportions ?très forts, et d’aussi vertueux programmes Les deux principaux chantiers à conduire Réformer le système éducatif ? Une uto-que celui d’Erasmus – modules de forma- dans ce sens d’une démocratie au service pie, si l’on en juge les tentatives passéestion dans les pays de l’Union européenne, de la citoyenneté portent sur l’éducation et et qui toutes ont échoué. La citadelleN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 11
Dialoguer YVES MICHAUD« La notion d’identité collective fait sens si elle prend pour socle l'identitérépublicaine. À ce titre on peut être un « bon citoyen français » sans chanterla Marseillaise, sans manger de saucisson, et sans lire Marivaux ! »semble imprenable, sans doute parce de la déchéance de nationalité les auteurs cas il signifie s’acquitter doublement dequ’elle symbolise de manière paroxys- d’infractions majeures. Sur quelle base l’impôt. Réduction et uniformisation de latique les méfaits de la « catégorisa- peut-on réformer le système fiscal afin TVA. Déploiement d’un système de pro-tion » ou plutôt de la « corporisation » de que la perception de sa nécessité, de son gressivité valant pour l’ensemble des reve-la société conduites par les politiques utilité et de sa justice s’impose dans les nus et pouvant même atteindre des seuilspubliques depuis plusieurs décennies… consciences, et ainsi sustente l’apparte- confiscatoires pour les tranches les plusIl existe deux moyens, très simples, de nance citoyenne ? hautes. La surtaxation actuelle des reve-déclencher le processus de transforma- Le système fiscal conditionne et éclaire nus du capital dissuade en effet d’investir,tion : mettre fin à l’administration cen- le système de solidarité. Ce qui particula- et l’épargne, encouragée, fait elle-mêmetrale du ministère de l'Éducation nationale rise la théorie de l’impôt permet de lire ce l’objet de prélèvements excessifs. En défi-et surtout à l'inspection générale, qui qui particularise la théorie de la société. La nitive, un système fiscal « citoyen » doitconcentre le monopole des programmes, salubrité de la communauté politique est être clair, simple, lisible, juste, valable pourdes manuels, de l'auto nomination, et dont en partie liée à la politique fiscale. Accep- tous, responsabilisant, et expose les frau-l’arbitrage devrait relever des délégations ter ces paradigmes invite à comprendre et deurs à une répression implacable.régionales. Tout ce qui concourt à décen- à accepter l’impôt. Et à décider quelquestraliser l’organisation d’ensemble est d’une orientations majeures qui toutes vont « Les montages très problématiquesnécessité et d’une utilité impérieuses. Il est servir l’exercice de citoyenneté. Parmi d’Ernest-Antoine Seillière et de ses aco-réconfortant d’observer combien le corps elles : fin de l’exemption. Il est délétère lytes chez Wendel datent de 2007 et n’ontenseignant est capable d’inventivité, d’au- que moins d’un foyer fiscal sur deux s’ac- toujours pas été jugés dix ans plus tard. »dace, d’engagement lorsqu’il est autorisé quitte de l’impôt ; absolument tous les Ainsi illustrez-vous l’extrême mansuétudeà prendre des initiatives ; il est désespé- citoyens, y compris les allocataires du qui profite au traitement judiciaire desrant ou plutôt scandaleux de constater RSA, devraient apporter leur contribution, crimes en « col blanc » et ternit au sein decombien le fonctionnement centralisé de même de manière symbolique, à la solida- la société la perception de citoyenneté.l’administration et de l’inspection générale rité et à la collectivité. Et en conséquence Les rédacteurs des lois étant eux-mêmesétrangle cette faculté. « Libérons » les pro- fin des effets de seuil créés à travers les exposés auxdits délits, est-il crédiblefesseurs, libérons leur envie et leur droit exemptions fiscales, qui peut être com- d’espérer mettre fin aux indulgences, col-de concevoir, d’expérimenter, d’adapter. Et pensée par la réduction des taux. Fin des lusions et compromissions ?d’entreprendre. dispositifs de prélèvement à la source, de Voilà une nouvelle illustration du pro- CSG (contribution sociale généralisée) et cessus de transformation de l’État-provi-L'éducation, c’est aussi et même en pre- de CRDS (contribution pour le rembour- dence en État-guichet : les producteurs demier lieu la famille qui la modélise. Le sement de la dette sociale), car ils rendent loi, ces monopolisateurs du pouvoir poli-bouleversement des structures fami- l’acte d’impôt invisible et donc dérespon- tique pour la plupart issus d’une Écoleliales, l’explosion du nombre de canaux sabilisent. Fin de l’ISF, car dans trop de nationale d’administration qu’il faudrait« exogènes » qui influencent l’enfant, absolument éradiquer, aménagent lesl’évolution du rapport à l’autorité ou à « L’État de droit est à la dérive. Qui sert-il en lois à leur profit et s'arrangent « catégo-l’autonomisation, transforment eux aussi premier lieu ? Les riches, les mieux placés riellement. » Dans cette organisation sile substrat de la citoyenneté… pour en tirer le meilleur. Que l’ex-président du morcelée de la société, chacun avance sesAuparavant, la formation était exercée par Medef et de Wendel Ernest-Antoine Seillière pions pour qu’ils profitent à son intérêtle diptyque famille-école. Comme nous ne soit toujours pas condamné dans l’affaire catégoriel ; les parlementaires sont sim-l’enseignait Alain Touraine, il y a une du montage financier Solfur en est plement mieux outillés pour réaliser cettecinquantaine d’années cette formation se l’illustration. » quête en intégrant quelque amendementcomplétait même d’un troisième « contri- subreptice. Et la porosité de cette castebuteur » : la société des pairs. Désormais, © Ludovic / Réa avec d’autres également dirigeantes,un quatrième « intervenant » est venu notamment dans le monde économique,bousculer en profondeur les équilibres : il favorise les collusions d’intérêts. Peut-onregroupe toutes les formes d’espace virtuel y faire face ? Je l’ignore. La plupart des(Snapchat, Whatsapp, Facebook, Twitter parades sont simples à mettre en œuvre,etc.), et face à elles, face à la dictature des mais la force de résistance des publicsréseaux, de l’immédiateté, de la rumeur, « menacés » est considérable. Surtoutde l’exaltation, du « buzz » communément lorsqu’elle s’allie à un périmètre de pou-retenu, les parents sont impuissants. voir substantiel. Qu’il s’agisse de l’éducation, de la réformeE ectivement fondamental à la construc- de l’État, des mécanismes de la démocra-tion de toute citoyenneté, à la partici- tie, du fonctionnement politique, ou depation du citoyen à la République, est l’impôt, il existe un moyen extrêmementl’exercice de l’impôt. Faire accepter la simple d’assurer un juste arbitrage : placernécessité et l’utilité de s’acquitter de l’im- au-dessus de tout le Défenseur des droits.pôt constitue l’une des meilleures parades Bien d’autres pays y sont parvenus ; pour-à la fraude – dont vous proposez de punir quoi la France échouerait-elle ?12 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
RUBRIQUE DE NOM Dialoguer DE L ÉCONOMIE MIEUX COMPRENDRE POUR MIEUX DÉCIDER L’INFORMATION QUI COMPTE EN AUVERGNE-RHÔNE-ALPESN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 13
Dialoguer YVES MICHAUD« Les lois permettent de condamner riches d’enseignements. Récemment, jele propriétaire d’un bar refusant l’accès des les questionnais sur de possibles voca- tions professionnelles. L’un d’eux parmi les plus vifs, Slimane, d’origine algérienne,femmes ou de s’opposer à un mari refusant m’a indiqué vouloir devenir médecin. Puisque son épouse soit auscultée par un médecin il a ajouté qu’il ne le serait sans doutehomme. Encore faut-il le vouloir. La résignation jamais ; en effet, à quoi sert-il de travaillerdu cénacle politique est inadmissible » si on est tiré au sort pour accéder à la pre- mière année en faculté… ? Voilà l’avenir que ce prétendu État de droit, que cette République prétendument exemplaire,« Vivre », « accomplir » sa citoyenneté L’exercice de la loyauté repose sur des réservent à un jeune que l’intelligence etnécessite de la « conscientiser. » De la conditions. On est loyal à ce à quoi on la détermination peuvent, ou plutôt pou-pensée guévariste au programme pour croit et à ceux à qui on croit. On est loyal vaient, destiner à une carrière de médecin.l’emploi d’Emmanuel Macron fondé sur à ce qui apparaît légitime et exemplaire,la flexisécurité, l’équilibre des droits et à ce qui porte une justification et un sens, L’état de « l’éthique » – en matièresdes devoirs partage avec l’exercice de aussi à ce qui dépasse notre finitude. La politique, économique, scientifique,la citoyenneté un même socle. Or, par réalité, dictatoriale, du matérialisme, de médiatique – peut-il « justement »,exemple en France, cette citoyenneté l’éphémère, du virtuel, de l’immédiateté, « noblement » dissuader d’être loyal ?est jugée si inconditionnelle, le « droit de la déspiritualisation, peut-elle bien Le degré d’acceptabilité de l’incivismeaux droits » est considéré si naturel, que donner des raisons d’être loyal ? est-il indexé à la dislocation supposéel’exercice des devoirs devient contrainte. Les nouvelles technologies offrent à la de l’éthique des institutions et de leursL’extension des droits a-t-elle progressé déloyauté d’être devenue une constante représentants, mais aussi à la conviction au XXIe siècle. Qu’il s’agisse d’amour,plus vite que la conscience des devoirs, « désormais banale » qu’une oligarchieau point de provoquer une dégradation d’amitié, de relations professionnelles, la organisée et corrompue orchestre la prolifération des outils de communication démocratie ?dudit équilibre ?C’est incontestable. L'État de droit, que instantanés et des réseaux sociaux modi- Nous arrivons au bout d’un système. Unechacun défend aveuglément tel un slogan fie radicalement – en les flexibilisant – les sorte de capitulation générale, une sortesans connaître la réalité de ce qu’il est, relations sociales. Ces outils permettent même de « conformisme de déloyauté »est à la dérive. Cet État de droit, il est d’initier, de rompre, de changer, de choisir s’est répandue.essentiel de le remettre en question, car dans l’immédiateté là où il y encore peuqui sert-il en premier lieu ? Les riches. les rencontres s’anticipaient à l’avance, se De l’incivisme mou à l’anti-civisme meur-En effet, qui est le mieux à même de préparaient, se concrétisaient. Tout est trier en passant par le non-civisme, quellecomprendre ses arcanes, de mobiliser désormais évolutif dans l’instant, et cette radiographie de l’incivisme établis-les bons leviers, de financer les meil- caractéristique de notre contemporanéité sez-vous ? Peut-on distinguer des fais-leurs soutiens ? Les riches. Que dix ans permet voire commande de ne pas être ceaux communs, des grandes tendancesaprès avoir initié un montage financier, loyal. En revanche – et sans que cela soit territoriales, sociologiques, historiques,baptisé Solfur, grâce auquel un gain net paradoxal – la « demande » de loyauté est religieuses ?de 315 millions d’euros fut généré après élevée, et la contestation de cette flexibilité Il existe un lien entre ces incivismes, c’est-un investissement de départ de moins tentaculaire, de cette liquéfaction générali- à-dire que tout acte d’anti-civisme meurtrierd’un million d’euros, le très puissant sée est grande. Les citoyens réclament des est la conclusion d’une lente dégradation,ex-président du Medef et de Wendel repères. Des ancrages. Lesquels ne sont qui a pour origine l’exercice de non-civismeéchappe encore à toute condamnation bien sûr plus une idiote « racine gauloise », ou d’incivisme mou qui se sont juxtaposé etest symptomatique. mais le serment de bénéficier de la Répu- ont peu à peu dérivé. Ce glissement sin-Au-delà, quels enseignements ce délite- blique. République qui, à condition bien gularise d’ailleurs le profil d’un certainment de l’État de droit suscite-t-il ? Un sûr qu’on lui donne le cadre, la légitimité, nombre de terroristes islamistes : « décro-fait constant dans l’histoire est que la les moyens de les mettre en œuvre, peut chage scolaire », absence de constructionnaissance des dispositifs est parfaitement épanouir la liberté, peut sanctuariser l’éga- éducative, ignorance, vulnérabilité, traficjustifiée au moment où on la décide, mais lité des chances, peut assurer la solidarité de drogue, destructuration, refuge dansque par la suite leur fonctionnement à ceux que les accidents de vie, l’infortune internet, endoctrinement…n’est plus adaptés. Les exemples sont ou le handicap frappent.pléthore. La loi du 29 juillet 1881 sur Lorsqu’ils ne sont pas encore assujettis … Ce continuum d’ailleurs n’est pas proprela liberté de la presse est-elle cohérente à la chape familiale ou culturelle, ligotés au terrorisme…avec l’environnement du XXIe siècle ? aux pressions de groupe, décervelés par la Absolument. Et ce qui est commun auxNon. Le regroupement familial décrété publicité, les écrans ou les téléphones por- dérives de ce type a pour nom laxisme.en 1974 était une excellente initiative ; tables, les jeunes collégiens portent en eux Laxisme par la faute duquel on repousseest-il adapté à la situation actuelle de un formidable gisement d’où émanent des les limites morales ou éthiques petit àl’immigration ? Absolument pas. Est-il émotions, des aspirations, des réflexions petit, subrepticement, parfois de manièreacceptable que le droit autorise les ter-roristes sanguinaires Salah Abdeslam « La compétition catégorielle, omnipotente,ou Anders Breivik à exiger des « règles nourrit l’égoïsme, principal obstacle à l’exerciced’humanité » particulières pendant leurincarcération ? Pour demeurer légitime, citoyen. Tout individu est ligoté à un mélange,l’État de droit doit faire l’objet d’inces- étrange, de compassion et d’égoïsme »sants toilettages.14 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
RUBRIQUE DE NOM Dialoguer À COMPTER DU 12 AVRIL L’INFORMATION QUI COMPTE SE PAYE L’information a un prix. Et un coût. Acteursdeleconomie.com produit depuis 2014 une infor- mation différenciante, intègre, fiable et indépendante sur l’économie en Auvergne Rhône-Alpes qui par mois séduit jusqu’à 270 000 visiteurs, génère jusqu’à 1 700 000 pages vues et fait rayonner l’économie, l’entrepreneuriat, l’innovation, les institutions du territoire au plan national via latribune.fr. Mais une information diffusée jusqu’à maintenant de manière essentiellement gracieuse, incompatible avec une réalité et avec une conviction : la réalité d’un modèle économique qui doit générer des recettes chaque fois qu’elles sont légitimes pour atteindre un équilibre consolidé, la conviction que l’information honnête, de qualité et innovante doit être payante. La dictature de la gratuité ne peut continuer de s’appliquer, au risque de le détruire peu à peu, à l’un des ciments de la démocratie - locale, nationale, sociale, des entreprises - : l’information. Et les investissements menés pour que vous soyez désormais connectés à un site, des services, une édition quotidienne, et une application portable entièrement refondus, justifient l’accès payant à « l’information qui compte ». Notre réputation depuis 20 ans témoigne de l’engagement, bien sûr toujours perfectible, que l’équipe consacre à investiguer, intermédier, révéler, analyser au service d’une information utile. Nous lire vous apportera une connaissance utile de l’actualité, une compréhension utile des réalités, une vision utile des enjeux socio-économiques, entrepreneuriaux, managériaux, scientifiques, institutionnels, mais aussi nous apportera les moyens de poursuivre notre mission d’informer utilement avec une exigence, une crédibilité et une indépendance toujours plus élevées. Consolidons notre confiance mutuelle, avançons ensemble, et pour cela faisons converger nos responsabilités de citoyens. Pour nos intérêts respectifs, et pour l’intérêt général.PROFITEZ DE L’OFFRE DE LANCEMENT UNIQUE OFFRE VALABLEOFFRE DIGITALE 100% NUMÉRIQUE JUSQU’AU 30 AVRIL19€ / mois durant 1 an (au lieu de 23€/mois) // 250€ / anAbonnements groupés : contactez-nous au 04 72 18 09 18pour profiter de nos offres sur-mesureDE L ÉCONOMIERejoignez la communauté des acteurs de l’économie sur acteursdeleconomie.comN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 15
Dialoguer YVES MICHAUDsaccadée, sans véritable conscience de la « L’absentéisme régimes particulièrement spéciaux, c’est-à-faute, souvent conforté par l’entourage incarne la difficulté ou dire honteusement avantageux – y compriset… le laxisme législatif et répressif. L’ac- le refus de s’intégrer en matière de retraite – dont bénéficientcumulation et la mise en perspective des des populations l’ensemble des parlementaires, commentdérives de François Fillon, révélées pen- d’origine immigrée, ces derniers peuvent-ils être crédibles àdant la campagne présidentielle, sont et ainsi « toléré » par réclamer la disparition des statuts pré-caractéristiques. La distinction entre les le laxisme participe férentiels des salariés de la SNCF ou desfautes légales et morales n’est pas toujours à la destructuration aiguilleurs du ciel – non sans raison d’ail-aisée, et à partir d’une loi particulièrement éducationnelle et leurs, tant ces régimes participent au désé-permissive autorisant l’emploi de parents sociale des jeunes. quilibre des droits et des devoirs ? L’unecomme attachés parlementaires, se super- Mais soyons honnête : des conditions les plus essentielles à lapose une succession d’erreurs ou même il frappe aussi les diffusion de la citoyenneté, à l’accepta-de fautes souvent « borderline. » Jusqu’à collèges cossus. tion des devoirs comme étant la conditionl’inacceptable, c’est-à-dire le reniement Là-bas, il résulte du des droits, c’est l’exemplarité de ceux quides convictions, la volte-face la plus inouïe retour trop tardif dictent la loi. Que nous en sommes loin…lorsque l’engagement à se retirer de l’in- des vacances au ski Et la perception, d’ailleurs inexacte, quevestiture en cas de mise en examen est ou au soleil… » les mêmes professionnels de la politiquebalayée d’un revers de main. autrefois tous vertueux sont désormais tous pourris, a des répercussions considérables,De quoi l’incivisme incarné par le « cas » aux conséquences sur le fonctionnementFillon est-il d’ailleurs le plus symptoma- de la société et de la démocratie encoretique ? D’amoralité ? De déloyauté ? De bien incomplètes.rupture de serment ? D’illégitimité ? Unetelle « inexemplarité » est-elle compatible La loyauté questionne l’obéissance. Aussiavec les devoirs pour partie sacrificiels bien pour se construire à l’adolescencequ’un Président de la République veut que pour nourrir, plus tard, sa raison deimposer à la population ? penser, d’agir, et d’être, il est essentiel de« Faites ce que je dis, ne faites pas ce que produire transgression, subversion. Insu-je fais » : voilà, très trivialement, ce qui bordination. À quelles conditions déso-résume les dysfonctionnements de Fran- béir est-il courage ou incivisme, loyautéçois Fillon, finalement eux aussi emblé- ou déloyauté ?matiques de « l’État-guichet » aujourd’hui Il faut distinguer les désobéissances ver-dominant. Et qui questionne le principe tueuse et préoccupante. Or la premièrekantien de l’universalisation du devoir : n’est guère vivace et la seconde l’est bien« que se passerait-il si tout le monde faisait trop, qui se répand et se banalise dans desla même chose ? » Là encore, à l’aune des proportions inquiétantes. Fumer de l’herbe« Construireune démocratieau service dela citoyennetéexige la refonteradicaledes systèmeséducatifet fiscal »16 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
YVES MICHAUD Dialoguern’est plus sanctionné, regarder des films « Arts plastiques, lors de la colonisation et de la boucherie depornographiques particulièrement avilis- musique, théâtre, la Grande Guerre 1914-18. Le patriotismesants dès 14 ans ou proférer des insultes travaux manuels, pour les compétitions de football ou pourvia Facebook est commun, et désormais sport : comment consolider l’exigence républicaine, oui.même conduire sans permis fait l’objet de peut-on croire qu’une Le patriotisme pour galvaniser le repli,menues punitions pécuniaires. Suivant heure par semaine la peur ou le rejet, non bien sûr. Le voletun mouvement comparable à celui de suffit pour enseigner économique du patriotisme répond d’unel’incivisme, la dégradation est aussi lente ces disciplines même logique. Sauf, toutefois, qu’il doitque profonde, qui produit des situations de « sensibilité » être amendé par la nécessité de real poli-de tolérance… intolérables. Comment, si précieuses pour tik, de pragmatisme. Stop à la naïveté !au nom de la République, peut-on accep- diffuser de l’humanité Peut-on tolérer indéfiniment l’invasionter que des « zones à défendre » comme donc de la démocratie des travailleurs détachés et les manœuvresà l’aéroport Notre-Dame-des-Landes ou dans la conscience entreprises par des sociétés polonaisesdes « zones de non-droit » comme dans d’adolescents cernés ou slovaques pour composer avec la partnombre de banlieues gangrénées par de dans leur quotidien d’ombre des lois européennes ou, pire, lesmultiples trafics dictent leur loi à la loi ? ou sur les écrans détourner sans vergogne ? « Acheter fran-Comment peut-on accepter que des par la violence ? » çais », n’est-ce pas vertueux ?jeunes de 16 ans aguerris et pleinementconscients de leurs actes échappent à la aujourd’hui atone voire pourchassée. En L’instrumentalisation du patriotisme, yjustice au nom de leur statut de mineur, d’autres termes, relocaliser la transgression compris économique, aux fins nationa-en réalité totalement décalé de leur véri- là où elle est intéressante et utile non seu- listes singularise également la politiquetable « maturité » ? L’absence de limites, en lement au processus d’individuation mais du Front national. Donald Trump et Marinel’occurrence de sanctions, libère les déso- aussi à la collectivité. Le Pen emploient l’exigence, acceptable,béissances les plus nuisibles. Et depuis la du « Made in USA or France » pour ramifiermort de Malik Oussekine (le 6 décembre Le patriotisme peut être considéré une même idéologie raciale, xénophobe,1986, lors d’une manifestation étudiante), comme un levier de citoyenneté. Mais dis- ségrégationniste. Ou comment deux paysle spectre de la bavure hante les décideurs tinguer le patriotisme du nationalisme est totalement incomparables – historique-politiques et donc au sein tant de la jus- tortueux. Ce que Donald Trump a entre- ment, sociologiquement, économique-tice que de la police entrave l’application pris ou promet : expulsion des migrants ment, culturellement – peuvent partagerdes légitimes répressions. Les policiers illégaux, interdiction d’entrée sur le ter- une stratégie…miraculeusement survivants après avoir ritoire pour six nationalités musulmanes, L’un et l’autre – et particulièrement Marineété pris au piège de leur voiture délibéré- édification d’un mur avec le Mexique, et Le Pen – s’adressent à une clientèle spé-ment incendiée par une bande de jeunes aussi, en matière économique, mesures cifique : celle des laissés-pour-compte.doivent-ils être moins considérés que ce protectionnistes radicales et condamna- Précaires, archi pauvres, inéduqués maismême public fulminant contre l’excès de tion du libre-échange, constitue-t-il un aussi désormais fonctionnaires de caté-contrôles d’identité ? dévoiement sournois de l’idéal citoyen ? gorie C, enseignants, artisans, patrons de Dieu, le dollar et le drapeau : voilà à quoi TPE/PME... Des catégories qui, tradition-Ce laxisme a-t-il contaminé toutes les on peut résumer les croyances de l’im- nellement, sont négligées voire méprisées.manifestations de toutes les strates de la mense majorité des Américains, sur les- Le succès électoral ou populaire des deuxsociété ? quelles se fonde l’élan patriotique, bien sûr tribuns n’est jamais que la conséquence deCurieusement, non. A ses côtés ou face à exacerbé et même manipulé par le nou- l’inconséquence des dirigeants politiqueslui cohabite une sorte de « religion », elle veau Président – Yves Michaud connait qui les ont précédés et ont proprementaussi de plus en plus prospère, de la « non- particulièrement bien les États-Unis, où il « oublié » cette « clientèle. »transgression. » L’art est particulièrement exerça comme professeur à l’Université desymptomatique de ce constat sidérant, qui Berkeley, NDLR. Et cette trilogie ne fonc- « La population d’origine immigréeappauvrit dangereusement les individus et tionne pas en France. Reste qu’universelle- maghrébine et subsaharienne n’est pasdonc la communauté. Le « politiquement ment le patriotisme constitue, à mes yeux, intégrée. Ni à la vie civique, ni dans lecorrect » aseptise notre liberté d’expres- un dévoiement. Au XXe siècle, il s’exprima champ scolaire ni en terme de respect dession donc nos relations humaines – profes- lois (…) Et ce constat empire dans les cassionnelles comme personnelles – donc nos de binationalité, qui mettent en conflitconsciences. Critiquer ou rire de l’islam, des principes civiques contradictoires.des juifs, des catholiques, des minorités, L’incivisme devient, dans de telles condi-des féministes… devient éminemment tions, une fatalité. (…) Et l’a lux massif dessuspect, voire même répréhensible. Ainsi migrants en Europe ne fait qu’exacerbercoexistent désobéissance généralisée et cor- le fléau. » Votre diagnostic est radical,rection politique généralisée qui, une fois il ignore les situations, heureusementagglomérées, produisent un climat d’abso- nombreuses, d’intégration réussie et ver-lue hypocrisie. Il est capital de rétablir des tueuse, il ne mentionne pas les respon-règles d’autorité et d’obéissance, de durcir sabilités exogènes – liées à l’histoire, à lale cadre pénal à l’endroit des délits – finan- ghettoïsation urbaine, à la ségrégationciers, d’influence, politiques – aujourd’hui sociale, à la xénophobie –, il n’est pasultra protégés, d’appliquer les sanctions, fondé sur des statistiques. Cet examenmais aussi, dans les domaines ne relevant sans nuance n’incarne-t-il pas ce mêmepas de ces champs comme c’est le cas de la populisme que vous dénoncez – juste-culture, d’encourager une transgressivité ment – par ailleurs ?N°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 17
Dialoguer YVES MICHAUD« La faculté Désolidariser l’éventail des mesures de Ces « âmes généreuses » ont tort. Il fautd’inventivité, d’audace, rétorsion du contexte social des « cou- distinguer l’acte de charité, pleinementd’engagement des pables » n’est pas juste. D’aucuns – dont fondé, de la parole de bienveillance, irres-enseignants est vous-même – revendiquent la suspension ponsable. A force d’entendre ou de lireétranglée. des prestations sociales en cas d’absence telle chancelière allemande ou tel Pape« Libérons » leur répétée et de décrochage scolaire des les exhorter à rallier l’Europe, les réfugiésenvie et leur droit enfants. Mais peut-on considérer éga- sont pleins d’enthousiasme, vendent tousde concevoir, lement le cas d’une femme travaillant de leurs biens pour financer les exploiteursd’expérimenter. nuit et élevant seule ses enfants dans un de ce que l’on peut dénommer un véri-Et d’entreprendre » minuscule appartement d’une cité insa- table « tourisme migratoire », prennent lubre, de celui d’une famille de cadres ou des risques humains terribles, et une foisLes situations doivent être étudiées avec de fonctionnaires établie dans un pavillon parqués en Grèce, à Calais ou à Francfort,lucidité. L’absence de statistiques ethniques paisible ? Les degrés de culpabilité de l’un découvrent que la promesse et l’espéranceen France est un lourd handicap, car elle et de l’autre ne sont pas comparables, et seront vaines. Imagine-t-on l’ampleurinterdit de dresser un état des lieux pré- la dureté des sanctions ne peut pas l’être du désenchantement, mais aussi de l’ai-cis, honnête, utile. Grâce à cet outil, nous non plus… greur et du ressentiment qui peuvent endécouvririons que la population d’origine Mais on a le droit « aussi » de se placer du découler ?immigrée est sans doute sensiblement côté de l’Éducation nationale – par ailleursmieux intégrée qu’on ne le croit, et aussi financée par la collectivité et qui assure la Certes, mais comment tout humanistequ’une frange non négligeable est rétive gratuité des cours – et de dénoncer l’un des peut-il éluder les conditions d’accueil deou hostile au cadre républicain. Une non phénomènes qui participent à paralyser son populations dont l’Occident et notammentintégration qui d’ailleurs prend des formes fonctionnement et à ronger son efficience ! l’Europe sont en partie responsables,très diverses, parmi lesquelles il faut retenir Vous mettez-vous à la place des enseignants par leur stratégie géopolitique inconsé-l’absentéisme. Oh, ce mal qui ronge la diffu- qui ont l’obligation de faire cours à des quente, de la détresse ? L’Occident n’est-ilsion de l’enseignement n’est pas propre aux enfants qui y assistent occasionnellement, pas redevable du chaos qu’il a provoquéseuls établissements scolaires des banlieues quand bon leur semble et qui se placent dans cette région dès 2003 en Irak ? Entreà forte proportion d’origine immigrée ; eux-mêmes en situation de décrochage le « sentimentalisme », dont vous accablezdans le collège d’une commune cossue où total ? Vous êtes-vous interrogé sur les rai- Angela Merkel ou François, et une ferme-j’intervenais l’an dernier, les professeurs sons qui conduisent un (bon) tiers desdits ture brutale et hermétique des frontières,devaient composer avec l’absentéisme de enseignants des établissements « diffi- n’existe-t-il pas un « chemin médian » ?convenance, celui qui résulte d’un retour ciles », usés par les conflits, les menaces, la Voilà effectivement l’origine principaletrop tardif des vacances au ski ou au soleil… violence, les pressions – enseigner Darwin, du drame : nous-mêmes, qui avons mis leToutefois, à Gennevilliers que je prends c’est s’exposer à une levée de boucliers ! –, feu sous le règne des Bush père puis fils,pour exemple des collèges du même type, la prolétarisation de leur condition, à don- mais aussi avec la complicité de la Franceil est mesuré que l’absentéisme « explose » ner leur voix au Front national ? Là encore – notamment en Libye. De l’Afghanistan ànon seulement dans la période du ramadan, l’existence de statistiques ethniques per- la Syrie, et nonobstant des contraintes géo-mais plus régulièrement en juin et en sep- mettrait d’éviter les amalgames grossiers, politiques que nous savons bien sûr émi-tembre. Simplement parce que le coût du de distinguer les situations, d’ajuster les nemment délicates, les États-Unis ont ététransport pour rejoindre la Tunisie ou l’Al- dispositifs et les remèdes. Nul doute que les figures de proue d’une stratégie folle,gérie est moins onéreux. Soyons conscients l’on saurait alors discerner les cas justifiant d’une incompétence notoire. Les conflitsque l’absentéisme est un élément révélateur accompagnement social et punition, indul- d’Orient concernent les pays d’Orient. Etde la difficulté ou du refus de s’intégrer, et gence et fermeté. cette règle s’impose depuis le XVIIIe siècle.qu’ainsi « toléré » par le laxisme du rectorat, La punition doit être la même pour tous : Pour l’avoir déchirée, pour avoir cru – bienparticipe à la destructuration éducationnelle c’est un principe d’équité républicaine, souvent au nom de motivations masquéeset sociale des jeunes. important pour cultiver la citoyenneté. En bassement économico-financières, commeLa crise des migrants, provoquée ou revanche, les dispositifs de réhabilitation et ce fut le cas avec le « pétrole irakien » –encouragée par une politique européenne de soutien doivent être adaptés aux circons- qu’il était légitime à s’immiscer, parfois auà l’international tout à fait inconsistante, tances. Et puis il faut être inventif. Pourquoi nom du droit d’ingérence, dans l’extraor-est appelée à durer longtemps. Très long- ne pas instaurer des peines d’éducation ou dinaire complexité de l’histoire, des cou-temps. Elle mêle de vrais réfugiés poli- des peines culturelles ? Imposer de lire puis tumes, des rivalités religieuses, des guerrestiques, de vrais réfugiés religieux, de vrais de commenter La princesse de Clèves, Guerre ethniques, des enjeux énergétiques, l’Oc-réfugiés économiques mais aussi de vrais et Paix, ou A la recherche du temps perdu cident est aujourd’hui confronté à sonvoyous – réseaux de prostitution, passeurs aurait quelque vertu civilisatrice. miroir. Et même en son sein, l’Europe–, de vrais inciviques voire de vrais terro- se comporte odieusement, abandonnantristes avérés ou en devenir. Cette vague Toutes ces mains tendues aux migrants, lâchement le « front » à la Grèce et à l’Ita-exige des traitements différenciés, appro- ces cœurs qui transgressent la loi, ces lie, déjà minées par la crise économique.priés. Qui ont pour socle commun un regards de compassion et de bienveil- Alors oui, nous sommes redevables. Maisabsolu impératif : apprendre le français. lance, sont-ils ceux d’âmes valeureuses non, pas à n’importe quel prix. Et certai- ou irresponsables, humaines ou cou- nement pas celui d’un accueil de masse,18 Acteurs de l’économie - La Tribune pables ? Le « défi » que la vague migratoire délétère pour toutes les parties prenantes. pose aux citoyens occidentaux, n’est-elle pas « aussi » l’opportunité de faire grandir L’identité de la France s’est, pour par- notre humanité, ou plutôt nos humanités tie, construite au Siècle des Lumières individuelle et collective, de consolider puis dans une tradition d’accueil, d’asile, notre citoyenneté ? d’ouverture au monde singulière. Et c’est N°135 Mai 2017
YVES MICHAUD Dialoguer 3 « Réformer l’État exige de ses architectes exemplarité, courage. Et intelligence. Qu’il est loin le temps de Michel Rocard premier Ministre… » © Ian Hanning / Réa1 © Giovanni Cittadini Cesi / Theâtre du Rond Point 1« Une condition essentielle à la diffusion de la citoyenneté, à l’acceptation des devoirs comme étant la condition des droits, est l’exemplarité de ceux qui dictent la loi.» 2« Le succès de Marine Le Pen et de Donald Trump est la conséquence de l’inconséquence des dirigeants politiques qui les ont précédés 2 et qui ont « oublié » la « clientèle » des précaires, des archi pauvres, des inéduqués mais aussi des fonctionnaires, des enseignants, des artisans, des patrons de TPE/PME. » 3« La religion de la « non transgression » aseptise notre liberté d’expression donc nos relations humaines donc nos consciences. Critiquer ou rire de l’islam, des juifs, des catholiques, des minorités, des féministes… devient éminemment suspect, et même répréhensible. Ainsi coexistent désobéissance généralisée et correction politique généralisée, qui produisent un climat d’absolue hypocrisie. » (ici Patrick Timsit)N°135 Mai 2017 © Fred Marvaux / Réa Acteurs de l’économie - La Tribune 19
Dialoguer YVES MICHAUD absolument centrale, et des réponses qui « L’hyper lui sont apportées dépendent les condi- flexibilisation desdans ce terreau, dans cet héritage iden- tions de cette (in)compatibilité avec la relations humainestitaire que l’immense majorité des Fran- citoyenneté telle qu’elle est vécue inti- et sociales qu’ellesçais ont façonné leur propre identité. mement et se pratique publiquement en suscitent confèrentVotre comme mon identité résultent de ce Europe. À l’instar d’Abdelmajid Charfi, aux nouvellesmouvement. Les réalités migratoire, ter- nombre d’intellectuels et de théologiens technologies deroriste, sociologique telles que vous les éclairés au Maroc, en Tunisie ou en commander d’êtredécrivez, enjoignent-elles de reconsidé- Égypte s’y affairent, et explorent les voies déloyal. Mais parcerer cette part de notre identité commune, non d’une sécularisation de l’islam mais que sa contestationde mettre fin au multiculturalisme ? Ces d’une circonscription au seul domaine grandit, la demandemigrants constituent-ils une menace pour religieux. D’ailleurs, dans la Tunisie qui de loyauté est élevée »des citoyennetés en Europe ? a initié le « printemps arabe », les isla-Qu’ils n’appartiennent pas à la culture reli- mistes d’Ennahdha ou les figures du © Sergey Ponomarev / The New York Times-Redux / Réagieuse « historique » de l’Europe : la chré- féminisme islamiste ont accepté que latienté, n’est pas un obstacle dès lors qu’ils charia ne figure pas dans la nouvelledécident de souscrire aux règles républi- constitution démocratique et ont sanctua-caines. En revanche, leur méconnaissance risé le principe de « liberté religieuse. »de notre culture politique démocratique est C’est un progrès qui doit être souligné.un handicap sévère à leur assimilation Et d’ailleurs que les Européens doiventcitoyenne. Comment peut-on embrasser saluer avec humilité : quel pays n’a pasnaturellement le socle de la citoyenneté (eu) dans son paysage politique des for-française ou allemande lorsque soi- mations « démocrates-chrétiennes » ?même, ses parents, ses grands-parents,avons vécu sous un régime théocratique L’islam serait-il donc naturellement (in)voire despotique, sous une constitution soluble dans la République ?ignorant la séparation du culte et de L’islam est absolument incompatible avecl’État, sous la coupe d’une religion dont la République. Mais ne nous méprenonscertaines expressions sont incompatibles pas : tout pouvoir religieux est difficile-avec les racines républicaines ? ment compatible avec le pouvoir républi- cain, et l’islam l’est simplement davantageConsidérez-vous dès lors que les attri- que d’autres, et même consubstantielle-buts théologiques et cultuels de la reli- ment. L’une des conditions à l’accom-gion musulmane hypothèquent l’exercice plissement de l’aspiration citoyenne estd’une citoyenneté occidentale – au-delà d’être parvenu à repousser les expres-de française ? sions, les manifestations de la religionComment peut-on séparer la charia au plus loin dans la croyance intérieure ;du droit positif ? Cette question, quicerne les enjeux de l’islam politique, est« S’interroge-t-on sur les raisons qui conduisent un (bon) tiers des enseignants « Oui, l’Occident est redevable à l’égard desdes établissements « difficiles », usés par les conflits, l’absentéisme, les menaces, la violence, migrants que sa politique internationale a précipitésles pressions – enseigner Darwin, c’est s’exposer à une levée de boucliers –, la prolétarisation dans le chaos. Mais non, pas à n’importe quel prix. Etde leur condition, à donner leur voix au Front national ? » certainement pas celui d’un accueil de masse. » « En Tunisie, les islamistes d’Ennahdha ont accepté que la charia ne figure pas dans la nouvelle constitution démocratique et ont sanctuarisé le principe de liberté religieuse. C’est un progrès, que d’ailleurs les Européens doivent saluer avec humilité : quel pays n’a pas (eu) dans son paysage politique des formations « démocrates-chrétiennes » ? »20 Acteurs de l’économie - La Tribune © Robert Kluba / Réa N°135 Mai 2017
YVES MICHAUD Dialoguertrois siècles furent nécessaires pour que d’une certaine autorité dans chaque vous avez exercé une responsabilité deles pays d’Europe y parviennent à partir strate – politique, éducationnelle, écono- dirigeant et de manager. L’organisation,du XIVe siècle, le labeur est long, caho- mique, sociale – composant la société, on les desseins, les réalités – aussi bienteux, parfois périlleux. C’est à cela que ne peut qu’être pessimiste. Et que per- sociales qu’économiques – de l’entre-les dirigeants et les ressortissants des sonne ne croie que la réhabilitation de prise forment-ils un terreau de citoyen-pays musulmans doivent s’employer s’ils l’autorité soit redoutée par ceux qu’elle neté ? « Entreprise citoyenne », locutionveulent ajuster leurs nations sur les fon- est censée viser ; l’étude sur l’autorité copieusement employée ces vingt der-dements citoyens de l’Occident démo- que j’ai effectuée avec un enseignant nières années et à bien des égards ins-cratique. Ils doivent œuvrer à éradiquer d’un établissement de Seine-Saint-Denis trumentalisée à des fins marketing,toute motivation ou tout prosélytisme révèle que dans sa majorité et une fois constitue-t-elle un oxymore ? Ou peut-anti-républicain si répandus et si insup- les « irrécupérables » exclus de la classe, elle, à certaines conditions, revêtir uneportables, et pour cela peuvent s’inspi- cette jeunesse supposée turbulente aspire réalité ?rer de ce qui annonça le contrat social : à l’ordre, apprécie le calme, savoure un Dans un tel établissement, il existeune crise de l’autorité, une contestation climat qui permettent de découvrir, d’ap- quelques moyens de participer à l’éveilsans précédent de l’autorité, c’est-à-dire la prendre, de comprendre. De s’instruire. ou à la prise de conscience citoyens. Lequête d’un modèle qui assure au peuple premier auquel je m’étais employé, étaitde « s’obéir à lui-même » plutôt qu’aux « Reconstruire la citoyenneté, c’est reve- de simplifier et de clarifier le fonctionne-suzerains de toutes sortes (roi, empereur, nir aux idéaux d’engagement citoyen, ment avec pour objectif de désengorgerpape, seigneur)… Et c’est l’association de c’est créer les conditions d’une citoyen- l’excès de bureaucratie et de responsa-cette quête au confinement, même à la neté voulue, engagée, et non passive et biliser. L’inventivité, remarquable, dontclaustration « intérieurs » de la foi qui consommatrice de droits et de devoirs. » les collaborateurs, associés à la démarche,autorise la réalisation de la théorie de la Et vous assortissez votre programme firent preuve accoucha d’initiatives inté-souveraineté... d’une liste de sanctions pour les citoyens ressantes. C’est dans ce sens que j’avais renégats : privation des droits politiques, notamment redéfini de fond en comble… Laquelle fait l’objet d’interprétations économiques, sociaux ; déchéance de la le règlement intérieur – dans les limbesextrêmement sensibles. L’idéologie sou- nationalité pour les auteurs de « crimes depuis un siècle –, de sorte qu’il soitverainiste constitue l’humus commun à de trahison ou punis de peines infâmantes à la fois très scrupuleux et source detoutes les formations politiques anti-eu- et a lictives », application intransigeante grande liberté. Exemple ? Le conseil deropéennes et sécessionnistes. L’attribut des peines, remise en question du regrou- discipline était composé jusque-là majo-« national » communément arrimé à la pement familial, durcissement du sys- ritairement de personnel administra-souveraineté n’est-il pas aussi dangereux tème pénitentiaire et judiciaire, recours tif et minoritairement de représentantsqu’obsolète ? à l’apatridie, et même « peine de mort étudiants ; j’ai inversé le rapport, et enUne fois, effectivement, qu’il est désin- civile. » Une longue énumération – dont huit ans nous n’avons prononcé qu’unedexé du caractère « national », le concept d’ailleurs vous assumez qu’elle puisse seule convocation en conseil. Bien sûr, ilde souveraineté n’est nullement dépassé. être « choquante » – que ne contreba- y eut aussi quelques couacs. Il en fut deLe « pouvoir souverain » est celui que lance aucune éclaircie. Or, construire la disparition, souhaitée dans cette mêmedécident les citoyens réunis ensemble. sa citoyenneté, ce n’est pas que charge, logique de simplification, des contrôlesÀ ce titre, il n’est pas mécaniquement défense, lutte ; c’est aussi dynamique, des documents étrangers préalables àsynonyme de démocratie, puisque lesdits joie, perspective, partage… l’inscription. Je militais pour le modèlecitoyens peuvent le confier par exemple Davantage que celui de plaisir ou mêmeà une monarchie constitutionnelle, et de joie, le levier de l’intérêt est le plus « Incivisme moumême à une sorte de Léviathan ou de efficace pour justifier et donc motiver la puis non civisme puistyran ainsi imaginés par le philosophe démarche de citoyenneté. Et c’est d’ail- incivisme meurtrier :anglais Thomas Hobbs (1588-1679). leurs ce que la formation civique devrait le processus glissantL'organisation de ce pouvoir souverain intégrer dans sa pédagogie. Être citoyen, caractérise ladécoule de la constitution de la commu- c’est-à-dire souscrire aux règles de L'État trajectoire denauté politique, laquelle peut prendre des de droit républicain, apporte de nom- plusieurs terroristesformes ethniques ou religieuses – cette breux avantages : protection contre l'ar- islamistes. Etdernière caractérise notamment l’Arabie bitraire du pouvoir – même si, dans ce démontre une règlesaoudite. Être Européen, c’est accepter domaine précis de la justice et comme inaliénable : l’absencel’héritage de plusieurs siècles de la « com- le dénonçait déjà Montesquieu, le chan- de sanctions et demunauté politique » qui la particularise. tier de l’indépendance est immense, qui limites libère les exhorte à une stricte étanchéité des pou- désobéissances desToute crise constitue une dynamique voirs non seulement exécutif et législa- plus nuisibles auxde transformation, et doit être considé- tif, mais aussi judiciaire afin de conjurer plus funestes »rée également comme l’opportunité d’y toutes les confusions synonymes de des-déceler des germes féconds. La crise potisme –, sanctuarisation de la liberté, Acteurs de l’économie - La Tribune 21d’autorité qui résume votre examen n’est- égalité des chances favorisée par la méri-elle pas la simple métamorphose de la tocratie et l'élitisme républicains, solida-légitimité de l’autorité, du rapport à l’au- rité (soins, etc.). Donner conscience detorité, de l’exercice de l’autorité soumis à cette réalité est déterminant pour valori-des injonctions certes contestables mais ser l’acte de citoyenneté.aussi vertueuses ?La période que nous traversons est celle Aux commandes de l’École nationaled’un basculement, et sans restauration des beaux-arts de Paris (1989–1997),N°135 Mai 2017
Dialoguer YVES MICHAUD« L’islam est absolument incompatible avec la République. Mais ne nousméprenons pas : tout pouvoir religieux est difficilement compatible avecle pouvoir républicain. L’islam l’est simplement davantage que d’autres »américain : une déclaration sur l’hon- emparés du « sujet » de la citoyenneté, et Ce trimestre de service civique auraitneur de l’authenticité desdits documents, surtout de ses supports – identité, équi- d’abord pour objet d’établir un contrôle :toute mystification se soldant par la sanc- libre des droits et des devoirs, préférence de la santé, des connaissances, des apti-tion appropriée. Lorsqu’au moment de et déchéance nationales, etc. – doit-il tudes. Ainsi pourrait-on repérer et répa-conclure son cursus et donc après cinq désespérer de ce que le successeur de rer tout à la fois ceux qui sont en panneannées d’études nous découvrîmes qu’un François Hollande est appelé à mettre en de savoirs et ceux dont le formidablefutur diplômé originaire de Bulgarie avait œuvre dans ce domaine ? potentiel intellectuel est en jachère. Ilfalsifié son expérience préalable, je déci- Comment ne pas être déprimé ? Com- permettrait aussi un réel brassage social,dai de ne pas apposer ma signature sur ment croire encore ? La France a besoin aujourd’hui rendu impossible par toutesson parchemin. En dépit des nombreuses de réformes radicales, en profondeur. les politiques publiques catégorisant,pressions pour que je fasse preuve d’in- François Fillon ? Exclu, car la mise en cloisonnant, hiérarchisant. Enfin, cettedulgence. Le respect du contrat passé, œuvre de ces réformes ne peut être jeunesse serait appelée à exercer desle respect de la parole, et donc la stricte conduite que par un Président considéré tâches qui favorisent la découverte, laapplication des règles édictant l’équilibre intègre, dont les actes sont cohérents avec curiosité, l’utilité, le labeur, l’effort, l’in-des droits et des devoirs, c’est cela, aussi, les discours. Emmanuel Macron ? Son confort, le respect, la solidarité… bref,être en citoyenneté. besoin de rallier un électorat très large ce qui compose l’appartenance citoyenne.La situation des entreprises marchandes l’amène à engager des promesses caté-et privées est différente. Trois grands gorielles, et son excès de bienveillance « L’état de santé » de la citoyenneté encorps les composent : celui des action- s’apparente à un maquillage censé faire France apparaît comme « un » élémentnaires, celui des salariés – parmi lesquels illusion et masquer l’absence de fond. de la radiographie sociale, sociétale,le cercle des dirigeants doit être distingué il est un disciple de François Hollande, humaine, même civilisationnelle de notre« Nous sommes potentiellement en révolution, il est même l’heure denous mettre concrètement en révolution. Juguler le déclin intellectuelet moral est à ce prix »–, celui des clients. Et on pourrait ajouter parfaitement croqué par le député de contemporanéité, il « dit » substantiel-celui de l’environnement (impacts social, l’Essonne Malek Boutih l’assimilant à un lement de la volonté et de la capacitéterritorial, climatique, etc.). Or la gou- guichetier distribuant les prébendes au individuelles et collectives de créer et devernance censée assurer l’équilibre des gré des groupes sociaux venus le sollici- bâtir ensemble, et même, comme notredevoirs et surtout des droits de toutes ces ter. Quant à Marine Le Pen, porte-voix dialogue l’introduit, de vivre ensemble. Leparties prenantes n’est qu’une illusion, d’un archipel de catégories sociales injus- malade est au plus mal…et même une imposture. Leurs intérêts tement déconsidérées, son programme C’est incontestable. Mais ce n’est passont intrinsèquement en conflit, il est est simpliste, inapplicable et même définitif. Le monde est un mouvementextrêmement rare sinon de les accorder dangereux. Réformer l’État exige de ses perpétuel, qui périodiquement brilleau moins d’assurer leur convergence, et architectes exemplarité, courage. Et intel- et s’affaisse, progresse et stagne – voiredans ces conditions conférer aux entre- ligence. Qu’il est loin le temps de Michel recule. À l’usure ou à la dégradationprises un rôle de citoyenneté n’est pas Rocard premier Ministre… momentanées, il existe des pansements,crédible. Surtout lorsqu’elles sont davan- des remèdes, dont la nature et la puis-tage assujetties au capitalisme financier et À quelles conditions « réalistes » – com- sance sont adaptées à l’ampleur du mal.spéculatif – déterminé à confisquer sans patibles avec le marché de l’emploi, Ce XXIe siècle est celui d’un changementvergogne et sans moral le produit du tra- le secteur artisanal, les compétences monumental de paradigme, d’un contextevail – qu’au capitalisme entrepreneurial et associatives, les sources de financement de révolution. Oui, nous sommes poten-d’innovation. public –, un service civique universel tiellement en révolution, et il est l’heure de peut-il voir le jour ? L’engagement d’Em- nous mettre concrètement en révolution.La manière dont le cénacle politique et manuel Macron de restaurer un service Juguler le déclin intellectuel et moral estles candidats à la Présidentielle se sont militaire devrait vous séduire… à ce prix.« Actionnaires, salariés, clients, environnement : la gouvernancecensée assurer l’équilibre de leurs devoirs et de leurs droits n’estqu’une imposture. Ainsi, conférer aux entreprises un rôle de citoyennetén’est pas crédible »22 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
YVES MICHAUD Dialoguer « La crise de citoyenneté est plus aiguë que les crises de la démocratie et de l’identité. Parce qu’elle met en cause les fondements même du vivre-ensemble »N°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 23
Dialoguer RUBRIQUE DE NOM SCHOOL OF MANAGEMENT SCHOOL OF MANAGEMENT LES CANDIDATURES SONT OUVERTES think largeEtudier le monde * depuis Lyon Julie - Master 1 MAE Management Général Licences, Licences en Formation Continue professionnelles, Masters, MBA, Doctorats, Executive DBA Formation initiale, alternance, cursus à temps partiel pour les professionnels* Penser large 24 Acteurs de l’économie - La Tribune iae.univ-lyon3.fr N°135 Mai 2017
ÉDITORIAL DialoguerOL’ÉDIT RIAL,DENISLAFAYFRANÇOIS FILLON, LA CITOYENNETÉ DÉSHONORÉEJ« e suis conscient que mes propos peuvent choquer », concède-t-il dans © Hamilton / Réa « Son « inexemplarité » l’épilogue de son vif essai (Citoyenneté et loyauté, Kéro 2017). Le philo- exclut François Fillon » sophe Yves Michaud exprime simplement la vérité, ou plutôt sa vérité telleque son expérience et ses convictions la cernent (p.6). Xénophobe, identi- Yves Michaudtaire, islamophobe, réactionnaire est son examen d’une citoyenneté qu’iljuge en déliquescence, menacée par la vague migratoire et certains prin- De la première, il ne fallait rien attendre, tant son idéologie, sa tactiquecipes de la religion musulmane, rongée par le laxisme, vidée de la loyauté et et sa rhétorique se nourrissent d’une contestation victimaire du fameuxdu serment censés la modeler ? Non. Indéniablement l’absence de nuances « système » – médiatique, institutionnel, judiciaire au gré de ses intérêtsdérange, la radicalité de son analyse reflète une réalité partielle – et peut- ou de ses turpitudes – adoubée par son électorat. Mais de François Fillon…être partiale. Mais quiconque connaît l’« œuvre » philosophique, artistique dont la campagne aux primaires, notamment pour se distinguer de Nicolas– il dirigea l’Ecole des beaux-arts de Paris – et éducationnelle de l’intéressé Sarkozy, encensait l’intégrité… Un Fillon dont le cas est symptomatique dudoit lire son propos avec… loyauté. Et responsabilité. Car il est en premier lieu « climat laxiste par la faute duquel, dénonce Yves Michaud, on repousse lesun cri, en faveur non d’une identité nationale, d’une citoyenneté nationale, limites morales ou éthiques petit à petit, sans véritable conscience de la faute,d’un retour à la racine « gauloise » ainsi espérés par les caciques de la droite souvent conforté par l’entourage, et « encouragé » par une position profession-dure ou de l’extrême droite, mais au profit d’un vivre-ensemble, d’une com- nelle à qui est confié le soin de rédiger discrètement les lois et amendementsmunauté humaine, d’une simple identité républicaine aujourd’hui gangré- les plus juteux et protecteurs pour son statut. L’analyse des dérives du candidatnés. Un cri auquel sa confrontation au réel d’un collège de Gennevilliers LR démontre que la distinction entre les fautes légales et morales n’est pasdonne force et légitimité. Un cri strident, et qui dérange le « bien-penser » toujours aisée, et qu’à partir d’une loi particulièrement permissive (en l’oc-parce qu’il prend appui sur des faits, sur des observations empiriques, sur le currence autorisant l’emploi de parents comme attachés parlementaires) sequotidien d’un établissement qui incarne ce que la République est supposée superpose une succession d’erreurs ou de fautes « border line. » Jusqu’à l’inac-di user le mieux : l’éducation – plus précisément l’ouverture à l’émancipa- ceptable, c’est-à-dire le reniement des convictions, la volteface la plus inouïetion puis à l’accomplissement de soi –, et dans son sillage, l’enseignement lorsque l’engagement à se retirer de l’investiture en cas de mise en examen estdes droits et des devoirs, ce lien indéfectible si vulnérable et si mobile qui balayé d’un revers de main. » Autant de raisons pour lesquelles, insiste celui quicimente toute relation humaine au sein d’un collectif (famille, entreprise, co-fonda l’Université de tous les savoirs, « François Fillon est exclu. »société) et donne sa consistance à l’adverbe ensemble arrimé aux verbes Exclu parce que la mise en oeuvre de toute réforme qu’il promet exige de soncréer, bâtir, partager. Lorsque cet équilibre des droits et des devoirs n’est inspirateur la confiance, donc la cohérence des discours et des actes, doncplus assuré et n’est plus accepté, comment peut-on regarder, considérer, l’exemplarité. Oui, l’exemplarité forme bel et bien « une condition capitale à la dif-accueillir l’autre ? Comment peut-on cultiver la conscience de l’autre ? Com- fusion de la citoyenneté. » Règle valable partout : là encore au sein de la famille,ment peut-on entretenir ce qui fait société : la solidarité ? de l’entreprise, comme de toute la société. Et particulièrement en politique, où l’incivisme ne tolère aucune tolérance. Le sabordage qu’il a orchestré à des finsLe spectacle, édifiant, qu’aura produit la campagne présidentielle n’est strictement personnelles, au détriment de la famille politique qu’il représente, que la démonstration, implacable, de la théorie d’Yves Michaud. La et incompatiblement avec l’esprit et l’application de son programme, disqualifie démocratie de citoyenneté est malade ; comment s’étonner alors François Fillon. Pour longtemps. Y compris s’il remporte le scrutin final.que la démocratie politique et représentative soit à l’agonie, que la pre-mière place du premier tour du scrutin soit, pour l’heure, promise au Front C’est au nom de cette même exigence de citoyenneté que Nicolas Hulot anational ? Oui, comment s’en étonner lorsque le dépérissement de « l’élite engagé un combat, aussi utopique que juste, pour faire reconnaître Donaldpolitique » est à ce point criant ? Dépérissement intellectuel ? Une cer- Trump coupable d’écocide (crime contre le vivant), c’est-à-dire de parti-titude, surtout lorsqu’on met en perspective son rayonnement, y com- ciper délibérément au massacre de la planète – humaine, végétale, animale. Cepris artistique et culturel, sur celui des « Pompidou, Mitterrand et autres que le président américain entreprend – retrait du Clean power plan, relance deRocard. » Dépérissement moral ? Rien n’est moins sûr, en revanche. la production de charbon et du projet de pipeline géant Keystone XL, nominationNonobstant le « cas » Chirac qui aura fait la jonction entre elles, ces dif- d’un climato-sceptique aux commandes de l’Agence de protection de l’environ-férentes époques révèlent des contextes contrastés : le cadre législatif a nement (dont le budget a été aussitôt mutilé de 31 %), contestation systématiquesinon éradiqué au moins sensiblement contraint les possibilités de délits des études scientifiques toutes plus alarmistes les unes que les autres, une stra-financiers, les nouveaux outils technologiques ont bouleversé – pour le tégie économique domestique et une multitude de prises de position géopoli-pire mais aussi pour une meilleure transparence – l’exercice politique, le tiques susceptibles d’enflammer la planète – prend, en e et, la forme d’un crimetravail d’investigation des journalistes n’a jamais été aussi performant, contre l’humanité. La bataille diplomatique et judiciaire est perdue d’avance,le rejet de l’opinion publique pour la « chose politique » atteint un niveau mais sa pertinence et sa noblesse peuvent sceller la contestation populaire,inégalé que le cénacle politique a rme s’employer de toutes ses forces à dynamiser la société civile, et même solidariser toute la société. La citoyennetédégonfler. A priori donc, le contexte sert la fameuse « moralisation » de la déshonorée ou le déshonneur citoyen propres à François Fillon croisent doncscène politique. Alors comment Marine Le Pen et François Fillon ont-ils pu l’honneur citoyen réveillé par Nicolas Hulot. Deux cas pour incarner, s’il en étaitainsi braver la loi, se fourvoyer dans l’inacceptable citoyen sans renoncer besoin, l’absolue nécessité de citoyenneté, l’impérieux besoin d’une démocratieà briguer le sésame citoyen ? de citoyenneté restaurée. Le combat sera rude. Mais il est vital.N°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 25
Dialoguer RUBRIQUE DE NOM édition 2017Partenaires Partenaires N°135 Mai 2017 médias26 Acteurs de Informationsl’économie - La Tribune et inscriptions sur acteursdeleconomie.com
RUBRIQUE DE NOM DialoguerCULTURE[S]D’ENTREPRENEURSRévolutionner, éduquer, rebondir, mobiliser, créer…Découvrez les parcours d’entrepreneurs qui ont valeur d’exemples, parcequ’ils entreprennent utilement et avec sens, pour les autres et pour eux-mêmes. PRIX PRIX PRIX PRIX PRIXRÉVOLUTIONNER ÉDUQUER REBONDIR MOBILISER CRÉERMERCREDI 14 JUIN 2017Salon des Entrepreneurs18hLyon, Cité InternationalePRÉSIDENT DE CÉRÉMONIEBARTABAS,artiste écuyer, metteur en scène, fondateur du Théâtre équestre Zingaroet de l’Académie équestre nationale du domaine de Versailles.GRAND PRIX 2017 DE L’ESPRIT D’ENTREPRENDREJEAN-MARC BORELLO,président du directoire du groupe SOSN°135 Mai 2017 DE L ÉCONOMIEActeurs de l’économie - La Tribune 27
SOMMAIRE Dialoguer EntreprendreN°135 Entrée en matière 3 Handicap et économie 56 François Gabart 6 Le poids des mots, 60 Yves Michaud 25 le choc des idées 61 « Ré-vo-lu-ti-on ! » 30 Métropoles Éditorial 32 un exemple pour l’État ? L’actualité en images 34 Jean Vaylet L’initiative d’Éléonore Blondeau 36 Les dessous d'un camouflet Lu sur acteursdeleconomie.com 38 Chroniques Chroniques Tribune Virginie Martin Tribune Laurent BergerActeurs de l’économie est publié par RH Editions (capital 221 640 euros). - 51 avenue Jean Jaurès, - 69007 Lyon - Tél. 04 72 18 09 18 - Fax 04 72 18 09 21 - [email protected] - acteursdeleconomie.compremièrelettreprénom.nom @acteursdeleconomie.com - Directeur de la publication et de la rédaction : Denis Lafay - Directeur général délégué : Valérie Asti - Rédacteur en chef adjoint : Romain Charbonnier - Journalistes : Didier Bert,Anne Bideault, Stéphanie Borg, Gérard Corneloup, Dominique-Myriam Dornier, Samuel Maïon-Fontana, Maxime Hanssen, Laurence Jaillard, Karen Latour, Marie Lyan, Mathieu Perisse/WeReport, NicolasRousseau - Secrétariat de rédaction : Nicolas Rousseau - Photographes : Hamilton, Laurent Cerino - Dessinateurs : Kanellos Cob, Vic - Maquette : Marie-Anne Joly - Conférences-Débats : Steven Dolbeau - Responsablewebmarketing & communication : Eric Fossoul - Comptabilité : Sonia Girard - Abonnements - Publicité : Razala Oulka - Impression : Courand, 82 route de Crémieu, 38230 Tignieu-Jameyzieu N° de CPPAP : 0320K89381 ISSN 1620-6096 - Dépôt légal : 1er semestre 2017 - 5 n°/an - Encartage : Routalya La synergie de nos expertises : la réponse à vos enjeux cms.law/bfl/lyon N°135 Mai 2017 Nos équipes d’avocats experts en droit et fiscalité, tant en conseil qu’en contentieux, offrent à leurs clients des solutions à haute valeur ajoutée. CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon 174 rue Créqui - CS 23516 - 69422 Lyon Cedex 03 - France T +33 4 78 95 47 9928 Acteurs de l’économie - La Tribune
ComprendreInventer RespirerLe rêve de 63 Hélène Courtois 81 Coup de crayon sur… 115Cyprien Verseux 64 Astrophysicienne 82 Les nouvelles AssisesStartups et grands comptes 72 Jeunes électeurs 89 internationales du roman 116Le mariage de raison 78 Extrême limite 94 Chefs japonais et 124Génération 2050 79 Commune nouvelle d’Annecy 100 cuisine française 130À la poursuite de demain Le grand saut 106 Le grand paradoxe 134Chroniques Clusters, réservoirs d’influence 107 Orchestre national de Lyon 138Tribune Hervé Le Treut Audiovisuel public suisse 110 Tous au diapason L’odyssée de Gilles Marchand Arnaud Meunier Conférence fait sa Comédie Chroniques Domaine Guillemot-Michel Tribune Monique Dagnaud L’œuvre du vivant Tribune Nicolas BaumertN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 29
Dialoguer L’ACTUALITÉ EN IMAGES 1 LYON Les musées des Beaux-Arts de Lyon et des Confluences 1 sont aux anges. Leurs deux expositions temporaires ont battu des records de fréquentation. « Henri Matisse, le laboratoire intérieur » a ainsi réuni 162 000 visiteurs et « Antartica » plus de 530 000 personnes. 2AUVERGNE-RHONE-ALPES En fusionnant, Numélink et Clust'R numérique ont donné naissance à Digital League, le « plus grand cluster numérique de France ». Ce nouvel ensemble, visant à fédérer les entreprises de la filière régionale, représente 510 membres, 26 000 emplois et plusieurs milliards d’euros de chi re d’a aires cumulés. 3 CLERMONT-FERRAND Dans un an, Michelin mettra en œuvre sa nouvelle organisation mondiale avec plusieurs axes stratégiques dans le but d’assurer son développement et sa réussite. « Aucun départ contraint ne sera imposé », assure le président du groupe Jean-Dominique Senard. 4 LYON Une page se tourne. Après 15 années à la direction générale de l’éditeur de logiciels Cegid (2 250 salariés, 307,6 millions d’euros de chi re d’a aires), Patrick Bertrand a quitté ses fonctions en mars, remplacé par Pascal Houillon. Dans le même temps, en avril, il ne postulera pas à un nouveau mandat à la présidence de l’association Lyon French Tech. © Musée des Beaux-Arts de Lyon © DR© Vincent Munier 30 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
7 L’ACTUALITÉ EN IMAGES Dialoguer 5LYON-SAINT ETIENNE Au forceps, l’Université de Lyon a obtenu la labellisation Idex après deux tentatives avortées. Mais l’enjeu est désormais à venir puisque le projet d’université intégrée devra réunir l’ensemble des acteurs, au-delà des divergences de chacun. © Francois Henry / Réa 6AUVERGNE RHÔNE-ALPES L'industrie régionale perd 10 000 emplois par an depuis 2008. Un constat sans appel observé par l’Insee conséquence de la hausse de la productivité, baisse du volume de production et surtout l’externalisation des activités. A la fin de l’année 2013, la région comptait 489 000 emplois industriels, soit une baisse de 11 % par rapport à 2008. 7ISÈRE La mobilisation n’aura pas été su sante. Les anciens salariés d’Ecopla renoncent à leur projet de Scop. Depuis un an, ils se battaient pour reprendre leur entreprise, spécialisée dans la fabrication de barquettes en aluminium. Les discussions avec le repreneur italien Cuki Cofresco n’ont pu aboutir 6 à un partenariat industriel et commercial. 5 © Laurent Cerino / Acteurs de l’économie © Stéphane Audras / RéaN°135 Mai 2017 © Gilles Rolle / Réa © Laurent Cerino / Acteurs de l’économieActeurs de l’économie - La Tribune 31
Dialoguer L’INITIATIVE© Laurent Cerino / Acteurs de l’économie ÉLÉONORE BLONDEAU Longtemps, Éléonore Blondeau a navigué L’ÉCO-CONCEPTRICE dans les méandres des cursus étudiants sans trop savoir où ceux-ci la mèneraient. 32 Acteurs de l’économie - La Tribune Elle passe d'abord un bac STG, poursuit par un BTS gestion, pour au final entame une formation à emlyon business school. « Je n’ai jamais su ce que je voulais faire », reconnaît la jeune femme originaire de Toulouse. Au moins jusqu'à la révélation. Sur le campus de l’école de management à Écully (Rhône), impliquée dans une association pour la promotion de l’en- vironnement, elle constate le gaspillage des gobelets en plastique utilisés pour les fontaines à eau. « J’ai pris conscience de l’ impact économique et écologique d’un tel usage. » Une idée germe alors. Éléonore Blondeau imagine un concept de machine distribuant des gobelets non jetables, moyennant une caution. Diplô- mée en 2015, ce projet la suit, la pour- suit même, et lentement mûrit. Après quelques mois d’études de faisabilité et de concours, elle fait une rencontre décisive, celle qui marquera le début de l’aventure Clean Cup. Une rencontre avec celui qui devient son associé en juillet 2016, Lionel Amieux (photo). « Il réflé- chissait de son côté à un nouveau type de lave-vaisselle. Nous nous sommes révé- lés complémentaires et avons conçu une fontaine à eau zéro déchet, lavant auto- matiquement les gobelets pour un nouvel usage. » emlyon a déjà été séduite par le concept, d’autres contrats devraient être rapide- ment signés. Par-delà l’aspect environ- nemental, l’entreprise s’engage aussi dans une fabrication locale, puisque les Compagnons du devoir de Saint-Étienne sont mobilisés, ainsi que la société Imeca de Michelin. Du concept à son dévelop- pement, jusqu’à l’emploi aujourd’hui de sept personnes, ces étapes ont forgé chez Éléonore Blondeau une volonté d’entreprendre socialement. Fini le flou de l’orientation. À 25 ans, la jeune femme a trouvé sa voie et dit « s’épanouir ». RC Retrouvez Éléonore Blondeau dans l’émission Start’Up Co, proposée par TLM-Télé Lyon Métropole et Acteurs de l’économie- La Tribune, chaque 2e et 4e vendredi du mois à 19H15. N°135 Mai 2017
Santé et performance au travailOn travaillequmaineduxonestÊtre , c’est bénéficier d’une multitude Mars 2017 - Crédit photo : iStock - Coxinélisd’actions en faveur de la santé au travail :gestion du stress, nutrition, sommeil...APICIL,5e groupe de protection sociale français.Rendez-vous sur www.apicil.com/performance-socialeAPICIL SERVICES PROTECTION SOCIALE (ASPS). Société par actions simplifiée immatriculée auRCS de Lyon 453 283 103, au capital de 37 000 euros, dont le siège social est situé 38 rue FrançoisPeissel, 69300 Caluire et Cuire.Document non contractuel à caractère publicitaire.
Dialoguer LU SUR ACTEURSDELECONOMIE.COM« ANTITHÈSES HISTORIQUES, BANQUES ET FINTECH DEVIENNENT UN DUO GAGNANT :DES ENTITÉS COMPLÉMENTAIRES DESTINÉES NON SEULEMENT À COEXISTER,MAIS À ASSURER L'AVENIR DE L'UNE DE L'AUTRE »Fintech et banque : laquelle sauvera l'autre ? « Notre école n'est pasBruno Gloaguen, directeur général d’Anytime, 22 février qu'un établissement régional »« Il y a davantage de créativité Entretien avec Pascal Ray, directeuren dehors des partis politiques » de l’École des mines de Saint-Etienne, 9 marsEntretien avec Isabelle Attard, archéologue « SI LA FRANCE EST DEVENUE RAPIDEMENT PARIS, QUIet députée, 16 février EST RESTÉE FONDAMENTALEMENT LA SOURCE UNIQUE DU POUVOIR, C'EST QU'AUCUNE AUTRE VILLE, LYON LA PREMIÈRE, N'A PU RÉSISTER À CETTE DOMINATION »« Nous n'aurons pas La France, est-ce toujours Paris ?de répit tant que Alain Renaud, consultant en géopolitique et géostratégie, 15 marsnous n'aurons pas faitrepartir l'investissementen France »Entretien avec Arnaud Peyrelongue, LU SUR « L'agriculturedirecteur du réseau Sud-Est ACTEURSDELECONOMIE.COM française est en crise.de Bpifrance, 16 mars Mais pour faire face, certains agriculteurs « L'ENSEIGNEMENT « résistants » ont mis en SUPÉRIEUR EST ABSENT place des systèmes de DU DÉBAT PRÉSIDENTIEL production inspirés de 2017 » l'agro-écologie. Un virage que doit Entretien avec Anne-Lucie Wack, désormais opérer toute présidente de la Confédération l'agriculture française » des grandes écoles, 23 mars Il faut revoir nos politiques agricoles françaises et européennes Marc Dufumier, professeur émérite à AgroParisTech, 29 mars« LES OBJECTIFS PUREMENT QUANTITATIFS DEMEURENT UTILES, MAIS LES OBSERVERSANS PORTER ATTENTION À LEURS COMPLÉMENTS PLUS QUALITATIFS EST TOUJOURS DANGEREUX.CE QUI EST VRAI LORSQUE L'ON PRÉSIDE AUX DESTINÉES D'UN PAYS L'EST ÉGALEMENTLORSQUE L'ON PRÉSIDE À CELLES DE N'IMPORTE QUELLE ENTREPRISE OU ORGANISATION »La croissance, un objectif économique trop simplisteHugues Poissonnier, professeur d'économie et de management à Grenoble école de management, 14 mars« Quand nos rêves ne se réalisent pas, « AFIN DE SAUVER LE MÉCANISME DE LA RÉFORMEne les accusons pas, mais demandons-nous DU MARCHÉ DU CARBONE POUR L’APRÈS 2020,plutôt si nous les avons su samment rêvés » IL EST PLUS QUE JAMAIS NÉCESSAIRE DE L'ADAPTER POUR LE RENDRE PLUS EFFICACE »La poésie est le pendant de l'actionBernard Devert, fondateur d’Habitat et humanisme, 23 mars Comment sauver le marché du carbone Thierry Fornas et Gérald Maradan, fondateurs d’EcoAct, 7 mars34 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
CHRONIQUES Dialoguer Auto Confort CICLa solution tout compris pour vos véhicules d’entreprise. Contactez-nous au : 0 820 302 312 0,12 € / min N°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 35CIC Lyonnaise de Banque - RCS Lyon - SIREN 954 507 976. cic.fr
Dialoguer CHRONIQUES2017, LE GRAND VIRAGE ?Guillaume Alberto Après presque 40 ans de révolution libérale, initiée Digitalisation des services, ubérisation ram-Directeur commercial banque privée justement aux États-Unis et en Angleterre, de mondiali- pante de certains secteurs, robotisation… ceschez CIC - Lyonnaise de Banque sation, de globalisation, de dérégulation… sur fond de révolutions, dont nous ne savons pas encore crises financières cycliques, d’antagonismes régionaux quelles en seront les conséquences sur nosAprès le Brexit du mois de juin et l’élection et d’inégalités croissantes, les populations semblent organisations sociales, représentent à la fois de Donald Trump au mois de novembre vouloir « souffler un peu » et retrouver quelques repères de nouveaux horizons à conquérir, mais aussi 2016, on se demande déjà quel pourrait rassurants. des risques si elles ne sont pas maîtrisées et être le futur programme des réjouissances Le mythe du retour en arrière est tenace, mais les révo- expliquées. pour 2017, et si les marchés financiers, lutions technologiques, industrielles, de même que les Les récents débats en France autour des primaires,jusque-là plutôt résilients, ne vont pas finalement céder impératifs climatiques finiront par nous rappeler que la à droite comme à gauche, ne sont que le reflet dedevant de telles inconnues. Car c’est bien un tournant coopération internationale et les échanges commerciaux ces changements à venir, et les grands mouvementsqui s’amorce dans les grands pays développés occi- sont constitutifs d’un monde plus équilibré et plus juste. politiques sont eux-mêmes traversés par des contra-dentaux, et les prochaines élections en France et en dictions et fractures qui rendent l’offre politique actuelleAllemagne pourraient aussi confirmer cette tendance. Recompositions caduque. Des recompositions sont à venir, de nou- Ce changement de paradigme en cours n’a cependant velles grilles de lecture, de nouveaux paradigmes vont pas effrayé les marchés. Les indices boursiers, aux progressivement remplacer ceux du XXe siècle défini- États-Unis notamment, n’ont jamais été aussi hauts. En tivement enterré. revanche, devant une menace inflationniste émergente Mais, « le français moyen, disait André Maurois liée au regain de protectionnisme, les marchés de taux dans Choses Nues, aime à imaginer l’avenir comme ont inversé une tendance baissière devenue presque une cristallisation du passé ». Et c’est bien là tout le inquiétante, voire malsaine. problème… Mais au-delà de tous ces chocs qui lézardent et créent quelques épaufrures sur l’édifice fragile de la reprise mondiale, d’autres ruptures, technologiques, réglemen- taires…sont à l’œuvre et provoquent, là aussi, des bou- leversements dans les organisations humaines, qu’elles soient étatiques, politiques ou privées.LES ENTREPRISES À LA RECHERCHEdu bonheur au travailDroit à l’égalité de traitement, à la formation, Françoise Albrieux les sujets suivants (article L. 2242-8 du Code du travail) : © DR au repos, à la santé, à l’équilibre entre la vie Avocat associée en droit social articulation entre vie personnelle et vie professionnelle ; professionnelle et la vie privée, à la décon- CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon objectifs et mesures permettant d’atteindre l’égalité nexion, à la prise immédiate des congés professionnelle entre les femmes et les hommes ; lutte payés, à l’égalité hommes-femmes, à l’ex- Déconnexion contre les discriminations en matière de recrutement, pression, et si tout simplement on parlait de droit au Au-delà du respect de la vie personnelle, mais sur le d’emploi, d’accès à la formation professionnelle ; inser- bonheur dans l’entreprise. L’avènement de l’entreprise terrain du respect de la santé des salariés, depuis le 1er tion professionnelle et le maintien dans l’emploi des tra- « post-industrielle » conduit les chefs d’entreprise à janvier 2017, la négociation annuelle obligatoire dans vailleurs handicapés ; modalités de définition d’un régime devoir repenser leur modèle de développement, en les entreprises doit porter notamment sur le droit à la de prévoyance et de complémentaire santé ; exercice axant sur la maîtrise des technologies de l’informa- déconnexion, dans le cadre de la négociation sur l’égalité du droit d’expression directe et collective ; modalités du tion et de la communication, sur le développement des professionnelle hommes-femmes et la qualité de vie au droit à la déconnexion et mise en place de dispositifs connaissances et sur la créativité dans un contexte travail. La loi Rebsamen du 17 août 2015, relative au de régulation des outils numériques en vue d’assurer le de mondialisation, de développement durable et de dialogue social et à l’emploi, a en effet intégré au Code respect des temps de repos et de congé ainsi que de la responsabilité sociétale. Dans ce contexte, ils doivent du travail la notion de Qualité de vie au travail, qui couvre vie personnelle et familiale. cependant prendre également en compte le bien-être Le bien-être au travail devient donc une valeur-clef et des salariés, c’est ainsi qu’un simple changement d’af- incontournable dans la gestion des ressources humaines. fectation dans un même secteur géographique ne doit Un dialogue social efficace et constructif doit pas porter atteinte aux droits du salarié, à la santé, au permettre de s’engager résolument dans un repos et à une vie personnelle et familiale, et doit être processus visant à maîtriser les nouvelles tech- justifié par la tâche à accomplir et être proportionné au nologies de l’information et de la communica- but recherché (cass. soc. 16 novembre 2016 n°15- tion, au service de la compétitivité des entreprises, dans 23.375 ; arrêt n°2082 F-D). le respect de la vie privée des salariés et en favorisant Si la Haute Cour ne met pas totalement en cause le leur bien-être au travail. Ceci devant favoriser l’attractivité pouvoir de direction de l’employeur, elle l’incite à veiller de l’entreprise, l’amélioration de la créativité, l'engage- à ce que dans ses décisions, il préserve les droits fon- ment, la motivation professionnelle, la fidélisation des damentaux des salariés. salariés et la diminution de l’absentéisme.36 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
CHRONIQUES DialoguerSANTÉ : du débat à la surenchère Éric Gérard le reste à charge des dépenses de santé ramené à boniment que d’une réflexion empreinte de © Valérie Couteron Directeur des assurances zéro. Si l’effet d’annonce d’une couverture totale des réalisme économique. de personnes prestations, notamment dentaires et optiques, est Ainsi, la Sécurité sociale garde un rôle prépondérant Groupe Agrica indiscutablement percutant, la méthode de réalisation au regard de la prise en charge de 78 % des dépenses envisagée, tout autant que la pertinence de l’objectif de santé de notre pays, portées principalement parPréoccupation majeure de nos concitoyens, restent sujets à caution. l’hospitalisation et les affections de longue durée, mais la protection sociale s’est largement invitée Si la fréquence des actes prothétiques, optiques ou elle n’assume d’ores et déjà plus que 50 % des coûts dans les débats qui animent la prochaine encore liés à l’audioprothèse reste faible, le montant de la médecine de ville et 4 % des frais d’optique. élection présidentielle. Quand les approches des factures afférentes subsiste conséquent. Pour Le solde constitue tant le cœur d’activité que la rai- et convictions divergent sur les sujets de fond autant, les 10,8 milliards d’euros de prestations cor- son d’être des organismes complémentaires, dont tels que l’avenir des retraites ou la progression de la respondants ne représentent que 4 % des 262 mil- les 42 milliards d’euros de prestations annuelles se dépendance, la plupart des candidats se rejoignent liards d’euros de dépenses de santé constatés en concentrent sur les dépassements d’honoraires, les pour brandir le Graal des ménages français, à savoir France en 2015. Et si le principe de cette prise ne auxiliaires médicaux, le dentaire, l’optique ou encore charge intégrale est retenu, on peut s’interroger sur l’audioprothèse. son financement, d’autant que les réformes succes- Un rôle aujourd’hui doublé d’une responsabilité sociale sives de notre Sécurité sociale ont plutôt résulté dans assumée qui se traduit par une implication significative des désengagements successifs destinés à résorber et croissante dans la prévention, l’accompagnement, une dette sociale de 120 milliards d’euros et un défi- les réseaux de soins et les services. En témoignent les cit qui, fin 2016, s’établit encore à quatre milliards investissements dans les insur’tech - startups dédiées d’euros. à l’assurance - qui par recours aux nouvelles techno- logies et au digital, contribuent autant à faciliter l’accès Évolutions aux soins qu’à limiter la charge des traitements curatifs. Dans ce contexte, les discours promouvant La santé participe sans conteste à la qualité de vie la prise en charge totale de ces frais par de notre société mais appelle des évolutions qui le régime obligatoire en substitution des conjuguent aussi bien la maîtrise des dépenses et le assureurs complémentaires, dont certains besoin de prise en charge que la désertification médi- prédisent la disparition, relèvent plus du cale et l’accès aux soins. ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES GRANDES Crédits Photos : © La Croix tous droits réservés - © Fotolia, Simbos. SOIRÉES2017ET LÉGISLATIVES ÉLECTORALES, INVITÉS POLITIQUES, ANALYSES DE FOND, LES DIMANCHES ÉMISSIONS SPÉCIALES… 23 AVRIL ET 7 MAI À PARTIR DE 19H. FACE AUX À RETROUVER SUR RCF.FR CHRÉTIENS, UNE EMISSION PRÉSENTÉE PAR FRÉDÉRIQUE MOUNIER TOUS LES JEUDIS À 17H LYON / 88.4 BOURGOIN-JALLIEU / 95.9 ROANNE / 88.3 Acteurs de l’économie 2-9L/0a3/T20ri1b7un1e9:0377 SAINTE-FOY-L’ARGENTIÈRE / 101.7 TARARE / 95.1 VIENNE / 94.7 VILLEFRANCHE / 91.7N°1½35paMgeaAi c2t0Ec1o7_RCF_ElectionsPres&Leg.indd 1
Dialoguer TRIBUNEDE L’URGENCE La question du travail a surgi dans la campagne présidentielle, à l’oc-DE RÉFORMER casion des débats sur la robotisation de l’économie. En fait, der-LA GOUVERNANCE rière l’utilisation du mot « travail », c’est bien de l’emploi, dont ilDES a été question. La révolution numérique va-t-elle créer des emplois ou enENTREPRISES détruire ? Personne n’est aujourd’hui en mesure de répondre à cette ques-ET DE REDONNER tion. Ce dont on est sûr en revanche, c’est que le travail va radicalement seDU POUVOIR transformer dans les années à venir ; il est indispensable que les décideursAUX SALARIÉS politiques, économiques et sociaux (re)placent ce sujet au centre des débats. La révolution numérique va transformer les manières de produire et donc de travailler, dans tous les secteurs d’activité, dans les usines comme dans les bureaux. Les notions de temps, de collectifs et de lieux de travail vont évoluer, avec le télétravail et les espaces de co-working. Le travail salarié avec un seul contrat de travail ne sera plus forcément la norme absolue, avec le développement de la poly-activité et des free-lance. La transition écolo- gique va, elle, obliger à de nouvelles compétences, dans des métiers actuels ou dans « l’économie verte ». Ces évolutions peuvent amener du progrès, comme la disparition progressive des travaux pénibles. Mais elles peuvent aussi cacher des risques. Comment empêcher le creusement des inégalités entre sala- riés qualifiés et non qualifiés ? Comment éviter le développement de nouvelles formes de taylorisme ? Notre défi collectif est de faire de ces changements des opportunités pour le développement de notre pays et pour l’émancipation des travailleurs. Le relever implique une absolue nécessité : remettre le travail au cœur des débats et de la vie des entreprises, des administrations.REMETTRE LE TRAVAIL AU CŒURDES ORGANISATIONS, C’EST D’ABORDÉCOUTER LES TRAVAILLEURSLaurent Berger CHANGEMENTSecrétaire généralde la CFDT Remettre le travail au cœur, c’est d’abord écouter ce que les travailleurs ont à en dire. C’est le sens de la grande enquête nationale sur le travail, que la CFDT a mené auprès de plus de 200 000 personnes. Selon elle, 92 % des © Info-Com CFDT Français disent se sentir utiles au travail, 82 % déclarent l’aimer. Le tra- vail reste structurant dans nos vies, mais il existe de fortes aspirations au changement. Ceux qui souffrent au travail sont ceux qui disent n’avoir aucune liberté pour l’organiser, aucun espace pour s’exprimer, aucun sens à lui don- ner. Il est temps de tenir compte de ces aspirations. De rappeler que c’est toujours le travail qui crée la richesse. Et d’adapter nos règles pour faire face au monde qui vient. Pour cela, nous devrons garantir un cadre protec- teur à tous les travailleurs salariés, fonctionnaires, indépendants grâce à de droits attachés à la personne et à une régulation de la zone grise entre salariat et free-lance. Nous devrons également créer des espaces de dialogue et de négociation, à tous les niveaux. Au plus près des réalités des tra- vailleurs, pour mieux tenir compte de la diversité des aspirations et des contraintes. Mais aussi aux niveaux stratégiques des entreprises, pour que les travailleurs et leurs représentants puissent peser sur des décisions qui les concernent. Il est urgent de réformer la gouvernance des entreprises et de redonner du pouvoir aux salariés. C’est aussi un challenge pour le syndicalisme, qui devra profondément se transformer pour continuer à remplir son rôle : nouvelles formes d’action et d'engagement, nouveaux services à inventer, etc.38 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
avec les offres Fibre Pro Gagner en efficacitéRUBRIQUE DE NOM Dialoguer avec les offDrue0s9/0F2/i1b7 arue05P/04r/1o7 Gagner en efficacité avec les offres Fibre Pro @ @ @ 1La0F0ib%re, Fibre 1La0F0ib%re, Fibre 100%Renseignez-voLuas Fibre, dans votre boutique Orange Fibreou appelez le 1016 Renseignez-vousdans votre boutique OrangeONr°1a3n5 gMeai S20A17 au capital de 10 640 226 396€ - 78 rue Olivier de Serres 75505 Paris CedAecxte1ur5s d-e3l’é8c0on1om2i9e -8L6a 6TribRuCneS39Paris. ou appelez le 1016
Entreprendre RUBRIQUE DE NOM Le handicap est un marché économique. Dans la société française moderne, l’a rmer est périlleux, tant le sujet de l’argent est encore di cilement acceptable lorsqu’il implique des personnes en situation de handicap. Pourtant, les mentalités évoluent et tendent à prouver le contraire. À condition que les aspects humains ne soient pas dévolus au seul profit.40 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
HANDICAP ET ÉCONOMIE EntreprendreHANDICAPET ÉCONOMIELE POIDS DES MOTS,LE CHOC DES IDÉESENQUÊTE, ROMAIN CHARBONNIER ls étaient tous là. Associations, handicap et le recours au secteur pro- pourraient induire, et mues néanmoins entreprises adaptées, experts : tégé et adapté ». Une place de marché – pour certaines – par une volonté de presque tous les grands acteurs sur laquelle exposaient 120 entreprises structurer leur politique RSE dans une du monde du handicap avaient adaptées (EA) et établissements ou ser- réelle démarche d’engagement, s’évitant répondu présents pour parti- vices d’aide par le travail (Esat), entre dans le même temps de s’acquitter de la ciper à la seconde édition du autres, afin d’« apporter des réponses aux contribution Agefiph. Depuis la loi du 10 salon Handicap, emploi et achats 3 000 visiteurs responsables d’achats, mana- juillet 1987, renforcée par la loi handicap responsables, organisé à Paris, gers ou RH d’entreprises sur leurs idées du 11 février 2005, les établissements de le 27 mars. Un événement reçues concernant le handicap », souligne 20 salariés et plus ont en effet l’obligation « couvrant à la fois la sensibi- Xavier Kergall, directeur général du pôle d’embaucher au moins 6 % de personnes lisation, l’emploi et le parcours salons et services du groupe Les Échos, handicapées. Si elles ne respectent pas professionnel, les achats res- organisateur de la manifestation. Des cette disposition, elles sont redevables ponsables et l’optimisation des entreprises qui, pour beaucoup, mécon- d’une contribution auprès de l’Associa- contributions des entreprises naissent et s’interrogent encore sur le tion nationale pour la gestion du fonds afin d’accroître l’employabilité handicap en leur sein, à la fois effrayées d’insertion professionnelle des handi- des personnes en situation de par les contraintes supposées qu’elles capés (Agefiph). Et pour s’en prémunir,N°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 41
Entreprendre HANDICAP ET ÉCONOMIEelles peuvent choisir une autre option : La preuve avec le ministère de la Santé, © DRPROBLÈME DE DÉFINITIONfaire appel à des entreprises spécialisées qui ne peut fournir à Acteurs de l’écono- © Laurent Cerino / Acteurs de l’économieTrès peu d’études et de travaux ont étépour effectuer de la sous-traitance, par mie-La Tribune que l’étude portant sur les conduits sur cette dimension écono-exemple. dépenses publiques en faveur du handi- mique, sur ce que le handicap génère etL’objectif du salon Handicap est de cap au titre clair : « Les dépenses en faveur rapporte. Les économistes et institutsdémystifier et sensibiliser le plus grand des personnes handicapées ont progressé de s’intéressent de loin à cette question etnombre à cette très large question et d’y 13,5 milliards d’euros de 2005 à 2014 ». aucun document – sauf sur des segmentsapporter des réponses, ainsi que de don- Rien en revanche sur son poids écono- définis, comme le chômage chez les per-ner une visibilité aux travailleurs de ce mique. « Il a toujours été considéré comme sonnes handicapées, le poids des Esat,milieu, qui en ont peu, en temps normal. une fragilité, comme étant de la charité, de les dépenses publiques, etc. – ne per-Toutefois, et derrière l’empathie que peut l’aide, de l’empathie, de la compassion. Le met de fournir de données précises sursusciter le débat auprès de chacun, le handicap n’a jamais eu de valeur positive « l’économie du handicap ». La recherchesalon est avant tout un rendez-vous d’af- dans la société et, je crois, n’en aura jamais, porte principalement sur le recensementfaires. « Un lieu d’opportunités économique, analyse Jean-Baptiste Hibon, psychoso- des personnes touchées par un handi-sociale et managériale », préfère souligner ciologue et conférencier, atteint depuis la cap, les pathologies, l’amélioration deXavier Kergall. Dès lors, le handicap naissance d’infirmité motrice cérébrale. l’accompagnement sur le plan médical,peut-il être considéré comme un marché, Lui associer le mot business, pour de nom- social, thérapeutique, sur l’améliorationà l’image de celui des seniors, de l’habil- breuses personnes cela n’est pas acceptable. de la vie quotidienne, etc. Nathalie Pel-lement ou de l’automobile ? La question Pourtant c’est bien comme cela que son image letier-Fleury, médecin, économiste etsoulève le débat tant il est difficile d’ob- peut évoluer, dès lors évidemment que l’on directrice de recherche à l’Institut natio-tenir une réponse unanime. Car le terme répond à un besoin. » Et si la définition nal de la santé et de la recherche médi-« handicap » porte une connotation était une question de nuance ? Le seul cale (Inserm), en donne deux raisons :que d’aucuns voudraient cacher. Est-il terme « marché » relève d’un champ lexi- « Il faut sans doute qu’il soit sensibilisé paracceptable et tolérable, en 2017, de parler cal aussi positif que négatif lorsqu’il s’agit un proche pour qu’un chercheur s’y intéressed’argent, de business ou de profitabilité de parler de maladies. Lui associer celui davantage, mais je pense surtout que la caté-lorsque celui-ci a pour sujet le handicap ? du « handicap » ferait donc désordre. gorie du « handicap » est difficile à délimiterPour la société civile, une large part du Pourtant, en y ajoutant le volet social, et pour obtenir une photographie économique. »monde associatif et de nombreuses per- surtout humain, il peut prendre un tout Contrairement aux seniors, par exemple,sonnes handicapées, il est encore diffici- autre sens. Ryadh Sallem se veut tout et à la fameuse silver économie qui devraitlement concevable, voire politiquement de même prudent et reste clairvoyant : générer, selon le Credoc, 130 milliardsincorrect, de le considérer comme un « Tout ne peut être vendu et généralisé. Le d’euros de chiffre d’affaires en 2020 et,marché traditionnel : peut-on décemment handicap n’est pas une économie comme les donc, représenter une source d’opportu-gagner de l’argent sur le dos d’hommes et autres. Il existe des marchés à l’intérieur du nités pour les entreprises, classer le han-de femmes ? Sportif ayant participé cinq handicap qui répondent à des besoins, avec dicap dans une catégorie s’avérerait caducfois aux Jeux paralympiques et vice-pré- cette dimension sociale en plus, mais certains tant il recouvre de situations et de réalités.sident de l’Agence de l’éducation par le handicaps auront toujours besoin de protec-sport, Ryadh Sallem admet « qu’il n’est pas tion publique et de subventions. » Patricia Gros-Micol, Handishare :évident de parler d’argent quand vous subis- Ryadh Sallem, sportif et vice-président « Le professionnalisme est demandé à nossez un accident et que vous êtes vulnérable. de l’Agence de l’éducation par le sport : 21 salariés comme dans toute autre entreprise.La douleur est une réalité ». Pour une partie « Tout ne peut être vendu et généralisé. Le handi- La bienveillance ne peut pas être infinie ».des personnes handicapées, des profes- cap n’est pas une économie comme les autres ».sionnels et représentants d’associations, N°135 Mai 2017présenter le handicap comme tel seraitpourtant « enfin » le signe qu’il n’est plusperçu comme « un boulet que traîne lasociété » depuis toujours, mais comme uncaractère parfaitement inclusif. « La per-sonne en situation de handicap (80% des 12millions de personnes handicapées ontun handicap qui ne se voit pas, NDLR)ne veut pas dépendre que de subventions, decharité et d’empathie. Elle veut être pleine-ment intégrée dans une société inclusive, sou-ligne Prosper Teboul, directeur généralde l’Association des paralysés de France(employant 14 200 salariés et disposantd’un budget de 770 millions d’euros,NDLR). Je suis donc ravi que le handicap soitpensé comme un marché, source d’opportuni-tés, dont certains peuvent, il est vrai, tirer unprofit. S’ils répondent à un besoin et prennenten compte la dimension humaine, cela nem’ennuie pas. Enfin, le handicap ne sera plusseulement considéré comme un coût. » Carc’est encore bien l’image dont il souffre.42 Acteurs de l’économie - La Tribune
HANDICAP ET ÉCONOMIE EntreprendreAvancer des chiffres globaux n’aurait, © Laurent Cerino / Acteurs de l’économie« Est-il acceptable UN VRAI CHANGEMENTaux yeux de certains acteurs associatifs, © Jerome Deyaet tolérable, en 2017,« En France, nous avons encore du mal àaucun sens. Puisqu’elle englobe toutes les de parler d’argent, associer les deux mots, comme ce pouvaitformes de handicaps – visibles ou non, de business ou de être le cas pour l’économie sociale et solidaireplus ou moins invalidantes –, les EA ou profitabilité lorsque à ses débuts, mais on va enfin de l’avant »,Esat, les startups innovantes, les four- celui-ci a pour sujet reconnaît Romain Truchi, chargé denisseurs de matériels, de technologie, les le handicap ? » mission au sein de la chambre régionaleétablissements spécialisés, l’emploi des d’économie sociale et solidaire d’Au-handicapés, le poids des associations, de la chercheure estime que trop peu d’élé- vergne-Rhône-Alpes. Ne pas vouloirla recherche, etc. Il faut remonter au 20 ments permettent de fournir de nouvelles parler d’économie du handicap, seraitjanvier 2005, soit quelques jours après données : « C’est encore plus sous-docu- donc une question de culture, commel’entrée en vigueur de la loi du 1er janvier, menté qu’à l’époque. La question est toujours parler d’argent en société. C’est ce quepour que cette question soit le thème cen- réduite au budget social. » En 2003, Annie soutient également Prosper Teboul, quitral d’un colloque baptisé « Économie du Triomphe avait écrit un article, publié note cependant un vrai changement deshandicap ». « L’économie du handicap est sur le site handicap.fr, dans lequel elle regards et des discours, qui y portentà la fois mal connue et mal documentée en appelait à « cesser de parler du « poids » un intérêt de plus en plus grand. RyadhFrance et se réduit souvent à une comptabi- financier des personnes handicapées et de Sallem prévient néanmoins : « Il fautlité des dépenses consacrées aux personnes leur « prise en charge » : celles-ci sont des simplement de l’équité et savoir construireen situation de handicap, contrairement acteurs économiques à part entière et source ensemble, avec les différences, en trouvant leaux pays anglo-saxons dans lesquels les de vraie « richesse » pour l’économie natio- juste équilibre et non pas en voulant toujours« disability studies » (mouvement prônant nale ». Une position qui avait nourri la tout généraliser. Ce serait une erreur de direl’étude du handicap dans son contexte critique. Quinze ans plus tard, et si cela que nous sommes comme tout le monde »,social, politique et culturel, NDLR) sont suscite le débat, les mentalités évoluent et tempère celui qui est également fonda-très développées », résumait la présenta- semblent néanmoins plus ouvertes. teur de CAPSAAA (Cap sport art aven-tion de l’événement organisé par Annie ture amitié) et fellow Aschoka. « AlorsTriomphe, alors directrice de recherches Prosper Teboul, directeur général d’APF : que la société française a caché durant desà l’Inserm et spécialiste de l’économie des « La personne en situation de handicap ne années ses minorités, si le handicap devientpolitiques sociales en direction des per- veut pas dépendre que de subventions, de un objet de marketing, je me dis que lasonnes handicapées. Dix ans plus tard, charité et d’empathie. » société ne l’estime plus comme un frein, mais comme un objet de reconnaissance », ana-Jean-Baptiste Hibon, psychosociologue : lyse pour sa part Yann Echinard, maître« Associer le mot business au handicap, de conférences en sciences économiquesc’est bien comme cela que son image à Sciences-Po Grenoble. Pour lui, il fautpeut évoluer. » voir une évolution des mentalités à la fois dans le rôle qu’exercent les médias ou leN°135 Mai 2017 sport notamment, mais aussi par le lien avec le vieillissement de la population. « Bien plus qu’un phénomène, cela trans- forme la relation au handicap », soutient-il. L’évolution de sa perception serait donc en marche, poussée par un autre volet qui bouleverse des pans entiers de la société, celui du numérique. Depuis 10 ans, il a ainsi complètement revu les processus d’innovation et s’est immergé dans l’en- semble des secteurs d’activités, obligeant les acteurs à réfléchir à de nouvelles stra- tégies. Pour le handicap, il a constitué un point d’orgue, ouvrant le champ des pos- sibles et cela à tous les niveaux, en parti- culier sur l’innovation et l’emploi. Acteurs de l’économie - La Tribune 43
Entreprendre HANDICAP ET ÉCONOMIE © Brian du Halgouet - Thiercelin Dudouit Le salon Handicap, emploi et achats responsables est avant tout © Laurent Cerino / Acteurs de l’économie un rendez-vous d’affaires, « un lieu d’opportunités économiques, sociales et managériales ». « L’innovation par un produit ou un service apporte une réponse à la contrainte ».44 Acteurs de l’économie - La Tribune
HANDICAP ET ÉCONOMIE Entreprendre © Laurent Cerino / Acteurs de l’économie Depuis 10 ans, le numérique a constitué un point d’orgue pour le handicap ouvrant le champ des possibles et cela à tous les niveaux, en particulier sur l’innovation et l’emploi.« Je suis ravi que SECTEUR PORTEUR ET INNOVANT nous n’avons pas souhaité nous concentrerle handicap soit Si les entreprises ont toujours innové sur une niche, précise Pierre-Alain Gagne,pensé comme un en faveur des personnes en situation de son fondateur. Le rendre jouable pour tous :marché, source handicap, développant des matériels à la des personnes déficientes visuelles, excluesd’opportunités, pointe, et parfois rendus accessibles à tous habituellement du marché des jeux vidéo,dont certains peuvent comme la télécommande – qui fut d’abord aux personnes valides, c’est être le plus inclu-tirer un profit. développée pour les personnes handica- sif possible. » Et ce fut un succès puisqueS’ils répondent pées –, l’innovation bousculera les codes 850 000 téléchargements ont été enregis-à un besoin et faisant naître aussi une multitude de star- trés. Se définissant comme socialementprennent en compte tups, créées pour répondre à des besoins responsable, Dowino considère la per-la dimension humaine, en développant des applications, objets sonne handicapée « comme n’importe quelcela ne m’ennuie pas. connectés, logiciels, etc. Engagées aussi consommateur, pour qui nous développonsLe handicap dans une démarche d’économie sociale des produits correspondant à des besoins »,ne sera alors plus et solidaire. et continue de concevoir des projets pourseulement considéré L’innovation se révèle donc un enjeu l’intérêt général, mais toujours avec uncomme un coût » majeur pour le handicap, si bien que modèle économique viable. durant le salon Handicap à Paris, une Le handicap est-il aujourd’hui davan-N°135 Mai 2017 vingtaine de startups étaient présentes tage perçu comme un secteur porteur pour la première fois sur un village dédié. et innovant ? « Il faut le voir comme un « L’innovation par un produit ou un service levier », affirme Yann Echinard. L’an apporte une réponse à la contrainte », sou- dernier, bpifrance lançait le premier ligne Jean-Baptiste Hibon. Avec A Blind appel à projets Piave (Projets industriels legend, le studio lyonnais Dowino a ainsi d’avenir) avec le « concours handicap et voulu proposer un jeu vidéo disponible innovation : autonomie à tous les âges pour les personnes malvoyantes, mais pas de la vie et conception universelle », à la seulement, puisqu’il est accessible à tous. demande du ministère de la Santé. Son « Pour des raisons de marché et de coûts, objectif visait à soutenir des PME dans Acteurs de l’économie - La Tribune 45
Entreprendre HANDICAP ET ÉCONOMIE« Comme tout secteur où les financements de l’État abondentet qui peut s’annoncer lucratif, le handicap attire des entrepreneursplus intéressés par l’appât du gain que par la valeur sociale »leur développement de produits, services peut être infinie. » Une philosophie qui fait management. Mais Nathalie Pelletier-et solutions innovantes répondant aux la force de cette PME de la banlieue lyon- Fleury veut rester lucide : « Je ne souhaitebesoins spécifiques des personnes en naise qui réalise près de 600 000 euros de pas faire de généralités, mais j’ai du mal àsituation de handicap. Sur les 31 dossiers chiffre d’affaires, et qui permet à sa fonda- croire que les entrepreneurs soient altruistes.déposés, neuf projets ont été lauréats avec trice de sensibiliser davantage ses clients En auraient-ils fait de même si la loi n’avait1,3 million d’euros d’aide en subventions qui viennent désormais pour la « qualité pas été promulguée ? »à se partager. Si l’initiative reste un épi- du travail fourni plutôt que pour bénéficier S’ils ressentent un changement de regardphénomène – le handicap ne bénéficie pas d’une réduction de charges, comme c’était le de la part des partenaires publics commedes mêmes programmes que la silver éco- cas au début. Mais le chemin est long et nous privés, les acteurs doivent néanmoinsnomie – et si d’autres concours existent demande d’être davantage qualitatif, car les a poursuivre la sensibilisation, la dédrama-soutenus par des fondations, celle-ci lui priori perdurent ». tisation, et démontrer la valeur du travaildonne une dimension nationale et pour- En France, elles sont plus de 2 000 entre- des personnes en situation de handicaprait institutionnaliser le soutien à l’inno- prises du secteur adapté et protégé (EA et promouvoir le profit qu’ils génèrent,vation en matière de handicap. Toutefois et Esat), employant près de 150 000 per- comme tout collaborateur – bien queaucune étude prospective ne donne de sonnes en situation de handicap, dont certains ne pourront, en raison de leurchiffres. La prudence sûrement. 44 % réalisent un chiffre d’affaires supé- handicap, jamais accéder à l’emploi. LeMais le numérique ne se résume pas rieur à un million d’euros. L’Association chemin est tortueux, mais les résultatsseulement aux produits ni aux aides des paralysés de France en gère, via une démontrés.techniques. Il aura permis également de structure dédiée, 54 en France et réalisedonner les moyens aux personnes han- 80 millions d’euros de chiffre d’affaires, RECHERCHE DE PROFITSdicapées de pouvoir travailler, d’accéder avec 3 800 employés en situation de Comme tout secteur où les financementsà des emplois au sein d’entreprises qui handicap sur 4 200. Un secteur en plein de l’État abondent et qui peut s’annoncerne les auraient pas créés auparavant, ou essor, puisque depuis 2015, APF Entre- lucratif et porteur, le handicap attire desencore de donner l’occasion à plus de prises a connu une croissance de 17 % entrepreneurs plus intéressés par l’appât70 000 personnes de créer leur entreprise. et a développé une vraie politique com- du gain que par la valeur sociale. « Avec merciale afin d’aller chercher des clients la loi de 2005, de nombreux cabinets se sontADAPTABILITÉ tels qu’Alstom, Air France ou Safran. Et il lancés afin de conseiller les entreprises dansAvec Handishare, Patricia Gros-Micol n’est pas question de pratiquer des prix l’embauche de travailleurs handicapés. Ils enest une patronne heureuse. Personnelle- moins élevés au prétexte que les tâches ont profité », souligne Jean-Baptiste Hibon.ment confrontée au handicap, elle a créé sont réalisées par des handicapés. « Nous « Tout comme certains EA ou Esat créés pourson entreprise adaptée en 2011 (régie par ne faisons pas de dumping et ne casserons faire du business pur, qui ont préféré déve-le Code du travail – contrairement aux Esat, jamais les prix », prévient Prosper Teboul, lopper l’activité et les recettes plutôt que desoumis au Code de la famille et de la santé, qui note que la motivation des entreprises mener une politique responsable et perfor-NDLR), spécialisée dans la sous-traitance ne porte plus seulement sur leurs obliga- mante vis-à-vis de leurs salariés », affirmeou la prestation de service à la fois sur le tions en faveur du handicap, mais entre Patricia Gros-Micol. Certains n’y voientplan des ressources humaines, de la ges- dans une réelle démarche de qualité. De pas d’inconvénient tant que le besointion de relation clients ou encore de la plus, ces établissements, implantés loca- est comblé et bénéficie aux personnescomptabilité. Le numérique a ainsi claire- lement, participent aussi au dynamisme handicapées, mais restent prudents surment permis son développement puisque d’un territoire. une dimension mal acceptée. « Handi-l’ensemble de ses 21 salariés est en situa- Mais embaucher un travailleur handi- cap et rentabilité ne sont pas antinomiquestion de handicap. Ce qui n’enlève rien à capé dans son entreprise est encore une et doivent être assumés, mais on ne pourrala finalité de la société, qui doit fournir autre étape. Le taux de chômage reste jamais mettre au même niveau le marché desun service comme n’importe quelle autre relativement important (21 %) au sein de voitures avec celui des handicapés », soutiententreprise « avec sa notion de marché et de cette population. « Nous devons lever les Daniel Dias.concurrence », souligne-t-elle. Seul le fonc- freins surtout auprès des petites entreprises, Mais si cela conduit à des agissementstionnement est différent. « Cela demande reconnaît Daniel Dias, délégué régio- plus ou moins contestables il est vrai,une adaptation permanente, car nous jon- nal de l’Agefiph. Parfois cela demande un n’est-ce pas là le résultat, comme souhaitéglons avec les maladies, mais nous demandons simple aménagement du poste de travail. » par d’aucuns, que le handicap puisse êtreavant tout à nos salariés un professionnalisme Et employer une personne handicapée considéré comme un secteur économiquecomme il leur serait demandé ailleurs, pré- bénéficierait à l’ensemble des salariés, et donc un sujet pleinement intégré à lacise Patricia Gros-Micol. Et parfois, certains créant une cohésion plus importante en société, avec ses effets positifs et ses effetsne sont pas compétents. La bienveillance ne son sein, jusqu’à revoir la politique de pervers ?46 Acteurs de l’économie - La Tribune N°135 Mai 2017
RUBRIQUE DE NOM EntreprendreN°135 Mai 2017 Acteurs de l’économie - La Tribune 47
Eurométropole de Lille Rouen Normandie Métropole métropole du Grand ParisBrest Métropole Rennes Métropole Nantes Métropole Bordeaux Métropole Toulouse Métropole Montpellier Méditerranée Métropole
MÉTROPOLES Entreprendre métropole européenne de Strasbourg métropoledu Grand Nancymétropole de Lyon MÉTROPOLES,Grenoble-Alpes Métropole UN EXEMPLE POUR L’ÉTAT ? Nice-Côte d’Azur Métropole DOSSIER, MARIE-ANNICK DEPAGNEUX métropole d’Aix- L’enthousiasme récent à l’égard des métropoles procède du Marseille-Provence principe de l’e et masse critique, synonyme de performances économiques. Néanmoins, entre les sceptiques qui jugent que N°135 Mai 2017 les métropoles aspirent les territoires, et les fervents a rmant qu’elles les irriguent, les divergences demeurent, et questionnent la généralisation du modèle. Un programme économique d’un président de métropole peut-il être dupliqué et adapté à la politique économique du pays ? Le débat est ouvert. Et est loin d’être tranché. Acteurs de l’économie - La Tribune 49
Entreprendre MÉTROPOLESAu cœur de la Par conséquent, transposer en l’état la poli- l’arrivée de Gérard Collomb. De Michel Noir,dernière réforme tique d’une métropole au niveau national on retiendra son impulsion dans les grandsterritoriale figure laisserait inoccupés des pans entiers de l’ac- projets urbains et, ensuite, l’action de Ray-l’a rmation tion étatique, des administrations centrales et mond Barre. » L’ex-président du pôle dedes métropoles. de la protection sociale. » recherche et d’enseignement supérieur deElles sont 15 Gérard Collomb, président heureux de la l’Université de Lyon (de 2008 à 2012) etaujourd’hui et métropole de Lyon (son troisième man- actuel directeur de l’Institut de l’éduca-la liste pourrait dat), à défaut d’avoir participé à un gou- tion évoque le caractère quasi « transpa-s’allonger, sept vernement – à ce jour – lui est convaincu rti » de cette gouvernance économique etnouvelles entités que le modèle est bien transposable, du des grands projets. « La plupart des élus seterritoriales moins sur d’autres territoires : « Toutes montrent plutôt pondérés quand bien mêmesouhaitant les villes devraient travailler comme nous. » ils ne sont pas prégnants au niveau national.bénéficier Le sénateur-maire socialiste de Lyon ne Si des tensions s’expriment, elles arriventde ce statut. manque jamais une occasion de flatter le à être gérées », souligne-t-il. « Le pouvoir dynamisme de la capitale rhodanienne national est en permanence sous pressionLa feuille de route de ces intercommuna- qui s’appuie sur le faire-ensemble. Il ne médiatique, prolonge Thomas Guénolé.lités est claire : renforcer les territoires de se lasse pas de rappeler l’histoire. Son Cette pression est sans commune mesure aula République et œuvrer au redressement histoire. « Je venais d’un arrondissement, niveau des métropoles. »économique du pays. Se sentent-elles le 9e, qui avait perdu quantité de ses emploisalors investies d’une mission d’exem- industriels. Ce déclin m’avait convaincu « Transposer en l’étatplarité ? En d’autres termes, le modèle que je devais agir très étroitement avec les la politique d’unegagnant appliqué par l’une d’elles peut-il acteurs économiques et universitaires. » Son métropole au niveauêtre reproduit ailleurs ? Pourrait-il faire appartenance politique au PS n’a-t-elle national laisseraitécole au niveau national ? pas suscité une certaine défiance dans inoccupés des pans« Des éléments pourraient laisser entendre cette cité plutôt ancrée à droite ? « Au entiers de l’actionque c’est envisageable, juge Thomas Gué- début, tout le monde me regardait avec per- étatique, desnolé, politologue et enseignant au Cevi- plexité, se souvient-il. Aujourd’hui, les gens administrationspof. Une métropole est un vrai ensemble ont confiance. Quand un promoteur immo- centrales et de laurbain, économique, social et humain, qui bilier réalise une tour, il commence à dépen- protection sociale »dépasse le plus souvent le million d’habitants. ser 40 à 50 millions d’euros en amont de laDès lors, nous avons affaire à un petit État. construction. Il doit croire dans la politique LA « CHAMPIONS LEAGUE »Toutefois, le principal argument qui plaide que vous menez. » En sa qualité d’économiste, Olivier Torrèscontre ce type de transposition tient à l’ac- se souvient avoir été frappé lorsqu’ilcumulation de compétences sur lesquelles la UN TERRAIN DE TEST ? enseignait à emlyon business school, ilmétropole n’a pas la main. Des compétences Pionnier, le groupe de gouvernance y a 12 ans, par le point commun entrefondamentales telles que l’appareil judiciaire, « Grand Lyon, l’esprit d’entreprise » a la direction de l’école supérieure dele militaire ou encore l’éducation nationale. ainsi vu le jour en 2008. Cette instance commerce, le président de l’Olympique de réflexion s’est muée en structure d’ac- lyonnais, Jean-Michel Aulas, et Gérard50 Acteurs de l’économie - La Tribune tion et a déployé « Lyon ville de l’entre- Collomb : « Chacun visait la « Champions preneuriat », un programme pour aider League ». L’EM était clairement dans une à la création, à la reprise et à la trans- stratégie européenne en matière d’entre- mission d’entreprises. Les objectifs ont preneurship. Pour l’OL, l’important était été revus à la hausse pour le mandat de jouer la coupe d’Europe de football. Le actuel, fixant annuellement l’accueil de maire de Lyon, quant à lui, avait compris que 100 nouvelles entreprises afin de créer lorsque sortait un classement franco-fran- 2 000 emplois, l’accompagnement de çais, il se heurtait à un biais parisien. » 200 pépites et l’émergence de dix nou- velles ETI. Laurent Fiard, président du N°135 Mai 2017 Medef Lyon-Rhône, partie prenante de ce tour de table, se félicite que le monde de l’entreprise soit suffisamment entendu à Lyon. « Les fondamentaux sont là, le par- tenariat aussi. Mais dans toute dynamique, il faut garder le cap », convient le PDG de l’éditeur de logiciels Visiativ. La pertinence de l’organisation métro- politaine lyonnaise est reconnue par les experts de tous bords. « On peut penser qu’il s’agit d’un terrain de test pour consti- tuer une métropole plus forte qu’ailleurs, acquiesce Michel Lussault, géographe et professeur à l’ENS de Lyon. La préoccupa- tion du développement économique est anté- rieure à la mise en place de la gouvernance métropolitaine. Cela a précédé de beaucoup
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