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Can 19 2e Medl

Published by vgu08417, 2020-05-24 03:13:20

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Table of Contents 2 5 Couverture 15 Sommaire 31 Item287 - Épidémiologie, facteurs de risque, prévention et dépistage des cancers 47 Item288 - Cancérogenèse, oncogénétique Item289 - Diagnostic des cancers, signes d’appel et investigations paracliniques, 65 caractérisation du stade, pronostic Item290 - Le médecin préleveur de cellules et/ou de tissus pour des examens 79 d’anatomie et cytologie pathologiques Item291 - Traitement des cancers : chirurgie, radiothérapie, traitements médicaux des 109 cancers (chimiothérapie, thérapies ciblées, immunothérapie). La décision thérapeutique pluridisciplinaire et l’information du malade 121 Item292 - Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux à tous les stades de la maladie 131 Item294 - Cancers de l’enfant : particularités épidémiologiques, diagnostiques et 143 thérapeutiques 159 Item295 - Tumeurs de la cavité buccale, naso-sinusiennes et du cavum, et des voies 181 aérodigestives supérieures 197 Item296 - Tumeurs intracrâniennes 215 Item297 - Tumeurs du col utérin, tumeurs du corps utérin 231 Item298 - Tumeurs du côlon et du rectum 245 Item299 - Tumeurs cutanées, épithéliales et mélaniques 265 Item300 - Tumeurs de l’estomac 279 Item301 - Tumeurs du foie, primitives et secondaires 297 Item302 - Tumeurs de l’œsophage 321 Item303 - Tumeurs de l’ovaire 347 Item304 - Tumeurs des os primitives et secondaires 371 Item305 - Tumeurs du pancréas 385 Item306 - Tumeurs du poumon, primitives et secondaires 409 Item307 - Tumeurs de la prostate 417 Item308 - Tumeurs du rein Item309 - Tumeurs du sein Item310 - Tumeurs du testicule Item311 - Tumeurs vésicales

LE RÉFÉRENTIEL | MED-LINE | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | C O L L È G EL I V R E O F F I C I E L D U Collège National des Enseignants en Cancérologie (CNEC) Cancérologie Ouvrage dirigé par le Pr Philippe Giraud et le Pr Jean Trédaniel iECN 2018 2019 2020 Collection dirigée par le Pr Serge Perrot Centre hospitalier Cochin, Paris

Éditions MED-LINE | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Tél. : 09 70 77 11 48 e-mail : [email protected] www.med-line.fr CANCÉROLOGIE ISBN : 978-2-84678-219-7 © 2017 ÉDITIONS MED-LINE Mise en page : Meriem Rezgui Toute représentation ou reproduction, intégrale ou partielle, faite sans le consentement des auteurs, ou de leurs ayants droit ou ayants cause, est illicite (loi du 11 mars 1957, alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal.

Sommaire Chapitre 1 : Épidémiologie, facteurs de risque, prévention et dépistage des cancers .......................13 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Chapitre 2 : UE 9 - item 287 Chapitre 3 : Cancérogénèse, oncogénétique................................................................................................................ 29 Chapitre 4 : UE 9 - item 288 Chapitre 5 : Diagnostic des cancers, signes d’appel et investigations paracliniques, caractérisation du stade, pronostic......................................................................................................... 45 Chapitre 6 : UE 9 - item 289 Chapitre 7 : Le médecin préleveur de cellules et/ou de tissus pour des examens d’anatomie Chapitre 8 : et cytologie pathologiques.......................................................................................................................... 63 UE 9 - item 290 Chapitre 9 : Chapitre 10 : Traitement des cancers : chirurgie, radiothérapie, traitements médicaux des cancers Chapitre 11 : (chimiothérapie, thérapies ciblées, immunothérapie). La décision thérapeutique Chapitre 12 : pluridisciplinaire et l’information du malade.................................................................................. 77 Chapitre 13 : UE 9 - item 291 Chapitre 14 : Chapitre 15 : Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux à tous les stades de la maladie .............................................................................................................. 107 UE 9 - item 292 Cancers de l’enfant : particularités épidémiologiques, diagnostiques et thérapeutiques ...........................................................................................................119 UE 9 - item 294 Tumeurs de la cavité buccale, naso-sinusiennes et du cavum, et des voies aérodigestives supérieures .......................................................................................... 129 UE 9 - item 295 Tumeurs intracrâniennes..............................................................................................................................141 UE 9 - item 296 Tumeurs du col utérin, tumeurs du corps utérin............................................................................ 157 UE 9 - item 297 Tumeurs du côlon et du rectum................................................................................................................ 179 UE 9 - item 298 Tumeurs cutanées, épithéliales et mélaniques ............................................................................ 195 UE 9 - item 299 Tumeurs de l’estomac................................................................................................................................... 213 UE 9 - item 300 Tumeurs du foie, primitives et secondaires................................................................................... 229 UE 9 - item 301 Tumeurs de l’œsophage ............................................................................................................................. 243 UE 9 - item 302

Chapitre 16 : Tumeurs de l’ovaire........................................................................................................................................ 263 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Chapitre 17 : UE 9 - item 303 Chapitre 18 : Chapitre 19 : Tumeurs des os primitives et secondaires....................................................................................... 277 Chapitre 20 : UE 9 - item 304 Chapitre 21 : Chapitre 22 : Tumeurs du pancréas ................................................................................................................................... 295 Chapitre 23 : UE 9 - item 305 Chapitre 24 : Tumeurs du poumon, primitives et secondaires............................................................................ 319 UE 9 - item 306 Tumeurs de la prostate................................................................................................................................ 345 UE 9 - item 307 Tumeurs du rein................................................................................................................................................ 369 UE 9 - item 308 Tumeurs du sein............................................................................................................................................... 383 UE 9 - item 309 Tumeurs du testicule..................................................................................................................................... 407 UE 9 - item 310 Tumeurs vésicales............................................................................................................................................ 415 UE 9 - item 311

Préface | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | C’est un grand honneur et un immense plaisir de présenter le référentiel d’Oncologie du Collège National des Enseignants en Cancérologie (CNEC) dont l’objectif premier est de développer les chapitres les plus importants de notre discipline. Cet ouvrage, avant tout adapté à la préparation de l’ECN informatisé, est destiné aux étudiants du deuxième cycle des études médicales (DFASM2, 3 et 4) en leur permettant de compléter leur formation et leurs connaissances en oncologie avec une vue transversale de la discipline. Il est centré sur l’UE9 mais également sur d’autres UE dont les contenus concernent directement l’oncologie. Cette approche est complémentaire de la cancérologie enseignée par les spécialités d’organe, mais surtout est indispensable à l’appréhension et la compréhension de la maladie cancéreuse selon une approche multidisciplinaire. Le travail accompli a été très important afin d’aboutir à un savant mélange entre une haute tenue scientifique et l’accessibilité pédagogique des étudiants. Il propose un support pédagogique basé sur des données actualisées et adapté à l’évolution récente des objectifs de l’ECN. Je tiens à remercier chaleureusement tous les membres du CNEC qui ont collaboré avec plaisir et enthousiasme à la rédaction de cet ouvrage. Les Professeurs Philippe Giraud et Jean Trédaniel doivent être particulièrement remerciés pour la coordination sans faille, leur ténacité et leur compréhension. En espérant que tous ces efforts aident les étudiants à réussir leur ENCi et surtout que ce manuel puisse éveiller chez certains d’entre eux intérêt et curiosité pour notre belle spécialité. Pr David Azria Président du Collège des Enseignants en Cancérologie (CNEC)

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Introduction | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Sous l’égide du Collège National des Enseignants en Cancérologie (CNEC) et spécialement conçu pour la préparation de l’iECN, ce manuel adopte fidèlement la programme de la cancérologie aux iECN. Il a été réalisé avec le concours d’équipes universitaires impliquées dans l’enseignement de la cancérologie, discipline transversale s’il en est. Les auteurs, dont l’expertise est reconnue, doivent être ici remerciés de leur implication dans la réalisation de cet ouvrage. Chaque item est structuré de manière identique ; les principales références et recommandations sont indiquées. S’y ajoute le « coup de pouce de l’enseignant » et les points principaux à retenir qui ponctuent chaque item. En dehors, des cancers de la peau, des poumons, de la prostate, du côlon et du sein, les modalités thérapeutiques sont données à titre indicatif, le programme de l’iECN ne faisant pas mention du traitement. Nous espérons que cet ouvrage réponde à vos attentes et vous guide au mieux pour la préparation de l’iECN. Pr Philippe Giraud Pr Jean Trédaniel Coordonnateurs de l’ouvrage

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UE 9 Item 287 Épidémiologie, facteurs de risque, | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Chapitre 1 prévention et dépistage des cancers Pr Nicolas Mounier1, Pr Jacques Robert2, Pr Philippe Giraud3, Pr Jean Trédaniel4 1 Service d’Onco-hématologie, CHU l'Archet, Nice 2Université de Bordeaux 3Service d’Oncologie – Radiothérapie, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris 4Unité de Cancérologie thoracique, Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph, Paris 1. Épidémiologie des cancers OBJECTIFS iECN 1.1.   Notions générales ÎÎ Épidémiologie, facteurs de risque, prévention et dépis- 1.2.   Épidémiologie des cancers les plus fréquents tage des cancers 2. Facteurs de risque des cancers –– Décrire l’épidémiologie des cancers les plus fréquents 2.1.   Tabac 2.2.   Alcool (sein, côlon-rectum, poumon, prostate). Incidence, 2.3.   Facteurs nutritionnels prévalence, mortalité. 2.4.   Facteurs de risque environnementaux et –– Connaître et hiérarchiser les facteurs de risque de ces expositions professionnelles cancers. 2.5.   Facteurs de risque infectieux –– Expliquer les principes de prévention primaire et sec- ondaire. 3. Principes de prévention des cancers –– Argumenter les principes du dépistage du cancer (sein, 3.1.   Définitions côlon-rectum, col utérin). 3.2.   Prévention vis-à-vis des principaux facteurs de risque Mots clés : Cancer – Épidémiologie – Incidence – Prévalence – Mortalité – Facteurs de risque – 4. Dépistage des cancers Tabagisme – Alcoolisme – Alimentation – 4.1.   Notions générales Prévention – Dépistage – Biais. 4.2.   Les principaux biais 4.3.   Cancers dépistés yy Le cancer est une cause majeure de morbidité et mortalité. Pour la planète prise dans son ensemble, il a été responsable en 2012 de 14 millions de nouveaux cas (ou cas incidents) et de 8 millions de décès. yy L’Institut National du Cancer (INCa) publie chaque année les principales données (épidémiologie, prévention, dépistage, soins en cancérologie, la vie pendant et après un cancer, la recherche) du cancer en France. yy Les données d'incidence proviennent du registre français des cancers, FRANCIM, qui couvre environ 18 % de la population française. Les données de mortalité sont fournies par l’INSERM (CépiDc-Inserm). 1. Épidémiologie des cancers 1.1. Notions générales yy Le cancer est la première cause de mortalité en France, devant les maladies cardio-vasculaires (Figure 1). yy L’incidence des cancers, qui augmentait depuis 1980, est en diminution chez l’homme depuis 2005 et s’est sta- bilisée chez la femme. La mortalité par cancer diminue régulièrement tant chez l’homme que chez la femme (Figure 2). yy Le cancer est encore une maladie majoritairement masculine (Figure 3). yy C’est aussi une maladie de la seconde moitié de la vie (Figure 4). La part prise par des sujets de plus en plus âgés rend compte de l’importance croissante de l’évaluation et de la prise en charge gériatriques (« l’oncogériatrie »). I 1 3U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

Figure 1. Causes de décès, France, 1980-2012 450 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 400 Taux (non standardisés) pour 100 000 350 300 250 200 150 100 Cancers, hommes Maladies cardio-vasculaires, hommes 50 Cancers, femmes Maladies cardio-vasculaires, femmes 0 1970 1980 1990 2000 2010 2012 2020 Figure 2. Évolution de l’incidence et de la mortalité pour tous les cancers, France, 1980-2012 Taux standardisés monde pour 100 000 personnes-années 450 Incidence hommes 400 Incidence femmes 350 Mortalité hommes 300 Mortalité femmes 250 200 1980 1990 2000 2010 2012 2020 150 100 50 0 1970 Figure 3. Projection de l’incidence et de la mortalité selon le sexe, France, 2015 Incidence Mortalité Hommes Hommes 55% Femmes 56% Femmes 1 4 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 Figure 4. Incidence et mortalité par cancer chez l’homme, selon l’âge (France, 2005) Taux pour 100 000 personnes-années 3500 Incidence | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 3000 Mortalité 2500 2000 1500 1000 500 0 5 15 25 35 45 55 65 75 85 yy En 2015, le nombre de nouveaux cancers en France métropolitaine est estimé à 384 442 (210 882 hommes et 173  560 femmes). Chez l’homme, les trois tumeurs solides les plus fréquentes sont celles de la prostate (53 913 nouveaux cas), du poumon (30 401) et du côlon-rectum (23 535). Chez la femme, il s’agit des cancers du sein (54 062), du côlon-rectum (19 553) et du poumon (14 821). Ainsi, quatre localisations tumorales (prostate, sein, poumon, côlon-rectum) rendent compte de la moitié des nouveaux cas de cancer. yy Le nombre de décès par cancer en 2015 est estimé à 149 456 décès (84 041 hommes et 65 415 femmes). Le cancer du poumon est la première cause de décès par cancer chez l’homme (20 990 décès) devant le cancer colorectal (9 337) et le cancer de la prostate (8 713). Chez la femme, le cancer du sein (11 913 décès) précède le cancer du poumon (9 565) et le cancer colorectal (8 496). yy L’incidence et la mortalité des principaux cancers diminuent régulièrement chez l’homme comme chez la femme, sauf le cancer du poumon de la femme qui continue à augmenter et qui a peut-être déjà dépassé la mortalité du cancer du sein (puisque les dernières données – standardisées – dont nous disposons sont de 2012), devenant ainsi la première cause de mortalité chez la femme française (comme il l’est depuis 1987 chez la femme américaine). yy Pour l’ensemble des cancers, la survie nette diminue avec l’âge et, pour la plupart des cancers, elle est meilleure chez la femme que chez l’homme. yy En 2008, la prévalence partielle à 5 ans (c’est-à-dire le nombre de sujets vivants ayant eu un diagnostic de cancer dans les 5 dernières années) est estimée à près de 1,1 million de personnes chez les 15 ans et plus. La prévalence totale, qui regroupe tous les malades et anciens malades ayant eu un diagnostic de cancer au cours de leur vie, est de l’ordre de 3 millions, ce qui correspond à 6,4 % de la population masculine de 15 ans et plus et 5,3 % de la population féminine correspondante. 1.2. Épidémiologie des cancers les plus fréquents 1.2.1.   Cancer du poumon yy Le cancer du poumon est le 2e cancer incident chez l’homme et le 3e chez la femme. Il représente respectivement 14 % et 8,5 % de l’ensemble des nouveaux cas de cancers masculins et féminins (Figure 5). yy Chez l’homme, l’incidence du cancer du poumon est quasiment stable depuis 1980. Elle est, au contraire, en forte augmentation chez la femme (le taux d’incidence standardisé est passé de 12,8 à 18,6 pour 100 000 personnes- années femmes entre 2005 et 2012) (Figures 6 et 7). yy En 2012, l’âge médian au diagnostic est de 66 ans chez l’homme et 65 ans chez la femme. I 1 5U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

yy Le cancer du poumon est la première cause de décès par cancer. Il représente 20 % de l’ensemble des décès par | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | cancers (respectivement, 25 % et 15 % chez l’homme et la femme) (Figure 8). yy La mortalité diminue chez l’homme depuis 1980, avec une accentuation de cette diminution depuis 2005, mais continue à augmenter chez la femme (Figures 9 et 10). yy En 2008, parmi les personnes ayant eu un cancer diagnostiqué dans les 5 dernières années et toujours en vie, 49 000 (36 000 hommes et 13 000 femmes) avaient eu un cancer du poumon. La prévalence totale s’élevait à 79 000 personnes. 1.2.2.   Cancer du côlon-rectum yy Chez l’homme le cancer colorectal est le troisième cancer incident et représente 11 % de l’ensemble des nouveaux cas de cancers masculins. Il est en 2e position chez la femme et représente également 11 % de l’ensemble des nou- veaux cas de cancers féminins. yy L’incidence du cancer colorectal diminue légèrement depuis 2005. yy 71 % des hommes et 74 % des femmes ont plus de 65 ans au diagnostic. yy Le cancer colorectal représente près 12 % de l’ensemble des décès par cancer et en est la 2e cause. Cependant, la mortalité par cancer colorectal diminue régulièrement depuis 1980. yy En 2008, la prévalence partielle à 5 ans s’élevait à 121 000 patients. La prévalence totale montait à 319 000 sujets. yy La survie nette à 5 ans est proche entre hommes et femmes. Elle s’améliore au cours du temps, passant de 54 % pour les cas diagnostiqués entre 1989-1993 à 63 % pour les cas diagnostiqués en 2005-2010. 1.2.3.   Cancer du sein yy Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme (sans être totalement absent chez l’homme). Il représente 31 % de l’ensemble des nouveaux cas de cancers féminins. yy Son incidence, qui avait beaucoup augmenté entre 1980 et 2000, est en diminution depuis 2005 (-1,5 % par an sur la période 2005-2012). yy 58 % de ces cancers sont diagnostiqués chez des femmes de 50 à 74 ans. yy Le cancer du sein est (encore) la première cause de mortalité par cancer chez la femme et rend compte de 18 % des décès féminins par cancer. yy En 2008, la prévalence partielle à 5 ans était de 220 000 femmes et la prévalence totale de 645 000. yy La survie nette à 5 ans, standardisée sur l’âge, s’améliore au cours du temps, passant de 80 % pour les femmes diagnostiquées en 1989-1993 à 87 % pour celles diagnostiquées en 2005-2010. 1.2.4.   Cancer de la prostate yy L’incidence du cancer de la prostate a considérablement augmenté entre 1980 et 2005 (ce qui correspond essen- tiellement à l’introduction du dosage du PSA - « prostate specific antigen »- comme test de dépistage) avant de chuter tout aussi brutalement (ce qui est notamment dû à la prise de conscience d’un risque de surdiagnostic et de surtraitement de petits cancers diagnostiqués uniquement à l’occasion de démarches systématiques de dépistage). yy En 2011, le cancer de la prostate est le plus fréquemment diagnostiqué chez l’homme chez qui il représente 26 % de l’ensemble des nouveaux cancers. yy La mortalité diminue régulièrement depuis 1990. yy Le cancer de prostate se situe au 3e rang des décès par cancer chez l’homme. yy En 2015, 79 % de ces décès concernent des hommes de 75 ans et plus. En 2012, l’âge médian au décès est de 83 ans. yy En 2008, la prévalence partielle à 5 ans était de 265 000 hommes et la prévalence totale de 509 000 hommes. yy La survie nette à 5 ans, standardisée sur l’âge, s’améliore avec le temps, passant de 72 % pour les cas diagnostiqués en 1989-1993 à 93 % pour les hommes diagnostiqués entre 2005 et 2010. 1 6 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 Figure 5. Données projetées de l’incidence des cancers en France, 2015 Sein Sein : 54 062 cas Prostate Prostate : 53 913 (évaluation 2011) Poumon Poumon : 45 222 cas Côlon-rectum Côlon-rectum : 43 068 cas Autres Autres : 188 177 cas (hors lymphomes) Total : 384 442 cas Figure 6. Évolution de l’incidence des cancers chez l’homme, France, 1980-2012 Taux standardisés monde pour 100 000 personnes-années 140 120 100 80 60 Prostate 40 Poumon Côlon-rectum 20 Cancers ORL 0 Mélanome 1970 1980 1990 2000 2010 2012 2020 Taux standardisés monde pour 100 000 personnes-années Figure 7. Évolution de l’incidence des cancers chez la femme, France, 1980-2012 100 80 60 40 Sein Côlon-rectum 20 Poumon Mélanome 0 Col utérus 1970 Cancers ORL 1980 1990 2000 2010 2012 2020 I 1 7U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

Figure 8. Nombres projetés des décès par cancer en France, 2015 Poumon Poumon : 30 555 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Côlon Côlon-rectum : 17 833 Sein Sein : 11 913 Prostate Prostate : 8 713 Autres Autres : 80 442 Total : 149 456 Figure 9. Évolution de la mortalité par cancer chez l’homme, France, 1980-2012 Taux standardisés monde pour 100 000 personnes-années 50 40 30 20 Poumon 10 Côlon-rectum Prostate Cancers ORL 0 Mélanome 1970 1980 1990 2000 2010 2012 2020 Figure 10. Évolution de la mortalité par cancer chez la femme, France, 1980-2012 25 Taux standardisés monde pour 100 000 personnes-années 20 15 10 Sein Poumon 5 Côlon-rectum Col utérus 0 Cancers ORL 1970 Mélanome 1980 1990 2000 2010 2012 2020 1 8 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 2. Facteurs de risque des cancers yy Un facteur de risque est tout attribut, caractéristique ou exposition d’un sujet qui augmente la probabilité de développer une maladie ou de souffrir d’un traumatisme. Le principal facteur de risque de développer un cancer est l’âge ! 2.1. Tabac yy Le tabac est le premier facteur de risque évitable de mortalité précoce par cancer, en France et dans le monde. Il tue près de 6 millions de personnes chaque année, soit près de 10 % de la mortalité mondiale (dont 600 000 par tabagisme passif). yy La fumée de tabac contient dont plus de 7 000 composés chimiques, dont plusieurs dizaines sont reconnus comme cancérogènes (regroupés en plusieurs classes parmi lesquelles les hydrocarbures polycyliques aromatiques – « les goudrons » –, les N-nitrosamines et les amines aromatiques). yy En 2015, le tabagisme concernait 35 % des Français, et le tabagisme quotidien 29 %. Ces chiffres de prévalence sont (encore) plus élevés parmi les hommes que parmi les femmes. Le tabagisme quotidien diminue chez les lycéens (23 % de lycéens fumeurs en 2015 contre 31 % en 2011) mais, dans cette tranche d’âge, les filles sont davantage fumeuses que les garçons. yy Le tabac a été responsable, toutes maladies confondues, de 73 000 décès en 2013, dont 45 000 décès par cancer (parmi lesquels 30 000 cancers du poumon). Le tabac est impliqué, à des degrés divers (on parle de fraction attribuable – Figure 11) dans le développement de plusieurs localisations cancéreuses : cancer du poumon en premier, mais aussi cancers ORL (cavités nasales, bouche, pharynx, larynx), cancers digestifs (œsophage, estomac, pancréas, côlon-rectum, foie), cancers urologiques et gynécologiques (rein, vessie, sein, ovaire, col de l’utérus), leucémies myéloïdes (Figure 12). Il n’y a pas de seuil de consommation sans risque puisque même le tabagisme passif (ou involontaire) augmente le risque de cancer (150 cancers du poumon ont été attribués au tabagisme passif en 2011). yy Le « coût social » du tabac est estimé à 120 milliards d’euros chaque année, en France. Figure 11. Fraction (%) des décès attribuables au tabagisme, selon la localisation cancéreuse, France, 2013 100 80 60 40 20 Homme 0 Femme I 1 9U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s Col utérus Ovaire Côlon Leucémie Estomac Pancréas Foie Rein Vessie VADS Poumon

Figure 12. Le tabac, facteur de risque dans la survenue de plusieurs cancers Le cancer de la bouche Le cancer de la cavité nasale | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Le cancer du larynx Le cancer du pharynx Le cancer de l’œsophage Le cancer du poumon Le cancer du sein Le cancer du foie Le cancer de l’estomac Le cancer du pancréas Le cancer du rein Le cancer colorectal Le cancer de l’ovaire Le cancer du col Le cancer de la vessie de l’utérus Les leucémies myéloïdes (sang) Épidémio – Figure 13 – Le tabac, facteur de risque dans la survenue de plusieurs cancers 2.2. Alcool yy L’alcool est la deuxième cause de mortalité évitable par cancer. yy L’évaluation de la consommation d’alcool est difficile (notamment du fait d’une sous-déclaration des consom- mateurs). Néanmoins, les données disponibles montrent qu’elle diminue depuis les années 1960, essentiellement du fait d’une diminution de la consommation de vin ; cette tendance ancienne à la baisse semble toutefois moins forte depuis les années 1990 pour aboutir à une stabilisation voire à une ré-augmentation récente et à confirmer. yy L’alcool a été responsable, toutes maladies confondues, de 49 000 décès en 2009, dont plus de 15 000 décès par cancer. La consommation d’alcool augmente le risque de développer un cancer dans 7 localisations : bouche, pharynx, larynx, œsophage, côlon-rectum, sein et foie. yy Le risque de cancer augmente quel que soit le type de boisson alcoolisée consommée et de manière linéaire avec la dose, sans seuil en dessous duquel le risque serait nul : même une consommation faible augmente le risque. 2.3. Facteurs nutritionnels yy La nutrition englobe l’alimentation (y compris l’alcool), le statut nutritionnel et l’activité physique. Elle est source de facteurs de risque et de facteurs protecteurs. yy On estime que 20 à 25 % des cancers sont imputables aux comportements alimentaires. yy Les facteurs nutritionnels qui augmentent le risque de cancer sont : la consommation d’alcool, le surpoids et l’obésité, la consommation de viandes rouges et de charcuteries, la consommation de sel et d’aliments salés, la consommation de compléments alimentaires à base de bêtacarotène. yy Au contraire, réduisent le risque de cancer : l’activité physique, la consommation de fruits et légumes, la consom- mation de fibres alimentaires et l’allaitement. 2 0 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 2.4. Facteurs de risque environnementaux et expositions professionnelles yy Les facteurs de risque environnementaux sont des agents physiques, chimiques ou biologiques présents dans l’atmosphère, les sols, l’eau, les médicaments ou l’alimentation et dont l’exposition est subie. Leur étude est diffi- cile et sujette à controverses. On estime que 5 à 10 % des cancers seraient liés à des facteurs environnementaux. yy Les expositions professionnelles sont traitées par l’item 288. Les données essentielles sur ce thème sont les sui- vantes : –– en 2010, 10 % de l’ensemble des salariés (soit 2,2 millions) ont été exposés à au moins un produit chimique cancérogène au cours de la dernière semaine travaillée ; –– les 8 principaux produits chimiques cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques rencontrés en milieu de travail sont, par importance décroissante : les gaz d’échappement diesel, les huiles minérales entières, les poussières de bois, la silice cristalline, le formaldéhyde, le plomb et ses dérivés, l’amiante et les phtalates ; –– l’incidence des cancers d’origine professionnelle est estimée entre 15 000 et 30 000 nouveaux cas par an (soit 4 à 8,5 % des cancers) ; –– l’amiante, facteur de risque essentiel du mésothéliome pleural (mais aussi d’autres cancers : poumon, larynx, ovaire) est l’exposition la plus reconnue en pathologie professionnelle. 2.5. Facteurs de risque infectieux yy 3 % des cancers, en France, auraient une origine infectieuse. yy Les principaux agents infectieux en cause sont : –– les sous-types 16 et 18 du papillomavirus humain (HPV 16 et 18) qui sont responsables de la quasi totalité des cancers du col de l’utérus. Ils sont également associés à d’autres cancers plus rares de la sphère anogénitale (vagin, vulve, pénis, anus) ainsi qu’à des cancers de la cavité buccale, de l’oropharynx et du larynx ; –– les hépatites virales chroniques B et C qui sont à l’origine d’environ un tiers des cancers du foie (soit plus de 3 200 cas diagnostiqués chaque année) ; –– l’infection de la muqueuse gastrique par Helicobacter pylori qui est responsable de près de 80 % des cancers de l’estomac (soit plus de 5 200 cas diagnostiqués par an). Autres virus et parasites associés à la survenue de cancer chez l’homme : –– virus d’Epstein-Barr et lymphome de Burkitt ; –– virus d’Epstein-Barr et carcinome indifférencié du naso-pharynx ; –– virus HTLV1 et leucémie à cellules T ; –– virus herpès humain de type 8 (HSV8) et sarcome de Kaposi ; –– virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et lymphome non hodgkinien ; –– bilharziose et carcinome épidermoïde de la vessie. 3. Principes de prévention des cancers 3.1. Définitions yy On estime à moins de 10 % les cancers héréditaires et à environ 40 % les cancers qui pourraient être évités grâce à des changements de comportements et de modes de vie. yy La prévention consiste à éviter l’apparition, le développement ou l’aggravation de maladies ou d’incapacités. On distingue classiquement : –– la prévention primaire qui agit en amont de la maladie (ex : action sur les facteurs de risque) ; –– la prévention secondaire qui agit à un stade précoce de l’évolution (ex : dépistage, traitement des états pré- cancéreux) ; –– et la prévention tertiaire qui agit sur les complications et les risques de récidive. I 2 1U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

yy Ainsi, la prévention primaire intéresse les populations tandis que la prévention secondaire vise l’individu à haut | www.facebok.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | risque. 3.2. Prévention vis-à-vis des principaux facteurs de risque 3.2.1.   Tabac Les 3 mesures les plus importantes pour la lutte contre le tabagisme, et dont l’efficacité a été universellement vérifiée, sont : –– l’augmentation, forte et régulièrement répétée, des prix ; –– l’interdiction de la publicité, directe et indirecte ; –– l’interdiction de fumer dans les lieux publics clos. yy Un effort particulier a été entrepris dans le cadre du Programme National de Réduction du Tabagisme (PNRT) (objectif 10 du Plan cancer 2014-2019). Le PNRT est organisé autour de 3 axes : –– protéger les jeunes et éviter l’entrée dans le tabagisme : ➢➢ adopter les paquets de cigarettes neutres pour les rendre moins attractifs ; ➢➢ étendre les lieux où il est interdit de fumer et renforcer le respect de l’interdiction de fumer dans les lieux collectifs ; ➢➢ encadrer les dispositifs électroniques de vapotage ; ➢➢ améliorer le respect de l’interdiction de vente aux mineurs. –– aider les fumeurs à arrêter : ➢➢ développer une information plus efficace en direction des fumeurs ; ➢➢ impliquer davantage les professionnels de santé et mobiliser les acteurs de proximité dans l’aide à l’arrêt du tabac ; ➢➢ améliorer l’accès au traitement d’aide au sevrage du tabac ; ➢➢ rendre exemplaires les ministères sociaux, notamment le ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes. –– agir sur l’économie du tabac : ➢➢ créer un fonds dédié aux actions de lutte contre le tabagisme (prévention, sevrage, information) ; ➢➢ renforcer la transparence sur les activités de lobbying de l’industrie du tabac ; ➢➢ renforcer la lutte contre le commerce illicite de tabac ; ➢➢ aider les buralistes à diversifier leurs activités. yy Le paquet neutre, avec des avertissements sanitaires agrandis, renouvelés et repositionnés est devenu au 1er jan- vier 2017 le seul autorisé à la vente pour les cigarettes et le tabac à rouler. yy De nouvelles professions (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, dentistes, médecins du travail…) sont désor- mais autorisées à prescrire des substituts nicotiniques. yy Le forfait d’aide au sevrage a été porté à 150 € par an pour tous les assurés. yy L’opération « Mois sans tabac », conçue pour inciter les fumeurs à arrêter de fumer durant un mois (ce qui mul- tiplie par 5 les chances d’arrêter de fumer définitivement) a été lancée, pour la première fois, en novembre 2016 et a pour vocation de se dérouler tous les ans. yy Chez les malades et anciens malades, un bénéfice significatif de l’arrêt du tabac, augmentant avec la durée de l’abstinence, a été observé pour tous les cancers majeurs associés au tabagisme. Cela est particulièrement net pour les patients atteints d’un cancer du poumon localisé au thorax et qui sont en situation curatrice. Il est impératif, chez eux, d’obtenir un sevrage définitif. 2 2 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 yy La cigarette électronique (e-cigarette) est un dispositif permettant d’inhaler de la vapeur obtenue par chauffage d’une solution liquide composée principalement de propylène glycol, de glycérol, d’arômes et le plus souvent de nicotine. À la différence des cigarettes, elles ne contiennent pas de tabac, ne créent ni de fumée ni de combus- tion. Bien que la nicotine soit addictive et – à très haute dose – néfaste pour la santé, la cigarette électronique ne contient pas le vaste cocktail de produits chimiques cancérogènes trouvés dans le tabac combustible. Il est admis qu’utiliser la cigarette électronique est infiniment moins nocif que de continuer à fumer du tabac. 3.2.2.   Alcool yy La lutte contre l’alcoolisme doit faire face à l’action de nombreux lobbies des producteurs. Là aussi, l’action passe par la fiscalité et l’encadrement de la publicité. La législation sur les débits de boissons devrait également être rénovée. 3.2.3.   Facteurs nutritionnels yy Plusieurs plans de santé publique regroupent leurs efforts sur le thème de la nutrition  : Plan national nutri- tion santé, Plan obésité, Plan cancer, Plan national de prévention par l’activité physique ou sportive, Programme national pour l’alimentation. yy Les principaux objectifs de prévention nutritionnelle des cancers sont de réduire la consommation de boissons alcoolisées et la prévalence du surpoids et de l’obésité, favoriser une alimentation équilibrée et diversifiée (en évitant de recourir aux compléments alimentaires) et promouvoir la pratique régulière d’une activité physique. 3.2.4.   Facteurs de risque environnementaux et expositions professionnelles yy C’est avant tout la pollution qui est l’objet de toutes les controverses. Quoique quantitativement faible (Figure 13), son impact est désormais démontré. Les mesures envisagées pour lutter contre la pollution regroupent, entre autres, l’interdiction des véhicules trop polluants (ce qui pose, notamment, la question des véhicules à moteur diesel), les certificats sur la qualité de l’air pour les voitures, les subventions pour les transports écologiques, l’interdiction des sacs plastiques… yy Le troisième Plan santé au travail met l’accent sur la prévention en milieu professionnel, ce qui inclut bien sûr les produits chimiques cancérogènes. La Société Française de Médecine du Travail a publié des recommandations concernant la surveillance médico-professionnelle des travailleurs exposés, ou ayant été exposés, à des agents cancérogènes pulmonaires. Figure 13. Nombre de cas de cancers attribuables aux différents facteurs de risque de cancer en France en 2000 Source : Les cancers en France, édition 2016, collection Les Données, Institut national du cancer I 2 3U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

3.2.5.   Facteurs de risque infectieux yy Le cancer du col de l’utérus est le 1er cancer à être reconnu par l’Organisation Mondiale de la Santé comme étant attribuable, dans près de 100 % des cas, à une infection virale par un ou plusieurs papillomavirus. yy Sa prévention repose sur la combinaison de deux démarches complémentaires : –– la vaccination contre les HPV 16 et 18 pour toutes les jeunes filles âgées de 11 à 14 ans, avec un rattrapage pour les 15-19 ans. La couverture vaccinale est cependant encore trop faible en France (13,7 % des jeunes filles de 16 ans au 31/12/2015). Les données épidémiologiques nationales et internationales confirment que cette vaccination n’entraîne pas d’augmentation du risque global de maladies auto-immunes. –– le dépistage par frottis du col utérin pour toutes les femmes entre 25 et 65 ans, qu’elles soient vaccinées ou non. yy La prévention de l’hépatite B se fait par la vaccination. La vaccination contre l’hépatite B augmente chez les nour- rissons mais reste encore insuffisante chez les adolescents. yy Les cancers de l’estomac sont en diminution régulière depuis plusieurs dizaines d’années dans tous les pays occi- dentaux, ce qui est vraisemblablement dû à la diminution des infections à Helicobacter pylori induite par l’in- troduction de la conservation des aliments par le froid (les aliments étaient autrefois conservés par le sel), de meilleures conditions d’hygiène et le recours accru aux antibiotiques. yy La prévention des cancers gastriques repose, en France, sur le repérage et le traitement de l’infection à Helicobac- ter pylori chez les personnes à risque de cancer gastrique (cf. encadré). Populations à risque de cancer gastrique : –– personne apparentée au 1er degré à un patient ayant eu un cancer de l’estomac ; –– patient ayant eu une gastrectomie partielle pour cancer ; –– patient porteur d’une lésion prénéoplasique gastrique ; –– patient traité depuis plus d’un an par inhibiteur de la pompe à protons ; –– personne ayant un syndrome de prédisposition aux cancers digestifs (HNPCC, syndrome de Lynch) ; –– personne devant subir une chirurgie bariatrique par by-pass (ce qui rendra une partie de l’estomac inaccessible à de futurs examens). Communication sur la prévention : La communication sur la prévention primaire des cancers a été renforcée sous la direction de l’INCa et du ministère des Affaires Sociales qui ont lancé en septembre 2016 une campagne de communication pour faire connaître le chiffre de 40 % de cancers évitables et ont sélectionné quatre conseils : « ne pas fumer, éviter l’alcool, bouger plus, manger mieux ». 4. Dépistage des cancers 4.1. Notions générales yy Le dépistage des cancers est une stratégie de prévention secondaire qui permet un traitement curatif lorsque la lésion est encore prénéoplasique ou que le cancer est encore localisé. yy Le dépistage organisé par les autorités de santé est une mesure de santé publique qui s’oppose au dépistage indi- viduel, effectué à l’initiative du sujet et/ou de son médecin (Tableau 1). 2 4 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 Tableau 1 : DÉPISTAGE ORGANISÉ VERSUS DÉPISTAGE INDIVIDUEL Dépistage organisé Dépistage individuel | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | yy relève d’un protocole de santé publique yy adapté à chaque individu yy réalisé à l’initiative des pouvoirs publics yy « anarchique » par nature yy sur des populations bien définies yy orienté en fonction des antécédents et des facteurs de yy régulièrement évalué risque spécifiques yy laissé à l’initiative des médecins yy non évalué yy Dans la médecine de soins, un sujet malade demande à être examiné et une obligation de moyens s’impose. Dans le dépistage, on demande à examiner des sujets (qui se croient) bien portants et une obligation de résultat – dimi- nution de la mortalité liée à la maladie dépistée – s’impose : la réussite du dépistage est le non-événement (le décès ne se produit pas !). 4.2. Les principaux biais yy Le critère absolu de jugement d’une campagne de dépistage d’une maladie donnée est la réduction, dans la popu- lation dépistée, de la mortalité spécifique liée à cette maladie, voire de la mortalité globale si son impact sur celle-ci est majeur (par exemple, dans un essai américain, la réduction de 20 % de la mortalité par cancer du poumon s’est traduite par une diminution de 7 % de la mortalité globale). Il peut aussi s’agir d’une réduction de l’incidence (par exemple, le dépistage des adénomes coliques, qui sont des lésions précancéreuses, peut se traduire par une diminution de l’incidence des cancers du côlon). yy Par contre, ce n’est pas l’augmentation de la durée de survie des malades chez qui la maladie est dépistée, car elle est soumise à 3 biais : –– l’avance au diagnostic : le diagnostic est plus précoce mais le traitement n’est pas suffisamment efficace pour empêcher ou retarder le décès. La survie des malades paraît allongée mais sans bénéfice réel (Figure 14) ; –– le biais d’évolutivité  : la procédure de dépistage répétée à intervalles réguliers, fixés par le protocole (par exemple, mammographie tous les deux ans), dépiste préférentiellement des tumeurs d’évolution spontanément plus lente entraînant une durée de vie plus longue (Figure 15) ; –– le biais de sur-diagnostic : c’est le dépistage de tumeurs qui n’auraient jamais été diagnostiquées en l’absence de dépistage, soit que les sujets décèdent d’une autre maladie, soit que la tumeur serait restée spontanément indolente (c’est, par exemple, une question particulièrement discutée pour le dépistage du cancer de la prostate). Figure 14. Biais d’avance au diagnostic : (lead-time bias) I 2 5U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

Figure 15. Biais d’évolutivité : (lenght-time bias)  | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 4.3. Cancers dépistés 4.3.1.   Cancer du sein yy Le programme national de dépistage organisé du cancer du sein a été instauré en 2004. Il repose sur l’invitation systématique de l’ensemble des femmes de 50 à 74 ans, sans facteur de risque significatif autre que leur âge, à bénéficier tous les deux ans d’un examen clinique des seins et d’une mammographie de dépistage par un radio- logue agréé. yy Les femmes à risque élevé ou très élevé ne sont pas éligibles à ce dépistage et doivent bénéficier d’un suivi spéci- fique. yy Le taux de participation au programme stagne à un peu plus de 50 % des femmes concernées (soit plus de 2,5  mil- lions de femmes dépistées en 2015). Près de 37 000 cancers ont été détectés par le programme sur la période 2013- 2014, soit environ 60 % des cas incidents annuels parmi les femmes de 50 à 74 ans et un taux de cancers détectés d’environ 7,4 pour 1 000 femmes dépistées. yy La mortalité par cancer du sein en France a diminué de 1,5 % par an entre 2005 et 2012. Environ 20 % de cette réduction de mortalité est due au programme de dépistage organisé grâce auquel 150 à 300 décès par cancer du sein sont évités pour 100 000 femmes participant de manière régulière pendant 7 à 10 ans. 4.3.2.   Cancer du côlon-rectum yy Le programme national de dépistage organisé du cancer colorectal s’adresse aux personnes âgées de 50 à 74 ans, à risque moyen de cancer colorectal (cf. encadré), qui sont invitées tous les deux ans à consulter leur médecin traitant pour réaliser un test de recherche de sang occulte dans les selles. Depuis avril 2016, le test au gaïacol (Hémoccult II) a été remplacé par le test immunologique, plus performant et plus facile d’utilisation. Il est suivi, en cas de positivité, par une coloscopie totale. yy Le taux de participation est légèrement inférieur à 30 %, plus élevé chez les femmes (31 %) que chez les hommes (28 %). yy 6 211 cancers ont été détectés par le programme en 2012-2013 (soit 1,3 cancer pour 1 000 personnes dépistées). Parallèlement, 16 000 personnes ont eu au moins un adénome avancé (lésion prénéoplasique) détecté par le pro- gramme. 2 6 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 287 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Personnes à risque élevé de cancer colorectal  yy Ce sont les personnes : –– ayant une pathologie colique qui nécessite un contrôle endoscopique programmé ; –– ayant des antécédents personnels d’adénomes colorectaux ; –– ayant un parent du 1er degré atteint d’un cancer colorectal avant 65 ans ; –– ou au moins deux parents du 1er degré. yy Elles doivent se voir proposer une coloscopie d’emblée à partir de 45 ans ou 5 ans avant l’âge du diagnostic chez le parent atteint. yy Enfin, les sujets présentant une pathologie grave extra-intestinale et ceux chez qui le dépistage revêt un carac- tère momentanément inopportun (exemple, la dépression) ne doivent pas réaliser le test de dépistage. 4.3.3.   Cancer du col utérin yy Le dépistage organisé du cancer du col de l’utérus repose actuellement sur une analyse cytologique après frottis cervico-utérin (FCU) (à l’avenir, par recherche du virus HPV). La Haute Autorité de Santé recommande, pour les femmes de 25 à 65 ans, un FCU tous les 3 ans après 2 FCU normaux à un an d’intervalle. yy Parmi les femmes concernées, beaucoup échappent à toute forme de dépistage, principalement parmi les popula- tions les plus vulnérables. Le Plan cancer 2014-2019 prévoit la généralisation du dépistage organisé du cancer du col de l’utérus via un programme national de dépistage organisé. 4.3.4.   Autres cancers pour lesquels aucun programme de dépistage n’est organisé  4.3.4.1. Cancer de la prostate yy Les agences d’évaluation et les autorités sanitaires considèrent qu’il n’y a pas lieu, en France, de mettre en place de programme de dépistage systématique du cancer de la prostate par dosage du PSA (et/ou toucher rectal), ni de recommander cette pratique, y compris pour les populations à risque. yy Néanmoins, les recommandations concluent également qu’une information éclairée du patient sur l’ensemble de la démarche de dépistage et ses conséquences, par le médecin, est nécessaire pour tout homme qui envisage (malgré tout) de faire ce dosage.  4.3.4.2. Cancer du poumon yy En 2016, les conditions de qualité, d’efficacité et de sécurité nécessaires à la réalisation du dépistage du cancer du poumon par scanner thoracique à faible dose de rayons X (« low-dose CT scan ») chez des individus fumeurs ne semblaient pas réunies. ▶▶ Références yy Les cancers en France, édition 2016, collection Les Données, Institut national du cancer, avril 2017*. yy World Cancer Report 2014, International Agency for Research on Cancer, Lyon 2014**. * : ce rapport est en accès libre sur le site de l’Institut National du Cancer : www.e-cancer.fr ** : ce livre est en accès libre sur le site de l’Agence Internationale de Recherche sur le Cancer (International Agency for Research on Cancer) : http://publications.iarc.fr/Non-Series-Publications/World-Cancer-Reports/World-Cancer-Report-2014 I 2 7U E 9 – i t e m 2 8 7 É p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s

POINTS CLÉS | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 1.  Le cancer est la première cause de mortalité en France. 2.  Quatre localisations cancéreuses (prostate, sein, poumon, côlon-rectum) rendent compte de la moitié des cancers en France. 3.  L’incidence et la mortalité de la plupart des cancers diminuent régulièrement à l’exception notable des cancers du poumon de la femme qui augmentent jusqu’à devenir la première cause de mortalité de la femme française. 4.  3 millions de Français(e)s sont vivants avec un diagnostic de cancer porté au cours de leur vie (prévalence totale). 5.  40 % des cancers sont dépendants des comportements et modes de vie. 6.  Le principal facteur de risque de développer un cancer est l’âge. 7.  Le tabac est responsable de 45 000 décès annuels par cancer. 8.  « La seule cigarette sans risque est celle qu’on ne fume pas ! ». 9.  L’alcool est responsable de 15 000 décès annuels par cancer. 10.  20 à 25 % des cancers sont imputables aux comportements alimentaires. 11.  4 à 8,5 % des cancers sont d’origine professionnelle. 12.  3 % des cancers ont une origine infectieuse. 13.  La quasi-totalité des cancers du col de l’utérus sont dus à l’infection par un papillomavirus (HPV). 14.  Un Programme National de Réduction du Tabagisme (PNRT) est en cours de réalisation. 15.  La prévention du cancer du col de l’utérus repose sur la vaccination contre HPV et le dépistage par frottis du col utérin. 16.  Le critère de jugement d’une campagne organisée de dépistage d’un cancer est la réduction de la mortalité. 17.  Les cancers du sein, du côlon-rectum et du col de l’utérus font l’objet d’un programme national de dépistage (objectif du Plan cancer 2014-2019 pour le cancer du col). 18.  Le dépistage du cancer du sein concerne les femmes de 50 à 74 ans, sans risque particulier, et leur propose un examen clinique des seins et une mammographie tous les deux ans. 19.  Le dépistage du cancer du col concerne les femmes de 25 à 65 ans et leur propose un frottis cervico-utérin tous les 3 ans après 2 FCU normaux à un an d’intervalle. LE COUP DE POUCE DE L’ENSEIGNANT 1.  Toujours regarder le mode d’expression des données épidémiologiques : chiffres bruts ou taux standardisés qui, seuls, permettent des comparaisons dans le temps et l’espace. 2.  Le tabac, et non l’alcool, est le principal facteur de risque du cancer du pancréas. 3.  L’efficacité d’une campagne de dépistage d’un cancer ne se juge pas sur l’augmentation de la durée de vie des malades dépistés mais sur la diminution de la mortalité. 4.  Le dépistage des cancers de la prostate et du poumon n’est pas organisé en France. 2 8 IÉ p i d é m i o l o g i e , fa c t eu r s d e r i s q ue , p r é v e n t i o n e t d é p i s ta g e d e s c a n c e r s U E 9 – i t e m 2 8 7

UE 9 Item 288 Cancérogenèse, oncogénétique | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Chapitre 2 Pr Karen Leroy1, Dr Odile Cohen Haguenauer2, Dr Patricia de Cremoux3, Pr Rosine Guimbaud4, Pr Jean-Claude Pairon5 1Service de génétique et biologie moléculaires, Hôpital Cochin, Université Paris-Descartes, Paris 2Unité Fonctionnelle d’Oncogénétique, Hôpital Saint-Louis, Université Paris-Diderot, Paris 3Unité d’Oncologie Moléculaire, Hôpital Saint-Louis, Université Paris-Diderot, Paris 4Unité d’Oncogénétique, Institut C. Regaud et CHU de Toulouse, IUCT-Oncopôle, Toulouse 5Unité de pathologie professionnelle, CHI Créteil, Université Paris-Est Créteil, Créteil 1. Cancérogenèse OBJECTIFS iECN 1.1.   Histoire naturelle du cancer ÎÎ Cancer : cancérogenèse, oncogénétique 1.2.   Biologie des cellules cancéreuses 1.3.   Génome tumoral –– Décrire l'histoire naturelle du cancer 1.4.   Hétérogénéité tumorale –– Connaître les implications cliniques des données 2. Oncogénétique constitutionnelle et génétique d'oncogénétique constitutionnelle et somatique moléculaire des cancers –– Décrire les principales étiologies professionnelles 2.1.   Oncogénétique ou génétique constitutionnelle des cancers et expliquer les principes de dépistage du cancer des cancers professionnels. 2.2.   Génétique moléculaire des cancers Mots clés : Amiante – BRCA – Cancers profession- 3. Cancers Professionnels nels – EGFRr – Gène suppresseur de tumeur – Génome tumoral – MMR – Mutation – Oncogène – 3.1.   Définitions, généralités Oncogénétique – RAS. 3.2.   Principaux facteurs de risque 3.3.   Principes du dépistage 1. Cancérogenèse 1.1. Histoire naturelle du cancer yy Le cancer résulte de la multiplication de cellules qui : 1. échappent aux mécanismes régulant l’homéostasie tissulaire (prolifération, survie et différenciation cellulaire) et 2. acquièrent les capacités d’envahir les tissus avoisinants (envahissement loco-régional) et à distance (métas- tases). yy Le développement du cancer se déroule sur une période de temps qui peut être assez longue (plusieurs années à plusieurs dizaines d’années). Cependant, le développement et l’évolution clinique sont très variables selon le type de cancer (en fonction de l’organe d’origine, du type histologique et des caractéristiques phénotypiques de la tumeur) : celle-ci peut être très agressive ou au contraire, plutôt indolente. 1.1.1.   Étapes de la carcinogenèse yy La carcinogenèse est un processus multi-étapes. yy L’étude de modèles expérimentaux, cellulaires et animaux, a permis de définir trois étapes clés dans le dévelop- pement d’un cancer : –– L’initiation : lésion rapide, irréversible et transmissible de l’ADN, induite par un facteur carcinogène (facteur physique : radiations UV, radiations ionisantes ; facteur chimique : hydrocarbures aromatiques polycycliques, métaux lourds, amines aromatiques… ; facteur viral : infection par HBV, EBV, HPV…). I 2 9U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

–– La promotion : exposition prolongée, répétée ou continue à une substance qui entretient et stabilise la lésion | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | initiée (stimuli mitogènes : cytokines, facteurs de croissance, hormones…). Elle aboutit à l’expansion clonale des cellules pré-tumorales. –– La progression : caractérisée par l’acquisition des capacités de prolifération/survie cellulaire, la perte de la différenciation, l’acquisition des capacités d’invasion locale et de dissémination à distance  (formation de métastases). 1.1.2.   Étapes de l’évolution d’un cancer d’origine épithéliale yy L’étude de modèles expérimentaux et l’analyse histologique des lésions pré-tumorales a permis d’identifier plu- sieurs étapes histologiques dans le développement de cancers à partir des épithéliums (de revêtement ou glan- dulaires) : –– La dysplasie (néoplasie intra-épithéliale) : ➢➢ caractérisée par des anomalies de la prolifération et de la différenciation cellulaire ; ➢➢ mise en évidence par des anomalies architecturales tissulaires et des anomalies cytologiques (mitoses, anomalies nucléaires…) ; ➢➢ secondaire à un état inflammatoire chronique (ex : gastrite, reflux gastro-oesophagien), une infection virale (ex : infection à papillomavirus), une exposition à des substances carcinogènes (tabagisme) ; ➢➢ définie par sa sévérité : bas grade ou haut grade (parfois trois catégories : légère / modérée / sévère). La dysplasie ou néoplasie intra-épithéliale sévère / de haut grade est équivalente au carcinome in situ ; ➢➢ évolutions possibles : régression, stabilité, évolution vers un carcinome invasif. –– Le carcinome in situ : ➢➢ caractérisé par des anomalies de la prolifération et de la différenciation cellulaire associées à des anomalies d’organisation des cellules entre elles, sans franchissement de la membrane basale (= sans stroma, ni vascularisation) ; ➢➢ parfois multifocal (cancérogenèse de champ) ; ➢➢ évolutions possibles : régression, stabilité, évolution vers un carcinome invasif. –– Le carcinome invasif : ➢➢ défini par le franchissement de la membrane basale et un envahissement du tissu conjonctif sous-jacent ; ➢➢ la croissance tumorale nécessite une néoangiogenèse ; ➢➢ la tumeur comporte un composant stromal (vasculaire, mésenchymateux, immunitaire). 1.1.3.   Dissémination des cellules tumorales yy Invasion loco-régionale  –– invasion des tissus adjacents par contiguïté ; –– invasion des vaisseaux sanguins et lymphatiques ; –– envahissement des gaines nerveuses. yy Dissémination et formation de métastases –– dissémination par voie lymphatique (ganglion sentinelle) ; –– dissémination par voie sanguine ; –– dissémination intra-canalaire (voies excrétrices urinaires), intra-cavitaire (péritoine, plèvre, méninges). 1.1.4.   Lésion pré-tumorale et pathologie prédisposante yy Pathologie prédisposante : pathologie associée à un risque accru de développer une lésion cancéreuse (endo- brachyoesophage, pathologie inflammatoire telle que maladie inflammatoire chronique intestinale, hémochro- matose…) ; 3 0 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | yy Lésion pré-cancéreuse : lésion histologique associée à un risque élevé de survenue de cancer (hyperplasie aty- pique, dysplasie, polype adénomateux colorectal…).  1.2.  Biologie des cellules cancéreuses yy Les cellules cancéreuses présentent un ensemble de caractéristiques fonctionnelles, associées de manière variable (Tableau 1). L’acquisition de ces propriétés est facilitée par l’instabilité génétique des cellules tumorales et l’exis- tence d’une inflammation tissulaire. Tableau 1. CARACTÉRISTIQUES DES CELLULES CANCÉREUSES Principales caractéristiques des cellules cancéreuses, selon la publication d’Hanahan et Weinberg, Cell, 2011. Selon ces auteurs, l’existence d’une inflammation tissulaire et d’une instabilité génétique sont considérées comme des processus favorisant l’acquisition des différentes propriétés des cellules tumorales. yy Auto-suffisance en signaux de prolifération yy Insensibilité aux signaux inhibant la croissance cellulaire yy Echappement à l’apoptose yy Capacité réplicative illimitée yy Capacité d’induire une néoangiogenèse yy Propriétés d’invasion tissulaire locale et de formation de métastases à distance yy Métabolisme énergétique spécifique yy Capacité d’échapper à la réponse immunitaire anti-tumorale yy L’étude de cellules d’origine humaine ou murine, cultivées in vitro, a permis de définir la notion d’immortalisa- tion cellulaire (cellule capable de proliférer in vitro indéfiniment, du fait de l’absence de sénescence réplicative) et de transformation cellulaire (cellule immortalisée, ayant perdu l’inhibition de contact, capable de proliférer sans ancrage et de former des tumeurs chez la souris immunodéficiente). yy La notion de cellule souche tumorale a été établie à partir d’expériences de transplantation de cellules triées (cellules leucémiques ou cellules issues de tumeurs solides) chez la souris immuno-déficiente. Dans ces modèles, seules certaines cellules ont la capacité de donner naissance à une tumeur : celles-ci possèdent des propriétés d’auto-renouvellement, de quiescence, de multiplication et de différenciation. Elles seraient à l’origine de la résis- tance aux traitements, des rechutes tumorales et des diffusions métastatiques. yy La transition épithélio-mésenchymateuse (EMT) définit un état transitoire des cellules épithéliales cancéreuses, au cours duquel ces cellules perdent des caractéristiques épithéliales et acquièrent des caractéristiques phénoty- piques de cellules mésenchymateuses, propices au développement de métastases. 1.3. Génome tumoral 1.3.1.   Génome tumoral yy Les cellules cancéreuses sont porteuses d’anomalies génétiques multiples, accumulées au cours des divisions cel- lulaires (Figure 1). yy Le taux de mutation est variable selon le type de cancer. Il est très élevé dans les cancers associés à une exposition carcinogène (ex : cancers du poumon et tabac, cancers cutanés et radiations UV). yy Les mutations qui jouent un rôle dans le développement du cancer sont appelées mutations pilotes / motrices / conductrices (driver). Il en existe peu (5-10) dans chaque tumeur. Elles touchent des proto-oncogènes ou des gènes suppresseurs de tumeur (cf. infra). yy Les autres mutations, plus fréquentes, sont le reflet de l’exposition aux substances carcinogènes et/ou de l’insta- bilité génétique tumorale et ne jouent pas de rôle dans le développement du cancer, elles sont appelées mutations passagères / accompagnatrices (passenger). I 3 1U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

Figure 1. Génome tumoral | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Les mutations sont acquises tout au long de la vie de l’individu, depuis la conception, et dépendent de l’exposition à des substances carcinogènes environnementales ou liées au mode de vie (alimentation, tabagisme, profession, etc.), ou aux traitements, y compris le traitement du cancer. La plupart des mutations sont considérées comme passagères ou accompagnatrices et témoignent de l’exposition à des substances mutagènes et/ ou de défauts de détection et de réparation des dommages à l’ADN. Seuls quelques événements génétiques (mutations, réarrangements chromosomiques, amplifications ou délétions géniques) jouent un rôle moteur dans le développement de la tumeur. À titre d’illustration, le noyau d’une cellule où s’accumulent des altérations génétiques au fur et à mesure des divisions cellulaires, les évènements génétiques « pilotes / moteurs » sont figurés par des éclairs, les évènements passagers par des étoiles ou des ronds, la couleur du symbole correspondant au processus mutagène indiqué en bas de la figure. 1.3.2.   Oncogène, gène suppresseur de tumeur yy Oncogène : forme « activée » d’un gène (gain de fonction) qui code pour des protéines induisant la proliféra- tion et/ou la survie cellulaire (par extension : favorise le processus oncogénique) : –– l’activation peut être quantitative (surexpression due à une amplification, une translocation ou à d’autres mécanismes…) ou qualitative (mutation faux sens, micro-délétion ou insertion conservant le cadre de lecture, translocation avec fusion de gènes différents) ; –– le gène normal (non activé) correspondant est appelé proto-oncogène ; –– 1 allèle activé suffit (effet dominant au niveau du phénotype cellulaire) ; –– l’oncogène peut être codé par un génome viral ayant infecté la cellule ; –– les proto-oncogènes codent des protéines impliquées dans les signaux de prolifération et de survie cellulaire (facteurs de croissance et leurs récepteurs, protéines de la signalisation intracellulaire, facteurs de transcription, etc.). yy Gène suppresseur de tumeur : gène dont la perte de fonction favorise la prolifération et/ou la survie cellulaire (par extension : favorise le processus oncogénique) : –– l’inactivation peut être due à une délétion totale ou partielle du gène, à une méthylation du promoteur du gène conduisant à une perte d’expression du gène, une mutation (mutation non-sens, décalage du cadre de lecture) ; –– l’inactivation est généralement bi-allélique ; 3 2 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | –– les gènes suppresseurs de tumeurs codent des protéines contrôlant la prolifération et la survie cellulaire (RB1 codant pour la protéine du rétinoblastome, TP53, PTEN, etc..) et la différenciation (APC) ou pour des protéines contrôlant la stabilité du génome (gènes impliqués dans les processus de réparation des dommages à l’ADN) ; –– la plupart des syndromes de prédisposition génétique au cancer impliquent des gènes suppresseurs de tumeur : un allèle est inactivé au niveau germinal (dans toutes les cellules de l’individu), le deuxième allèle est inactivé dans les cellules tumorales. 1.4. Hétérogénéité tumorale yy Les études de séquençage de haut débit du génome tumoral ont montré qu’il existe des variations spatio-tempo- relles du génome tumoral. En effet, ce génome subit des variations (mutations, gains et pertes de segments chro- mosomiques, réarrangements intra ou inter-chromosomiques) au cours des divisions cellulaires, dans la tumeur primitive et dans les différentes localisations secondaires, donnant naissance à des sous-clones génétiquement hétérogènes (Figure 2). yy Cette hétérogénéité est plus ou moins marquée selon le type de cancer. Figure 2. Hétérogénéité génétique tumorale Les événements génétiques (mutations, réarrangements chromosomiques, amplifications ou délétions géniques) s’accumulent dans les cellules tumorales au fur et à mesure des divisions. Les sous-clones produits peuvent avoir des génotypes partiellement différents, et évoluent pour leur compte, contribuant de manière variable à la masse tumorale dans ses différentes localisations. Certains sous-clones pourront être sélectionnés sous l’effet des traitements. Les différentes couleurs représentent les différents sous-clones issus des altérations successives du génome tumoral. 2. Oncogénétique constitutionnelle et génétique moléculaire des cancers yy L’oncogénétique constitutionnelle concerne les altérations génétiques héritées : « germinales » ou « constitution- nelles », qui peuvent être mises en évidence dans les cellules normales de l’individu. La génétique moléculaire des cancers ou génétique somatique concerne les altérations génétiques acquises des cellules tumorales. I 3 3U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

2.1. Oncogénétique ou génétique constitutionnelle du cancer | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 2.1.1.   Définitions (forme familiale, syndrome de prédisposition génétique) yy La plupart des cancers surviennent de manière sporadique, et résultent essentiellement de l’exposition aux fac- teurs carcinogènes liés à l’environnement ou au mode de vie. yy Dans environ 10 à 20 % des cancers, on peut mettre en évidence une agrégation familiale de cas de cancers, témoi- gnant de facteurs génétiques hérités favorisant le développement de tumeurs : on parle de formes familiales. yy Parmi ces formes familiales, on distingue les syndromes de prédisposition génétique aux cancers, dus à la pré- sence d’une mutation germinale (constitutionnelle) identifiée qui augmente fortement le risque de cancer(s) au cours de la vie de l’individu. Ils représentent environ 5 à 10 % des cas de cancer ; ce pourcentage est plus élevé lorsque le diagnostic de cancer est porté avant l’âge de 40 ans. 2.1.2.   Consultations d’oncogénétique (organisation, réglementation) yy En cas de suspicion de forme familiale et/ou de syndrome génétique de prédisposition au cancer, une consultation d’oncogénétique spécialisée doit être proposée au patient. Au cours de cette consultation, le risque de syndrome génétique spécifique sera évalué, et un test génétique constitutionnel pour identifier le gène impliqué et la muta- tion causale pourra éventuellement être proposé au patient (appelé « cas index ») dans le respect de la confiden- tialité des données génétiques ; cette approche est encadrée de façon très stricte par les lois de Bioéthique. yy Ce test ne peut être réalisé qu’avec un consentement signé du patient, dans un laboratoire agréé et sous réserve qu’il accepte au préalable d’informer sa parentèle en cas de mutation identifiée. Le test sera généralement réalisé sur l’ADN isolé des cellules normales, en règle les leucocytes circulants (ADN germinal)  ; le prélèvement de contrôle, obligatoire, peut être un frottis jugal. yy L’identification de la mutation germinale chez le cas index permet dans un second temps de proposer aux appa- rentés asymptomatiques un « test prédictif » afin de déterminer s’ils sont porteurs de cette caractéristique géné- tique. Un suivi individuel adapté aux risques est alors proposé aux sujets porteurs de la caractéristique génétique identifiée. yy En cas de forme familiale avérée et en absence de « mutation » identifiée chez le cas index, aucun test prédictif n’est disponible. Une surveillance clinique / radiologique appropriée sera alors proposée à l’ensemble des individus conformément aux recommandations HAS. 2.1.3.   Syndromes de prédisposition génétique aux cancers du sein / ovaire yy 5 à 10 % des cancers du sein surviennent dans le contexte d’un syndrome de prédisposition génétique au cancer dû à des mutations des gènes BRCA1 ou BRCA2, transmis de manière autosomique dominante. Pour chacun de ces gènes, les mutations sont présentes à une fréquence de 1/500 individus en moyenne dans la population. yy Les gènes BRCA1 (chromosome 17), et BRCA2 (chromosome 13), codent des protéines impliquées dans la répa- ration des cassures double brin de l’ADN par recombinaison homologue. yy Ces mutations augmentent le risque de développer (sans dépasser 70 % de risque cumulé sur la vie) : –– un cancer du sein (à un âge précoce) ; –– un deuxième cancer sur le sein controlatéral ; –– un cancer de l’ovaire (essentiellement après 40 ans). yy Pour BRCA2 : augmentation du risque relatif de cancer du sein et de la prostate chez l’homme ; augmentation du risque de cancer du pancréas et mélanome. yy Différents éléments doivent conduire à rechercher ce syndrome (Tableau 2) 3 4 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Tableau 2. ÉLÉMENTS D’ORIENTATION DEVANT FAIRE SUSPECTER UN SYNDROME HÉRÉDITAIRE DE CANCER DU SEIN ET DE L’OVAIRE (BRCA). Selon les recommandations de l’INCa, 2013. yy Présence de plusieurs cas de cancers du sein dans une même famille ––  Même branche (paternelle ou maternelle) yy Précocité de survenue du cancer du sein ––  40 ans ou moins yy Diagnostic d’un second cancer sur le sein controlatéral et/ou cancer multifocal yy Présence d’un cancer de l’ovaire yy Survenue d’un cancer du sein chez l’homme Le score Inserm dit « score d’Eisinger » est un score familial d’analyse de l’arbre généalogique dans une seule branche parentale à la fois, basé sur l’âge de diagnostic, la présence de cancer du sein chez l’homme, de cancer de l’ovaire. Il permet de graduer le risque de prédisposition génétique, et de guider ainsi l’indication à la consultation d’oncogénétique et à la réalisation d’un test génétique. yy Le diagnostic de syndrome BRCA implique une surveillance clinique et radiologique spécifique. Cette surveil- lance comporte : –– un examen clinique bisannuel des seins dès l’âge de 20 ans par un médecin référent ; –– une imagerie mammaire annuelle dès l’âge de 30 ans par IRM (jusqu’à l’âge de 65 ans) complétée par une mammographie numérisée plein champ, incidence unique oblique externe ± échographie ; –– une surveillance gynécologique annuelle dès l’âge de 35 ans, avec au moindre doute échographie pelvienne et endovaginale dont la fiabilité reste médiocre ; ainsi dès 40-41 ans pour BRCA1 et 45-47 ans pour BRCA2, une annexectomie bilatérale est préconisée, à titre préventif. yy Des mutations d’autres gènes, plus rares, prédisposent également au cancer du sein (PALB2, TP53, PTEN, CDH1...) ou au cancer de l’ovaire (par exemple : syndrome de Lynch). yy Outre les conséquences en termes de dépistage / prévention, la connaissance du statut génétique BRCA a des implications thérapeutiques : la prescription de traitement anti-PARP est aujourd’hui conditionnée à la présence d’une mutation (germinale ou somatique) de ces gènes (cf. 2.2.3). Ces nouvelles données ont conduit l’INCa à recommander une consultation d’oncogénétique chez toutes les patientes présentant un cancer de l’ovaire, quel que soit leur âge. yy De manière plus générale, le décret intervenu le 1er septembre 2016 met en place l’exonération du ticket modéra- teur pour les examens annuels d’imagerie chez les femmes à risque élevé de cancer du sein (avec ou sans mutation identifiée). 2.1.4.   Syndromes de prédisposition aux cancers colorectaux Environ 5 % des cancers colorectaux surviennent dans le contexte d’un syndrome de prédisposition génétique au cancer.  2.1.4.1. Le syndrome de Lynch  yy Ce syndrome est dû à une mutation germinale d’un des gènes impliqués dans la reconnaissance et la réparation des mésappariements de l’ADN (Mismatch Repair ou MMR) : MLH1, MSH2, MSH6, PMS2. Il est transmis de manière autosomique dominante. yy Il augmente fortement le risque de développer : 1. un cancer colorectal (risque cumulé d’environ 25 à 50 %), un cancer de l’endomètre (risque cumulé entre 30 et 40 %), des voies excrétrices urinaires, de l’intestin grêle (spectre étroit, risque élevé) ; mais aussi : 2. un cancer de l’estomac, des voies biliaires, des ovaires (spectre large, risque modéré). I 3 5U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

yy Les cancers développés dans le cadre d’un syndrome de Lynch sont caractérisés par un défaut du système de | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | réparation des mésappariements (inactivation biallélique du gène MMR), se traduisant par une instabilité des séquences microsatellites (phénotype MSI ou dMMR), mis en évidence par analyse en biologie moléculaire et par une perte d’expression de la protéine issue du gène muté, détectée par analyse immunohistochimique. yy Le phénotype tumoral MSI ou dMMR n’est pas spécifique du syndrome de Lynch : l’inactivation du système MMR dans les tumeurs peut provenir d’une inactivation somatique de MLH1, due à une hyperméthylation du promoteur, et s’observe dans des cancers sporadiques (15% des cancers colo-rectaux, 35 % des cancers de l’endo- mètre). yy Afin de dépister le syndrome de Lynch, il est recommandé de rechercher une instabilité des séquences microsa- tellites et/ou une perte d’expression des protéines MMR dans les cancers colorectaux répondant à certains critères (Tableau 3). Le caractère sporadique du statut MSI / dMMR est généralement établi par la présence d’une méthy- lation du promoteur de MLH1. Tableau 3. ÉLÉMENTS D’ORIENTATION DEVANT FAIRE SUSPECTER UN SYNDROME DE LYNCH Les éléments listés doivent conduire à la prescription d’un test de recherche d’instabilité microsatellite et/ou de l’analyse de l’expression des protéines du système Mismatch Repair dans la tumeur et à orienter le patient vers une consultation d’oncogénétique si le résultat est positif (tumeur MSI ou dMMR, sans méthylation du promoteur de MLH1). yy Cancer colorectal < 60 ans yy Cancers multiples (synchrones ou métachrones) du spectre du syndrome de Lynch chez un même patient yy Cancer colorectal + antécédents familiaux de cancer(s) du spectre du syndrome de Lynch (au moins un apparenté au premier degré < 50 ans ou deux apparentés, au premier ou second degré, quels que soient les âges) yy En cas de statut MSI ou dMMR non sporadique, une consultation oncogénétique est requise pour recherche d’un syndrome de Lynch par identification de mutation constitutionnelle de gènes MMR. yy Le diagnostic de syndrome de Lynch implique une surveillance clinique et endoscopique spécifique. Cette sur- veillance comporte : –– une coloscopie avec coloration (chromoscopie) à l’indigo-carmin tous les 2 ans (sous couvert d’une très bonne préparation colique et sans excéder cet intervalle), dès l’âge de 20-25 ans. La colectomie prophylactique systématique n’est pas préconisée. –– un examen de l’utérus par échographie endo-vaginale tous les 2 ans, dès l’âge de 30-35 ans, avec prélèvement endométrial préconisé  ; compte-tenu de son efficacité, l’hystéroscopie souple avec biopsies ciblées tend à s’imposer. L’indication d’une hystérectomie et annexectomie prophylactique est une option à évoquer et discuter après accomplissement du projet parental.  2.1.4.2. Polypose adénomateuse familiale (PAF)  yy Due à une mutation germinale du gène APC, transmise de manière autosomique dominante, beaucoup plus rare que le syndrome de Lynch. yy Elle augmente fortement le risque de développer des polypes adénomateux colorectaux (> 100 dans la forme classique), et donc de développer un cancer avant l’âge de 40 ans. Il existe aussi des adénomes duodénaux à risque de dégénérescence et d’autres pathologies bénignes. yy Le diagnostic de PAF implique une surveillance par coloscopie annuelle à partir de la puberté, une surveillance digestive haute : duodénoscopie avec biopsie de la papille tous les ans à tous les 2 ans et, dans les formes typiques, une colectomie (voire colo-proctectomie) prophylactique dès l’âge de 18-20 ans.  2.1.4.3. Autres syndromes  yy Il existe d’autre syndromes de prédisposition génétique à la survenue de polypes adénomateux et de cancers colo- rectaux, avec des gènes identifiés (MUTYH, POLE, etc.) ou non (polypose festonnée, cancer familial de type X…). 3 6 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | 2.2. Génétique moléculaire des cancers 2.2.1.   Définitions (type d’anomalies recherchées, tests utilisés) yy Les mutations « motrices » observées dans les cellules tumorales sont le plus souvent des mutations acquises : on parle ici de génétique somatique par opposition à la génétique constitutionnelle. Ces mutations peuvent avoir un intérêt diagnostique (pour préciser un type histologique, par exemple dans les sarcomes, les lymphomes, les gliomes…), pronostique, ou théranostique, c’est-à-dire permettant de prédire la réponse à un traitement. yy Les principales anomalies génétiques observées dans les cellules cancéreuses sont les suivantes : –– amplification génique : augmentation du nombre de copies d’un gène, pouvant conduire à sa surexpression. L’amplification d’un gène peut être détectée par des techniques de biologie moléculaire (hybridation sur puce, PCR quantitative, séquençage nouvelle génération - NGS…), par des analyses de cytogénétique moléculaire (hybridation in situ avec des sondes fluorescentes ou chromogéniques, sur noyau interphasique ou métaphasique ; - FISH, SISH, CISH..), par ses conséquences au niveau protéique (immunohistochimie) ; –– délétion génique  : perte de 1 ou des 2 copies d’un gène. La délétion d’un gène peut être détectée par des techniques de biologie moléculaire (hybridation sur puce, PCR quantitative, séquençage nouvelle génération - NGS…), par des analyses de cytogénétique moléculaire (hybridation in situ avec des sondes fluorescentes ou chromogéniques, sur noyau interphasique ou métaphasique), par ses conséquences au niveau protéique (immunohistochimie) ; –– translocation / réarrangement chromosomique : fusion de deux segments de chromosomes normalement non contigus, originaire du même chromosome ou de deux chromosomes différents. Ce type d’anomalie aboutit à la surexpression de certaines protéines (translocation impliquant les gènes des Ig ou des TCR, par exemple), et/ou à la production de protéines de fusion chimériques (protéine oncogénique BCR-ABL dans le cas de la translocation t(9;22) caractéristique des leucémies myéloïdes chroniques, par exemple). Ces réarrangements peuvent être détectés par des techniques de biologie moléculaire (RT-PCR quantitative…), par des analyses de cytogénétique moléculaire (hybridation in situ avec des sondes fluorescentes), et dépistés par leurs conséquences au niveau protéique (immunohistochimie) ; –– mutations : modification de la séquence nucléotidique, concernant un seul nucléotide ou un nombre limité de nucléotides (petites insertions ou délétions, respectant ou non le cadre de lecture). Ces variations nucléotidiques peuvent ne pas entraîner de modification protéique (mutation synonyme), induire un changement de la séquence protéique (mutation faux sens, insertion / délétion en phase), aboutir à la production d’une protéine tronquée (mutation non sens : création d’un codon stop, insertion / délétion ne respectant pas le cadre de lecture, mutation touchant un site d’épissage). Elles peuvent donc aboutir à un gain de fonction (mutation activatrice) ou une perte de fonction (mutation inactivatrice). Une mutation peut être détectée par des techniques de biologie moléculaire (séquençage, différentes techniques de PCR…), ou par ses conséquences au niveau protéique (immunohistochimie). 2.2.2.   Plateformes de Génétique moléculaire des cancers (organisation) yy L’Institut National du Cancer a labellisé des plateformes régionales de génétique des tumeurs, qui peuvent comporter plusieurs laboratoires, et qui ont pour mission de réaliser les tests de génétique somatique nécessaires à la prise en charge des patients sur l’ensemble du territoire, quel que soit l’établissement de soin (égalité d’accès aux soins), dans un délai et avec une qualité technique compatibles avec la prise en charge médicale. Ces plateformes travaillent en réseau et participent à des contrôles de qualité annuels. yy Les techniques de séquençage massif parallèle, également appelé séquençage « de nouvelle génération » (NGS), sont en train de remplacer les techniques de biologie moléculaire classiques dans les laboratoires. Ces techniques permettent de séquencer simultanément un ensemble de gènes, partiellement ou en totalité, de détecter des muta- tions ponctuelles ou des anomalies du nombre de copies. Elles permettent également de séquencer l’ensemble des ARN (RNA-Seq), l’ensemble des exons (exome), ou l’ensemble du génome. L’application de ces techniques de haut ou très haut débit à la prise en charge des patients atteints de cancer est en cours d’évaluation dans le cadre de RCP (Réunions de Concertation Pluridisciplinaires) dites « moléculaires ». I 3 7U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

2.2.3.   Principales applications dans les tumeurs solides | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | yy Le Tableau ci-dessous (Tableau 4) résume les principaux tests de génétique somatique réalisés en 2017. Sont indiqués les tests indispensables à la prise en charge des patients, mais également les tests innovants susceptibles d’être associés à une AMM conditionnée dans les prochaines années. Certains tests préconisés n’ont pas d’impact théranostique direct (ex : KRAS dans les adénocarcinomes du poumon, NRAS dans les mélanomes…), mais ils indiquent la voie oncogénique motrice et excluent la présence d’une autre altération pouvant être ciblée. Tableau 4. PRINCIPAUX TESTS DE GÉNÉTIQUE MOLÉCULAIRE (GÉNÉTIQUE SOMATIQUE) DES TUMEURS EN 2017 (mAb : anticorps monoclonal, TKI : inhibiteur de tyrosine kinase, ADK : adénocarcinome. ISH : hybridation in situ. FISH : hybridation in situ fluorescente. IHC : immunohistochimie) Tests réalisés à visée diagnostique et pronostique Cancer Contexte clinique Test Intérêt Cancer colo-rectal < 60 ans, contexte Recherche d’instabilité Test d’orientation personnel ou familial microsatellite syndrome de Lynch Sarcomes Diagnostic Recherche des anomalies Classification moléculaires spécifiques des sarcomes (transcrits de fusion, amplification génique) Glioblastomes Traitement systémique mutation IDH1/IDH2 Classification Co-délétion 1p-19q, histo-moléculaires des glioblastomes Tests réalisés à visée théranostique (GIST : tumeur stromale gastro-intestinale. TKI : inhibiteur de tyrosine kinase, mAb : anticorps monoclonal, BM : biologie moléculaire) Cancer Contexte clinique Test Technique Prescription Sein Diagnostic Amplification IHC / ISH / mAb et TKI (K invasif ) HER2 (ERBB2) BM anti-HER2 GIST Diagnostic Mutation KIT, BM TKI anti-KIT, (tumeur haut risque) PDGFRA anti-PDGFRA Mélanome Maladie Mutation BRAF BM / IHC Inhibiteur de métastatique V600 BRAF Mutation NRAS BM Mutation KIT BM TKI anti-KIT Cancer Maladie Mutation RAS BM CONTRE- colo-rectal métastatique (KRAS, NRAS) INDICATION mAb anti-EGFR Mutation BRAF BM Adénocarcinome Maladie Mutation EGFR BM TKI anti-EGFR du poumon métastatique Mutation KRAS BM Translocation ALK IHC / FISH TKI anti-ALK Estomac Maladie Amplification IHC / ISH / mAb et TKI métastatique HER2 (ERBB2) BM anti-HER2 Ovaires Rechute platine Mutation BRCA1/2 BM Anti-PARP sensible germinale ou somatique 3 8 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 Tests Innovants (liste non limitative) Cancer Contexte clinique Test | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Sein Maladie précoce, Signatures moléculaires des cancers du sein luminaux Adénocarcinome contexte adjuvant du poumon Maladie métastatique Mutation ESR1 de résistance aux inhibiteurs d’aromatase Cancer colo-rectal Maladie métastatique Mutation BRAF Glioblastomes Mutation HER2 (ERBB2) Translocation ROS1 Amplification, mutation MET Maladie métastatique Mutation PIK3CA Amplification ERBB2 Traitement systémique Méthylation MGMT yy Il est actuellement possible de rechercher les anomalies génétiques tumorales au niveau de l’ADN plasmatique. La quantité d’ADN tumoral circulant dans le plasma varie selon le type de cancer et elle est d’autant plus élevée que la maladie est à un stade élevé. L’analyse de l’ADN tumoral circulant est actuellement recommandée au dia- gnostic pour les adénocarcinomes du poumon métastatiques en absence de matériel tissulaire informatif, ou lors de la progression sous traitement ciblé anti-EGFR. Les autres utilisations possibles de l’analyse de l’ADN tumoral circulant (marqueur pronostique, suivi de la maladie résiduelle, recherche de mutations de résistance aux traite- ments administrés) dans les différents cancers sont en cours d’évaluation. 3. Cancers professionnels 3.1. Définitions, généralités yy Les cancers professionnels correspondent à des cancers primitifs de divers organes, qui résultent d’une exposition professionnelle à certains produits ou procédés du milieu de travail. Sur le plan épidémiologique, des fractions de risque attribuable ont été calculées pour divers sites de cancer, et permettent d’estimer la fraction de l’ensemble des cancers qui ne serait pas survenue en l’absence des expositions professionnelles. Ainsi Santé publique France (auparavant : Institut de Veille Sanitaire) estime que 4 à 8,5 % des cancers sont d’origine professionnelle (soit 15 000 à 30 000 nouveaux cas par an actuellement). Des estimations plus récentes effectuées par le Centre internatio- nal de recherche sur le cancer ont rapporté des fractions de risque attribuable un peu plus faibles. yy La fraction de risque attribuable aux facteurs de risque professionnels varie largement d’un site de cancer à un autre (chez l’homme, elle est estimée de 13 à 29 % pour le poumon, 85 % pour le mésothéliome, 8 à 14 % pour la vessie, 24 à 41 % pour les cancers naso-sinusiens, 5 à 18 % pour les leucémies), et est très généralement plus élevée chez les hommes que chez les femmes, reflétant des expositions professionnelles antérieures nettement plus fréquentes chez les hommes. yy Sur le plan médico-administratif, certains cancers peuvent faire l’objet d’une reconnaissance en maladie profes- sionnelle donnant droit à réparation lorsque les patients ont été exposés au cours d’une période d’activité salariée (reconnaissance avec application d’un principe de présomption d’imputabilité pour certains agents étiologiques lorsqu’il existe un tableau spécifique ; mais une reconnaissance est également possible en cas d’exposition anté- rieure à des cancérogènes certains non mentionnés dans les tableaux, après passage devant un Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, sans application de la présomption d’imputabilité). yy Il est actuellement connu que les statistiques annuelles des cas reconnus en maladie professionnelle (environ 2 000 cas par an) sous-estiment largement le nombre réel des cas de cancers professionnels (cela résultant de multiples facteurs intriqués, notamment : absence d’identification des expositions antérieures, sous-déclaration par les patients, refus de reconnaissance lié à l’absence de confirmation de l’exposition par la Sécurité sociale, en particulier en cas d’exposition très ancienne survenue plusieurs dizaines d’années auparavant). I 3 9U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

3.2. Principaux facteurs de risque | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | yy Les principaux facteurs de risque sont résumés dans le Tableau 5. yy Les cancers professionnels touchent préférentiellement les hommes, en particulier les ouvriers. yy Des études menées par le Ministère du Travail (étude SUMER : surveillance médicale des risques) ont permis d’établir qu’en 2010 près de 10 % des salariés (soit environ 2,2 millions) avaient une exposition professionnelle à un agent cancérogène chimique certain (groupe 1) ou probable (groupe 2A) défini par le Centre international de recherche sur le cancer. Les principaux secteurs d’activités où les personnels sont le plus fréquemment expo- sés sont les activités de maintenance, le secteur de la construction-BTP, la mécanique-travail des métaux, le secteur des matériaux souples-bois-industries graphiques, et l’artisanat. Des estimations de prévalence d’expo- sition cumulée vie entière ont été réalisées par Santé publique France, aboutissant à la conclusion que 20 à 25 % des hommes de plus de 60 ans ont eu au moins un emploi exposé à l’amiante au cours de leur carrière. En France, actuellement, l’immense majorité des cancers indemnisés chaque année par le régime général de la Sécurité sociale sont les cancers broncho-pulmonaires et les mésothéliomes pleuraux liés à des expositions antérieures à l’amiante. Tableau 5. PRINCIPAUX FACTEURS DE RISQUE DE CANCERS PROFESSIONNELS (CIRC : Centre international de recherche sur le cancer. HAP : hydrocarbures aromatiques polycycliques. UV : Ultra-violets) Principaux facteurs de risque professionnels iden- Exemples d’autres agents ou situations d’expo- Types/Sites de cancers tifiés, faisant l’objet de tableaux de maladie pro- sitions professionnelles « hors tableaux » mais fessionnelle cancérogènes certains selon le CIRC Cancers yy amiante (nombreuses situations yy béryllium du poumon d’exposition antérieures, notamment dans yy fumées de gaz d’échappement Mésothéliomes les métiers du bâtiment) (plèvre, péritoine, de moteurs diesel péricarde) yy gaz et poussières radioactives (radon) yy fumées de soudage (travaux au fond des mines de fer) yy certains métaux : arsenic, cadmium, certains dérivés du chrome et du nickel, cobalt associé au carbure de tungstène (industrie des métaux durs) yy silice cristalline (en cas de silicose) yy goudron de houille, brais de houille, suies (HAP) yy bischlorométhyéther, chlorométhylméthyléther (rare ++) yy amiante (nombreuses situations d’exposition antérieures, notamment dans les métiers du bâtiment) Cancers de la yy certaines amines aromatiques vessie et des voies (expositions anciennes : excrétrices supé- 4-aminobiphényl, benzidine et dérivés, rieures 2naphtylamine ; orthotoluidine…. ; MBOCA ; concerne la synthèse des colorants, encres, peintures, industrie textile, imprimerie, industrie du cuir et papetière, caoutchouc) 4 0 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 Cancers naso- yy certains travaux exposant à des HAP : yy poussières de cuir | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | sinusiens production d’aluminium (ancien procédé yy poussières de bois Cancer du naso- Söderberg), travaux en cokerie, ramonage- pharynx entretien de chaudières/chauffages au Leucémies charbon, goudrons routiers (avant 1985) Cancers cutanés yy poussières de bois yy certains dérivés du nickel, yy certains dérivés du chrome yy formaldéhyde yy radiations ionisantes (radiologues, yy irradiation solaire (UV) radiographies industrielles, utilisation de yy rayons X ou gamma radioéléments) yy benzène (uniquement leucémies aiguës myéloblastiques et lymphoblastiques) yy butadiène (leucémies myéloïdes chroniques, industrie des caoutchoucs synthétiques, gaz de pétrole liquéfié / GPL) yy arsenic, HAP (goudrons, brais de houille, huiles minérales peu raffinées, huiles de moteur usagées, suies de combustion) 3.3. Principes du dépistage yy La priorité des actions à entreprendre vis-à-vis des cancers professionnels est la prévention de ces cancers en milieu de travail. Afin de renforcer la prévention des cancers professionnels, un ensemble de mesures ont été prises dans le cadre des Plans cancers 2009-2013, puis 2014-2019. yy Ces mesures consistent à : –– améliorer le recensement des cancers d’origine professionnelle ; –– effectuer des campagnes de contrôles renforcés de l’application des réglementations auprès de toutes les entreprises en ciblant sur les cancérogènes les plus utilisés ; –– élaborer, à l’attention des médecins du travail et des médecins traitants, des recommandations de bonnes pratiques pour améliorer la surveillance médicale des travailleurs exposés à des agents CMR (cancérogènes – mutagènes – « reprotoxiques ») ; –– expérimenter et évaluer l’intérêt de la mise en place de consultations spécifiques «cancer professionnel» pour améliorer le diagnostic des étiologies et la déclaration des cancers professionnels. yy L’accent doit être prioritairement mis sur la prévention primaire, avec un repérage et une maîtrise des situa- tions d’exposition potentielle aux cancérogènes sur le lieu de travail. Les employeurs ont l’obligation d’évaluer les risques (exposition aux substances CMR), de limiter au maximum cette exposition par la mise en œuvre de moyens de protection collectifs (substitution si possible, système clos, sinon captage à la source), de mettre en œuvre les moyens de protection individuels adaptés, d’en informer les salariés et de mettre en œuvre une surveil- lance médicale renforcée des sujets exposés. yy Sur le plan de la surveillance médicale, il convient de s’assurer que les travailleurs sont informés et portent le cas échéant des équipements de protection adaptés. Les dossiers médicaux doivent être conservés 50 ans. Une surveillance post-exposition (c’est-à-dire pendant que le sujet est encore en activité), assurée par le médecin du I 4 1U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

travail, et une surveillance post-professionnelle (après la cessation d’activité, en particulier à la retraite), assurée | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | par le médecin traitant, sont proposées aux personnes antérieurement exposées. Il existe actuellement un nombre limité de recommandations de bonnes pratiques proposées par les Sociétés savantes concernées et validées par la Haute Autorité de Santé, sur les examens à mettre en œuvre après exposition à certains agents cancérogènes : –– pour les poussières de bois, il est recommandé de proposer un examen ORL et une naso-fibroscopie tous les 2 ans, à partir d’un délai de 30 ans après le début de l’exposition lorsque l’exposition cumulée a duré au moins 1 an. –– pour les groupes professionnels associés à un risque très élevé de cancer de vessie, il est proposé de réaliser une cytologie urinaire semestrielle, à partir d’un délai de 20 ans après le début de l’exposition. –– une réflexion est en cours sur le dépistage qu’il convient de proposer chez les sujets ayant eu une exposition antérieure à des cancérogènes pulmonaires professionnels (incluant l’amiante, qui est à l’origine du plus grand nombre des cancers professionnels). La surveillance qui a été préconisée par la Commission d’audition ad hoc réunie par la Haute Autorité de Santé en 2010, pour les sujets antérieurement exposés à l’amiante, visait en effet exclusivement le dépistage des affections bénignes (asbestose et fibrose pleurale, notamment plaques pleurales) et était inadaptée au dépistage des affections malignes. La recommandation de bonne pratique récente concernant la « surveillance médico-professionnelle des travailleurs exposés ou ayant été exposés à des agents cancérogènes pulmonaires », labellisée fin 2015 par la Haute Autorité de Santé et l’Institut National du Cancer, préconise qu’une expérimentation soit mise en place pour évaluer la faisabilité et l’intérêt d’un dépistage par examen tomodensitométrique thoracique faiblement dosé, chez des sujets exposés ou ayant été exposés à des cancérogènes pulmonaires et classés à haut risque de cancer bronchopulmonaire. Il n’est donc pas préconisé de le réaliser à ce jour en pratique clinique de routine. yy Lorsque le sujet part en retraite, la surveillance post-professionnelle assurée par le médecin choisi par l’assuré fait l’objet d’une prise en charge spécifique par la Sécurité sociale, dans le cadre de protocoles après accord de la Caisse primaire d’assurance maladie, et délivrance de volets de soins spécifiques à l’assuré. ▶▶ Références yy Anatomie et Cytologie Pathologiques et Cancérologie (Collège Français des Pathologistes) –– http://umvf.univ-nantes.fr/anatomie-pathologique/ yy Oncogénétique et Génétique moléculaire des cancers –– http://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/L-organisation-de-l-offre-de-soins/Oncogenetique –– http://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Les-therapies-ciblees/Les-plateformes-de-genetique-moleculaire-des-cancers –– http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1741170/fr/depistage-du-cancer-du-sein-en-france-identification-des-femmes-a-haut- risque-et-modalites-de-depistage –– Décret n° 2016-1185 du 30 août 2016 relatif à la participation des assurés pour les frais liés au dépistage spécifique du cancer du sein en cas de risque élevé yy Cancers professionnels –– http://www.chu-rouen.fr/sfmt/pages/Recommandations.php –– http://www.inrs.fr –– http://www.cancer-environnement.fr/479-Classification-par-localisations-cancereuses.ce.aspx –– http://www.e-cancer.fr/Comprendre-prevenir-depister/Reduire-les-risques-de-cancer/Cancers-lies-au-travail –– http://www.invs.sante.fr/pmb/invs/%28id%29/PMB_6053 (cancers professionnels) –– http://www.invs.sante.fr/pmb/invs/%28id%29/PMB_422 (amiante) 4 2 IC a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue U E 9 – i t e m 2 8 8

UE 9 Item 288 | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | POINTS CLÉS  1.  Les cellules cancéreuses sont porteuses d’anomalies génétiques multiples. 2.  Les mutations acquises (ou somatiques) recommandées à visée diagnostique, pronostique ou théranostique, doivent être recherchées au diagnostic. 3.  Les mutations somatiques « driver » peuvent être ciblées par des thérapeutiques. 4.  Les mutations « driver» diffèrent le plus souvent d’un tissu à l’autre. 5.  5 à 10 % des cancers sont liés à un syndrome de prédisposition génétique au cancer. 6.  Les cancers liés à un syndrome de prédisposition génétique sont plus fréquents chez les sujets de moins de 40 ans. 7.  La consultation d’oncogénétique et les tests réalisés dans les laboratoires d’oncogénétique constitutionnelle sont strictement réglementés (Lois de Bioéthique). 8.  Les mutations de BRCA1/2 prédisposent aux cancers du sein et de l’ovaire. 9.  Les mutations des gènes MMR sont responsables du syndrome de Lynch et augmentent forte- ment le risque de cancer colorectal et de cancer de l’endomètre. 10.  4-8 % des cancers sont d’origine professionnelle. 11.  Le nombre de cancers professionnels est sous-évalué. 12.  La majorité des cancers professionnels indemnisés en France sont liés à une exposition anté- rieure à l’amiante. LE COUP DE POUCE DE L’ENSEIGNANT 1.  En absence de mutation identifiée prédisposant à un syndrome connu, une surveillance cli- nique et radiologique doit être proposée aux individus avec une histoire familiale de cancer avé- rée. 2.  Les mutations BRCA2 augmentent le risque de cancer de la prostate. 3.  Le phénotype MSI ou dMMR peut être sporadique ou révéler un syndrome de Lynch. 4.  La présence de mutations des gènes KRAS ou NRAS contre-indique la prescription des anti- corps anti-EGFR dans les cancers colo-rectaux. 5.  Les mutations EGFR peuvent être recherchées au niveau de l’ADN tumoral circulant (dans le plasma). 6.  L’interrogatoire professionnel à la recherche d’une exposition antérieure à des cancérogènes professionnels devrait être systématique pour certains sites de cancer (cancer bronchopulmo- naire, mésothéliome, cancer de vessie, cancer naso-sinusien, leucémie, cancer cutané). 7.  Il n’y a pas de stratégie validée pour le dépistage des cancers liés à une exposition à l’amiante. I 4 3U E 9 – i t e m 2 8 8 C a n c é r o g é n è s e , o n c o g é n é t i q ue

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UE 9 Item 289 Chapitre 3 Diagnostic des cancers | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Signes d’appel et investigations paracliniques, caractérisation du stade, pronostic Dr Benoît Rousseau1*, Dr Romain Cohen2*, Pr Christophe Tournigand3, Pr Thierry André4 *ont participé de façon égale à la rédaction de ce chapitre 2 et 4Service d’Oncologie médicale, Hôpital Saint Antoine, AP-HP, Paris, 1 et 3Service d’Oncologie médicale, Hôpital Henri Mondor, AP-HP, Créteil 1. Signes d’appel OBJECTIFS iECN 1.1.   Clinique ÎÎ Diagnostic des cancers : signes d’appel et investigations 1.2.   Paraclinique paracliniques ; caractérisation du stade ; pronostic 2. Diagnostic –– Décrire les principes du raisonnement diagnostique en 2.1.   Obtention d’un échantillon de tissu tumoral 2.2.   Analyse anatomo-cytopathologique cancérologie –– Expliquer les bases des classifications qui ont une 3. Examens paracliniques : bilans d’extension et pré-thérapeutique incidence pronostique –– Connaître les principaux marqueurs diagnostiques et 3.1.   Bilan d’extension 3.2.   Bilan pré-thérapeutique : basé sur le terrain, prédictifs des cancers la stratégie thérapeutique envisagée, les Mots clés : Diagnostic anatom-opathologique – complications suspectées Bilan d'extension – Facteurs pronostiques 4. Évaluation du pronostic des cancers et prédictifs – Stratégie thérapeutique 4.1.   Stadification : notion de TNM, notion de stade et corrélation avec le pronostic 4.2.   Caractéristiques pronostiques cliniques 4.3.   Caractéristiques pronostiques anatomo- pathologiques 4.4.   Caractéristiques pronostiques moléculaires 5. Conclusion yy Le cancer est une pathologie fréquente potentiellement grave dont les circonstances de découverte sont le plus souvent une symptomatologie évocatrice, une découverte fortuite chez un patient exploré pour une autre raison ou à l’occasion d’un examen de dépistage. La vigilance du médecin face à l’hypothèse néoplasique doit donc être constante. Une fois le cancer suspecté, des investigations cliniques et paracliniques doivent être organisées, dans un but diagnostique, pronostique et pré-thérapeutique, l’ensemble de ces explorations étant liées les unes par rapport aux autres. yy Au cours de ce chapitre, nous aborderons tout d’abord les signes d’appel évocateurs de cancer, puis les éléments permettant d’affirmer le diagnostic, les bilans d’extension et pré-thérapeutique, et enfin, les éléments permettant d’évaluer le pronostic. I 4 5U E 9 – i t e m 2 8 9 D i a g n o s t i c d e s c a n c e r s , s i g n e s d ’ a p p e l e t i n v e s t i g at i o n s pa r a c l i n i q ue s , . . .

1. Signes d’appel | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | yy Le diagnostic de cancer peut se faire dans le cadre d’un dépistage organisé, de manière fortuite ou dans le cadre d’une démarche initiée du fait d’une suspicion clinique ou radiologique. yy De multiples signes peuvent et doivent faire évoquer le diagnostic de cancer. La présence de ces signes dits « d’appel » devra faire rechercher : –– un terrain prédisposant : ➢➢ exposition professionnelle ou personnelle (tabagisme actif ou passif, consommation d’alcool, infections chroniques, etc.) à des agents cancérigènes ; ➢➢ antécédents personnels ou familiaux de cancer pouvant faire suspecter un syndrome de prédisposition génétique au cancer. –– d’autres signes cliniques, biologiques ou d’imagerie ; une association de signes renforce la présomption de cancer et, par conséquent, l’indication d’investigations complémentaires à visée diagnostique.  yy Les signes cliniques, biologiques et d’imagerie retrouvés dans le cadre du bilan peuvent être regroupés en 3 grandes entités syndromiques : –– syndrome cachectique et inflammatoire : ensemble des signes en lien avec une altération de l’état général et un état inflammatoire liés au cancer ; –– syndrome tumoral : ensemble des signes cliniques, radiologiques ou biologiques liés à la présence d’une masse tumorale primitive ou de métastases et à ses conséquences loco-régionales (compression, envahissement) ; –– syndrome paranéoplasique : ensemble des signes liés à une tumeur fonctionnelle sécrétante ou à une maladie auto-immune associée au cancer (Tableau 1). Tableau 1. PRINCIPAUX SYNDROMES PARANÉOPLASIQUES Syndromes paranéoplasiques Mécanisme Principaux cancers associés Endocrinologiques SIADH ADH Poumon, SNC Syndrome cushingoïde ACTH ectopique Poumon Hypercalcémie PTH-rp Poumon, sein, rein, ovaire Syndrome carcinoïde Sérotonine, 5HIAA Tumeurs neuro-endocrines du grêle Hypoglycémie Insuline Insulinome Syndrome de Zollinger-Ellison Gastrine Gastrinome Erythème nécrolytique migrateur Glucagon Glucagonome Panniculite de Weber Christian Lipase Pancréas Gynécomastie hCG Tumeurs germinales Neurologiques Ataxie cérébelleuse subaiguë Ac anti-Hu, anti-Yo Poumon, sein, ovaire Encéphalite limbique Ac anti-NMDA, Ac anti-Hu Poumon Neuropathie sensitive subaiguë de Ac anti-Hu Poumon, sein, ovaire Denny-Brown Syndrome myasthéniforme Ac anti-canaux calciques Poumon de Lambert-Eaton Myasthénie Ac anti AchR, Ac anti MuSK Thymus 4 6 ID i a g n o s t i c d e s c a n c e r s , s i g n e s d ’ a p p e l e t i n v e s t i g at i o n s pa r a c l i n i q ue s , . . . U E 9 – i t e m 2 8 9

UE 9 Item 289 Hématologiques Anémie hémolytique Immunologique Thymus | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | Polyglobulie Érythropoïétine Rein, hépatocarcinome, hémangioblastome MVTE, syndrome de Trousseau, Hypercoagulabilité Tout cancer (notamment estomac, CIVD, MAT pancréas) Néphrologique Glomérulonéphrite extra- Auto-immunité Poumon, estomac, ovaire, thymus membraneuse Immunologique Dermatomyosite et polymyosite Auto-immunité Poumon, sein, ovaire Ostéoarthopathie hypertrophiante Auto-immunité Poumon pneumique de Pierre-Marie Syndrome de Stauffer Auto-immunité Rein Fièvre paranéoplasique IL-6, inflammation Tout cancer, surtout en cas de métastases hépatiques Ac : anticorps ; CIVD : coagulation intravasculaire disséminée ; MAT : microangiopathie thrombotique ; MVTE : maladie veineuse thrombo-embolique ; SIADH : sécrétion inappropriée d’hormone anti-diurétique ; SNC : système nerveux central 1.1. Clinique 1.1.1.   Signes généraux d’appel yy Altération de l’état général : asthénie, anorexie, amaigrissement voire dénutrition et sarcopénie (il faut noter le poids actuel, le pourcentage de la perte de poids par comparaison au poids de base et le délai qui a vu s’installer cet amaigrissement). yy Fièvre et sueurs nocturnes. 1.1.2.   Signes d’appel par systèmes yy Vasculaire : signes en faveur d’une thrombose veineuse profonde ou d’une embolie pulmonaire, signes hémorra- giques en lien avec la tumeur ou une coagulopathie. yy Neurologique : signes neurologiques centraux focaux, atteinte centrale des paires crâniennes, tableau d’hyperten- sion intracrânienne, signes de compression médullaire (syndrome rachidien, syndrome pyramidal, déficit neuro- logique), syndrome du cône terminal ou de la queue de cheval, radiculalgie. yy ORL  : dysphonie, dysphagie, douleur de la sphère ORL, ulcération muqueuse et saignements, tuméfaction, atteinte périphérique des paires crâniennes. yy Respiratoire : toux, hémoptysie, dyspnée, douleur thoracique, épanchement pleural. yy Digestif : douleurs abdominales, troubles du transit dont syndrome sub-occlusif ou occlusif, diarrhée, syndrome rectal, saignement digestif (hématémèse, méléna, rectorragies), ascite, hépatomégalie, ictère, syndrome de masse à la palpation abdominale ou aux touchers pelviens, nodule ombilical. yy Urologique : signes fonctionnels urinaires, hématurie avec ou sans caillot, orchidomégalie, dysfonction érectile, fécalurie ou pneumaturie (en rapport avec une fistule vésico-rectale). yy Orthopédique / rhumatologique : douleurs osseuses (d’allure mécanique ou inflammatoire ; spontanées et/ou reproduites à la palpation ; du rachis, du gril costal ou des os longs) parfois réfractaires à un traitement antalgique de palier 3 bien conduit, fracture sans élément traumatique majeur, tuméfaction. I 4 7U E 9 – i t e m 2 8 9 D i a g n o s t i c d e s c a n c e r s , s i g n e s d ’ a p p e l e t i n v e s t i g at i o n s pa r a c l i n i q ue s , . . .

yy Dermatologique : modification de l’aspect de la peau (apparition d’une tâche, modification d’un grain de beauté, | www.facebook.com/LeTresorDesMedecins | www.facebook.com/groups/LeTresorDesMedecins | https://t.me/LeTresorDesMedecins | http://letresordesmedecins.blogspot.com | ulcération, surtout si on retrouve les éléments de l’alphabet du mélanome ou règle ABCDE : lésion asymétrique, à bords irréguliers, de couleur non homogène, de diamètre en augmentation), ulcération cutanée, douleurs, appari- tion de nodules sous-cutanés (nodules de perméation, métastases en transit de mélanome), prurit, flush. yy Hématologique : présence d’adénopathies et leurs caractéristiques (taille, localisation, dureté, caractère fixé, adé- nopathies douloureuses), signes hémorragiques et notamment purpuriques dans le cadre d’une thrombopénie, syndrome anémique, splénomégalie. 1.1.3.   Syndromes paranéoplasiques yy Les syndromes paranéoplasiques sont des manifestations systémiques, à distance du cancer, qui ne sont pas dus à la présence de métastases mais qui sont schématiquement liés à la production tumorale d’une substance pseudo-hormonale ou à des phénomènes auto-immuns en rapport avec une réaction immunitaire anti-tumorale. yy Les syndromes paranéoplasiques peuvent être regroupés en 2 grandes catégories : endocrinologique (syndrome sécrétant) et dysimmunitaire (Tableau 1). yy La maladie veineuse thrombo-embolique est le plus fréquent des syndromes paranéoplasiques. Elle est parti- culièrement fréquente dans les cancers du pancréas et de l’estomac. yy Les syndromes paranéoplasiques liés à une auto-immunité sont rares, mais peuvent être inauguraux de n’im- porte quel type de cancer et même parfois précéder leur détection clinique, radiologique ou métabolique. Les syndromes paranéoplasiques liés à un syndrome sécrétant (production anormale d’une substance par la tumeur et que l’on peut objectiver par des dosages biologiques) sont fréquemment associés aux tumeurs neuro- endocrines dont les cancers bronchiques à petites cellules ou aux tumeurs endocrines bien différenciées (notam- ment pancréatiques comme l’insulinome, le gastrinome, tumeur carcinoïde du grêle, cancer thyroïdien comme le carcinome médullaire, ou surrénalien comme le phéochromocytome). 1.2. Paraclinique 1.2.1.   Biologie yy Les analyses biologiques peuvent amener à suspecter un cancer ou renforcer la suspicion de cancer en cas de signes cliniques associés : –– signes biologiques liés à un syndrome cachectique et inflammatoire : dénutrition (baisse de l’albumine et de la préalbumine), élévation de la CRP, et du fibrinogène ; –– signes biologiques liés à un syndrome de masse  : perturbations de fonctions d’organe, principalement hématologique, rénale et hépatique, élévation des LDH, hypercalcémie (par métastase osseuse), syndrome de lyse tumorale spontanée biologique ; –– signes biologiques liés à un syndrome paranéoplasique  : hypercalcémie (par sécrétion de PTH-rp), hyponatrémie (sécrétion inappropriée d’ADH), dosages hormonaux anormaux ou résultats évocateurs d’auto- immunité. yy Les signes d’appels pourront ainsi être : –– hématologiques : anémie microcytaire ferriprive sur saignement chronique, lymphopénie (de dénutrition ou liée à un envahissement médullaire), hyperleucocytose et thrombocytémie secondaire à une inflammation chronique, pancytopénie d’origine centrale par envahissement médullaire, anémie hémolytique mécanique et thrombopénie dans le cadre d’une microangiopathie thrombotique. –– biochimiques : ➢➢ ionogramme sanguin : hyponatrémie, hypercalcémie, hyperphosphorémie ; ➢➢ fonction rénale  : élévation de la créatininémie (obstacle sur les voies urinaires avec ou sans infection urinaire, microangiopathie thrombotique, atteinte glomérulaire) ; 4 8 ID i a g n o s t i c d e s c a n c e r s , s i g n e s d ’ a p p e l e t i n v e s t i g at i o n s pa r a c l i n i q ue s , . . . U E 9 – i t e m 2 8 9


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