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N° 001 Agefi Bliss

Published by AGEFI, 2016-04-07 06:57:27

Description: Mars 2016

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N. 001 - mars 2016 CHF 5.–Une publication d’Agefi SA #carats #�ngela #sérum #cinémarusse #gifs

BR S WHITE CERAMIC DIAMONDS Bell & Ross Suisse : +41 32 331 26 35 · [email protected] · e-Boutique : www.bellross.com





éditorialDans nos quotidiens qui s’enchaînent à un rythme endiablé, passant d’un rendez-vous profes-sionnel à un déjeuner amical, récupérant nos enfants d’une main en répondant à un appel del’autre, tout en se faisant la réflexion qu’il faut encore organiser le week-end — l’oeil rivé sur latrotteuse — nous abordons les semaines avec un dynamisme à toute épreuve.Bliss est un terme difficilement traduisible tant sa polysémie est riche de sens positifs, de la sé-rénité à la joie, en passant par l’allégresse. C’est donc tout naturellement que j’ai souhaité vousen apporter le souffle au gré des rendez-vous lecteurs du magazine. Fière de mon équipe qui m’afait confiance dans ce beau projet, je vous propose de faire leur connaissance.Dans ce premier numéro, François Guery pose son regard de philosophe sur les GIFs, tandis queRémy Haas — en amour avec le cinéma — interviewe la talentueuse Elena Hazanov pour nousprésenter son dernier film; puis voguant sur les flots de la Tamise, nous allons à la rencontrede l’énigmatique et fascinante Angela DeCristofaro, laissant les heures s’écouler tranquillementsur le dossier spécial horlogerie de Mathilde Binetruy et Michel Jeannot. Et s’engouffrer dansla relecture de Rebecca avec Pétronie Concorde avec la garantie de se fondre dans une histoireobsessionnelle sur fond d’aristocratie toxique qu’elle maîtrise si bien…Après un grand bol d’air frais avec M’zelle Bibi qui nous emmène jusque sur les cimes ennei-gées de ses échappées culturelles, nous partagerons la table de Dimitri Jean qui nous confie lestravers de sa vie de vegan avec humour. Précédant le magnifique shooting mode aux parfumsd’océan avec Ellen Mirck et Zak Andrea Zaccone, Katharina Sand nous transmet toute sonexpertise de la mode dans son rendez-vous avec Léa Peckre. Quant à Gaëlle Sinnassamy, ellenous balade avec beauté dans l’univers de la cosmétique où les boudoirs n’ont plus de secretpour elle.Pour finir, nous partirons jusqu’à Paris chez Bateaumagne qui nous réserve des surprises, maisles carnets de voyage de Christophe Clivaz d’Arolla nous feront voyager encore plus loin. Etgrâce à Marlène Isabelle, nous garderons toujours un peu la tête dans les étoiles tout au long duchemin...Chers lecteurs, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une blissful lecture d’Agefi bliss à tra-vers les très belles mises en page de Diego Fellay et Marc Bally. J’espère sincèrement que cettenouvelle ligne éditoriale vous apportera le luxe d’une respiration. Caroline SchmidtAgefi bliss 001 5



Caroline Schmidt Rémy Haas Diego Fellay Rédactrice en chef Conseiller de rédaction Directeur artistique [email protected] Responsables de rubriques  Rédaction Maquette & Graphisme  Diego Fellay Culture — M’zelle Bibi François Guery Marc Bally Cinéma — Rémy Haas Pétronie Concorde Photographe  Mode — Katharina SandHorlogerie — Mathilde Binetruy Michel Jeannot Zak Andrea Zaccone Beauté — Gäelle Sinnassamy Catherine de Vincenti Stylisme  Laurent Conus Ellen Mirck Marlène Isabelle Dimitri Jean Christophe Clivaz d’ArollaAbonnez-vous à Agefi bliss 6 numéros au prix de CHF 30.– [email protected] www.facebook.com/agefiblissmag Service lecteurs — Découvrez le détail de nos offres Agefi SA — Service Lecteurs Rue de Genève 17, Case postale 5031 1002 Lausanne Tél: +41 21 331 41 41 Fax: +41 21 331 41 10 www.agefi.coméditeur publicité France diffusion abonnements Affinity MediaAgefi, société de l’agence Suisse [email protected] Prix au no: CHF 5.– (TVA incl.) Rachel Isozéconomique et financière SA Christian Nicollier www.affinity-media.fr Abonnement — Kiosques Naville [email protected] Rue de Genève [email protected] E-paper également sur l’application iPad 6 éditionsCase postale 5031 Grande-Bretagne (www.agefi.com/app) et sur LeKiosk.fr Suisse: CHF 30.– (TVA2,5% incluse)1003 Lausanne Allemagne Prime Media International Parutions: 6 × par an Europe: CHF 50.– (frais de port inclus)T +41 (0)21 331 41 41 Mercury Publicity [email protected] Impression: Kliemo s.a. Compris dans l’abonnement à L’AgefiF +41 (0)21 331 41 00 (Deutschland) GmbH www.prime-int.co.uk Tirage: 12’800 exemplaires www.agefi.com/abowww.agefi.com [email protected] No ISSN: 2297–7457 www.mercury-publicity.de Italie www.agefi.com/agefibliss Copyright  Administrateur délégué : François Schaller Studio Villa Media Promotion S.r.lDirecteur Général (CEO) : Olivier Bloch Benelux [email protected] Correcteur : Rémy Haas Toute reproduction, même partielle,Directeur adjoint, Développement : Lionel Rouge Mediacontact International www.studiovilla.com des articles et illustrations publiésMarketing et events : Guillaume Tinsel [email protected] est interdite, sauf autorisation écriteResponsable back office : Jessica Maquelin www.mediacontact.net de la rédaction.

BELLEAU SOLEIL Distributeur pour la Suissee: Parlux Diffusion SA

couverture : Angela DeCristofarophoto graphie: Eric Leonhardt Leightonsommaireculture 20–21 Caprices : Ibiza au sommet des pistes 22–23 gothique Rebecca 24 Bub le Zombie : le Gainsbourg du rap 25–27 le #cinémarusse d’Elenasociété30–31 vegan mais humain32–34 #gifsdu selfie aux35 nos gaminscarte blanche#�ngela37–41 à ou dans l’intimité d’une artiste inclassable

mode 43–47 Katharina Sand : Léa Peckre entre ombre & sacré 48–55 un nouvel horizon #carats 56–60 : 2016, «année bissextyles» 61 chou, un caillou 62–63 Michel Jeannot : Madame est (moyennement bien) serviebeauté 66–67 brèves de boudoirs 68–69 secrets d’alcôve 70 à l’heure du thé 71 au pilori 72 savant #sérum zoom Nescens 73 au banc d’essaidesign 74–77 le Paris de Bateaumagne78–80 carnet de voyage 181 quelque chose à se faire pardonner?82 astres et étoiles

DGrosmangin/MMorazzani collection « ventaglio » www.adler.ch BOUTIQUE GENÈVE 23 rue du Rhône +41 22 819 80 26 GSTAAD . LONDON . DOHA . BAKU . HONG KONG

mine de rien... mes petites affaires auxquelles je tiens Par Caroline Schmidtagefi blissParce que bliss, blissful, blississime! Le numéro 1 a forcément une place à partdans mon coeur !cartierCe stylo, parfois je crois l’avoir perdu. Trèsmignon, il se faufile facilement dans les petitscoins, mais heureusement il finit toujourspar réapparaître. J’y tiens.hermèsMon agenda. L’unique. L’irremplaçable.J’ai tenté les agendas électroniques, j’y aicru quelques mois, mais je reviens toujoursau papier. J’aime le geste, j’aime l’odeur,j’aime son poids, j’aime qu’il protège montemps si précieux.www.hermes.comfendi gilles vidalAhhh la Selleria… son cuir et ses coutures Mon ami photographe souvent poète qui faitm’ont conquise. Le petit dernier, mon de merveilleuses images. Un incontournableporte-cartes de visite. Si vous passez talent de la photo et du portrait en particulier.à la boutique de Genève, demandez la Cette photo est l’une de mes préférées.charmante Laurence, passionnée par lesproduits de la maison, elle vous donnera www.gillesvidal.comtoujours des conseils objectifs et avisés.www.fendi.comtentations 12

mon trésorLors de mes voyages, je mets souvent descailloux dans mes poches, juste parce que leurforme, leur texture ou leur couleur me touche.Leur valeur n’a aucune importance, je croissimplement aux bienfaits des bons souvenirs.Ils trônent toujours sur mon bureau. goyard Ma mallette ! La très haute qualité de ses finitions, l’apparence classique et intemporelle d’un produit d’exception dont j’ai dessiné les lignes, il y a près d’une dizaine d’années. Je ne m’en suis jamais lassée. www.goyard.com le poudrier ancien Un magnifique cadeau dont le dessin en émail représente une tendre scène de la maternité. Quand je suis devenue maman, cet objet m’a beaucoup émue et il continue à le faire. byredo J’aime tous leurs parfums, mais ma bougie favorite est Loose Lips… une fragance à la délicatesse subtile et parfaite. Comme un doux baiser qui s’abandonne. www.byredo.comchanel bois de cerf des forêts valaisannesLe tout premier bracelet Chanel de ma vie. Mon père était chasseur, mon frère est chas-C’est un collector ! Il ne quitte pas le pôle de seur et mon fils rêve de devenir chasseur.mes accessoires préférés. Je l’ai au bras ou Moi, jamais je ne pourrais tirer sur un animal,dans ma boîte à bijoux depuis une quinzaine mais mes promenades en forêt me donnentd’années. de merveilleuses et rares opportunités de trouver des bois de cerf que parfois je peins.www.chanel.comAgefi bliss 001 13

florale florence Les imprimés de la collection Gucci homme printemps-été 2016 nous rappellent les somptueux ornements des paravents japonais. Une garde-robe de dandy que l’on a immédiatement envie de s’approprier, ici portée par Florence Welch à Londres.astres et courtoisie de SGPdiamants L’unicité et le respect du savoir-faire artisanal traditionnel sont au cœur de l’approche créative de Brooke Gregson. Parmi ses bijoux les plus désirables, les colliers de sa collection Astrology, chacun orné à la main d’une constellation de diamants. Collier Capricorn www.brookegregson.comZimmerli Zimmerli of Switzerland incarne la lingerieà Genève la plus fine au monde. Depuis 1871, l’entreprise promeut ses valeurs — à savoir des méthodes de travail et de transformation particulièrement exigeantes — et ennoblit par tricotage et tissage des matières de la toute meilleure qualité dans sa manufacture implantée en Suisse. Genève s’enrichit d’une tradition textile séculaire. Zimmerli, dont le rayonnement intern­ ational s’étend bien au-delà des frontières, ouvre en effet sa première boutique en Suisse romande au Passage des Lions à l’adresse de la Rue du Rhône 6. www.zimmerli.com 14

CALIBRE RM 07-01

Oliver Perrottdonia allegue Une très belle histoire qui commence comme un film. Donia visite une demeure, dont la proprié- taire qui la reçoit porte une coiffe majestueuse, signature d’une époque presque oubliée. Immédiatement, le turban hypnotise Donia et l’évidence lui chatouillant le bout des doigts, elle s’évade déjà rêveuse dans son univers créatif. Dans son atelier parisien, elle invente chaque pièce qui est confectionnée par les meilleurs artisans de France. Depuis deux ans et demi, les magnifiques turbans de Donia Allegue sont des accessoires indispen- sables à toute tête bien faite qui aime exprimer sa personnalité à travers un produit de haute qualité, dont l’élégance est intemporelle. www.doniaallegue.comtrois, deux, un, partez !«Dans le meilleur intérêt de l’enfant», telleest la philosophie de Stokke. Et c’est bience que nous démontre la poussette StokkeScoot. Il n’est pas un petit fan de voiturespour trouver quelque chose à redire à unepromenade en look sportif de coureurautomobile. Avec les nouveaux kits de styleRacing en édition limitée, cette poussetteparticulièrement maniable a l’air encoreplus agile. La course peut commencer !www.stokke.comwww.facebook.com/Stokkekinder acvheacmvbierwe Du papier peint qui déchire, du carrelage qui casse des briques et des tableaux qui font bonne impression. Créez votre univers merveilleux au gré de toutes vos fantaisies, rien que ça ! www.surfaceview.co.uk 16

àuln’osrieginllee Nous nageons dans le bonheur avec la nouvelle collection de 12 boucles d’oreilles du zodiaque, interprété par Louis Vuitton. Agefi bliss est né en mars sous le signe du poisson, et vous ? www.louisvuitton.com chopardsublime l’opaleLes métiers d’art de la maison Chopard révèlent le monde fascinant de leurs jardins mystérieuxen proposant six bagues excep­tionnelles.L’opale, cette pierre mythique au coeur deleurs fleurs, a le pouvoir de nous émerveillerpar son aura iridescente. Toutes les opales decette éblouissante collection sont des pierresprécieuses issues d’un approvisionnementrespectueux, répondant à de sérieux critèreséthiques et environnementaux. Des enviesde printemps nous animent immédiatement !www.chopard.com tel un bonbon, pomellato nous donne l’eau à la bouche Nudo, la ligne de bagues iconiques et contemporaines de Pomellato annonce sa couleur pour 2016: le quartz rose. Sa tonalité très douce apportera une touche de sérénité à votre quotidien. www.pomellato.com 17

collection Menottes dinh van - dinhvan.com BOUTIQUE DINH VAN À GENÈVE : 11, rue Neuve du MolardCRANS MONTANA : Crans Prestige - route du Prado, 9 - GENÈVE : Bongénie - 34, rue du Marché - LAUSANNE : Junod - 8, Place Saint François MONTHEY : Langel - rue de Coppet, 1 - NEUCHATEL : Michaud - 1-3, place Pury - NYON : Piguet - 36, rue Saint Jean VERBIER : Jacot - route de Verbier - station, 63 - VEVEY : Meylan - place du Marché, 4 - YVERDON-LES-BAINS : Gillet - place Pestalozzi, 5 ZURICH : Meister - Münsterhof 20, Zunfthaus zur Meisen

20–21 Sorties cendrillon des temps modernity 22–23 Livre pourquoi (re)lire Rebecca, de Daphné du Maurier 24 Musique de la flowésie avec Bub le Zombie 25–27 Cinéma #cinémarusse le syndrome Elenaculture 19

cendrillon des temps modernity Par M’zelle BibiCaprices Festival invite Ibiza au sommet des est-ce un fantasme de filles capricieuses?pistes de Crans-Montana et fera vibrer la station Et bien sachez Mesdames et Demoiselles que cede ski valaisanne quatre jours durant. Une oc- rêve peut se réaliser éveillées, du vendredi 8 aucasion de vivre une expérience époustouflante dimanche 10 avril 2016 à La Modernity dans lealliant émotions visuelles et sonores dans une cadre du Caprices Festival à Crans-Montana.ambiance unique et caliente. La Cendrillon des temps modernes est enfin née.Nous les filles, avons toutes, rêvé de ­chausser le Une clubbeuse indépendante et sexy qui pourra,fameux soulier de verre de Cendrillon et de nous au son des douze coups de Midi, atteindre le palaisrendre, magnifiquement vêtues, au bal dans un du 7e ciel, dans son carrosse moderne au départ desuperbe château, pour y danser, le temps d’une la télécabine « des Violettes » de Crans-Montana,nuit au bras d’un prince charmant. Imaginons sur le parking « Barzettes ».donc, le temps d’un week-end, enfiler nos magni-fiques Louboutin et nous rendre dans un palais Elle bougera ses jolies jambes sur le rythme desde verre, chauffé en plein jour, du haut de ses meilleurs DJ du moment comme : Jamie Jones,2208 mètres de sommet enneigé. Et danser sur le leader du nouveau son minimal, The Marinezdu groove au bras d’une multitude de torses virils Brothers, leaders de la scène house mondiale,ou d’autres charmantes Cendrillons. Ricardo Villalobos, le citoyen du monde under- ground, ou encore Ryan Crosson, 1970’s funk, and East African jazz.culture 20

Elle pourra se pavaner dans une zone lounge en La Dansedégustant de délicieux cockails munis d’une jolie de Wang-Molinapaille fluo. Prolonger son bronzage, se faire dorloter Le 21 avril 2016par de nombreux serviteurs bénévoles, ou encore à l’Octogone de Pullyadmirer la vue extraordinaire sur la chaîne demont­ agnes alpines, du Cervin au Mont-Blanc. Maisnotre Cendrillon Modernity devra, cette fois aussi,faire attention à l’horaire car le bal au sommetse termine à 19 h, dès la nuit tombée. aujourd’hui, cendrillon a aussi droit Lors du festival de la danse Steps soutenu par à une after ! la Migros, le spectacle Felahikum réunit deux femmes d’exception: Wang & Molina. D’une part,La fête continue en bas des pistes jusqu’au petit Honji Wang dont le vocabulaire gestuel s’inspirematin. Une simple descente en carrosse-téléca- de la danse classique et du hip-hop et d’autrebine la conduira directement sur le dancefloor part, Rocío Molina qui s’inscrit dans la traditiondu Moon. Le temps de trajet réduit entre les deux du flamenco charnel et ardent. Un décor volon-scènes permet de rester dans l’ambiance et en te- tairement minimaliste, et la musique aux airsnue sexy. Une soirée mémorable s’annonce avec jazzy apporte une dimension particulière à lad’exceptionnelles têtes d’affiches comme le légen- dramaturgie. Le chorégraphe, Sébastien Ramirezdaire Sven Väth, la charismatique poupée russe crée un dialogue tout en finesse et s’interroge surNina Kraviz, les Berlinois émotionnels Tale of us, la place de la femme dans notre société.ou encore les Lausannois fous Adolfo & Franky.En plus, Cendrillon pourra se promener — habil- Réservations: www.theatre-octogone.chlée plus chaudement — dans la rue centrale deCrans-Montana et découvrir une troisième scèneoff, qui propose une programmation éclectiqueaux couleurs de la culture suisse. Elle y retrouveradiverses animations et stands culinaires ouvertsà un large public. La baguette magique opèrera àtous les coups. (Ne sachant pas skier, ma chute sera fracassante !)Je souhaite donc à toutes les Cendrillons Modernity­ Exposition collectivedu succeX, de bons beats, du hot et de la bonne Jusqu’au 12 mai 2016poudreuse ! au Musée de l’AbsurdeInformations et billetterie : www.caprices.ch à BiennePackages (Tickets & Hotel) : Certaines choisiront de seloger dans un des multiples chalets ou hôtels de luxe desenvirons. D’autres préféreront la convivialité de certainesauberges. Caprices s’est associé avec Festicket pour vousoffrir une large gamme de packages incluant votre billetpour Modernity-Caprices ainsi que votre hébergementpour la durée du festival.www.caprices.ch/fr/simple/detail/packages-2238www.crans-montana.ch/hiver/fr/hebergementAccès : Bien que située au cœur des Alpes, Crans-Montanaest facilement atteignable grâce au réseau ferroviaire quivous amènera à Sion ou à Sierre. Un service efficace de bus,de funiculaire et de taxis au départ de ces deux villes est àdisposition. Liaisons directes de Bâle, Berne, Genève/aéroport,Lausanne et Zurich/aéroport.www.crans-montana.ch/hiver/fr/acces Ce tout jeune et audacieux musée, après avoir exposé Plonk & Replonk, propose leur deuxième projet, Planches. Il accueille pour l’occasion, Mix & Remix, Bénédicte Sambo et présente leurs dessins en noir et blanc. Des fresques crayon- nées lors du vernissage vous feront revivre leur incroyable spontanéité. De plus, Genêt Mayor expose ses sculptures en vitrine. Infos: www.absurde.chAgefi bliss 001 21

pourquoi (re)lire Rebecca de Daphné du Maurier ?Écrit en 1938, rendu mondialement célèbre par Hitchcock deux ans plus tard — de l’écrivain, il portera également à l’écran Les Oiseaux —, le roman gothique de Daphné du Maurier retrouve dans sa nouvelle traduction, son mystère vénéneux d’origine. Par Pétronie Concorde la restaurationQui ignore la magistrale adaptation de Rebecca par Alfred Hitchcock ? Le slogan du film promettait :«V  ous avez adoré le roman, vous allez vivre le film !». Au regard des images puissantes qui semblentavoir imprimé l’inconscient collectif, Manderley en flammes et aussi et surtout Mme Danvers —l’appa­rition la plus horrifique du film —, l’intrigue (comme toujours chez Hitchcock) est très secon-daire. Mais c’est une erreur de penser qu’il lui revient d’avoir su insuffler à l’histoire une dimensionangoissante et psychanalytique qui ne se trouvait pas dans le roman. Le génial cinéaste certes l’asoulignée, mais il l’a aussi bel et bien puisée au texte originel, dont cette nouvelle version rendmagnifiquement compte. En redonnant vie à ce qui avait été édulcoré voire gommé dans la traductionde 1940, Anouk Neuhoff a su retranscrire l’ambiance quasi fantastique, à la Henry James, de cethypnot­ique roman et en propose une expérience de lecture d’une vivacité surprenante. l’histoireLa narratrice, dont on ignore prénom et nom, dame de compagnie mal dégrossie, épouse un hommefortuné rencontré sur la Côte d’Azur ; Maximilien de Winter avait autrefois été marié à Rebecca, avecqui il régnait sur le fascinant domaine de Manderley. Elle s’y installe mais le charme noir de l’ex-épousehante les lieux. En plus de devoir s’imposer au sein d’une société qui n’est pas la sienne et dedevoir administrer cet immense manoir aux allures victoriennes, c’est avant tout contre le spectre de­Rebecca qu’elle va devoir lutter, notamment au travers de Mme Danvers — la terrifiante gouvernantequi vouait un culte trouble et passionnel à la défunte. le polar gothiqueJugé académique voire obsolète lors de sa sortie — le style gothique du XIXe était dépassé —Daphné du Maurier, sans renier ses amours littéraires (le roman fait à de nombreuses reprises écho àJane Eyre de Charlotte Brontë) revivifie pourtant le genre en lui adjoignant une intrigue à suspense(ou thriller) très XXe. Ce qui frappe, c’est la façon singulière dont la romancière utilise les codesg­ othiques, les active pour entrouvrir au lecteur la porte de l’inconscient.Et plus encore que la présence obsédante et fantomatique de Rebecca, Manderley apparaît comme unvéritable personnage (à propos de son adaptation, Hitchcock confiait à Truffaut* : « On peut dire que lamaison est un des trois personnages principaux du film »). Demeure fantasmée par la narratrice avantmême d’en être devenue la maîtresse, ce lieu ardemment désiré deviendra sa prison. la pulsionSexualité et tabous ont très tôt nourri l’imaginaire de Daphné du Maurier, lectrice de Freud, de Jung.Sa nouvelle La Poupée écrite en 1928 — elle n’avait alors que 20 ans — met en scène les amourscharnelles d’une très jeune femme avec une effrayante poupée articulée. La jeune fille en questionse prénomme... Rebecca. Ajoutons à cela les propos en forme de confession de l’auteure à propos deson roman : « Oui, le je de Rebecca, c’était moi », et l’on comprend mieux, au regard de sa bisexualitéavérée, l’inquiétante étrangeté dont son roman est nimbé, où les pulsions sexuelles, les instincts pré-dateurs et la culpabilité sont plus que suggérés.Pour autant, cet éclairage ne suffit pas à dévoiler toutes les arcanes d’un roman à plusieurs motifset plusieurs clés, additionnant les genres, multipliant les énigmes et les rebondissements. Thrillerspectral et vénéneux, histoire morbide et passionnelle, Rebecca, à l’instar d’un parfum capiteux,ne cesse d’entêter.* Entretiens « Hitchcock / Truffaut »culture 22

Portrait deDaphné du Maurier Rebeccad’Alfred Hitchcock (1940) Thriller spectral, histoire morbide et passionnelle, Rebecca, à l’instar d’un parfum capiteux, ne cesse d’entêter. extrait Rebecca Elle me prit par le bras et m’entraîna vers le lit. de Daphné du Maurier, nouvelleJ’étais incapable de lui résister, j’étais une poupée traduction de l’anglais par Anouk Neuhoff,de chiffon. Le contact de sa main me fit frissonner.Et sa voix était basse et intime, une voix que je éd. Albin Michel, 535 p.détestais et qui me faisais peur. « C’était son lit. Unlit magnifique, n’est-ce pas ? J’y laisse en perma­nence la courtepointe dorée, c’était sa préférée.Et voilà sa chemise de nuit, dans sa pochette. Vousl’avez touchée, n’est-ce pas ? C’est celle qu’ellea portée en dernier, avant de mourir. Vous voulezla toucher encore ? » Elle sortit la chemise de nuitet la déploya devant moi. « Caressez-la, tenez-la.C’est fou ce qu’elle est douce et légère, n’est-ce pas ?Je ne l’ai pas lavée depuis qu’elle l’a mise pour ladernière fois. Je l’ai disposée ainsi, avec la robede chambre et les mules, exactement comme jel’avais fait la nuit où elle n’est jamais revenue,la nuit où elle s’est noyée. »Agefi bliss 001 23

de la flowésie avec Bub le Zombie portrait Par M’zelle BibiBub le Zombie s’est lancé en 2005 avecun projet caricatural sous le nom de souris Un rappeur lausannois parle d’amourpouic-pouic et cherchait déjà à exprimer avec cynisme, humour et poésie.son côté gentil-salopard-provocateur.Très vite il a su s’entourer des meilleurs Qu’on se le dise, le marquis de Sade s’est réincarnérappeurs de la région ( Carlos Leal de en rappeur lausannois sous le nom de Bub leSens Unik, Robert Rocoobelly, Astro, Hades, Zombie. À l’écoute de son premier album PoésieMoh ou encore Skile ) qui collaborent à divers et Cervelas (2009) ou encore Bub chante l’amouralbums. Il s’est également fidélisé au label (2011) sorti sous le label OrnormOrform, monOrformOrnorm. canapé s’en souvient encore…Aujourd’hui, il forme sous le même label, Ce flow-compositeur a réussi à m’ébranler parle groupe le floOw avec Hade, Moh et Skile. son romantisme, et il serait même capable deIls ont sorti leur premier album du même rendre un rossignol jaloux de par sa prose cocasse.nom ce janvier 2016. Il a de plus le talent (rare) d’articuler, si bien queCe n’est pas un hasard si le nom du projet ses mots font instinctivement écho.fait référence au “flow”, cette manière C’est le Gainsbarre contemporain du hip-hoporiginale et personnelle qu’a tout rappeur suisse. Sur un groove appuyé de riffs lourds etde maîtriser la diction, le débit, l’élocution, de mélodies aux accents cinématographiques, onla scansion. Et cette fois, ce n’est pas tant découvre un dur au cœur tendre avec des textesl’importance de ce que le MC raconte ( même impudents, tordants et romanesques. Comment nesi ça reste pertinent ) mais plutôt l’extrême pas être interpelée par des titres provocateurs telset ambitieuse maîtrise technique. que : Renifle la chatte, P’tite pute et chien crevé,Vous trouverez toutes les infos utiles La fille poupée (avec un tattoo et un hématome)sur le site www.orformOrnorm.ch ou encore Sandra sans bras ? Dès que l’aiguille touche le sillon de ces titres culture tapageurs, on découvre un univers subtil aux métap­hores cruelles et chevaleresques, comme dans le morceau Sans Limite : « Elle voulait que mon désir pour elle soit inégalable. Alors elle s’est fait greffer une bouche de poupée gonflable. J’ai fait une drôle de mine en la voyant avec ses lèvres en cercle, un pot de vaseline à la main, dont elle ôtait le couvercle. J’ai dit : Mais qu’est-ce que t’as fait à ton beau visage mon amour ? Elle m’a répondu : C’est ton seul plaisir que j’en- visage pour toujours ». 24

#cinémarusse Réalisatrice suisse d’origine russe, Elena Hazanov ne cessedepuis une bonne décennie de surprendre. Son appétit de cinéma confine à la voracité tant elle aime se frotter à des genres et formats très variés. Aussi prolifique qu’éclectique, la cinéaste est partout (où on ne l’attend pas). Son tout dernier film, Le Syndrome de Petrouchka ne déroge pas à la règle. Andrei Fedechkole syndrome Elena Par Rémy HaasDe la double vie de Véronique de Kieslowski à cinéma… Comme si les prémices de son artCasanova de Fellini en passant par Fanny et futur s’y élaboraient, là, avec trois bouts de ficelle.Alexandre de Bergman ou bien encore Dans Car le cinéma « primitif » s’enracine bien dansla peau de John Malkovich de Spike Jonze, cette tradition.les films — et pas des moindres — peuplés demarion­nettistes sont légion. Est-ce-à-dire que le syndrome de petrouchka interrogele cinématographe renverrait de manière récur­ le statut de créateurrente au geste de ses origines? Agnès Varda, dans Allégorie du pouvoir démiurgique du cinéasteson film-hommage à Jacques Demy — Jacquot de ou non, Le Syndrome de Petrouchka interrogeNantes — le montrait enfant, créer des spectacles le statut de créateur, ici marionnettiste, om-de marionnettes. Et son amour pour ce théâtre‑là nipotent jusqu’au sadisme et à la destruction.de se muer très rapidement en amour pour le Adapté du roman éponyme d’Elena Rubina*, leAgefi bliss 001 25

“ Le roman est vaste, avec beaucoup de lignes temporelles, beaucoup de personnages. On a donc dû faire des choix.\"film raconte l’histoire de Pierre et Lisa. Obsédé De facture classique bien que s’éloignant de toutedepuis sa plus tendre enfance par le monde chronologie, au risque de perdre occasionnelle-des marionnettes, Pierre succombe très tôt au ment le spectateur — qui trop embrasse (parfois)charme de Lisa, comme s’il entrevoyait déjà en mal étreint —, le film d’Elena Hazanov est marquéelle la future et idéale « créature » qu’elle sera. du sceau de la création et de son processus.Mais Lisa, devenue littéralement petrouchka — Parsemé de signes — enfanter, tordre le réelPierre en fait sa marionnette dans ses spectacles pour le conformer à son imaginaire, idéaliser— est victime d’un syndrome (une sombre malé- l’autre au point de le réifier… —, Le Syndromediction irrigue toute l’histoire) qui scelle le destin de ­Petrouchka, avec ses béances, son mystère,du couple. Chacun à sa façon tentera de s’en ex- est surtout une histoire de possession dont la vic-tirper. Elle, en fuyant dans la dépression, lui, en time n’est pas forcément celle qu’on croit.sombrant dans la folie jusqu’à créer une nouvellemuse, une monstrueuse marionnette sophistiquée­ * Petrushka’s Syndrome de Dina Rubina (2010)prénommée Alice, copie conforme de Lisa.culture 26

rencontre avec Elena HazanovAvec votre 5e long métrage, Le Syndrome de par la Russie (Kinotavr Festival de Sotchi) où il aPetrouchka, adapté du roman de Dina Rubina, vous remporté le prix de la meilleure musique de film…revenez en Russie, votre terre natale. Qu’est-ce qui Oui, et il sera cette année présenté à Sofia, Münicha motivé ce choix ? puis Haïfa… Au fond, c’est la rencontre avec le pu-Le roman de Dina Rubina est un best-seller en blic qui compte, c’est ça qui est intéressant. Et ceRussie et j’avais déjà lu tous ses livres. Un jour, dont on a envie, c’est de faire connaître et de fairenous nous sommes rencontrées et je lui ai dit que vivre les films autant que possible.j’aimerais beaucoup adapter l’un de ses ouvrages.A ce moment-là, elle m’a donné Le Syndrome de Entre documentaires, courts métrages, moyens mé-Petrouchka qui n’était pas encore publié. Je l’ai trages, long métrages et séries, vous êtes très activelu et j’ai adoré. Là, j’ai commencé à réfléchir, à lui et prolifique. Outre votre précédent long mé­trage,dire comment je voyais l’histoire. C’est comme Sam, qui a beaucoup voyagé et a été multi-­primé,ça que l’aventure a commencé. vous avez réalisé une série de 2 saisons, L’heure du secret. Qu’est-ce qui vous fait pencher pour tel ouCe roman — malheureusement pas traduit en fran- tel genre, tel ou tel format ?çais — est vaste. Vous avez dû resserrer l’action, Pour L’heure du secret, on est venu me cherchervous concentrer sur les deux personnages princi­ en tant que réalisatrice. Le scenario m’a été sou-paux avec, comme toile de fond, une maléd­ iction mis pour la première saison, puis pour la seconde,familiale. La structure narrative complexe (des j’ai participé en plus un peu à son écriture. Ceflash-back à l’intérieur de flash-back) permet d’en fut une magnifique expérience de découvrir larestituer l’ampleur. région, de découvrir l’horlogerie ! En fait, on neOui, le roman est vaste, avec beaucoup de lignes sait jamais quel projet va se faire. Je peux êtretemporelles, beaucoup de personnages. Et en sur plusieurs projets à la fois sans jamais savoirécrivant ce scénario — en effet complexe dans sa à l’avance quel est celui qui va se concrétiser.structure — on a dû faire des choix, ne raconter Et quand tout à coup, l’un d’eux prend plus d’am-qu’une seule histoire et trouver un axe ; ce qui pleur, de vitesse, on met les autres en stand-by.n’est évident ni pour l’auteur ni pour le scéna-riste. C’est le grand travail qu’on a dû faire. Sur quel projet travaillez-vous en ce moment? Une comédie française avec Gérard DepardieuPlus précisément, le film se focalise sur le marion- dans le rôle principal. Je suis en train de coécrirenettiste (Pierre) et sa compagne (Lisa). Synthé- le scenario avec la même scénariste que Le Syn-tisent-ils à eux seuls les thématiques principales drome de Petrouchka. Le titre du film sera: La viedu livres et si oui, quelles sont-elles? est une histoire vraie.Bien sûr, les thématiques principales du livresont présentes : la création, le créateur, la dualité PCT Cinéma Télévisionvie / art, la possibilité ou l’impossibilité de combiner présenteles deux. Et aussi, l’amour évidemment, la volontéde faire que l’autre soit à l’image de ce qu’onvoudrait qu’il soit. Et ces thématiques-là se re-trouvaient beaucoup à travers l’histoire des deuxpersonnages principaux. Alors naturellement, demanière quasi organique, on les a vraiment choisiscomme les pivots du film.Le film commence par un suicide et se clôt sur une Chulpan KhaMatova - MErab ninindzEsorte de carnaval avec des marionnettes géantesdont une s’enflamme. Cette fin donne lieu à plu- Avec Mironov -sieurs interprétations, quelle est celle qui, d’après EvgEnyvous, est à retenir ? UBsacnséénfsauirlrimoleadrloe' EnmlaaEnanldOaeVDaHinaazRaUnBinoavLa scène finale sur le pont où Pierre a une « vision » Basé sur le roman de Dina Rubinia | scénario alena alova | un film d'elena Hazanovdémontre pour moi qu’il ne peut pas vivre sans image aziz zHambakiyev | musique nicolas Rabaeus | chorégraphie RaDu PoklitaRu | costume Galina nikolaeva | montage Daniel Gibel - seRGey ivanov | décors natalya navoenko produit paranna KatchKo | petrushKa production elena BrenKova | studiothird rome dmitryaronin | pct cinématélévision pierre-andréthiéBaud | departures filmthomas KrÁl undine filter | arri Josef reidinger -antonio exacoustosce monde-là, imaginaire — un peu fou — des avec l’aide de la rts radiotélévision suisse françoise mayor - sophie sallin | ssr srg svenWälti | cinéforom et la loterie romande | the ministry of culture ofthe russian federation | mitteldeutsche medienförderungmarionnettes. Il n’arrive pas à se satisfaire de la Le Syndrome de Petrouchkaréalité. Et on peut supposer que ça va continuer… d’Elena Hazanov, sortie en salle le 16 mars 2016 (Suisse romande)Le film a déjà beaucoup voyagé, de Honfleur en PCT — Cinéma TélévisionChine où il a remporté le prix du meilleur film CH–1921 Martigny-Croix(Silk Road International Film Festival) en passant Pierre-André Thiébaud www. pctprod.chAgefi bliss 001 27



30–31 vegan animal et bête pensante 32–34 phénomène les #gifs 35 ado’tres nos gaminssociété 29

animal et bête pensante Par Dimitri Jean« Incarnez le changement que vous voulez voir Pour ne pas cautionner l’abattage des animaux.dans le monde. » Mahatma Gandhi. Il était assom- « Mais faut bien se nourrir ! » Il nous demande simant. Il a fait l’Histoire mais il était assommant. nous pourrions tuer un cochon, un poulet ou unÀ la fin, il n’avait plus de sexe avec sa femme, agneau. C’est vrai ça, je pourrais, moi ? Déjà dégoû­il a très vite arrêté de boire de l’alcool et question té par une caille servie avec sa tête, je pourrais enfashion, il portait le dhoti… Tout ça pour dire que tuer une? Bah non… En plus, on tue plus que celes gens bien le sont souvent. La preuve. dont on a besoin. On élève pour tuer, conditionner, empaqueter pour finalement jeter. On ne nourritDe bons amis, un resto qui ne paie pas de mine, même pas ceux qui ont faim 2. « C’est triste pourquelques bouteilles et c’est parti ! Seulement voilà, les pauvres mais on va pas en plus gâcher dePaulo est là. Sa dernière lubie, c’est la défense la viande, dis-je pour arrêter de me sentir mal.des animaux. Il se prend pour Brigitte. Il ne porte C’est des emplois tout ça ! T’en fais quoi des pauv’plus de cuir. Sa tenue en toile de jute, bouts de gens qui triment pour nous faire des steaks ? » Ilsficelle et poils d’alpaga sent le chien mouillé, le gagneraient plus à faire de la viande de qualitérance, comme s’il sortait d’une cave après deux plutôt que de la quantité. C’est notre argent quisemaines. On est loin de la caricature. C’est bien fait la différence. Payer pour des animaux mieuxquand on est petit, vieux, excentrique et que per- traités, c’est zéro batterie, moins de gâchis. C’est desonne ne vient plus vous voir. En société, c’est la viande à son vrai prix, des productions saines…gênant. D’autant plus gênant que le resto n’est pasdonné et que sa garde-robe, toute renouvelée, ne Mais il me bassine, Paulo ! Me voilà en train de melui permet plus ce genre de dîner... sentir coupable ! Je l’aime mon agneau ! J’ai rien fait de mal, il est sur la carte !Paulo traîne la patte. Il prend le menu mais rien.Même pas les frites : elles sont cuites dans de la Les plats arrivent. On mange. Un peu plombés.graisse de canard. Il ne veut pas prendre une sa- David demande : « Mais alors, t’es végétarien ? »lade : CHF 150.– pour du vin, trois feuilles de laitue Non. Paulo, il est végéta-LIEN. Il ne mange rienet un café, très peu pour lui. Il prend une soupe d’animal. Rien qui pourrait justifier l’exploitationà l’oignon, une salade de fruits. Il voulait du vin d’un animal. « Mais tu ne bouffes plus en fait ! » Ilmais son vin canadien sans gelée de porc appa­ est “ vegan ”. Il est pénible ET vegan. « Mais tu vasraît nulle part 1. On se fout de lui, il se marre et changer quoi, toi ? Un seul Paulo contre l’indus-la soirée démarre. On boit, sauf Paulo qui reste à trie alimentaire?!» Il fait ça pour lui. Il se sentl’eau, on parle. Le saucisson et le fromage arrivent, mieux comme ça. C’est vrai qu’il a l’air plus léger.en un mot : Satan. L’alcool aidant, on lui passe le Il ne s’est pas plaint une seule fois qu’il avait malsauciflard sous le nez. On le sait qu’il aime. Ça et quelque part. Pas de vin, donc on commande desles rillettes : ses péchés mignons. Il résiste, il ne cocktails. Du rhum pour Paulo. On va le faire parler.bronche pas. On finit par lui demander pourquoi. Il est “vegan” Paulo. Il est pénible ET vegan.société 30

Si vous cherchez un resto sympa où Paulo pourraitmanger sans souci, je vous conseille le Sesamo à Barcelone,un petit resto qui ne paie pas de mine mais qui ravira vospapilles, peu importe le plat. Vous avez aussi Amaranthà Berlin. Je ne me suis jamais autant extasié sur unesoupe froide.Si vous passez par Londres, vous avez Mildreds, c’estune institution et en plus, ils vendent leurs recettes dansun livre qui n’a de cesse d’épater mes amis.Et enfin, les soirées « Green » du Shangri-La Hotel Paris,5 étoiles avec une cuisine à la hauteur de sa réputation.Roméo Balancourt Me voilà en train de me sentir coupable ! Je l’aime mon agneau ! J’ai rien fait de mal, il est sur la carte !Il nous lâche la vraie raison. Dans sa famille, le où, moi, si je dois faire attention à tout ? C’estcholestérol, les arrêts cardiaques, y en a à foi- pas vivable ! «Va t’faire voir, Paulo ! Et idem pourson. C’est soit il change tout, soit il claque dans tous les bobos qui sont mieux que tout le monde !dix ans, le vieux Paulo. Les végétaliens n’ont Et au fait, c’était pas le type des ordinateursque très peu de problèmes cardiaques ou de qu’est mort d’un cancer (ndlr: Steve Jobs étaitcancers 3. On le ressert. Il peut pas lâcher une végétarien)5  ? Tu vas crever aussi, Paulo ! Ton ta­bombe, plomber l’ambiance et rester sobre! Un mat­ruc te sauvera pas !»verre. Deux verres. Bah le voilà, mon pote! Il estbourré comme un coing au quatrième rhum. Y PS: Les deux personnages de cette chroniquea rien d’animal dans la canne à sucre. Il dit qu’il sont une dichotomie de ma propre personne. Jene devrait pas. Il abuse de l’alcool ce soir. «C’est me laisse aller à une schizophrénie passagère afinpas sal- QUOI ???» L’alcool n’est pas «Sattvique». de mettre en exergue le besoin d’être végétarien«C’est tama- QUOI ???» Ta-ma-sique. Ca perturbe et la réalité d’être un animal social.l’équilibre du corps et de l’esprit. Ca, c’est les yogisqui le disent  4. Ca y est, on le perd… 1 L’étape du « collage » au moment de clarifier le vin nécessite des ingrédients de provenance animale.Voilà ! Il m’a pourri mes plaisirs, la charogne. J’ai www.mangez-vegetarien.com/alcool.htmlpas de problème avec ce que je bouffe et pourtant 2 Un tiers de la production alimentaire est jetée dansje me sens coupable ! Et puis je vais aller manger les pays riches comme dans les pays pauvres. www.planetoscope.com/agriculture-alimentation/ 1556-le-gaspillage-alimentaire-dans-le-monde.html 3 www.francetvinfo.fr/sante/infographie-le-regime- vegetarien-est-il-bon-pour-la-sante_853229.html 4 www.lepalaissavant.fr/lapproche-corps- esprit-dans-notre-alimentation 5 www.vegemag.fr/actualite/50-vegetariens- celebres-1084 Si vous aviez besoin d’arguments pour convaincre vos proches que vous n’êtes pas fou : www.l214.comAgefi bliss 001 31

#gleisfs privilèges anciens et nouveaux Après le portrait, l’autoportrait , le GIF (Graphics Interchange Format), dernier avatar du selfie.société 32

Par François GueryJ’ai rencontré jadis, dans les Cévennes, un homme qui s’échinait à obtenir un permis de chasse, pourdes raisons qu’il claironnait à qui voulait l’entendre : dans l’Ancien régime, les nobles qui chassaient àcheval avaient le droit de passer sur les terres des paysans, de ravager leurs cultures… la Révolutiona su abolir ce privilège, qui tombe donc dans le droit commun : il revient de droit à chaque citoyen dejouir à son tour du privilège de chasser.Étrange destin des privilèges, une fois abolis : ils deviennent un must, un devoir civique, encoredavan­tage qu’un droit arraché. Ils diffusent dans la masse, et de privilèges qu’ils étaient avec un statutd’exception, ils se font mœurs, état normal.Avoir son portrait a été de même un privilège, qui a fait largement l’art pictural même, de la Renaissance,de l’âge classique : un artiste servait de miroir aux Grands. On ne peignait que les personnes de qualité,à tel point que les innovations de Vermeer, avec sa jeune fille à la perle, ou de Turner, Brueghel, quipeignaient aussi le peuple, ont pu sembler une provocation, sans parler des impressionnistes.Aujourd’hui, une fièvre de portrait atteint la génération montante, en tous pays. Ce ne sont pas desportraits peints, ni des œuvres d’artistes, mais des réalisations d’amateurs qui se tirent à eux-mêmesle portrait. Le terme international est selfie, autoportrait, et les réseaux sociaux servent à leurdiffusion en masse, reposent sur eux, en font le medium d’un échange de sociabilité, voire de flirt :c’est un rituel émergent. Mariana & Cristopher selfie pris à l’aide d’une webcamLa technologie propose des applications en conséquence. On inverse la direction de la prise de vuesur les iPhones, smartphones, tablettes, pour diriger vers soi la caméra. Une perche téléscopique,vendue sur les sites touristiques, permet d’éloigner l’appareil, pour prendre un selfie devant un décorhistorique fameux, le Rialto, les Pyramides, le Louvre, et comme la Joconde, on peut ainsi poserdevant des paysages de rêve, auparavant privilège des Grands. Le décor historique vidé de son sensd’origine, déserté par les princes qui l’avaient programmé pour s’auto-célébrer, est comme la toile defond de ces selfies à la gloire de chacun.Les remote control sur les appareils numériques, qui ont une option video, ouvrent la voie à desselfies mobiles qui se passent d’une tierce personne opératrice, et laissent chacun face à soi-même.On se filme à peu de frais, on se fait star le temps d’une séquence narcissique.Le réseau social explose pour servir la demande de poster, se poster, se diffuser, comme une icônesacrée des anciens temps. Facebook est un ancêtre débordé, l’image sexy y est règlementée, alors quec’est une partie du rituel. Gifyo accueille des teenagers des deux sexes, surtout de l’Est de l’Europe,czech, polish, georgian, ou du Nord, Sweden, Norway, et a dû contrôler l’afflux des selfies parfois au-dacieux qui profitaient de la fenêtre ouverte pour s’exposer en mouvement (un gif est une animationen boucle). Aussi, les échantillons qui s’y affichent servent-ils à présent de passerelle vers les réseauxnon censurés: skype et sa webcam, kik, autre fenêtre avec webcam, texte, envoi de documents.Snapchat est un medium d’échange de clichés éphémères, qui durent dix secondes.Agefi bliss 001 33

Gifyo sert essentiellement à afficher un descriptif en image du membre, qui ne cherche pas toujoursà se montrer à son avantage au sens classique du terme. Les attitudes des deux sexes semblent stabi­lisées dans un rituel de séduction et d’insultes bien dosées, avec de l’humour pour fluidifier le tout :la fille appelle ou repousse, fait sa coquette ou son garçon manqué, interpelle en rugissant “dontfollow me”, ou en miaulant “I am bored, msg me”, tout en roulant sur l’oreiller comme un tankerdans la tempête. On transmet dans un bandeau de profil des adresses permettant de suivre le membre :sur tumblr, snapchat, skype ou parfois, facebook !Des catégories du discours émergent; bored veut dire je m’ennuie, mais aussi distrais-moi, excite-moi ;“I hate school” donne lieu à des trémoussements coléreux, l’alliance des deux est une incitation àpartager un état de disponibilité sexuelle. Le nombre des likes et des messages en sous-titre indiquele degré de popularité.Les messages envoyés après visionnage du gif demeurent privés, celui-ci n’est qu’une amorce visiblepour des actes qui ne regardent que les partenaires. Ainsi se crée une université mondiale du selfie, qui permet la “démocratisation” de l’image de soi.Ainsi se crée une université mondiale du selfie, qui permet la «démocratisation» de l’image de soi,immense réservoir de Maja Desnuda émergentes, d’Adonis avantageux, venus de partout pour secélébrer, se faire célébrer, se faire désirer, comme jadis les Grands l’entreprenaient à des fins de pouvoiret de renommée.La démocratisation n’est pas le seul aspect de cette diffusion, elle dégénère aussi en commercialisa-tion, discrète ou plus louche. Un gif annonce en sous-titre des problèmes d’argent, et les photos et lesvidéos de la jeune étudiante sont à vendre hors écran. Un numéro paypal va servir à la transaction.D’autres renvoient à un tumblr account carrément commercial, qui est la vitrine et la réclame d’unesociété produisant du porno classique. Les chaturbate, chatroulette, donnent accès à un show sexyou sexuel payé en token, jetons commercialisés à l’inscription.Les privilèges ont migré vers la masse, l’aristocratie abolie, parfois décadente, donne le la des mœursmondialisées, c’est un nouveau demi-monde, sous des formes neuves, avec la puissance d’un tsunami.Nastassja Kinski 34dans le film Paris, Texasde Wim Wenders (1984) société

ado’tres Nos gamins ne s’en laissent pas compter. Pas plus que ceux que nous étions, sans doute. Alors, tous pareillement autistiques à force d’êtrehyper-connectés, les ados d’aujourd’hui ? A d’autres ! Par Laurent Conus MarinPour cette première interview, je vais rencontrerMarin. Un adolescent de seize ans, passionné deKung Fu. Je suis impatient de parler avec lui, cardepuis toujours, je suis fasciné par cette disciplinemélangeant rigueur mentale et défi physique.Très vite, je me rends compte que la date de notre — Tu t’entraînes donc régulièrement ?entretien ne va pas être simple à fixer, les journées — Tous les jours, week-ends compris.de Marin ne lui laissent que peu de temps libre etvisiblement, mon impatience à l’idée de cette ren-contre n’est pas réciproque. Sa maman me dit queson fils ne comprend pas trop le pourquoi d’uneinterview, cependant, il ne s’y oppose pas.Suis-je tombé sur un ado des plus banals ? Pas vrai-ment d’intérêt ni de temps à consacrer à d’autrespersonnes qu’à ses amis — réels ou virtuels?Je reçois un mot me disant que lundi matin est le Sa réponse a fusé. Mais plus encore, je sais queseul moment de la semaine où Marin a du temps je m’entretiens maintenant avec un véritable pas-pour me rencontrer. J’en suis bien désolé car lundi, sionné, qui ambitionne de devenir Grand Maîtreil m’est impossible de me libérer. Le temps presse, de Kung Fu. Il me le dit très naturellement, commealors nous convenons d’un entretien par téléphone s’il m’annonçait une prévision météo.la semaine suivante, à midi. — Il y a donc le Marin d’avant le Kung Fu et celuiVoix sérieuse, posée, ce jeune semble un peu mé- d’aujourd’hui ?fiant à l’autre bout du portable. Je le comprends, — Oui, je me sens plus confiant, j’apprends à gérerje n’aurais pas été plus à l’aise à son âge vu les cir­ ma concentration et plus que tout, je suis devenuconstances. persévérant, ce qui est un plus pour ma scolarité.Après une brève présentation, j’y vais de mes ques­ Mes parents, eux, me trouvent plus mature, res-tions. Très vite, la voix de Marin se fait chaleureuse ponsable et épanoui.et je sens la confiance s’inviter à notre échange. — Et tes amis ?J’apprends qu’il fait partie d’une fratrie de triplés et — Ils ne voient pas de changement.qu’il a aussi une grande soeur. Qu’il est en secondeannées de collège. Marin ajoute qu’il écoute principalement de laEt le Kung Fu alors ? Marin m’explique que c’est musique extrême-orientale et qu’il envisage de seFlorian, son frère, qui a commencé à prendre des rendre en Chine afin de se perfectionner. Moi quicours et qu’un jour, alors âgé de 14 ans, il décide craignais d’avoir affaire à un ado banal…de l’accompagner lors de son entraînement. Au furet à mesure de son récit, je réalise à quel point ce — Une ombre au tableau ?premier contact avec cet art l’a transformé. — Oui, j’ai moins de temps à consacrer à ma famille — Une idée de métier ?Il me confie à propos de ce premier rendez-vous avec — Pratiquer la médecine chinoise et la physio­cette discipline : « Je ne savais pas trop comment thérapie.utiliser mon temps libre et mise à part une expé-rience de hockey sur gazon étant plus jeune, je ne Le temps file et c'est le moment pour lui de retour­me sentais pas l’âme d’un sportif. Mais le Kung Fu ner en classe. Je le remercie et lui fais part, enthou-est bien plus qu’un sport et cela m’a plu. Je suis siaste, de ma fascination pour les arts martiaux,également des cours de Tai Chi au sein du club. » ce à quoi il me répond : « Ah… »Agefi bliss 001 35

Parce que la beauté méritait un chef d’œuvreConcentré d’absolu, la gamme Elixir des Glaciers propose une variation rareet somptueuse autour des ingrédients les plus nobles que la Suisse puisseoffrir. Eau des plus pures, puisée au pied d’un glacier millénaire, extraits deplantes, issus de la production conservatoire Valmont (le jardin phyto-alpin)et teneur en ADN triple défiant les lois de la cosmétique...Des formules exclusives pour les femmes en quête d’exception. www.evalmont.com Disponible à la parfumerie du Bongénie

Angela DeCristofaro est une artiste d’origine italienne, née à Bari en Italie. En 1962, son grand-père est nommé responsable du vestiaire et du département des costumes masculins par les compagnies Western Costume et Paramount où il habilla les plus grands acteurs durant plus de 30 ans. Et toute la famille de le suivre en émigrant à Los Angeles dans les années 70. Winggraphite sur carnet 20 cm × 30 cm #�ngela 37

Eric Leonhardt Leighton Avant que je ne devienne mère, je me disais que je n’avais aucune excuse de ne pas tout faire, j’avais conditionné mon esprit de la sorte, alors je l’ai fait. Now that I am a mother I tell myself I have no excuse to not do everything I set my mind to doing ; for her. Holy Boy, Soldier Boy acrylique et ruban de satin sur toile, 152 cm × 305 cm Blindnessacylique sur toile, 122 cm × 152 cm C’est donc en gambadant dans les couloirs du magnifique building de la Western Company sur Melrose Avenue que la petite Angela grandit. Parterres sans fin de costumes de films, exquises silhouettes féminines se préparant dans les boudoirs aux rideaux en cascades dorées et immenses miroirs reflé- tant les plus grandes stars, odeurs de cigarettes et de parfums Chanel qui émanent des salons, tels sont les souvenirs qu’elle garde de son enfance.#Angela 38

autoportraitOutre de très fortes influences liées à la mode et à la haute couture, Angela se dirige vers les arts visuels ;elle est diplômée de la prestigieuse Art Center School of Design de Pasadena.C’est ainsi que durant les années 90, à Los Angeles, pour soutenir financièrement son atelier et sa toutenouvelle carrière de peintre, Angela pratique le stylisme pour des campagnes éditoriales et publicitaires.Agefi bliss 001 39

Eric Leonardt Leighton Never Neglect The Tiniest Cut acrylique sur toile, 122 cm × 152 cm Anita Ekberg l’a parfaitement exprimé dans la “Dolce Vita\" de Federico Fellini... A la question “Quelles sont les choses que vous préférez dans la vie ?\", sa réponse est “J’aime beaucoup de choses, mais il y a trois choses que je préfère, l’amour, l’amour et l’amour.\"Durant cette période, ses peintures sont exposées à travers les Etats-Unis et en Europe. En 2006,son exposition Totally Shaped Out of Nothing présente des peintures dont les grands formats luipermettent de faire cohabiter — et de réconcilier — des éléments a priori discordants, reflets de saphilosophie : « Je pense que la plupart des femmes et des hommes ont des points communs, noussommes tous une addition de diverses parties de nous-mêmes mises ensemble et nous ne vivons pasune seule et même existence ».#Angela 40

Style is not about what you’re wearing, Eric Leonardt Leighton but about the swagger you have when you’re wearing something or nothing at all! Saint Agathagraphite sur papier de riz 19,5 cm × 29,5 cmNelly Recchia Eric Leonardt Leighton On love… Either it is, or it isn’t.Durant 20 ans, Angela passe d’une forme d’existence à une autre en accumulant et assemblant harmo­nieusement toutes les parts d’elle-même.Elle réside actuellement à Londres avec son mari réalisateur Eric Leonhardt Leighton et leur fille Beatrice.Agefi bliss 001 41

BOUTIQUES WINNER OF GENEVAGENEVE • GSTAAD • LUZERN GRAND PRIX D'HORLOGERIE ZURICH • ZERMATT BIG BANG BRODERIE

44–47 rencontre l’ère de Léa Peckre, entre obscur et sacré 48–55 série un nouvel horizon 56–60 horlogerie #carats 2016, année bissextyles 61 joaillerie chou, un caillou! 62–63 Michel Jeannot madame est (moyennement bien) serviemode 43

Emma Ledoyen l’ère de Léa Peckre: entreobscur & sacré Fabrice Fouilletmode 44

Par Katharina SandElle ne sourit pas pour plaire et préfère les sourires victorieux. Quand la créatrice Léa Peckres’impatiente, les coins de sa bouche se courbent vers le bas — tout comme les volumes voûtées decathédrales qu’elle traduit en résille. Depuis l’automne 2015, la jeune Française partage son tempsentre son l’atelier à Paris et son poste de directrice de la filière mode de la prestigieuse Haute Écoled’Art et de Design de Genève — à la conquête du monde avec ses tailleurs.Il est 9 h du matin et dans le bureau blanc éclatant de l’école, vêtue d’une palette de gris, elle verseun peu de sucre dans son café. « La dernière fois que j’ai porté du rose ? Un rire lui échappe : Je devaisêtre en primaire ! » Le matin, elle s’habille en deux minutes. Doc Martens, Jeans Acne, un T-shirt etune veste de sa collection. Veste cuir mouton retourné en hiver. Ses longs cheveux sont attachésavec un élastique dans la nuque. « On voit bien que je ne passe pas 4 heures dans la salle de bains ! »Son seul rituel du matin est d’armer presque tous ses doigts de bagues.Ses inspirations peuvent paraître sombres. Lorsque, suite à sa présentation à l’école de La Cambre,Jean Paul Gaultier lui demande d’intégrer son atelier haute couture, elle lui crée une robe-araignée.Le titre de sa collection primée en 2011 au Festival d’Hyères était Les cimetières sont des champsde fleurs, celui de sa première collection en 2013 Flowers born in Shadows. Même la typographie deson logo évoque des anciens textes religieux et les arcs de l’architecture médiévale. Pourtant, elle re-fuse catégoriquement l’étiquette « gothique » : « le lettrage est juste un clin d’œil, la base de mon travailest une femme élégante. Je ne fais pas juste du noir pour faire du noir. »Ses parents, actifs dans le monde du cinéma, lui ont surtout appris à observer la lumière, « sujetprincipal le soir à table ! » Les observations de son père, directeur photo, et de sa mère, productricede films, ne s’arrêtaient pas à la critique des tournages. La luminosité de leur espace était aussi pro-fondément liée au sens du confort. Et de confier précisément à propos de la lumière: « Chez nous,c’était Versailles ! » ( Autre anecdote familiale, et pas des moindres : la soeur de Léa ne pouvait quitterla maison qu’à condition d’être habillée à l’identique : « J’imposais, elle suivait. »)  Depuis, la cinémato-graphie infiltre toujours le travail de Léa. Si sa collection A light in the dark était inspirée par les filmsaustères de Michael Haneke, elle cite également les images du vidéaste Bill Viola. De même, le film descience-fiction Dune de David Lynch ( se déroulant sur une planète couverte de sable hostile ) datantde 1984 — l’année de sa naissance — était l’inspiration première de sa collection printemps-été 2016présentée à Paris.Peu de matières incarnent le contraste entre l’ombre et la lumière comme la résille — une matièrephare pour Léa depuis ses débuts. Un peu élastique, plus souvent utilisée pour la lingerie haut degamme, elle l’avait trouvée au Salon Première Vision lorsqu’elle était encore étudiante. Depuis, elle lasculpte — du sous-top aux drapés plus romanesques — en armures qui enlacent le corps comme unruban de fumée, qui expose et voile simultanément. En mars 2014, une collaboration avec Lejaby sefait naturellement. Comme toutes ses créations, cette collection-capsule est construite comme unecathédrale : une transparence structurée et suspendue telle le plafond d’une abbaye.Agefi bliss 001 45

Cosmic ConcreteTom de Peyret et Chloé Berthaudin “Je ne fais pas juste du noir pour faire du noir.\" fétiches et défilésSur son compte Instagram, on trouve un défilé d’images d’églises, avec #dimanchejourneeduseigneurlp.Quand Léa décrit — sans les dévoiler — ses moodboards, elle mentionne qu’on y trouve toujoursquelques portraits de femmes qui l’inspirent, des paysages un peu désertés — et quelques églises.Lors de sa victoire au Festival de Hyères, ses mannequins portaient des parures de nonnes. Elle anommé les sacs qu’elle a créés comme directrice artistique pour la griffe de maroquinerie De Gris:Relique, Amulette, Talisman et Icon. Pourtant, elle n’a pas reçu d’éducation religieuse: l’attirance estcomplètement personnelle. « Dès que je passe devant une église, je m’arrête. Pour moi, cette archi-tecture est liée à la spiritualité purement esthétique, mais détachée de la religion; d’ailleurs, je visiteaussi les synagogues et les mosquées. »A l’instar de messes, certains défilés électrifient. Pourtant, ce ne sont pas toujours les spectaclesexaltés et grandioses à la Galliano et Alexander McQueen, applaudis comme des opéras, mais ceuxqui changent profondément notre perception du vêtement. Comme la force discrète que dégageaitla sobre conviction d’Helmut Lang au sommet de sa gloire en 1997, l’impact des defilés de Léa estpalpable, même dans une vidéo. On en voit les traces sur les visages des invités : le vêtement a changél’air qui l’entoure. Tout est neuf, le passé est effacé. Quelqu’un a allumé la lumière.Avec ses volumes bombés, ses colonnes solennelles, ses coutures précises comme des pierres taillées,Léa Peckre enchaîne les prix et s’affirme devant des jurys d’experts. Elle se souvient du Festival demode 46

Nicolas Schopfer Hyères : « Le moment le plus touchant fut quand Raf Simons pendant le trajet dans la voiture m’a de- mandé si j’avais bien appelé ma maman » — et elle s’est jetée sur son téléphone. Pour l’ANDAM *, elle admet avoir été tétanisée par le jury : parmi d’autres, elle affrontait le créateur Haider Ackermann, devant les PDGs de LVMH, Kering et YSL, le directeur mode de Chanel et Pierre Bergé. « C’était très dur de présenter ma collection devant des personnes si importantes — j’ai réalisé que je rentrais dans un autre contexte professionnel, et que j’avais des épaules un peu plus larges... » Heureusement qu’elle s’y connaît en épaulettes ! C’est avec sa première veste Jean Paul Gaultier, achetée il y a six ans, quand elle était encore étudiante, qu’elle a commencé à comprendre l’intérêt et le pouvoir d’un vêtement de créateur. Le tailleur reste le fil conducteur de ses collections. Pour le printemps 2016, elle présente ses daily resistance jackets, tenues par des ceintures graphiques qui créent des tensions de rattachement et relâchement. Des vestes clairement conçues par une jeune femme qui se bat. Pour la marque de bijoux De la Forge elle avait d’abord dessiné une bague, un collier et une boucle d’oreille, basés sur l’architecture moderniste et intégrant l’aspect mat du béton ainsi que le côté plus clinquant de l’or rose. Depuis, et visibles lors de son dernier défilé, elle a développé des bagues de bouche, comme un clip posé sur la lèvre en déclinaisons boule et barre, ressemblant à de très luxueux piercings de lèvres — qui permettent de s’armer jusqu’aux dents. * L’ANDAM (Association nationale pour le développement des arts de la mode) organise chaque année en France un grand concours destiné à repérer et à lancer de jeunes stylistes Agefi bliss 001 47

unnouvelhorizon modèle Chemisier, chaussures et jeans Erika Cavallini Ksusha (agence Women, Milan) photographieZak Andrea Zaccone stylisme Ellen Mirck 48




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