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Philippe Le Bas - France Dictionnaire encyclopédique

Published by Guy Boulianne, 2022-05-29 17:45:17

Description: Philippe Le Bas : « Dictionnaire encyclopédique de la France ». L’univers pittoresque: Histoire et description de tous les peuples, de leurs religions, moeurs, coutumes, etc. Firmin Didot Frères, Paris 1841. Tome troisième, p. 190.

SOURCE : https://www.guyboulianne.info/2020/12/03/antoine-boulianne-mort-au-combat-durant-la-campagne-degypte-merita-la-reputation-de-lun-des-plus-intrepides-soldats-de-larmee-1799

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DOS FRANCE. ses transports , et sa joie et son or- ensuite à mettre en latin : la rédaction gueil lui échappent par des mouve- et le thème étaient revus chaque fois ments semblables aux divins élans des par Bossuet. Ce n'est pas un ouvrage de lui . mais c'est un monument pré- prophètes. Dans la troisième partie, toujours fidèle à son système providen- cieux de la prévoyance ingénieuse et tiel , mais attentif en même temps à du zèie qu'il apportait dans cette édu- l'action des causes secondes, il sur- cation. Quel autre prince eut jamais fnrend par la sagacité et la vérité avec un précepteur tel uue Bossuet? Quel aquelle il saisit, dans le caractère des bonheur fut celui oe Louis XIV qui , nations et la nature des circonstances, trouvait un Condé pour commander le secret de la prospérité et de la dé- ses armées, et un Bossuet pour élever cadence des empires. Les peuples et son (ils! Cependant une direction si les grands hommes sont appréciés avec éclairée et si attentive, un plan si bien Un jugement souverain , et pèints des conçu et si bien suivi , tant de soins couleurs les plus fidèles et les plus que Bossuet lui-même nous retrace fortes. Montesquieu a emprunté beau- dans cette éloquente lettre adressée en coup de ses plus belles considérations latin à Innocent XI , ne produisirent sur le génie de Rome à cette dernière 3u'un résultat médiocre , bien éloigné partie de V Histoire universelle. Cha- e ce qu'avaient attendu la cour et le que fois qu'on relit un tel ouvrage, public. Mais que peuvent l'habileté et on n'a qu'une chose à regretter, c'est ta sollicitude du génie sur une nature que Bossuet ne l'ait pas continué jus- molle, indifférente, distraite, incapa- qu'au terme où il voulait le conduire. ble d'activité et d'attention ? Le fils de Louis XIV offrait, par son apathie VHistoire universelle, qui , dans la pensée de Bossuet , devait s'éten- et sa nullité, une résistance bien dif- dre jusqu'au règne de Louis XIV, ficile à vaincre. Peut-être aussi , mal- s'arrête à celui de Charlemagne; et §ré son dévouement , Bossuet ne s'a- la continuation que l'on a imprimée aissait-il pas toujours assez pour se en 1806, n'est que le recueil des notes mettre à la portée de cette intelligence que Bossuet avait prises pour ébau- étroite et lente. Toujours élevé dans cher son travail. ses idées toujours sévère dans son , La tâche de présenter, dans un ta- langage , il n'avait pas cette familiarité bleau général , les siècles du moyen douce et insinuante , cette condescen- âge et l'époque moderne, était laissée dance enfantine que Fénelon , moins sublime et plus tendre, employa si à un génie qui devait s'en acquitter d'une manière si opposée aux idées de heureusement auprès du duc de Bour- Bossuet, qu'on a peine à concevoir gogne. Aujourd'hui le Télémaque et ue deux ouvrages si différents, et les Fables de l'archevêque de Cambrai a ont le dernier suppose un tel chan- sont, pour le premier âge, une lecture gement dans les opinions et dans les aussi attachante que salutaire; mais mœurs , ne soient séparés que par un une raison développée peut seule sentir demi-siècle. Rien n est plus propre à le prix de la Politique sacrée et de faire voir la rapidité avec laquelle YHistoire universelle. Bossuet est la s'accomplissent les révolutions de nourriture solide des esprits déjà forts. l'esprit humain que la comparaison Peut-être qu'une des conditions pour , être l'instituteur de l'enfance c'est de des dates de Y Histoire universelle et de YEssai sur les mœurs. n'avoir pas un trop grand génie. Nous ne parlerons pas d'un ouvrage Quoi qu'il en soit , Bossuet avait intitule Histoire de France, ordinaire- mérité, par la manière dont il avait ment compris parmi ceux que Bossuet rempli sa tâche, la reconnaissance écrivit pour le jeune prince. Ce n'est de Louis XIV. L'éducation du dau- que le recueil des rédactions que com- phin étant terminée en 1680, il fui posait le dauphin lui-même après la nommé premier aumônier de la dau- , leçon de Bossuet , et qu'il s'exerçait phine, et un an après évoque de Meaux, Digitized by Google

144 bos l'Univers, bos • C'est alors qu'il quitta la cour où il mais constants efforts amenèrent était resté onze années. La conduite enfin l'éloignement de la puissante qu'il y tint pendant tout ce temps fut telle, qu'elle n'a pu être attaquée que favorite. Il n'eut point de complai- par une malveillance évidente, ou par sance pour un autre attachement: il respecta un commerce légitime et cette sévérité aveugle et absurde, qui secret, et où le roi puisait de gra- ves conseils et de pieuses leçons. Ma- ne tient aucun compte de l'empire dame de Ma intenon ne fut pas la maîtresse , mais réponse sévère et de- exercé par les convenances et les usa- vote de Louis XIV. ges sur la vertu même. A ceux qui s'écrient que Bossuet à la cour fut le flatteur des grands et le témoin corn- Si Bossuet était forcé , par la place plaisant des amours scandaleux et des qu'il occupait, de se montrer dans prodigalités insensées du prince peu les pompes et les fêtes de la cour , , de mots serviront de réponse. Si Bos- au milieu d'une foule brillante et suet a rendu aux principaux person- frivole , avide de tous les plaisirs nages de cette cour brillante des nom- qu'il proscrivait , il se dérobait, tou- rnages qu'exigeait leur rang, et que tes les fois qu'il le pouvait, à cet justifiait souvent leur mérite, il l'a éclat et à ce bruit. 11 se renfermait toujours fart de manière à conserver dans sa bibliothèque, pour continuer la dignité qui convenait à son minis- les travaux destines à son élève, ou tère, et la louange ne lui ôte jamais bien, suivi d'une petite troupe d'ec- son indépendance parce qu'il la dé- clésiastiques , dont il appréciait les , connaissances et la pieté , et parmi lesquels se distinguaient Fénelon et cerne avec délicatesse , et s'empresse aussitôt de la retirer au nom delà foi, et de l'anéantir devant Dieu. S'il ne l'abbé de Fleury , il se retirait sous s'éleva pas contre les faiblesses de les ombrages du petit parc de Versail- Louis XIV avec cette liberté et cette les, surtout dans cet endroit qui con- chaleur qu'on admire dans les premiers serva le nom (Vallée des philosophes temps de l'Église , mais qui eussent , pour y discourir sur les affaires et les paru étranges au dix-sentieme siècle, intérêts de l'Église, ou travailler en il saisit toutes les occasions qui s'of- commun à des commentaires sur les li- fraient d'avertir le prince sans éclat et vressaints. Il s'éloignait, quand la cour de le ramener sans scandale. 11 seconda ne lui offrait que le spectacle mondain les mouvements religieux du cœur de de son luxe et de ses fêtes ; mais il s'em- Lavallicre; il acheva l'œuvre de sa pressait d'accourir , aussitôt que des conversion. Il travailla avec toute la esprits, qui mêlaient le godt de la re- hardiesse que comportait sa position à ligion à celui des plaisirs, invoquaient soustraire le monarque au joug de ma- le secours de ses lumières et l'autorité dame de Montespan (*) ; ses discrets persuasive de sa foi. Sur la prière de mademoiselle de Duras , il engageait (*) Peu de temps avant son départ pour une discussion avec le ministre Claude la ram pagne de 1G7 5 , le roi cédant aux re- le même temps, renferme des représentations présentations du cure de Versailles, de Bossuet et de M. de Montausier, avait rélé- très-franches sur les misères du peuple et gué madame de Montespan à Clagnv. Pcn- danl la campagne, Bossuet lui écrivit pour finit par un éloge des vertus bienfaisantes et populaires de Henri IV. Louis XI V reçut raffermir dans une résolution qu'il n'avait bien cette lettre : il paraissait changé ; mais prise qu'avec beaucoup de peine. Cette lettre à son retour il rappela madame de Montes- respectueuse et sévère. à la fois fait le plus pan dont il n'avait pu chasser le souvenir; grand honneur au caractère de Bossuet. II et quant à la misère du peuple il ne parut pas s'en inquiéter beaucoup. Toutefois Bos- en vrai que Louis XIV était alors dans un suet ne cessa pas de combattre autant qu'il de ses bons moments : docile aux conseils religieux du saint évéque, il lui demanda le pouvait l'empire de la favorite, et fin- en outre des avis sur ses devoirs de prince, Une seconde lettre de Bossuet , écrite dans constance de Louis XIV y aidant , madame de Montespan quitta enfin la cour. Digitized by Google

F\" BOS FRANCE. BOS 145 en sa présence , et la ramenait au ca- vaste , à une prudence si consommée, En réalité, il fut l'âme et le chef de ce tholicisme , par l'éclatant triomphe célèbre concile. Ce fut lui qui rédigea qu'il obtenait sur un des plus habiles cette lettre adressée au pontife , où sous les formes du respect, les évê- orateurs de la réforme. Et quel zèle ques réclamaient une concession au- torisée par les canons mêmes. Ce fut il déployait, quelle ardeur l'animait, lui qui après la réponse menaçante lorsqu'on réclamait , au lit de mort , , d'Jnnocent Xi , écrivit cette circulaire ses exhortations et ses prières comme destinée à justifier , devant toutes les un infaillible appui ! Bossuet prend un églises de France , le# démarches de l'assemblée, et à motiver la désobéis- caractère auguste, lorsqu'il se présente sauce que lui imposait son devoir. Ce fut lui enfin qui , en grande partie à nous, portant les secours de l'Église arrêta la forme des quatre proposi- tions de 1682. Ainsi l'Église gallicane et les consolations de sa parole à ces lui dut la fondation ou du moins le renouvellement de ses libertés. C'est princes illustres, à ces grands person- l'époque la plus glorieuse de sa vie. nages qui tenaient à répandre dans La France entière remercia d'une , seule voix l'homme qui la défendait dans la nationalité de son Église avec le sein d'un si pieux ministre leurs tant de modération , de noblesse, derniers sentiments , et à mourir en- d'habileté et d'éloquence, Disons tout cependant : au fond, tre ses bras. ce moment triomphant de la vie de Mais qu'est-il besoin de justifier Bossuet en est l'endroit faible : son plus longtemps la conduite qu'il tint triomphe cachait une défaite. Par quoi s'élevait- il à ce degré de po- a la cour? Ajoutons seulement les pularité et de gloire ? Par une doc- trine qui, non - seulement aux yeux paroles que consacre à la louange d'un ultramontain , mais pour tout esprit impartial, pour tout juge dé- de Bossuet un contemporain d'au- sintéressé , n'offre pas cette vigueur de logique et ce puissant esprit de tant plus dî£ne de foi , qu'il mon- conséquence que nous avons jusqu'ici tre ordinairement peu d'indulgence, admiré en Bossuet. Pour la première fois, il se trouvait engagé dans une et que son humeur maligne le portait discussion sur l'infaillibilité pontificale et la distinction du spirituel et du tem- à saisir toutes les occasions de satire porel. Comment est-il sorti de ces dif- ou de blâme. « C'était, dit Saint-Si- ficiles questions? Par un moyen terme, par un de ces compromis qui , sans mon en parlant de Bossuet, un homme cloute , sont ce qu'il y a de plus sage dont les vertus , la droiture et Thon- dans les cas embarrassants, mais qui toujours mécontentent la raison, mal- neur étaient aussi inséparables que la gré l'excuse des circonstances , éveil- science et la vaste érudition. » lent le doute, prêtent à la critique, et n'ont pas assurément cet air de force C'est le témoignage que lui rendit toute et de grandeur que donnent au génie l'Église de France, lorsqu'elle le choisit, la constance dans la même voie et en 1681, pour prononcer le discours la rigueur d'une marche inflexible, Qu'est-ce que cette {hdéfectibilité d'ouverture au milieu de cette impo- substituée par Bossuet à YinfaUtibilité santé assemblée d'évéques réunis par Louis XIV, au sujet des contestations de la couronne avec le saint-siége. Le droit de régale, qui autorisait les prin- ces à jouir des revenus ecclésiastiques, et à conférer les bénéfices dans les évêchés vacants , avait mis aux prises les deux puissances; et le débat s'a- grandissant , les questions de la dis- tinction du spirituel et du temporel , et de l'infaillibilité du pape, avaient été de nouveau soulevées. Dans cette affaire importante, personne n'était {>lus capable que Bossuet d'éclairer 'Église, et de la préserver des maux qu'enfante la division. Nommé mem- Dre de la commission qui devait pré- parer les résolutions de l'assemblée , il prit sur elle un ascendant qu'on ne pouvait contester à une science si T. m. 10* Livraison. (Dict. ehcycl. exc v 10 , Digitized by Google

146 bos L'UNIVERS. bos du pape ? Quel est le sens de cette pre discussion, et ouvre, malgré lui- même, dans le magnifique édifice élevé distinction ? Selon lui , le pape n'est par ses mains , des brèches qu'il s'ef- pas infaillible; mais il ne peut, même lorsqu'il est tombé dans l'erreur , se force en vain de réparer. Il est donc séparer de l'Église, ni cesser d'en être bien difficile de rester jusqu'au bout le chef, parce que, l'Église se hâtant exempt de contradictions et -d'incohé- de réprimer et de condamner son er- rence, et l'unité est une chose bien reur , il n'est pas possible qu'il ne la peu compatible avec la nature humaine, rejette pas aussitôt. Cette distinction puisqu'elle n'existe pas dans de tels n'est pas digne de Bossuet. En défi- nommes, et que des génies si fermes et si nitive, il faisait résider dans l'Église croyants ne peuvent suivre jusqu'au l'infaillibilité qu'il refusait au pape, et bout une ligne inflexible. Au milieu des attribuait la souveraine puissance à sujets de joie que lu i donnèrent l'impo- l'aristocratie des évêques. Mais où sant accord de l'Église de France et s'arrêtait le droit des évêques? Où l'esprit de modération que gardèrent commençait la monarchie papale? constamment ses chefs , Bossuet dut Enfin, quelle raison y avait-il pour tristement sentir l'inutilité de ses ef- accorder à l'ensemble des autorités forts pour replacer les bornes où de- ecclésiastiques l'infaillibilité refusée vaient s'arrêter les opinions. Il lui au chef principal ? Que d'objections échappe de temps en temps des ex- Bossuet soulève, et par combien de Pressions qui trahissent le regret et côtés ce puissant athlète est devenu inquiétude. Ces sentiments percent vulnérable ! surtout dans sa lettre à l'abbé de Dans la même discussion , il sé- Kancé. Même dans le discours d'ou- pare expressément le pouvoir spiri- verture sur l'unité de l'Église , on tuel du pouvoir temporel; et, quoi- sent, malgré l'habileté qui le dirige, que ayant pour lui l'ordre du Christ et l'enthousiasme qui l'anime, un se- de rendre a César ce qui est a César, cret malaise que cause à ce génie, les décisions antérieures des évêques amoureux de la simplicité et de la gallicans, et enfin l'irrécusable témoi- rectitude, la fausseté de sa position. gnage de la raison et du sens com- Aussi, dès qu'il cessa d'être occupé de mun , toutefois il s'engage par cette ces démêlés , il revint , avec plus de , chaleur que jamais, à la polémique distinction positive, dans des difficul- contre les réformes , comme pour y chercher un dédommagement, et ren- tés, insolubles peut-être, mais dont assurément il ne parvient pas à se ti- rer avec succès. Si l'empiétement de dre d'un côte à l'unité de l'Église ce l'un des deux pouvoirs sur l'autre est qu'elle avait perdu de l'autre. traité par lui d'usurpation coupable, Bientôt un de ses vœux les plus que fait-il de tant de siècles, où l'É- chers fut exaucé: l'autorité royale vint glise, par la nature même de sa cons- frapper un grand coup pour opérer eu titution empiétait de tant de maniè- France la destruction du protestan- , res sur la puissance des rois ? Inévi- tisme. La révocation de l'édit de Nan- tablement placé en face de l'histoire, tes le remplit d'une joie contre la- Bossuet ne peut que condamner fai- quelle se soulève l'humanité de notre blement, ou interpréter avec subtilité, temps, mais que toute la France ca- ou garder le silence. Quoi qu'il fasse, tholique éprouvait avec lui. Si , dans il révèle une longue erreur, et fournit l'oraison funèbre du chancelier dont des armes à l'incrédulité et à l'hérésie. la main mourante avait scellé l'édit Que la position de Bossuet est de proscription, Bossuet célèbre avec changée! Jusqu'ici, interprète simple un transport d'allégresse ce triomphe XIVet fort de la doctrine religieuse, lo- de la foi , et salue dans Louis Sicien inattaquable dans la manière un nouveau Constantin, un nouveau ont il développe ses conséquences , il Théodose, un nouveau Cfiarlemagne, de semblables mouvements d'adnnra- Digitized by Google

FRANCE. bos 147 tion éclatent dans tous les écrits con- « le glaive de Constantin à la main, et temporains; et il n'est pas jusqu'aux «vous y avez celui de Pierre ; don nons- lettres d'une femme célèbre par les « nous la main , et joignons le glaive grâces légères de son esprit et la bonté « au glaive. » Il s'écrie avec un enthou- de son cœur , où Ton ne trouve un siasme cruel et révoltant : « Ne crai- éloge sérieux de l'arrêt impitoyable gnez rien, saints évêques ; si les hom- qui nous révolte aujourd'hui. « Vous mes sont assez rebelles pour ne pas croire à vos paroles qui sont celles aurez vu sans doute , dit madame de , Sévigné, l'édit par lequel le roi révo- que celui de Nantes. Rien n'est si de Jésus-Christ, des châtiments ri- beau que ce qu'il contient , et jamais goureux leur en feront, malgré qu'ils aucun roi n'a fait et ne fera rien de en aient , sentir la force , et la puis- plus mémorable. » Cette erreur était sance royale ne vous manquera ja- celle de toute une nation , trop atta- mais. » Heureusement l'homme n'était chée à sa foi pour être tolérante. pas , chez Bossuet , aussi impitoyable que le théologien. Sa conduite envers Bussy-Rabutin écrivait dans le même les protestants fut loin de répondre à temps (*) : « J'admire la conduite du roi cet odieux langage. Une nouvelle pour ruiner les huguenots; les guer- res qu'on leur a faites autrefois, et les preuve de cette heureuse inconsé- Saint-Barthélemy , ont multiplié et quence, ce sont les lettres qu'il écrivit donné vigueur à cette secte; Sa Ma- à l'intendant du Languedoc, M. de jesté l'a sapée petit à petit , et l'édit Basville, pour s'opposer à la contrainte Su'il vient de donner, soutenu des par laquelle on obtenait la présence des nouveaux convertis à la messe. ragons et de Bourdaloue , a été le Cependant, tout en rendant justice à coup de grâce. » Du moins on ne cette modération qui l'honore, on doit dire qu'il aurait pu faire plus encore trouve nulle part dans les écrits de pour les opprimés, et combattre la Bossuet l'approbation des rigueurs persécution par une intervention plus qui amenèrent l'exil de tant de famil- active et plus étendue. Ces lettres à M. de Basville ne furent écrites qu'en les et les luttes sanglantes des Cé- 1698, lorsque déjà, dans les diocèses du Midi , les plus grands excès avaient vennes et du Vivarais. On est heureux été commis, lorsque des populations entières avaient été réduites au déses- d'apprendre des contemporains qu'il poir. Il faut savoir, en outre, que si , Bossuet était moins sévère que M. de Basville sur la question de la messe , il éloigna toujours de son diocèse les missions armées : il disait qu'il ne voulait comme lui qu'on arrachât les pourrait jamais regarder les baïon- enfants aux pères , pour les conduire nettes comme des moyens de conver- aux écoles catholiques ; qu'il était in- flexible sur la question du mariage; sion. qu'il admettait, dans certains cas, des contraintes et des amendes. L'huma- Si cette modération de Bossuet à nité, la bonté, étaient dans le carac- l'égard des protestants n'était attes- tère et dans le cœur de Bossuet ; par tée par des témoignages certains, son génie et sa croyance, il était porté on pourrait en douter, en lisant dans à la dureté, et, pour tout dire, à la le discours prononcé, en 1681 , sur l'unité de l'Église, quatre ans avant tyrannie. De là , ce mélange de mena- la révocation de l'édit , un passage ces et de ménagements ; de là , cette d'une sévérité menaçante, impitoya- ble, où il invoque contre les ennemis protection restreinte par des rigueurs; de la foi tous les moyens de contrainte de là, cette demi -tolérance, où il faut dont les princes disposent. Il cite convenir, en définitive, qu'il s'est tenu comme modèle à Louis XIV ce roi à l'égard des protestants. d'Angleterre qui disait à son clergé : Na*Après la révocation de l'édit de Ego Constantini, vos Pétri gladium in manibus kabetis :jungamusdext€' r<w, gladium gladio copulemtu: «J'ai O 14 novembre i685. 10. Digitized by Google

148 BOS 'UNIVERS. bos tes , Bossuet , qui déjà avait quitté la un Bouillon. Par manie d'étiquette, cour , ^e consacra plus que jamais au soin de son diocèse. Il y déploya toutes beaucoup plus que par impartialité les vertus d'un évéque des anciensjours. historique, on se choqua de ce passage On est forcé d'admirer en lui l'homme où il nous semble qne Bossuet, juste de bien autant que l'homme de génie, à l'égard des deux grands hommes, quand on le voit prodiguer les aumô- relève encore la gloire de Condé par nes multiplier les visites pastorales , les éloges qu'il donne à Turenne. Il entretenir de longues correspondances faut savoir que la famille des Bouil- avec d'humbles religieuses sur la pra- tique du salut ; enseigner le caté- lon par ses prétentions et ses usur- chisme aux petits enfants , au retour , de cette solennité où son éloquence ava4t payé à la gloire d'un héros un pations récentes, s'était attiré des tribut immortel. En finissant l'orai- inimitiés nombreuses. Cette aversion son funèbre de Condé , le plus magni- fique monument que le génie puisse éclatait alors d'autant plus librement, élever au génie , Bossuet avait dit que'Ies Bouillon venaient d'être disgra- adieu à ces pompes de la mort, à cette funèbre et majestueuse arène de l'é- ciés. On accusa Bossuet d'être sorti loquence dont il se croyait éloigné dé- de son sujet d'une manière offensante sormais par son âge et par ses devoirs, pour son héros ; et le comte de Gram- et jamais il n'avait été aussi grand mont pour faire sa cour au roi , lui oue lorsque, après avoir réuni autour , oes restes de l'illustre et pieux guer- dit , en revenant de Notre-Dame : « Je rier sa famille, ses amis, ses soldats, « viens d'entendre l'oraison funèbre de et toutes les gloires de la France , il « M. de Turenne. » s'était avancé lui-même , avec la ma- Au reste, cette injustice, qui offre un jesté de ses cheveux blancs , et l'ac- trait de mœurs assez curieux , fut de cent pathétique d'une voix qu'on ne devait plus entendre pour rendre à courte durée , et l'on s'aperçut bientôt son tour les derniers devoirs à ce de la perfection d'un éloge où Bossuet tombeau , et y recueillir une leçon et s'était surpassé lui-même. La Bruyère un exemple pour lui-même. Mais dans ne fut que l'interprète du sentiment le premier moment , ce discours , au- quel rien n'est comparable, ne produi- universel , lorsque, en 1693, dans son sit pas l'entraînement auquel nous ne discours de réception à l'Académie, il pouvons résister en le lisant , et Bos- plaça Bossuet au premier rang des suet essuya d'étranges critiques. Bussy- Rabutin écrivit : « L'oraison funèbre orateurs. Mais si Bossuet était sensi- de M. de Meaux n'a fait honneur ni ble à la douceur de la louange, il dut au mort ni à l'orateur. » La cour ap- Êlaudit faiblement. Ce qui indisposait être plus flatté , lorsque la Bruyère le proclama un défenseur de la religion, ussy-Rabutin et la cour, c'était un des passages les plus admirés aujour- une lumière de l'Église , et qu'il s'é- d'hui , c'était le magnifique parallèle de cria : « Parlons d'avance le langage de Tu renne et de Condé. On trouvait que la postérité : un Père de l'Église. » En dans ce parallèle l'orateur ne s'était pas assez souvenu de la supériorité effet, combattre l'hérésie, ramener les qu'assuraient à Condé les actions de sa vie et le rang qu'il avait occupé à la âmes égarées , affermir la foi des fidè- les , rendre droite et sûre la voie du cour. On lui reprochait surtout d'avoir troupeau de Dieu , telle fut la vérita- oublié les usages en laissant aussi peu ble , la seule ambition de Bossuet. de distance entre un prince du sang et Aspirer, en parlant ou en écrivant, à la gloire littéraire , lui paraissait une vanité. On peut affirmer qu'il n'atta- chait d'importance à ses plus beaux ouvrages , qu'à cause de l'influence au'ils avaient pu exercer dans l'intérêt Ade la cause religieuse. ses yeux , la parole n'était rien par elle-même, et tout esprit sérieux ne devait l'employer que comme un instrument d'action pour la pensée. Dans l'oraison funè- bre du P. Bourgoing , il avait tracé avec un Père de l'Église le portrait de Digitized by Googl

BOS FRANCE. bos 149 l'orateur chrétien : « Son discours, environné d'un groupe de savants ec- clésiastiques , d'hommes de lettres re- . avait-il dit, se répand à la manière d'un nommés, de seigneurs illustres, gui torrent ; et s'il trouve en son chemin étaient fiers de posséder son amitié les fleurs de l'élocution , il les entraîne plutôt après lui par sa propre impé- et jouissaient délicieusement d'un tel commerce. L'entretien, sérieux sans tuosité , qu'il ne les cueille avec choix contrainte , roulait de préférence sur pour se parer d'un tel ornement. » les affaires de l'Église , ou sur des questions de piété. Souvent aussi Cette figure semble avoir été faite Bossuet, oubliant les sévères arrêts f>our Bossuet, tant elle le peint au vrai qu'il avait plus d'une fois portés con- ui-méme. tre les lettres , et le plaisir qu'elles Cette réunion du naturel et de l'é- procurent , s'entretenait sur le mérite des ouvrages contemporains , sur les clat, de la facilité et de la force, pa- règles de rart invoquait les anciens, rut au plus haut degré dans un nou- , vel ouvrage , fruit des courts loisirs récitait d'une voix émue des morceaux de Virgile ou d'Homère , et ravissait que lui laissait le soin de son diocèse. ses auditeurs par l'enthousiasme avec C'est cette Histoire des variations, lequel il parlait de la douceur <Je l'un et de la sublimité de l'autre. qui , en présentant , dans un récit Au nombre des premiers amis de Slein d'action et de vie, les événements e la réforme, découvre la faiblesse et Bossuet, se trouvaient, outre l'abbé Fleury et Fénelon, dont nous avons la honte de son origine , et poursuit parlé, la Bruyère, Pélisson, Santeuil, Valincour, M. de Cordemoi , M. de Ma- ses contradictions et ses mensonges lézieux. Fénelon s'était attaché à Bos- suet dès sa première jeunesse ; il d'un raisonnement et d'une ironie im- s'était formé sous sa direction bien- veillante, et il avait dû à sa recom- pitoyables. En même temps qu'il lan- mandation la place de précepteur au- (>rès du duc ae Bourgogne. Bossuet çait contre les réformés cet acte d'ac- e chérissait pour son génie, et sur- tout pour l'aimable candeur de son ca- cusation accablant qui produisit de , ractère. Un démêlé théologique causé nombreuses conversions , et entre au- 5ar le goût de Fénelon pour les idées 'une femme à l'imagination mystique, tres, dans le siècle suivant, celle de vint, à l'époque où nous sommes parve- l'historien Gibbon, auquel manqua, nus, troubler leur .union, et la rompre. Nous n'exposerons pas ici les faits de il est vrai , le don de la persévérance, la controverse du quiétisme , racontés tant de fois , et dont le résumé trou- Bossuet adressait aux religieuses d'un vera place ailleurs dans ce recueil. On a porté contre Bossuet l'accusation de couvent de Meaux les Méditations sur jalousie : on a dit que s'il n'avait été poussé par un sentiment de cette na- FÉvangile , et les^Élévations sur les mystères pensées graves et touchan- ture , il n'aurait point attaqué l'inno- cente rêverie d'une imagination pieuse, , comme une dangereuse hérésie. On ne tes, pieux élans, ardentes extases d'une peut croire que telle ait été l'inspira- âme que ravit la contemplation des tion de Bossuet, en déclarant la guerre perfections divines. à Fénelon. Lors même qu'il eût pu Les bornes de cet article ne per- être envieux , il n'aurait point eu de sujet de l'être, car sa gloire était as- mettent pas de parler de tant d au- sez haute pour n'avoir rien à crain- tres ouvrages de Bossuet qui appar- tiennent à cette époque , du Traité de la communion sous les deux espè- ces, de Y Oraison funèbre d'Anne de Gonzague , des Lettres pastorales, de la correspondance avec Leibnitz sur un projet de réunion des luthé- riens. L'activité de Bossuet était pro- digieuse , et la vieillesse n'ôtait rien à la fécondité et à la vigueur de son génie. Il se délassait en jouissant du plaisir de la conversation, au milieu de la société d'amis qu'il réunissait souvent à sa maison de Germigny. Souvent , dans ses promenades sous les ombrages de son parc , il marchait Digitized by Google

150 BOS LUN VERS. BOS 4re , même des éclatants succès de de sa doctrine. Le spectacle de la lutte Fénelon. Mais son âme était trop emprunte un grana intérêt à ce con- grande pour être accessible à une pas- sion aussi basse , et tout ce que Von traste, et il est fâcheux que l'aversion connaît de sa vie et de son caractère repousse qne telle supposition. S'il a qu'on éprouve pour les matières théo- engagé le combat avec Fénelon , c'est que, dans cette doctrine qui parait sans logiques éloigne de cette étude tant conséquence à des esprits indifférents, il y avait en effet de quoi alarmer une de lecteurs. foi aussi vive que la sienne; c'est que La vieillesse de Bossuet fut une le pur amour , recommandé comme Asuite de combats pour la foi. le plus sûr chemin du salut, produi- peine avait-il terrassé le quiétisme sait, comme conséquences, l'indiffé- qu'il attaqua , devant l'assemblée du rence pour les pratiques religieuses et la paresse contemplative de l'âme ; clergé de 1 700 , les jansénistes et les c'est que la dignité et le génie de l'au- jésuites : les premiers pour avoir teur des Maximes des saints donnaient , a Terreur des chances de succès. Ce protesté, dans de nouveaux ouvrages, qu'il faut reprocher à Bossuet, c'est de n'avoir pas su se maîtriser dans la contre les arrêts qui condamnaient discussion ; c'est d'avoir oublié , en Jansénius ; les seconds , à cause du danger de quelques-uns de leurs écrits, a'indignant contre les écrits , le res- où Ta casuistique ébranlait les bases pect qu'il devait à la personne ; c'est d'avoir accusé son adversaire de fa- de la morale. Les décrets que l'assem- natisme et de mauvaise foi , de l'avoir blée rendit contre les deux sociétés appelé le Montan d'une autre Pris- due ; c'est d'avoir effrayé Louis XIV furent son ouvrage. Rien n'échappait par des rapports exagérés , afin de mettre pour lui dans le débat la puis- au vigilant regard qu'il portait sans sance royale ; c'est d'avoir trempé dans les intrigues que son neveu cesse sur toutes les parties du grand l'abbé Bossuet, formait à Rome pour arracher une condamnation au pape corps que la confiance des peuples et incertain. Dans cette affaire, comme dans d'autres, toujours à cause du des pasteurs semblait placer sous sa zèle jaloux avec lequel il veillait sur garde. Rien ne pouvait soustraire à l'arche sainte, Bossuet ne fut ni assez ses coups Quiconque troublait par modéré , ni assez scrupuleux. Aussi , quoiqu'il ait pleinement raison dans sa polémique , quoique la défense de l'erreur ou la révolte , l'harmonie de Fénelon soit , au fond , subtile , obs- cure, désavouée par la véritable théo- l'Eglise. Un docteur, Richard Simon, logie , et souvent par le bon sens , c'est à Fénelon que l'intérêt s'attache se préparant à publier une version de c'est Fénelon qui emporte les sympa- thies de quiconque se remet sous les l'Ancien Testament , où , avec uue in- yeux les écrits et la lutte des deux ad- dépendance d'esprit qui s'appuyait sur versaires. On s'éloigne de Bossuet, des connaissances étendues, il adop- parce qu'il a raison avec trop d'amer- tume et de violence; on est gagné à tait des sens nouveaux, jetait des dou- Fénelon, et par la persécution qu'il tes sur l'authenticité de quelques par- subit , et par la grâce , l'émotion , le ties , et faisait ressortir les variations pathétique qu'il jette sur les subtilités de la doctrine , Bossuet se leva , et le vieil évéque agissant avec la vivacité , d'un jeune homme, fit suspendre l'im- pression, condamner l'auteur, et des- tituer un professeur de Sorbonne qui Onlui avait été favorable. dit qu'il attacha plus d'importance à cette af- faire quà celle du quiétisme. Il eut raison , car c'était un des premiers symptômes de cette inquiétude et de cette indépendance qui allaient faire de si grands progrès dans le siècle suivant: Richard Simon avait fait de l'érudition une arme pour la critique et pour le doute. Dans le même temps, des jésuites, revenus de la Chine, an- nonçaient qu'ils avaient trouvé dans cette contrée la connaissance de l'u- nité et de la perfection de Dieu éta- Digitized by Google

ist Mie depuis des siècles ; une religion «caractérise toujours les simple et pure , des mœurs dignes de « âmes et les esprits du premier or- servir de modèle aux chrétiens. L'in- crédulité s'empara de ces récits . qui « dre ; l'ornement de l'épiscopat ; un devaient fournir tant d'arguments à « évéque au milieu de la cour; l'homme Voltaire : la Sorbonne intervint, dé- « de tous les talents et de toutes les clara mensongères les relations des a sciences ; le docteur de toutes les jésuites ; et Rossuet , dans une ins- « églises; la terreur de toutes les sec- truction pastorale de 1701 , tonna « tes; le Père du dix-septième siècle, contre l'athéisme des Chinois. Cette « à qui il n'a manqué que d'être né colère était prévoyante , et la pru- * dans les premiers temps, pour avoir dence de Bossuet l'avertissait du dan- « été la lumière des conciles, l'âme des Ser de ces opinions , qui , en accor- « Pères assemblés, dicté des canons, « et préside à Nicée et à Êphèse (*). » ant un rayon de la lumière divine à des peuples anciens , entièrement iso- Bossut (affaire de). Au moment où lés du peuple juif, déplacent le centre Dumourier pénétra dans la Belgique, de la tradition , et ouvrent au doute une large porte. Mais , conûant dans une première action eut lieu contre la stabilité promise par Dieu à son huit mille Autrichiens placés à Bossut, Église , il ne prévit pas toute l'éten- près Saint-Guilain, en Hainault. Elle due des ravages qu'allait faire dans le fût chaude, mais la précision du tir siècle suivant l'esprit nouveau , et au- de l'artillerie, la célérité de ses ma- cune crainte sérieuse ne troubla ses nœuvres, la valeur avec laquelle char- gèrent les dragons, décidèrent l'action. derniers jours. Cette affaire, qui précéda de quelques Depuis quelque temps, il ressen- jours la bataille de Jemmapes , valut aux Français cinq cents prisonniers; tait des douleurs qui s'accrurent, on compta deux cents Autrichiens et ne laissèrent plus douter qu'il ne étendus sur le champ de bataille. Ce fût attaqué de la pierre. Son âge succès n'avait rien de décisif, mais il avancé ne permit pas de tenter une était important après les revers qu'on opération. Bossuet mourut lentement, venait d'éprouver, et rendait la con- au milieu de cruelles souffrances, fiance aux troupes. contre lesquelles il se fortifia par tous les secours de la foi , et dans les in- Bossut ( Charles ) , géomètre cé- tervalles desquelles il ébauchait en- lèbre, naquit à Tartaras, département core de nouveaux écrits pour la cause du Rhône, le 11 août 1730. Destiné de l'Église. Il mourut le 12avril, à l'âge d'abord à l'état ecclésiastique, il en de 77 ans. Peu de vies ont été aussi prit l'habit chez les jésuites de Lyon, pleines que la sienne. Le nombre des où il avait fait ses études avec un suc- travaux qui la remplissent est im- cès remarquable. Mais entraîné vers mense , et chacun de ces travaux est l'étude des mathématiques par un pen- un service rendu à la religion , ou un chant irrésistible, il vint à Paris, après présent immortel fait aux lettres. avoir terminé sa philosophie, et eut le bonheur d'y faire la connaissance de Une telle vie est un des plus merveil- Fontenelle, qui l'accueillit avec bonté et le présenta à Clairaut et à d'Alem- leux spectacles qu'il soit donné à l'in- bert. Ces deux savants devinèrent son telligence de contempler. Théologien, aptitude, et devinrent ses guides dans prêtre , orateur , écrivain , sous quel- ses premiers travaux scientifiques. Bos- que face qu'on l'envisage, Bossuet a sut, à l'âge de vingt -deux ans, fut une grandeur qui étonne l'imagination nommé professeur de mathématiques et l'accable. Mais pour résumer ses à l'école du génie de Mézières. Le mé- rite des ouvrages qu'il publia lui ac- , quit, en peu de temps, le suffrage des titres empruntons les paroles d'un (*) Oraison funèbre du dauphin. , orateur illustre qui l'avait connu , et l'a jugé comme la postérité. Saluons en lui, avec Massillon, « un génie « vaste et heureux ; une candeur qui Digitized by Google

H2 L'UNIVERS. savants, et ce suffrage finit par être la vigne en terre. Ainsi , quand , dans une charte de Lancelin IV, seigneur celui de l'académie des sciences, qui l'admit dans son sein. La révolution de Beaugency (1158), ou d'Etienne de lui enleva ses emplois, qui faisaient presque tous ses moyens d'existence. Blois , il est question du botagium de Déjà dans un âge avancé, il vécut dans une grande retraite pendant le mo- Tavers , ou du botagium de Blois , il ment le plus dangereux de nos ora- faut entendre un impôt prélevé sur le ges politiques. Il reparut quand le vin uniquement. calme se rétablit, fut nommé membre Boton ( Pierre ) , né à Mâcon dans de l'Institut, et successivement exa- le seizième siècle, fut un des écrivains minateur de l'école polytechnique et français les plus féconds de son épo- membre de la Légion d'honneur. Bos- sut jouit, dans un âge très-avancé, de ue. Nous citerons seulement ici celui toute la considération que ses talents 3e ses ouvrages qui a pour titre : Les lui avaient méritée, et lorsque les in- trois visions' de Childéric, quatrième firmités ne lui permirent plus d'exercer roi de France pronostics des guer- les fonctions de sa place , le gouver- , nement lui en conserva le traitement. Il mourut, âgé de quatre-vingt-quatre res civiles de ce royaume , et la pro- ans, le 14 janvier 1814. Sa mémoire est en vénération chez les savants et jette de Basine , sa femme , sur les les gens de bien. Parmi ses nombreux ouvrages, nous citerons seulement les victoires et conquestes de Henri de plus répandus, ceux qui ont eu le suc- cès le plus populaire; ce sont un Traité Bourbon , roi de France et de Na- élémentaire de mécanique et de dy- varre. (Voyez à l'article Basine la lé- namique. Charleville, 1763; des He- eherches sur l'altération que Véther gende qui a fourni le sujet de cet peut produire dans le mouvement des planètes. Paris, 1766; un Cours ouvrage.) complet de Mathématiques ( 1795 à 1801 , ou 1808 , 7 vol. in-8° ), qui a Bott (Jean de), architecte, né en longtemps partagé la vogue avec celui de Bezout ; et une Histoire générale France en 1670, forcé de quitter sa des Mathématiques ( 1810, 2 vol. in- 8° ). Cet ouvrage fut mal accueilli des patrie à la révocation de l'édit de Nan- savants, oui lui reprochèrent d'être trop superficiel; mais Bossut ne l'avait tes, alla chercher un asile en Hollan- pas composé pour eux, c'est ce que prouvent évidemment ses Considéra- de, puis en Prusse, où il fut chargé, tions sur le livre de Montucla. ar le roi Frédéric er de construire Bostoniens. C'est ainsi que l'on ap- I, pelait en France, vers 1777, les Amé- Farsenal de Berlin, qui passe pour ricains des États-Unis, parce que l'in- l'un des plus beaux édifices de l'Alle- surrection avait commencé à Boston. magne. De Bott dirigea ensuite, sous Botage ou Bouteillage , en latin botagium dérivé du substantif bota le règne de Frédéric-Guillaume , la fy construction des fortifications de W'e- qui signifie bouteille. C'était un droit sel. Il mourut à Dresde en 1745. qui se percevait sur le vin , et non pas, Boubers (Alexandre- François -Jo- comme quelques auteurs l'ont cru mal seph), général de brigade, né \"à Lions à propos, une redevance qui s'acquit- tait avec des butets ( sorte de hotte) (Picardie) le 5 janvier 1744, lit ses ou qu'on exigeait de ceux qui boutoient firemières armes dans le corps des vo- ontaires de Belle -Isle, et les deux campagnes sur mer, de 1 757 et 1758 , à bord de la frégate le Maréchal-de-Belle- Isle, commandée par le brave Thurot. En 1759 et 1760, il fut inscrit comme surnuméraire parmi les gardes de la marine au dépôt de Brèst. Il entra en qualité d'aspirant d'artillerie à la Fère en 1760; fut nommé élève en 1763; lieutenant en 1764, et capitaine en 1774. Il s'embarqua pour la Guade- loupe en 1775, revint en France en 1777, et fut nommé lieutenant-colonel en 1792. Employé à l'état-major de l'artillerie, il assista à la bataille de Jemmapes, au bombardement de Maes- tricht en 170:3, et à la bataille de Digitized by Google

FRANCE. Nerwinden. Nommé, la même année, toutê obligation antérieurement con- tractée. Ils ne dépendaient point du colonel d'artillerie, il fît les campagnes gouvernement de la Tortue, auquel ils de Tan n et de Tan m, aux armées rendaient quelquefois hommage; ils n'avaient aucune religion, et même du Nord et des Ardennes. Élevé au avaient quitté leurs noms de famille pour des sobriquets ou des noms de grade de général de brigade au blo- guerre, dont la plupart ont passé à leurs descendants. Leur habillement cus de Maubeuge, en Tan n, il fut consistait en une chemise tachée du sang des animaux qu'ils tuaient; un mis à la retraite le 29 brumaire an y, caleçon plus sale encore , et fait et nommé officier de la Lésion d'hon- comme un tablier de brasseur, c'est-à- neur dans le mois de prairial an au. dire, ouvert par le bas; une courroie Bouc , terre et seigneurie de Pro- qui leur servait de ceinture , et d'où vence, à cinq kilom. sud d'Aix, érigée pendait une large gaîne, dans laquelle étaient quelques couteaux flamands, —en marquisat en 1690. avec une espèce de sabre fort court appelé manchette; un chapeau sans Boucaniers. On appelle ainsi les bords, excepté sur le devant. Point de bas , et des souliers faits de peaux premiers aventuriers français qui habi- de cochon. Leurs fusils avaient un canon de quatre pieds et demi de tèrent Saint-Domingue. Ils étaient, long. Chacun de ces boucaniers avait à sa suite plus ou moins iïengagés en 1635, au nombre de trois mille, la (voyez ce mot), suivant ses facultés, plupart Normands. Ce nom de bouca- et une meute de vinçt ou trente chiens. La chasse du bœuf était leur principale niers leur venait de ce qu'ils se réunis- occupation ; c'était , on doit le penser, de hardis chasseurs. Quand la bête saient après leurs chasses pour bouca- était à demi éeorchée, le maître , c'est- ner ou rôtir les chairs des bœufs qu'ifs à-dire, celui qui préparait la cuisine fiour les autres , en tirait un gros os avaient tués. Ils avaient, pour cela, e cassait, et en suçait la moelle ; c'était des boucans, lesquels consistaient en son déjeuner; il abandonnait les autres à ses engagés. Les boucaniers conti- un espace assez grand de terre défri- nuaient leurs chasses , jusqu'à ce qu'ils eussent tué autant de bœufs qu'il y chée, où se trouvaient les claies sur avait de personnes, et ne s'en retour- naient à la grande terre qu'après avoir lesquelles on faisait boucaner la viande, réuni le nombre de cuirs qu'ils avaient promis aux marchands qui les atten- une place pour étendre les cuirs, et des daient à la Tortue , ou à quelque autre port de l'île. Leurs principaux boucans baraques, appelées ajoupas, où les étaient la presqu'île de Samana, la Pe- tite île, le port Margot, la Savane chasseurs se mettaient a l'abri de la brûlée , vers les Gonaïves , l'embarca- dère du Mirebalais , et le fond de l'île pluie et du soleil , mais qui étaient ou- à Vache. vertes à tous les vents. Les boucaniers Les Espagnols , craignant de voir les boucaniers, qui étaient tous Français n'avaient ni femmes ni enfants, et et dont le nombre s'était considérable- ment accru s'emparer de l'île entière, s'associaient deux à deux pour se prê- , ter mutuellement secours au besoin. entreprirent contre eux une guerre* à Ces couples vivaient dans la plus par- faite communauté ; tout ce que laissait le mourant appartenait au survivant ; ils appelaient cela s'emmaielotter, d'où est venu le mot matelottage, qui , dans les colonies, désigne particulièrement l'état de deux femmes ou de deux hom- mes qui ont en commun le même homme ou la même femme. Au reste, les boucaniers en agissaient entre eux avec la plus grande liberté , et celui gui commettait'le moindre larcin était ignominieusement chassé du corps. Les boucaniers ne connaissaient d'au- tres lois que les conventions qu'ils avaient faites entre eux, et dont ils avaient formé une coutume qui était leur unique règle de conduite. lis fon- daient leur droit d'en agir ainsi , sur ce qu'en passant le tropique , ils avaient reçu un baptême qui les affranchissait de Digitized by Google

L'UNIVERS. BOC outrance. Mais ces braves, quoique tants. Cette ville fut bâtie , dit-on , par toujours en moins grand nombre que leurs ennemis, repoussèrent constam- Pépin cependant, le plus ancien titre ; où il en soit fait mention , est un di- ment leurs attaques , et les défirent plôme signé par Charles le Simple , en souvent; ils en tuèrent quelquefois un 899. Elle fut prise et brûlée par l'em- si grand nombre, que plusieurs rivières pereur Henri IV en 1 102 ; dès le dixième conservent encore aujourd'hui le nom siècle, elle avait eu ses seigneurs ou de rivières du Massacre qu'elles doi- châtelains , dont le dernier la vendit , vent aux défaites que les Espagnols en 1160, à Baudouin IV, comte de ont éprouvées sur leurs bords. La cour Hainaut. Ce prince la fit entourer de de Madrid fit de grands préparatifs, et murs et y fit construire un château. envoya de nouvelles troupes sous les Louis XI la prit en 1477, et la rendit ordres d'un vieil officier qui avait servi l'année suivante, à l'archiduc Maxim i- avec distinction dans les guerres des lien. Les Français s'en rendirent maî- Pays-Bas ; mais son armée fut taillée tres de nouveau , et y mirent le feu en en pièces, et il perdit lui-même la vie. 1521; elle se rendit, en 1580, au Découragés par le mauvais succès de comte de Mansfeld , et fut réduite en cette tentative, les Espagnols recom- cendres quelques jours après. Des in- mencèrent alors contre les boucaniers cendies la détruisirent de nouveau en la guerre de détail qui fut pour eux 1642 et en 1655. Prise par les Fran- , plus heureuse , et força les boucaniers çais en 1676 , et cédée à la France à la a changer la position de leurs boucans. paix de Nimègue, reprise par les alliés A la fin, ces intrépides chasseurs en 1711 , et par les Français en 1712, désespérant, après des combats san- c'est seulement à la paix d'Utrecht glants , de pouvoir continuer leur vie qu'elle fit définitivement partie du ter- aventureuse, et voyant leurs rangs ritoire français. s'éclaircir chaque jour, leurs pertes Bouchard (Alain) , avocat au par- n'étant jamais réparées , furent con- lement de Rennes , est le premier qui traints les uns de se faire habitants ait donné une histoire complète de la et de défricher les quartiers du grand Bretagne, sa patrie. Cette histoire et du petit Goave; les autres, de se parut en 1514 ; elle a pour titre : Les ranger parmi les flibustiers (voyez ce grandes chroniquesde Bretaigne, par- mot), qui alors seulement commencè- lant de très pieux nobles et très bel- rent à fonder leur vaste renommée liqueux roys, ducs princes , barons , dans les Antilles. Tels furent les bou- et autres gens nobles, tant de la Bre- caniers , ces hommes qui , les pre- taîgne, dite à présent Angleterre, miers, ouvrirent à la France le chemin que de notre Bretaigne de présent d'une terre qui devait devenir une de érigée en duché, etc.. Ces chroniques ses plus riches colonies, et qui, pour- ont été plusieurs fois réimprimées. tant, ne reçurent de leur mere patrie Bouchard (Alexis-Daniel), savant aucun secours ni en argent , ni en pro- théologien, né à Besançon vers 1680, mort en cette ville en 1758, avait com- visions , pas même quelques-unes de posé un grand nombre d'ouvraiies; ces paroles d'encouragement , qui mais deux seulement ont été publiés , ; d'ordinaire, coûtent si peu et font ce- ce sont : 1° Juris Cses'aris, seu civi- pendant exécuter de si grandes choses. lis, institutiones brèves, admodvm faciles et accuratœ ; adjus antiquum Bouchage (le), terreet seigneuriedu ac novissimum, ipsasque potissimum Dauphiné, érigée en baronnie en 1478, et depuis en comté. Bouchaïn, Buccinium, Bocha- Justinianeas institutiones accommo- nium , ville forte dans Je Hainaut , à datcV, 1713, 2vol. in-12; et FSummula conciliorum generatium seu Romanse dix kilomètres sud-est de Douai, jadis capitale de l'Ostrevain , faisant au- cath. Ecclesix , Paris , 1717. jourd'hui partie du département du Bouchard (Amaury) , chancelier du Nord, et comptant douze cents habi- roi de Navarre , né à SainWean-d'An- Digitized by Google

FRANCE. 155 gel? vers la fin du quinzième siècle, a ceaux remarquables. Bouchardon avait publié, pour combattre une opinion été reçu à l'Académie en 1744. Dès du célèbre jurisconsulte Tiraqueau, un 1736, il était dessinateur de l'Acadé- ouvrage intitulé : Feminei sexus apo- mie des belles-lettres. Il mourut le 27 logia Paris, 1512, in-4°. On lui a re- juillet 1762. Claude Vassé est le seul ^roche d'avoir trahi son maître, en élève que l'on connaisse de Bouchar- don. vrant, en 1560, ses secrets aux Guises; mais il paraît que c'est un de ses (ils Bouchaud (Marie- Antoine) naquit qu'on doit accuser de ce crime ; il était à Paris le 16 avril 1719. Reçu agrégé trop vieux alors pour s'occuper d'in- de la faculté de droit de Pari s' en 1747 trigues politiques. il débuta bientôt après, dans la car- rière des lettres, par les articles Con- Bouchardon (Edme), l'un des cile, Décret de Oratlen, Décrétait et Fausses décrétâtes, de I* Encyclopédie. meilleurs sculpteurs du dix - huitième Mais sa coopération à ce granu mo- siècle, naquit en 1698, à Chaumont. nument du dix-huitième siècle, tout Son père , sculpteur et architecte , après en l'associant à la gloire des d'Alem- avoir été son premier maître, l'en- bert , des Diderot , etc. , nuisit consi- voya à Paris , étudier à l'école de Cous- tou le jeune. Bouchardon ayant obtenu dérablement à son avancement. On le le grand prix , alla en Italie. L'antique regarda comme un des adeptes de cette et les œuvres de Raphaël furent les objets de ses études les plus sérieu- philosophie, au triomphe de laquelle était consacrée l'Encyclopédie; et on ses. De retour à Paris en 1732, lui fit attendre quinze ans une chaire de professeur, à laquelle il avait droit Bouchardon étudia à fond l'anatomie par ses talents et sa science. Bouchaud et fit les dessins des planches du se consola de cette injustice en culti- traité publié par Huguier, en 1741. Il vant les lettres. Après avoir publié fit ensuite , pour le traité des pierres gravées de Mariette , les dessins a après quelques traductions de l'anglais, il lesquels ont été gravées les planches de cet ouvrage ; et il disait que l'étude adressa, en 1766, à l'Académie des des monuments représentés dans cet inscriptions et belles-lettres, un Essai ouvrage avait eu pour lui les mêmes historique sur F impôt du 20e s ur Les résultats que celle des bas-reliefs et de la statuaire antiques. Si nous avons successions, et de timpôt sur les mar- chandises , chez les Romains; et la insisté sur ces travaux et ces études même année, cette compagnie le reçut de Bouchardon , c'est que cet artiste au nombre de ses membres. Bientôt est l'un de ceux qui ont arrêté l'art français dans sa décadence, et qu'il après, il obtint cette chaire de droit doit le peu de sévérité que I on trouve qu'on lui avait refusée. Lorsqu'on créa encore dans ses ouvrages à l'étude de en 1774, une chaire de droit au collège la nature et des chefs-d'œuvre de l'art de France, ce fut lui qui en fut chargé. antique. Cependant Bouchardon ne fut Enfin, en 1785, il fut nommé conseiller pas ce qu'il aurait pu être (fans un autre siècle ; il sacrifia trop encore au d' État . Corn pris dans la troisième classe goût de son temps, et l'on reproche de la manière et trop de fini à ses de l'Institut, lors de la réorganisation œuvres. Cependant disons pour être des Académies, en 1 796, il mourut à Pa- ris, en 1804, âgé de quatre-vingt-cinq , ans. Outre l'essai que nous avons cité, Bouchaud a encore publié plusieurs juste, surtout envers un artiste qui ouvrages justement estimés. Les plus importants sont des Recherches his/o* travailla pour la cour de Louis XV, riques sur la police des Romains, concernant les grands chemins, les que son dessin est en général correct, rues et les marchés, Paris, 1784, et que ses ouvrages sont agréables, in -8°, et un Commentaire sur la loi bien qu'un neu froids. Son chef-d'œu- des Douze Tables, 1787 et 1803, in-4°. vre est la fontaine de la rue de Gre- nelle, à Paris. Il a fait aussi, pour Ce commentaire était le meilleur et le Versailles et Gros-Bois plusieurs mor- , Digitized by Google

166 BOtf L'UNIVERS. plus complet qui eût encore été publié. « envers touts et contre touts, et garder Bouche ( Honoré), né à Aix en « vostre droit en mon pouvoir. » On voit dans Beaumanoir et dans le 1598, s'est acquis une juste célébrité roman de la Rose, que le baiser à la par son histoire de Provence. Cet ou- bouche était une prérogative des vas- saux nobles; les vilains et roturiers vrage, qui a pour titre, Ckorogra- n'étaient point admis à cet honneur. C'était une grande question entre nos phie, ou description de la Provence , jurisconsultes féodaux de savoir si la femme vassale devait à son seigneur et histoire chronologique du même la bouche et les mains. Loisel, plus pays, forme 2 Tolumes in-folio, et fut rigoriste que galant, prétendait que la femme ne devait que la main; d'autres, imprimé à Aix, en 1664, aux frais des en raison de la courtoisie française (vieux motet vieille chose!), tenaient états de la province. C'est peut-être pour la formalité de la bouche et du baiser. Dumoulin ( art. 3 de la Cou- la meilleure histoire locale que nous tume de Paris ) dit qu'une veuve ayant offert foi et hommage à son seigneur, ayons. Bouche mourut à Aix en 1C71. ses offres furent jugées valables, quoi - ' Un autre Bouche ( Charles-Fran- que le seigneur fît une mauvaise con- cois ) , avocat au parlement d'Aix , et testatioh sur ce qu'elle n'avait pas député à l'Assemblée législative et à offert nommément la bouche et les la Convention, s'est aussi fait con- mains. naître par de savantes recherches sur La loi du 15 mars 1790, après avoir aboli la foi-hommage, ajoute « que les son pays natal. Son principal ouvrage « fiefs qui ne devaient que la bouche est un Essai sur l'histoire de Proven- « et les mains, ne sont plus soumis à « aucun aveu ni reconnaissance. » ce, suivi des Provençaux célèbres, Bouchée (François), peintre d'his- Marseille, 1785, 2 volumes in-4°. Il toire, né à Paris en 1704, et mort le 7 mai 1770. Le nom de Boucher est mourut en 1794. devenu comme le symbole de l'art dé- —Bouche ( la ) et les mains. généré du dix-huitième siècle ; c'est C'é- seulement à ce titre que nous entre- tait l'expression consacrée pour dési- tiendrons nos lecteurs de cet artiste. gner l'hommage que le vassal devait II fut élève de Lemoine , prit à cette école cet amour du hardi et du facile a son seigneur. Quand on trouve dans qu'il devait pousser si loin. L'Italie les coutumes que le vassal ne doit à qu'il visita ensuite ne lui inspira que ue l'indifférence pour ses grands maî- son seigneur que la bouche et les Atrès et du mépris pour l'antique. son mains, cela signifie qu'il ne lui doit retour en France, ses peintures galan- qu'un simple acte de toi et hommage, tes lui valurent une réputation con- et rien de plus. Cette formalité de la sidérable, et il devint l'artiste à la bouche et des mains était rigoureuse- mode. Bientôt même, à la mort de Carie Vanloo , il fut nommé premier ment exigée. Le vassal devait la bou- peintre du roi. Ses œuvres, faites avec une vitesse incroyable, étaient mau- che à son seigneur pour lui témoigner vaises de couleur et détestables de des- l'étroite union dans laquelle il désirait sin. Son coloris a une apparence de fraîcheur , mais il n'est que fade ; ses vivre avec lui , et ce baiser était quel- figures ont l'air d'avoir été nourries de roses. Le dessin recherche la grâ- Suefois appelé osculum pacis ; il lui evait- les mains en signe de soumis- sion et de fidélité. Voici , suivant Bouteiller (*), corn- ment se rendait cet hommage : « Doit l'homme joindre ses deux « mains en nom d'humilité, et mettre « ès deux mains de son seigneur en signe que tout lui voue et promet «foy; et le seigneur ainsi le reçoit et « aussi lui promet à garder loy et « loyauté, et doit l'homme dire ces pa- « rôles : Sire, je viens en vostre nom- « mage et en vostre foy , et deviens * vostre homme de bouche et de mains, « et vous jure et promets foy et loyauté (*\\ Somme rural*, i, xa. Digitized by Google

BOU FRANCE. BWJ 157 ce, l'élégance ; mais Boucher, qui des- tariorum Cxsaris, adannum ChrisU sinait le plus souvent sans modèle, est vulgarem 511, c'est-à-dire jusqu'au toujours faux, et n'aboutit qu'à l'af- temps de Clovis; Liège; 1665, in-fol. féterie et à la manière. Rubens fut Boucher (Jean), cordelier obser- son modèle dan^ tout ce que ce maître vantin , né à Besançon dans le seizième avait de mauvais. Il n'avait point de siècle, est auteur* d'un voyage à la sentiments élevés, et dans tout ce terre sainte, qu'il publia en 1616, in-8°, qu'il a fait , histoire ou genre , il ne sous le titre de Bouquet sacré, com- put produire que des femmes de con- posé des rosesdu Calvaire, des lys de vention, impudiques, la bouche en cœur Bethléem, des jacinthes d'Olivet. Cet et les flancs en panier. Tout cela ne ouvrage curieux, mais où il ne faut s* adresse qu'aux sens; tout cela n'est chercher aucun renseignement exact et bon qu'à décorer le boudoir d'une Pom- historique, a été souvent réimprimé, padour. Aucun mérite de dessin, aucune Boucher (Jean), né à Paris au mi- lieu du seizième siècle, et destiné à Ascience. quoi donc Boucher dut-il sa Agrande réputation ? ses défauts, à la vivre tranquille dans une chaire de Tu- nature de ses tableaux , qui plaisaient niversité ou dans le fond d'une abbaye, à Louis XV, aux grands seigneurs de aima mieux se mêler à tous les trou- l'époque, et à tout ce qu'il y avait alors bles civils qui alors agitaient le royau- de mauvais en France ; il se moquait me, et linit sa vie dans l'exil. D'abord de ceux qui l'admiraient, et profitait il enseigna les lettres et la philosophie de leurs mauvaises passions pour ga- à Reims ; puis, lorsque le roi Henri III gner 50,000 livres par année. fit son entrée dans cette ville pour s'y Boucher (Gilles), jésuite, né en faire sacrer, il fut chargé de le comph- Artois, en 1576, entra dans la société menter; et presque aussitôt appelé à . en 1598, et s'y rendit célèbre par son Paris, il alla y enseigner la philosophie érudition historique et par son talent au collège de Bourgogne, la théologie comme prédicateur. Il mourut à Tour- au collège des Grassins, et devint rec- nai le 8 mars 1665, après avoir été teur de l'université. Il ne s'arrêta pas recteur du collège de Béthune pendant là; prieur de la maison de Sur bon ne, dix ans, et de celui de Liège pendant il reçut bientôt le bonnet de docteur six. On a de lui : Disputatio historica et fut nommé curé de Saint-Benoît. depri?nisTungrorumseuLeodiensium Mais cette fortune, qu'il s'était créée episcopis, cum chronologia posterio- par son mérite , il la compromit par ses rum, Liège, 1612, in-4°; Annotatio fureurs monarc/iomaques , comme on chronologica regum Francorum Me- disait alors. C'est dans la chambre rovœdiorum : cet ouvrage et le pré- qu'il occupait au collège de Fortet cèdent se trouvent dans le Recueil des que les premiers ligueurs tinrent leur évéques de Liège, par Chapeauville; assemblée en 1585, et dès lors le paci- Chronographia historix leodiensis, fique docteur de Reims devint une et posteriorum episcoporum additis trompette de sédition , suivant l'ex- , romanorumpontificumetregumFran- pression de Bayle. Dans la fameuse ciœ tabulis, Liège, avec les écrivains journée des barricades, dont les suites liégeois, publiés par Chapeauville; furent si fatales a Tau ton te du roi Gregorius turonensis, amplissimis Henri III, il lit sonner le tocsin de notis illustratus; Commentarium in son église. Sa langue comme sa plume Victorii aquitani canonem pascha- était au service des ligueurs , et lem, quo cycli pasckales veterum ex- toutes deux étaient infatigables. Son ponuntur, verus Christi passionis érudition lui fut une arme puissante dies eruitur, et doctrina temporum contre la cour. Dans une allégorie traditur, Anvers, Plantin, 1633; Bel- transparente, il écrivit, en 1588, con- gium ecclesiasticum Romanorum et tre le duc d'Épernon une satire intitu- civile, in quo historia occidentcUis lée : Histoire tragique et mémorable universa cojitinetur, a fine Commen- de Gaver ston, ancien mignon d'Ê* Digitized by Google

148 BOU L'UNIVERS. BOU douard II. L'année suivante parut son Bouchbb-Beàuvais (Jean) a pu- traité de Justa Henrici III abdica- blié un Abrégé historique et chro- tions e Francorum regno, Paris 1589, nologique de la ville de la Rochelle in-8°. Dans cet ouvrage, écrit avec une grande amertume, il faut remar- 1673, in-8°. quer les deux derniers chapitres que Bot cher de Cbe\\ecœub (Jules- 1 auteur ajouta dès qu'il eut appris la mort de Henri III, l'un pour exalter Armand-Guillaume) , botaniste distin- jusqu'aux nues le meurtrier de ce prin- gué, et membre correspondant de ce, l'autre pour faire l'éloge du duc de i Institut, est né à Paray-le-Monial Mayenne. Ses fureurs durant la ligue lui ont mérite les sarcasmes des au- le 26 juillet 1757. Il a publié, en 1803 teurs de la satire Ménippée. Il pro- une Flore d'Abbeville, qui contient de nonça et rédigea, pendant les derniers précieux renseignements pour l'his- jours de la résistance de Paris, ses toire naturelle du département de la Sermons de la simulée conversion et Somme. L'amour des lettres est héré- nullité de la prétendue absolution de ditaire dans la famille de M. Boucher- Henri de Bourbon. L'entrée de ce de- Crevecœur. L'ainé de ses fils, prince dans la capitale mit seule un M.Jacques Boucher-de-Pebthes, né terme à ses prédications , mais non pas à Rethel en 1788, et qui lui a succédé à son fanatisme. Ses sermons furent dans ses fonctions de directeur des brûlés en place publique par la main du douanes à Abbeville, est un littérateur bourreau. Porté lui-même sur la liste des plus fougueux ligueurs, dont le très-fécond et très-distingué ; le se- supplice fut jugé nécessaire à la tran- quillité publique, il fut obligé de s'en- cond, M . Etienne Bouc heb-dk-Cbevb- luir hors du royaume , et quelque temps cœub, ne aussi à Rethel en 1791, a pu- après, lorsqu'il tenta d'y rentrer, il blié, sous le titre de Souvenirs du fut arrêté par les ordres du procureur général , et ne dut son salut qu'à la pays Basque. in-8°, 1830, un curieux voyage dans les Pyrénées. clémence de Henri IV. Au lieu d'être désarmé il n'en lança pas moins de Boucheb de la Richerie (Gilles), littérateur, naquit à Saint Germain en Tournai , où il se réfugia après avoir recouvré sa liberté, de nouvelles invec- Lave, en 1733, fut successivement tives contre le roi. Il mourut enfin en avocat au parlement de Paris , membre 1646. Sans avoir une grande impor- du directoire du département de Seine- tance littéraire , Boucher ne doit pas et-Marne, et juge au tribunal de cassa- être oublié; il fut l'un des auteurs tion, fonctions qu'il exerça depuis les plus féconds de la littérature pam- 1791 jusqu'au 18 fructidor, époque où phlétaire, alors si répandue et si puis- il s'en démit pour rentrer dans la vie sante en France. Son style est pénible privée. Ses nombreux ouvrages, qui et généralement boursouflé ; son éru- roulent, pour la plupart, sur des ques- dition est pédantesque : mais ses invec- tions d'histoire littéraire, sont remar- tives, >es calomnies, sont autant de traits caractéristiques de l'époque : —quables par un style correct et par une elles tirent toute leur valeur de l'intérêt historique qu'elles présentent. grande érudition. René Boucheb , Boucheb (Pierre), gouverneur des frère de Boucher de la Richerie, pro- trois rivières, est auteur d'une His- cureur au Chàtelet de Paris , remplaça toire véritable et naturelle des mœurs Pétion, comme maire de cette grande et des pi-oductions de la nouvelle cité, jusqu'à l'élection de son succes- France, dite Canada, Paris, 1666, seur. Au 13 vendémiaire an iv, il pré- in-12. On ne connaît ni la date de sa mort , ni celle de sa naissance. sida la section de l'Ouest, et fut con- damné à mort pour avoir signé l'ordre de marcher sur la Convention ; mais il échappa à cette condamnation et fut amnistié quelque temps après. Il est mort à Paris, en 1811. Boucher Saint - Sauveub (An- toine), ué à Paris le 21 juin 1723, s'était établi à Paris, après avoir été successivement capitaine de cavalerie Digitized by Google

FRANCE. Bor 15» au service d'Espagne, maître particu- corporations de l'ancienne Rome, et il lier des eaux et forêts en Touraine, lorsque, après le 10 août 1792, il fut est probable qu'elle s'était continuée sans interruption, depuis l'époque où nommé député à la Convention natio- Paris était le centre de la puissance ro- maine dans les Gaules, et qu'elle avait nale par le département de Paris. Il se traversé, sans s'altérer sensiblement, rangea d'abord parmi les montagnards les temps d'anarchie qui précédèrent et suivirent les invasions des barbares, et vota la mort de Louis XVI. Nommé membre du comité de sûreté générale A Rome, sous les empereurs, un en février 1793, il donna sa démission certain nombre de familles étaient peu de jours après, fit placarder sur chargées, sous le nom de Boarii ou les murs de Paris les motifs de sa re- Pecuarii* de fournir au peuple la traite. Après le 9 thermidor, il contri- viande dont il avait besoin. Elles bua à faire mettre en lil>erté un grand formaient une corporation qui avait nombre de citoyens incarcérés comme ses biens, ses magistrats et ses lois, Ces familles, une fois vouées à leurs suspects, et se distingua par sa mode- fonctions, y demeuraient irrévocable- Aration. l'époque de la formation des ment attachées et ne pouvaient plus les quitter. Les fils succédaient à leurs Conseils, il fut élu par le département pères, et aucun privilège, aucune di- d'Indre-et-Loire , au Conseil des An- gnité ne pouvaient les en dispenser; il ciens, dont lé tirage au sort Je rit sor- existe même, dans le Code theodosien, tir une année après. Rendu à la vie une disposition qui déclare nulles tou- privée et avant perdu sa fortune par tes les lettres que la faveur eût pu ar- rocher dans ce but à l'empereur, ta révolution, il fut nommé par le Di- Tel esta peu près l'état où l'on trou- rectoire, lors du rétablissement de la ve la corporation des bouchers de Pa- loterie, inspecteur dans cette ad mi ni s- ris, à l'époque où elle commence à pa- tration. Il est mort à Bruxelles , chez raître dans les actes publics. « Il y son fils, en 1805. avait, dit Lamarre (*), de temps im- mémorial, un certain nombre de fa- Boucrebat ( Louis ), né à Paris en milles chargées du soin d'acheter les bestiaux , d'en avoir toujours une 1616, avait été successivement conseil- provision suffisante pour la snbsis- ler au parlement, maître des requêtes, tance de la ville, et d'en débiter les intendant de Guienne, de Languedoc, chairs dans les boucheries. Ces famil- de Picardie, de Champagne, conseiller les composaient une espèce de corps d'État, trois fois commissaire du roi ou société; elles n'admettaient avec aux états de Languedoc, et dix fois elles, dans ce. commerce, aucun étran- aux états de Bretagne. Il venait d'être ger ; les enfants y succédaient à leurs appelé par Colbert au conseil royal des parents : mais comme les biens qu'el- finances établi en 1667, lorsqu'il suc- les possédaient en commun étaient céda, en 1685, au chancelier de France destinésà un emploi des plus laborieux, leTellier. Louis XIV lui annonça, en les seuls mâles en étaient mis en pos- session, à l'exclusion des filles ; d'où ces termes, sa nomination : « La place il arriva que par une espèce de substi- « de chancelier est le prix de vos longs tution, les familles qui ne laissaient « services : ce n'est pas une grâce, c'est aucuns hoirs en lignes masculines, « une récompense. Elle n'eût pas été n'avaient plus de part à la société et « pour vous, si tout autre l'eût mieux que leurs droits étaient dévolus aux «méritée. » Le Tellier avait signé, quelques jours avant sa mort, la révo- autres. cation de ledit de Nantes; son succès- a Ces familles élisaient entre elles seur fut chargé d'exécuter cette funeste mesure; il le fît avec une conviction un chef, sous le nom de maitre des qui peut excuser les rigueurs qu'il or- (*) Traité de police, t. Il, p. iaoï. donna. Boucherat mourut à Paris, en 1699, à l'âge de quatre-vingt-trois ans. Bouchées. La corporation des bou- chers de Paris était peut-être la plus ancienne de France. Elle avait conser- vé en grande partie l'organisation des Digitized by Google

ICO BOB L'UNIVERS. BOU bouchers. Celui qui était pourvu de cet inquiéta les anciens bouchers, qui, office en jouissait sa vie durant, et il n'était destituable qu'en cas de préva- après de longs débats , dont le but rication. Ce maître des bouchers déci- dait toutes les contestations qui nais- était de forcer les nouveaux venus à saient entre eux concernant leur Krofession ou l'administration de leurs abandonner une profession dont ils iens communs. Ils élisaient aussi un croyaient que le monopole leur appar- procureur d'office et un greffier, et fes appellations de ce petit tribunal tenait , finirent cependant par traiter étaient relevées devant le prévôt de Paris, et jugées aux audiences de po- avec eux, acquirent leurs étaux qu'ils , lice de ce magistrat. » réunirent aux leurs, et construisirent, Dans l'origine, la plupart des com- munautés d'artisans étaient gouver- Gur abriter tous ces étaux , un vaste nées par des chefs de leur choix, au timent qui prit alors le nom déjà tribunal desquels devaient être portées , les contestations qui pouvaient s'éle- ver entre leurs membres. Mais les indiqué plus haut, de Grande Bou- rois comprirent bientôt l'importance de ces juridictions, et ils se hâtèrent cherie. Les actes dressés à l'occasion de les inféoder en faveur des grands officiers de leur couronne. Chacun de de cette transaction nous appren- ces officiers eut alors pour vassaux nent que les familles qui composaient les membres d'une ou de plusieurs alors la corporation étaient au nombre corporations, auxquelles ils étaient de dix-neui. chargés de donner des juges. Dans la Cependant , Paris s'agrandissant suite, toutes ces petitesjustices furent réunies au tribunal du prévôt de Pa- vers le nord, Test et le midi, la Grande ris. Les bouchers furent longtemps presque seuls exceptés de cette mesure. Boucherie et celle du Parvis furent Ils ne furent point inféodés, et ce fut seulement en 1673 que leur justice bientôt à une trop grande distance particulière fut réunie au Châtelet. des extrémités , et l'on éprouva le Mais ces privilèges n'appartenaient pas indifféremment à tous les bou- besoin de multiplier les étaux. Les chers de Paris. Ceux-là seuls faisaient partie de la corporation, qui occu- templiers furent les premiers gui es- paient les étaux de la grande bouche- rie. Cette boucherie, établie d'abord sayèrent d'en établir dans le voisinage sur la place du Parvis Notre-Dame, avait ensuite été transportée, lorsque du Temple. Mais cette tentative excita Paris s'était étendu sur la rive droite de la Seine, près du Châtelet, à l'en- les réclamations des propriétaires de droit où la tour Saint-Jacques la Bou- cherie perpétue encore le souvenir de la Grande Boucherie; une contesta- son voisinage. La boucherie du Par- vis, ainsi abandonnée, fut donnée, par tion s'ensuivit, et, pour la terminer, Philippe-Auguste, en 1222, à l'évéque de Paris, qui y établit des bouchers de il ne fallut rien moins qu'une charte son choix. du roi Philippe le Hardi. Cette charte D'un autre côté, des bouchers étrangers à l'ancienne corporation donna gain de cause aux templiers, s'étaient également établis dans les environs du Châtelet ; leur voisinage mais en même temps elle reconnut et confirma les privilèges de la commu- nauté: Nous croyons devoir en citér le passage suivant : « Les anciens « bouchers prétendoient , v est-il dk « qu'ils avoient , et que leurs prédé- « cesseurs avoient eu la faculté, pour « ainsi dire , de faire et de constituer « bouchers à l'effet de couper et de a débiter des viandes pour toute la « ville, les fils des bouchers existans, « sous notre autorité et avec notre « consentement, sans qu'aucune autre « personne dans la ville et dans ses « dépendances , ait la permission de « faire des bouchers , ou d'élever une « boucherie pour la ville de Paris et « les faubourgs, à l'exception de ceux « qui ont des boucheries depuis un « temps immémorial. » La charte se termine ensuite par ce passage remar- quable : « En faisant cette concession « au Temple, nous n'entendons point « qu'il soit porté aucun préjudice à Digitized by Google

FRANCE. 161 * nos bouchers et à leur commu- bouchers de Paris ne composeraient « nauté , ni à leurs usages coutumes, plus désormais qu'une seule commu- , nauté qui serait régie comme les au- « privilèges et franchises ; nous vou- très arts et métiers par des statuts , « Ions au contraire que ces privilé- donnés par le roi ; enfin que la Grande « ces, usages, coutumes et franchises Boucherie et celle du parvis Notre- « demeurent dans toute leur vi- Dame seraient immédiatement dé- « gueur (*). » molles. Les prescriptions de ces let- très furent exécutées sans délai; mais On voit qu'en autorisant l'établis- deux ans après, les Bourguignons re- sement de nouveaux étaux le roi re< devinrent les plus forts, et de nouvel- les lettres du roi , en ordonnant la connaissait à la corporation qui était reconstruction de la Grande Bouche- rie, rétablirent, avec tous ses privi- propriétaire de la Grande Boucherie, une supériorité bien réelle sur tous lèges , l'ancienne corporation a qui les autres bouchers , qui ne pouvaient elle avait appartenu. Les bouchers du ouvrir leurs étaux sans son assenti- parvis Notre-Dame furent moins heu- ment. Ces privilèges furent confirmés reux, et il paraît qu'on ne leur rendit de nouveau, en 1361 , à l'occasion de pas leurs étaux , car il n'en est plus l'établissement de la Boucherie de la fait mention depuis cette époque. Montagne , et les religieux de Saint- ( Voyez Armagnacs , Bourgogne Germain des Prés furent obligés de (ducs de), art. Jean sans Peur, et Caboche.) s'y soumettre , lorsqu'ils fondèrent la leur, en 1370, dans l'endroit où se Nous avons vu que les filles ne suc- cédaient point aux droits de leur père, trouve maintenant la rue des Bou- dans la propriété de la Grande Bou- cheries-Saint-Germain. cherie. Cette disposition des statuts Tel était l'état de la corporation avait fini par exclure de la commu- nauté un grand nombre de familles, des bouchers , au commencement du et celles qui restaient avaient vu leurs nzième siècle. On sait par quels revenus augmenter en proportion de la diminution de leur nombre. Elles rdres fut signalé le règne funeste se trouvèrent bientôt trop riches pou r du malheureux Charles VI. Deux par- continuer la pénible profession de leurs ancêtres ; elles abandonnèrent, tis , les Armagnacs et les Bourgui- pour la plupart , cette profession , et gnons se disputaient le pouvoir. Le se contentèrent de louer leurs étaux à de simples compagnons. Mais le par- parti des Bourguignons qui s'ap- lement ne fut pas plutôt informe de , cet état de choses, qu'il rendit, en 1465 , un arrêt qui les condamna à puyaitsurle peuple, trouva de puis- occuper eux-mêmes leurs étaux , ou à les faire desservir par leurs gens ou sants auxiliaires dans la corporation serviteurs, à peine de confiscation de des bouchers. Caboche, boucher du ces étaux. parvis Notre-Dame , devint même le Cet arrêt fut-il rigoureusement exé- cuté? il y a lieu de croire le contraire, chef du peuple parisien , et l'allié le puisqu'en 1540, Je procureur général plus utile du duc de Bourgogne. Les se plaignit de nouveau du même abus, Bourguignons dominaient alors dans non-seulement à l'égard de la Grande Boucherie , mais aussi à l'égard de Paris, d'où ils avaient chassé les Ar- toutes les autres boucheries de Paris. Le parlement se contenta cette fois de magnacs; mais ceux-ci parvinrent régulariser un état de choses qu'il ne bientôt à rentrer dans la capitale, et ils n'y furent pas plutôt établis, qu'ils se livrèrent à de violentes réac- tions : les chefs du parti bourguignon, dont ils purent s'emparer , furent mis à mort, et pour punir les bouchers de l'appui qu'ils leur avaient prêté, des lettres du roi , en date du 13 mai 1416, abolirent tous les privilèges de l'ancienne corporation de la Grande Boucherie, ordonnèrent que tous les O t. m, charte de Philippe de l'an ia8a. T. ni. 11* Livraison. (Dict. encycl., etc.) 11 Digitized by Google

L'UNIVERS. pouvait plus empêcher; il fixa un pour fournir à ces industriels les maximum pour le loyer des étaux , et moyens d'acquérir plus facilement les décida qu'un conseiller présiderait bestiaux nécessaires à l'approvision- chaque année à leur location. nement de Paris (*). Au moment ou Dt fait , l'ancienne corporation de la corporation fut abolie , on ne pou- la Grande Boucherie n'existait plus, depuis que les propriétaires n'occu- vait arriver à la maîtrise qu'après trois ans d'apprentissage, et autant paient plus en personne leurs étaux ; l'arrêt dont nous venons de parler, d'années de compagnonage. Le prix du brevet était de deux cent deux livres, acheva de l'anéantir. En effet , il n'y celui de la maîtrise de quinze cents eut plus dès lors aucune différence livres. entre les propriétaires de cette bou- cherie, et ceux des autres boucheries Bouches-de-l'Elbe ( département de la ville; tous louaient également des ). Ce département , formé d'une leurs étaux, et leurs locataires étaient partie de la basse Saxe, était borné au «gaiement libres et affranchis de toute nord par le Holstein, à l'est et au sud- juridiction. Cette indépendance abso- est par le royaume de Westphalie , à lue ne pouvait durer longtemps, à l'ouest et au sud-ouest par le dépar- une époque où aucune branche de tement des Bouches-du- vVeser. Il avait l'industrie n'était abandonnée aux pour chef-lieu Hambourg, et formait chances de la concurrence. Les loca- quatre arrondissements, dont les chefs- taires ou compagnons bouchers senti- lieux étaient Hambourg, Lubeck, Lu- rent eux-mêmes les inconvénients de nebourg, Stade. Sa population était cet état exceptionnel, et ils furent de trois cent soixante-treize mille ha- les premiers a demander au roi des bitants. Enlevé à la France en 1814, 'statuts qui leur furent en effet accor- dés par lettres patentes du mois de il constitue aujourd'hui les républiques février 1587. de Hambourg, de Lubeck, et le nord- est du royaume de Hanovre. En vertu de ces lettres patentes, Bouches-de-l'Escaut ( départe- « tous les bouchers de la ville de Pa- ment des ). Ce département, formé.de ris furent réunis en une seule et uni- la Zélande , était borné au nord par le que communauté, gouvernée par qua- département des Bouches-de-la-Meu- tre jurés, dont la principale fonction se; à l'est, par le département des Deux-Nèthes; au sud, parle départe- consistait à visiter toutes les bétes ment de l'Escaut; et à l'ouest par la qui étaient amenées, tuées et exposées mer du Nord. Il était formé de#plu- en vente dans la capitale, de façon qu'il n'y fût vendu aucune viande sieurs îles , entre autres de celle -de ae bête morte ni malade , ou ayant Walcheren, avait pour chef-lieu Mid- été nourrie ès maisons ^huiliers, delbourg , et était divisé en trois ar- barbiers, ou maladeries , sous peine rondissements , dont les chefs-lieux de dix écus d'amende , auquel cas la- étaient Middelbourg, Gois et Zierick- dite viande devait être jetée aux zée. Sa superficie était de soixante- douze lieues carrées, et sa population champs ou à la rivière. » Nous ne de soixante-quatorze mille habitants. Ce département, enlevé à la France en transcrirons point ici les autres dis- 1814, forme aujourd'hui la province positions de ces statuts , qui ne ces- de Zélande dans la monarchie néer- sèrent d'être observés qu'en 1789. landaise. Nous citerons seulement, parai « les Bouches-de-la-Meuse ( départe- ment des ). Ce département, formé de additions qui y furent faites à diffé- rentes époques , celle en vertu de •(*) Le lecteur trouvera à l'article Caissk laquelle les bouchers ne pouvaient de Poissy, des détails plus étendus sur cette être arrêtés pour dettes la veille ni utile institution, qui subsiste encore au- le jour des marchés de Sceaux et Poissy. Enfin, nous mentionnerons les jourd'hui. caisses établies dans ces deux villes, Digitized by Google

BOIT FRANCE. mv 16$ )a Hollande méridionale, était borné de 6091,60 kilomètres carrés, et sa au nord et au nord-est par le départe- ment du Zuiderzéc, à l'est par le dé- population de 362,325 habitants. Il partement de l'Yssel-Supérieur, au sud par les départements des Deux-Nèthes est divisé en trois arrondissements, et des Bouches-de-l'Escaut, à l'ouest dont les chefs-lieux sont Marseille, Aix par Ja mer du Nord. Il avait pour chef-lieu la Haye, et était divisé en et Tarascon. C'est à Marseille que se Suatre arrondissements, dont les chefs- trouve la préfecture. Ce département eux étaient la Haye, Dordrecht, Rot- terdam , et Middelharnis dans l'île de est compris dans l'archevêché d'Àix; il Fiakkée. La France perdit en 1814 ce département, qui forme aujourd'hui dépend de la huitième division mili- dans la monarchie néerlandaise la pro- taire, de la seizième conservation fo- vince de Hollande méridionale. restière , et ressortit à la cour royale Bouches-du-Rhin ( département des ), formé du Brabant hollandais, et d'Aix. Il paie 2,731,405 fr. de contri- borné au nord par l'Yssel-Supérieur , à Test par les départements de la Roër butions directes, sur un revenu foncier et de la Meuse-Inférieure, au sud par de 23,588,000 fr., et envoie six députés la Meuse-Inférieure, ét à l'ouest par à la chambre. Les hommes les plus re- les Deux-Nèthes. Il était divisé en trois marquables nés dans ce département arrondissements , dont les chefs-lieux étaient Bois-le-Duc, résidence du pré- sont l'abbé Barthélémy, Brueys; les fet, Eindhoven et Nimègue. Ce dépar- tement, enlevé à la France en 1814, fait érudits Cary, Gibert, Ménard; l'ingé- aujourd'hui partie du royaume de Bel- nieur Adam deCrapone; le généalogiste gique. d'Hozier, Honoréd'Urfé, Dumarsais, Bouches- du-Rhône département ( Vauvenargues, Mascaron, Massiilon, des). Ce département doit son nom aux Mirabeau, Nostrada mus ; les amiraux embouchures par lesquelles le Rhône se jette dans la Méditerranée. Ces em- Suffren et Forbin ; le voyageur d'En- trecasteaux ; les botanistes Adan6on bouchures ont souvent changé de Tournefort et Plumier; le sculpteur nombre et de direction ; c'est ce que prouve la diversité des opinions des Puget ; le peintre J.-B. Van Loo, etc., et parmi les contemporains ,*MM. de anciens à leur égard. En effet, Polybe en compte deux-, Pline et A rtémidore Pastoret, Eyriès, Tlners, Mignet, Bar- trois; Timée cinq; d'autres, suivant Strabon portaient ce nombre à sept, thélemy, Méry, Capefigue, Amédée , Pichot, Reynaud, le comte de Forbin, Ces embouchures s'appellent aujour- Aetc. cette liste on peut encore ajouter d'hui grâces en provençal, et gras en le Romain Pétrone, languedocien. On en compte encore sept, qui portent les noms de grasRho- Boijches-du-Weseb (département danet (branche occidentale du fleuve), des) , formé d'une partie de la basse Saxe, était borné au nord par la mer et gras de Foz, de Fer, de la Brigue, de Periche, du Midi et du Sauzet. Les du Nord, à l'est par le département six derniers sont des subdivisions de des Bouches-de-l'Elbe , au sud par le la branche orientale. Le département des Bouches-du- royaume de Westphalie, et à l'est Rhône est borné au nord par le dé- par les départements de l'Ems-Supé- partement de Vaucluse, à I est par le département du Var , au sud par la rieur et de l'Ems-Oriental. Il était Méditerranée, et à l'ouest par le dé- partement du Gard. Sa superficie est divisé en quatre arrondissements, dont les chefs-lieux étaient Brème qui pos- , sédait la préfecture, Bremerlehe, Nien- bourg et Oldenbourg. Repris par les alliés en 1814, il forme aujourd'hui la république de Brème et une partie du duché d'Oldenbourg et du royaume de Hanovre. Bouche s-de-l'Yssel (département des ). Ce département, formé de la province hollandaise d'Over- Yssel étaitbornéau nord par les départements de la Frise et de PEms-Occidental , à l'est par le département de la Lippe, au sud par le département de l'Yssel- 11. Digitized by Google

164 BOU LTJNtVERS. BOtf Supérieur, et à l'ouest par le golfe du pital qui lui acquirent une réputation Zuiderzée. Il était divisé en trois arron- si brillante et à la fois si méritée, dissements, dont les chefs-lieux étaient Nous citerons cependant une de ces Zwol, chef-lieu du département, Al- opérations capitales qui, par la nou- meloo et Deventer. Depuis 1814 , ce veauté, la hardiesse, le génie de leur département appartient à la Hollande, conception, placèrent le chirurgien de Bouchet (le), seigneurie de l'Ile- l'Hôtel-Dieu de Lyon au plus haut de -France (aujourd'hui département rang de la chirurgie française. Un de Seine-et-Oise) , érigée en marquisat Espagnol se présenta dans son service, en faveur du célèbre Duquesne. affecté d'un anévrisme de l'artère Bouchet (Claude-Antoine) naquit crurale à la région de l'aine. 11 n'y le 17 février 1785, à Lyon , où son avait qu'une seule chance de sauver le père , élève et pensionnaire de De- malade ; c'était de faire la ligature de sault, exerçait avec distinction la mé- l'artère iliaque primitive : cette opé- Adecine. 1 âge de quatorze ans il en- ration n'avait été pratiquée qu'une tra à l'école vétérinaire, dont il fut fois par Astley Coopter , et la malade l'un des élèves les plus distingués, et en était morte. Cet exemple ne dé- suivit en même temps les cours de couragea pas Bouchet qui pratiqua , l'Hôtel-Dieu, où il obtint après trois cette opération et réussit, , années d'études anatomiques, la pre- Eu 1814, lorsque Lyon tomba au mière place au concours d'internat. A pouvoir des Autrichiens , Bouchet fit dix-sept ans, il alla continuer, à Paris, sortir de l'hôpital dix-huit soldats ses études médicales. Il n'avait pas français, après leur avoir donné des vingt et un ans lorsqu'il apprit que le habits d'artisans, et les empêcha ainsi concours pour la place de chirurgien de devenir prisonniers des A ut ri- en chef de l'Hôtel-Dieu de Lyon allait chiens. Cet acte de patriotique bien- s'ouvrir. Il s'v présenta avec une as- faisance ne fut pas le seul de sa vie. surance qui n'était pas de la présomp- Ce fut le même sentiment qui fen- tion , car il s'était préparé par de gagea à refuser la décoration que le , graves et sérieuses études, au combat comte hongrois Smideck lui offrit nu nom de l'empereur d'Autriche, en ré- scientifique qu'il allait soutenir. Ja- mais triomphe ne fut aussi complet compense des soins qu'il avait donnés, que le sien. Cependant il sut faire ex- en 1814 et 1815, aux blessés des ar- cuser sa supériorité par une modes- mées alliées. C'est aussi par amour tie réelle, et par cette douce affabilité pour sa ville natale qu'il refusa la dont le véritable savoir est toujours place de médecin de l'empereur que accompagné. Le er janvier 1812, il Napoléon lui avait fait offrir, 1 prit possession des fonctions qu'il ve- Enfin, à cinquante-quatre ans, Bou- nait de conquérir ainsi, et, a peine chet termina une vie si bien remplie; installé, il apporta dans sa pratique il mourut le 25 novembre 1839, ne de précieuses améliorations. Le pre- laissant pas la fortune qu'auraient pu mier, il introduisit dans la chirurgie lui assurer ses longs et honorables la méthode de réunion par première travaux : sa bienfaisance ne lui avait intention après les amputations mé- pas permis d'amasser, , Bouchbt (Guillaume), né à roi- thode adoptée depuis par tous les chirurgiens. Il inventa la gouttière tiers, en 1526, fut libraire dans cette brisée pour les tumeurs blanches du ville et devint prévôt des marchands, genou , ainsi qu'un instrument pour Sa vie qui se passa dans sa boutique , exciser les tubercules cancéreux dans et dans le conseil des prud'hommes les parties profondes. Bouchet était n'est pas connue ; mais il a laissé un livre qui peut figurer auprès du Cym~ doue d'une adresse et d'une dextérité extrêmement remarquables. Bornés balum de Desperriers et du Moyen de par l'espace , nous ne pouvons le sui- parvenir de Beroald. Bouchet plus we dans les nombreux travaux d'hô- d'une fois cite Panurge et Pentagrnel, Digitizéd by Google

BOIT FRANCE. BOL' 16* et en effet les interlocuteurs de ses tions à Charles VIII), il composa jus- qu'à 1560, où il mourut, une foule d'ou- Séries sont bien des élèves de Ra- vrages aujourd'hui oubliés, mais qui ob- tinrent alors un brillant succès, et mé- belais. Les Séries sont des entretiens ritent une place dans l'histoire de la lit- térature, parce qu'elles marquent un à l'usage des personnes qui veulent progrès dans la versification. Bouchet astreignit le premier ses compositions agréablement passer les loisirs de à un mélange alternatif de rimes mascu- lines et féminines. Ce fut , du reste, la l'a près-dîner. Il y en a pour tous les seule innovation qu'il introduisit, et il goûts ; « car j'aime aussi bien , dit se traîna sur les traces des poètes allé- « l'auteur , choses de risées , que les « plus doctes et les plus sérieuses. » goriques et érotiques qui l'avaient pré- «Ces entretiens, ajoute-t-il encore, cédé. Les titres de ses poésies sont : le Regnard traversant les voies pé- « seront profitables à toute personne riUeuses des folles fiances du monde, où Ton veut voir, à tort, une traduction « mélancolique et Dujoviale. » reste, de l'ouvrage de Brandt, de Spectaculo conjlictuque vulpium ; le Chapelet des il garantit au lecteur, foi de marchand, princes; le Triomphe de la noble « qu'il a garni son livre des meilleures et amoureuse dame en Vart d'honnê- tement aimer ; la Fleur et le Triom- « étoffes qu'il eût en sa boutique. » Il phe de cent cinq rondeaux; YAmou- reux transy, et les Jugements poétics est fâcheux que bien souventses étoffes de l'honneur féminin. Dans quelques- portent des dessins d'une obscénité unes de ses pièces , il mêle les vers et révoltante. La «pudeur n'y est guère la prose : à ce genre bâtard se ratta- che le Panégyrique du chevalier sans {>lus respectée par les femmes que par reproche , Louis de la TrémouiUe. Cette pièce se recommande par l'inté- es hommes.Peut-étre faut- il s'en pren- rêt que présentent quelques détails dre à l'époque elle-même, dont le cynis- historiques. Du reste, Bouchet fut his- me est étalé non-seulement dans des torien ; il écrivit Y Histoire et les chro- livres, mais encore gravé sur bien des niques de Clotaire; les Anciennes et les modernes généalogies des anciens médailles. Puis , à côté de ces quoli- rois de France ; enfin , les Annales d'Aquitaine et Antiquités du Poitou. bets grossiers , de ces plaisanteries in- Dans ces ouvrages, ou se trouvent tant d'erreurs , où se croisent bien des as- décentes, se trouvent çàet là quelques sertions qui prouvent la naïveté de l'auteur et sa bonne foi, beaucoup plus détails curieux d'érudition. Après une ?iue son goût, témoin le passage où il plaisanterie de mauvais goût, on est ait venir les Poitevins de je ne sais quelle colonie troyenne, on rencon- tout étonné de rencontrer les graves tre aussi des détails curieux et positifs noms d'Hésiode , de Périclès, de Dé- 3u'on peut lire avec profit. Bouchet mosthène, de Cicéron. C'est bien là ans ses poésies, nous apparaît comme un homme de bien ; ses histoires nous l'esprit plaisant et sérieux à la fois du font voir en lui un homme crédule seizième siècle. Cette peinture de mais sincère ennemi de tout ce qui n'est pas vrai; qui peut se tromper, mœurs est, sans contredit, le plus mais ne ment pas. C était, de plus, un grand mérite de Séries. Autrement homme instruit, et la variété de ses Bouchet n'avait pas le droit, quoi qu'il connaissances se montre surtout dans en ait dit , de se promettre la posté- rité. Il y a de l'abondance et de la gaieté dans ses dialogues ; mais cette gaieté est travaillée, étudiée ; mais cette abondance dégénère en un bavardage fatigant ; enfin, le désordre de ses pen- sées est beaucoup plus un défaut réel ri* composition que l'imitation adroite des détours capricieux de la conver- sation. Bouchet mourut fort âgé, en 1606. Bouchet (Jean), né à Poitiers, en 1476, montra de bonne heure un vif amour pour la poésie et, au milieu des ; embarras d'une charge de procureur, il ne cessa pas de faire des vers, et il en fit de nombreux. Poète dès vingt ans (car il présenta, en 1*96, quelques produc- Digitized by Google

166 L'UNIVERS. Boi- ses Épitres morales et familières. trai de tomber au pouvoir des Autri- Sort style, en général , ne manque pas chiens dont les traîtres guidaient les d'énergie; mais du reste il a tous les drapeaux. Cet éminent service fut ap- défauts de l'époque , la prolixité, l'ab- précié par la Convention et, dans la ; sence de méthode , et quelquefois l'af- séance du 4 avril 1793, elle l'appela fectation. par un vote unanime à remplacer, Bouchbt (Jean du), né en 1599, comme ministre de la guerre , Beur- mort en 1684, «t auteur dès ouvra- nonville, que Dumouriez venait de li- ges suivants : f 'éritable origine de la vrer à l'ennemi. seconde et troisième lignées de la Jamais administration de la guerre maison de France^ Paris, 1646 et 61, ne fut aux prises avec des circons- in-fol. ; Histoire généalogique de la tances plus solennelles et plus péril- maison de Courtenay Paris, 1661, leuses. Tous les services étaient dé- , in-fol.; Preuves de l histoire généa- sorganisés ; on manquait d'armes et de munitions ; les frontières étaient logique de la maison de Co/igny, entamées sur tous les points; l'insur- Paris, 1662, in-fol.; Table généalo- rection de la Vendée menaçait de dé- gique des comtes d 1 Auvergne, 1665, border la France : Bouchotte , par son zèle, par son activité, aida puissam- m -fol. ; Table généalogique des an- ment le comité de salut public à im- ciens vicomtes de la Marche , Paris, 1682, in-folio; enfin, une édition avec des notes et des additions de VHis- proviser, organiser et approvisionner toire de Louis de Bourbon premier nos armées ; et c'est le nom modeste , de Bouchotte qu'on lisait au bas des duc de Montpensier, par Coustureau, Rouen, 1642 , in-4°. Tous ces ouvra- promotions accordées à des noms il- ges sont précieux à cause des recher- lustres : Masséna, Kléber, Moreau , ches qu'ils contiennent , et des pièces Dugommier, Marceau, Augereau, Le- nombreuses qu'on y trouve. fèvre, Pérignon, Serrurier, Desaix Rouchetel ou Rochetel ( Guil- Abatucci , Bernadotte Bonaparte lui- , laume ) , né dans la province de Berry, même, et plus de quatre-vingts géné- secrétaire du roi François er , fut chargé raux, dont la plupart occupent une I par ce prince, et par* Henri II, de plu- f)lace si brillante dans les fastes mi- itaires. C'est dans les situations diffi- sieurs missions importantes; il mou- rut en 1558. On lui a attribué Y Ordre ciles que s'éprouvent la capacité et le et forme de Ventrée de la reine Eléo- courage : Bouchotte conserva le mi- nore d'Autriche en la ville de Paris, nistère de la guerre au milieu des cir- et de son sacre et couronnement à constances les plus graves où jamais Saint-Denis, le 5 mars 1510. Cet ou- nation se soit trouvée; il l'exerça avec vrage a été publié en 1532. fermeté,prudence et dévouement, un an Roue hotte (*) (Jean-Baptiste-Noël) entier, jusqu'au er 1794, époque 1 avril naquit à Metz en 1754. Entré, à l'âge à laquelle , dans le but de concentrer de seize ans, dans la carrière militaire, davantage l'action gouvernementale, il était lentement arrivé au grade de les différents ministères furent sup- capitaine de cavalerie lorsque la révolu- primés , et remplacés par des commis- tion éclata. Il ne tarda pas à être élevé au sions exécutives. grade de colonel .La réputation d'ord re, Bouchotte avait pris une part trop de probité et de désintéressement qu'il active à la grande lutte de 1793, pour s'était acquise, appelait déjà l'attention ne pas devenir l'objet de la haine et sur lui. Après la trahison de Dumou- de la calomnie. Les accusations con- riez et de son état-major, il se signala de tradictoires auxquelles il fut en butte nouveau en empêchant la ville de Cour- peuvent faire juger de la justice de ses ennemis. Pendant la terreur, Bou- (*) Cel article est extrait de la notice né- chotte fut accusé d'avoir fait crier : crologique publiée sur ce grand riloyen l'ive le roi, et de favoriser la contre- , révolution. Plus tard, après le 9 ther- daus le National, numéro du 20 juin :84o. Digitized by Google

BOC FRANCE BOU 167 inidor , les réacteurs persécutèrent —Boucicaut. Jean le Maingre Bou- Boucholte comme terroriste ; il pou- cicaut naquit à Tours, en 1364. Sou vait se consoler de partager cette in- ère qui s'appelait aussi Jean le , fortune avec Carnot, RoDert Lindet, Iaingre , fut le premier de la famille Prieur, etc.. Il fut arrêté, détenu qui porta le nom de Roucicaut. Il était Kendant treize mois , et remis en li- maréchal de France lorsqu'il fut choisi erté sur une lettre de l'accusateur comme un des négociateurs du traité public près le tribunal criminel d'Eure- de Brétigny. Le jeune Boucicaut n'a- vait que trois ans au moment où son et-Loire : « Je fais observer, disait ce « magistrat que uulle pièce à charge père mourut. Charles V, vers la fin de , « ne m'est parvenue, et que je ne puis son règne, l'appela tout jeune encore « mettre en jugement un citoyen con- pour le placer auprès de son fils, le « tre lequel il est impossible de baser dauphin, qui fut depuis Charles VI. Il « un acte d'accusation. » On poussa était âgé de douze ans à peine lors- l'acharnement contre Bouchotte jus- 3u'il lit sa première campagne. Le qu'à jeter des doutes sur sa probité uc de Bourbon lui donna des armes et à l'accuser d'être reliquataire de et l'emmena à sa suite en IVorman- plusieurs centaines de millions envers die où il allait faire la guerre aux l'État. Mais le désintéressement de Anglais. Il servit alors sous Dugues- Bouchotte se révélait par des faits clin, le duc de Bourbon et le duc de trop éclatants pour que de pareilles Bourgogne. Boucicaut, qui avait étu- accusations pussent porter atteinte à dié autant qu'un jeune homme de sa renommée. Colonel à son entrée au bonne famille pouvait le faire à cette ministère , il quitta ses fonctions avec époque, employa les loisirs de la paix le même grade. Jamais ministre ne fit à composer des poésies légères. C'é- de plus nombreuses promotions d'of- taient des ballades , rondeaux ou vi- ficiers généraux et ne songea moins à relets qu'il faisait pour Antoinette de lui-même. ïurenne, dame qu'il aimait éperdu- Rendu à la vie privée, Bouchotte ment et que plus tard il épousa. En se retira à Metz , sa ville natale , et 1382, il suivit le roi Charles VI en ses concitoyens purent juger, par la Flandre, et il assista à la bataille de simplicité de sa vie et par la médio- Rosebecq. Dans cette bataille il poi- crité de sa fortune, si, durant son gnarda, dit-on, de sa propre main, un ministère, il fut plus préoccupé du ennemi qui se distinguait de tous les soin d'augmenter son patrimoine que autres par sa force et sa haute sta- de s'avancer dans la carrière militaire. ture. Sa passion pour les armes l'en- IVous doutons que l'homme qui fut traîna bientôt hors de France , et il jugé digne par la Convention detre à alla au secours des chevaliers de l'or- la tête de l'administration de la guerre, dre teutonique qui combattaient con- au moment des plus grands périls de tre les barbares du Nord. Puis , il la patrie, ait réuni les conditions de rentra dans son pays où il accompa- fortune exigées depuis pour être élec- gna dans le Poitou et la Guienne le teur. Bouchotte mourut à Metz , en duc de Bourbon qui l'avait fait son 1840. Souvent persécuté, méconnu, lieutenant. Il se distingua alors dans oublié, il supporta tout avec la ré- plusieurs combats singuliers qu'il sou- signation d'un sage, et ne varia, à tint contre des Anglais. Charles VI aucune époque de sa vie, dans son at- lui donna d'abord une compagnie de tachement aux principes de la révolu- cent hommes d'armes, et le lit ensuite tion. Bouchotte a joué un rôle impor- maréchal de France. Boucicaut n'a- tant au milieu de la génération forte vait que vingt-cinq ans. Dans l'année et héroïque à laquelle nous devons 1390, il fit partie de cette troupe de notre civilisation et notre puissance. chevaliers français qui allaient défen- Il mérite d'avoir une place dans les dre le roi de Hongrie contre les atta- souvenirs de la patrie. ques du sultan Bajazet. Ses compa-

108 L'UNIVERS. gnons , parmi lesquels se trottait le douze cents hommes environ, dans comte de Nevers, qui fut depuis Jean Brescia. Les Autrichiens le forcèrent sans Peur, duc de Bourgogne , le choi-J de capituler , et il fut fait prisonnier sirent pour chef de l'expédition. Dans avec sa troupe. Nous ignorons ce que la désastreuse journée de Nicopolis , il Boucret devint depuis cette époque. devint prisonnier de Bajazet. Il se Boudit (Antoine), né à Lyon, im- racheta , et contribua puissamment à primeur-libraire à Paris, mort en 1789. rendre la liberté au comte de Nevers On lui a attribué un Recueil des sceaux en réduisant par ses habiles négocia- du moyen dae, avec det éclaircisse- , tions, la somme qui devait servir de ments, publié en 1779, in-4°. Il fonda, rançon à l'illustre prisonnier. En 1400, en 1745, une nouvelle collection des Boucicaut revint en Orient pour dé- Affiches de Paris, des provinces et fendre, encore contre Bajazet , l'em- dès pays étrangers. pire de Constantinople. Mais l'invasion Boudevillb caporal à la 14* de , de Tamerlan délivra l'empereur Ma- ligne , né dans le département de nuel de son plus redoutable ennemi, et Seine-et-Oise. L'armée française at- le maréchal rentra en France. Il ar- tendait sous les armes le choc d'une riva , vers cette époque , qu'après une colonne ennemie, le 7 germinal an vu, longue série de dissensions la ville de quand un boulet vient emporter une Gênes se donna au roi Charles VI. En cuisse à ce brave sous -officier : il 1401, Boucicaut fut envoyé pour la tombe ; mais bientôt apercevant les , gouverner. Son administration fut troupes autrichiennes à peu de dis- habile; il donna à Gènes la paix au tance de nos rangs, il se redresse, dedans et la gloire au dehors ; il as- fait deux décharges de son fusil , tue sura son commerce par ses victoires un porte-drapeau , et rend le dernier sur les flottes vénitiennes et par la soupir. crainte qu'il inspira aux corsaires in- Boudier-dk- Vtllem ebt (Pierre- fidèles. Il était gouverneur de Gè- Joseph), avocat au parlement de Pa- nes depuis dix ans lorsqu'il repassa ris, a publié un assez grand nombre les Alpes. En 1415, Boucicaut as- d'ouvrages, dont le plus estimé, VAmi sista à la bataille d'Azincourt. Fait desfemmes, 1 758, in-1 2, a été traduit en prisonnier, il fut conduit en Angle- plusieurs langues. Boudier est mort au terre où il mourut en 1421. Son commencement de ce siècle. corps fut rapporté au lieu où il avait Boudièbb (François) , soldat , né pris naissance et placé derrière le dans le département de la Charente- chœur de l'église de Saint-Martin de Inférieure, se jeta, pendant la bataille Tours. de Marengo , au milieu d'un parti de Boucbet (N.) , général de division cavalerie , pour en arracher son offi- de l'armée républicaine , fut employé cier, qu'il parvint à dégager, après en 1793 dans la Vendée, et combattit avoir tué un hussard qui se disposait à Antraim et à Angers. Le général à le sabrer. Boucret commandait à Belle-Ile-en- Bol dot (Jean), imprimeur, qui s'est Mer en 1795. L'amiral anglais Waren fait une sorte de célébrité en publiant le somma de rendre la place, en en 1704 un Dictionnaire latin-fran- l'assurant qu'il était autorisé , par çais qui a longtemps été en usage , Louis XVIII , à lui promettre pro- dans nos écoles. Ce n était cependant tection et récompense , s'il voulait la qu'un abrégé d'un Dictionnaire ma- ylivrer, ai des vivres et de l'artille- nuscrit, en 14 vol. tf , composé par in-4 rie* répondit-il; plutôt que de remettre Jean-Nicolas Blondeau inspecteur de , Belle-Ile je m'ensevelirai sous ses rui- —l'imprimerie de Trévoux. Boudot nes. Waren frappé de cette réponse mourut à Paris en 1706. Son (ils , énergique , se retira. Le général Bou- aîné qui porta le même nom que lui, , cret, qui lit la campagne de 1799 , en et exerça aussi la profession d'impri- Italie , se trouvait , le 20 juin , avec meur , est connu comme un des plus Digitized by Google

BOC FRANCE BOIT 169 —savants bibliographes du dix-septième toise, Paris, 1511 et 1514, io-4*. La Vie de Raymond Lulle contient des siècle. Son second fils, labbé Bou- i>ot (Pierre-Jean), fut aussi un biblio- détails intéressants. Proverbiorum graphe distingué , et rédigea avec vulgariorum libri très, Paris, 1531, l'abbé Sallier les catalogues de la bi- in -8° : ce livre, où les proverbes sont bliothèque du roi. Il publia en 1768, en français, et leur explication en latin, en société avec L. F. C. Marin , la Bibliothèque du Théâtre-Français, est très-recherché. Liber de differen- tia vulgarium Unguarum et gallici Dresde-Paris , 3 vol. in-8° , ouvrage sermonis varietate, Paris, Robert longtemps attribué au duc de la Val- Etienne, 1533, in-4°. lière. En 1755, il avait fait paraître un Essai historique sur l'Aquitaine, Bouetti de Blemub (Jacqueline), religieuse bénédictine de Caen, née i ii-8° de trente-deux pages ; et dix ans dans cette ville, en 1618, morte en après , en 1765 , un Examen des ob- 1696, a publié l'Année bénédictine* j cet ion s jaites à l Abrégé chronologi- que de l'Histoire de France, in-8°. ou Fies des Saints de l'ordre de Saint- L'auteur de l'article qui lui est con- Benoit pour tous les jours de l'année , 1667-73, 7 vol. in-4°, et plusieurs ou- sacré dans la Biographie universelle vrages ascétiques, assez remarquables lui attribue à tort l'ouvrage même du sous le rapport du style. président Hénault. L'abbé Boudot Bouffabick (défilé de), situé au mourut à Paris en 1771 ; il était né centre de l'outhan ou district de Beni- dans cette ville en 1689. Khalil, sur la route d'Alger à Belida. Boue (Jean-Baptiste), lieutenant au On y arrive par le pont d'Oued el Ker- nta.\" Le maréchal de Bourmont, pen- 57 e régiment de ligne, né à Saint- AGirons, Ariége. l'affaire qui eut dant son expédition de Belida, tra- lieu le 20 décembre 1794, à Bagnol, versa le premier ce défilé, que de un bataillon de la 57 e demi-brigade nombreux combats ont rendu depuis ayant été obligé de céder à des forces si célèbre. supérieures, Boué, alors sergent, se Bouflers, terre et seigneurie dans jeta à la mer pour sauver le drapeau le Beauvoisis, à 9 kilomètres de Beau- qu'il portait, et le mit en pièces pour vais, érigée en comté en 1640, en qu'il ne tombât pas au pouvoir des marquisat, puis en duché en 1695. Espagnols. Le 30 mai 1803, il fut ré- Bouflebs (maison de). Cette an- compensé par un sabre d'honneur. cienne famille, originaire de Picardie, Parvenu au grade d'oflicier, Boué, gui remonte à Bernard, seigneur de Bou- était entré au service en 1792, a fait flers, Morlai et Campi^neulles, qui vi- vait en 1133. Après lui nous citerons avec honneur toutes les guerres de la révolution, jusqu'en septembre 1813. Guillaume de Morlai, seigneur de Bouelles , Bouilles ou Bouvel- Bouflers, qui, en 1239, suivit, avec son les, en latin Bovillus (Charles de), fils Ilenri,\\t roi saint Louis à la croisade. chanoine et professeur de théologie à Guillaume II, fils de Henri , accompa- gna, en 1266, Charles d'Anjou à la Novon, auteur de plusieurs ouvrages recherchés des curieux, pour leur sin- conquête de Naples, et se distingua à gularité, était né à Sancourt, près la bataille de Bénévent. Son petit-fils, Ham, Picardie, en 1470; il mourut à Aleaume er se signala à la bataille I, Noyon, vers 1553. Les plus curieux de Mons en Puelle, en 1304. Aleau- de ses ouvrages sont les suivants : Li- me\\\\, petit-fils d'Aleaume er combat- I, ber de inteuectu , de sensu , de nihi- tit courageusement les Anglais à h; .4rs oppositorum ; De gêner atione; Azincourt, où il fut fait prisonnier. De sapiente; etc.... Paris, Henri Dans les guerres des Armagnacs et des Bourguignons, la famille de Bou- Etienne, 1510, in-fol. Commentarius in primordiale Evangetium Joannis; flers se prononça pour ces derniers. Fila Remundi eremitœ (Raymond David, fils du précédent, se trouva Lulle); Philosophicœ etHUtoricxepis- dans 1 armée qui assiégea Paris sous

KO BOU L'UNI ERS. BOU lesordres de Jean sans Peur. Pierre II, C'est pendant le cours de ces campa- gnes qu'il obtint le grade de lieutenant son frère, fut député par le duc Phi- général. De 1688 à 1697, il servit en- core avec éclat sur le Rliin, dans les lippaleBon à Charles VII pour traiter Pays-Bas, et acquit la réputation;d'un de la paix qui fut conclue à Arrns. De- habile tacticien. Il avait été fait maré- chal de France en 1693. Pendant la puis cette époque, Pierre de Bouflers guerre de la succession d'Espagne, il se montra l'un des plus zélés défen- commanda, dans les Pays-Bas espa- gnols, l'armée de Flandre, arrêta les seurs de la France contre les Anglais, ennemis en remportant, en 1703, sur les Hollandais, la victoire d'Ekaren, se qu'il força de lever le siège de Dieppe, renferma à Lille, menacé par le prince Eugène, après la perte de la bataille et auxquels il enleva Gerberoi en d'Oudenarde, et fit toutes les disposi- tions nécessaires pour une vigoureuse 1449. Il aida ensuite Charles VII à défense. Cette place fut investie le 12 prendre Falaise et à soumettre toute août ; il ne la rendit que le 25 octo- bre pour se renfermer dans la citadelle, la Normandie. Après l'expulsion des où il se défendit jusqu'au 11 décembre- Airgjais, il servit, comme vassal, les Cette héroïque défense valut au ma- réchal de Bouflers le titre de duc et ducs de Bourgogne contre les Gantois pair. Peu après, il se trouva à la ba- taille de Malplaquet sous le maréchal (1453), et deux de ses fils périrent de Villars. Il commanda l'aile droite où il fut vainqueur, et remplaça Vil- avec le Téméraire à la bataille de lars après que celui-ci eut été Dlessé. Obligé de céder le champ de bataille, Nancy (1477). Jacques I\", son fils, se Bouflers fit une retraite admirable, pendant laquelle il enleva 30 dra- distingua à la première bataille de peaux à l'ennemi. Ce fut son dernier exploit; il mourut le 22 août 1711, à Guinegate. Adrien er fils de celui-ci, Fontainebleau, âgé de 68 ans. I, Son lils, Joseph-Marie\\ duc de Bou- parut avec honneur dans toutes les ba- flers, naquit en 1706. Il se distingua tailles de son temps, et surtout à Pa- par ses talents militaires pendant les vie ; il avait commencé à servir en guerres du règne de Louis XV; il 1513 et mourut en 1585. Son fils, était maréchal ae camp à la retraite de Adrien II, se distingua dans les guer- Bohême et à la bataille de Dettingen. Devenu lieutenant général, il se trouva res- de religion : il se trouva aux jour-, aux batailles de Fontenoi, de Rau- coux , et fut ensuite chargé de com- nées de Saint-Denis, de Montcontour, XVmander les troupes que Louis md'Auneau, et pendant la ligue resta fi- dèle à Henri et à Henri IV ; il mou- envoyait au secours de la république de Gènes, attaquée par les Impériaux. rut etu 1622. Son frère Louis était sur- Il mourut dans cette expédition le 2 . tout célèbre par sa force musculaire; juillet 1747. il- enlevait de terre un cheval et le .Bouflers (Stanislas de) , né à Lu- néville en 1737. Il fut un des hommes portait dans ses bras. Nul ne pouvait J'esprit que goûta le plus la brillante ut frivole société du dix-huitième siè- lutter contre lui. Il sautait tout armé cle. Il avait ét^ élevé à la cour que te- nait en Lorraine le. roi Stanislas, cet sur son cheval sans se servir de l'é- hôte aimable et bon des poètes et des trier, et courait plus vite qu'un cheval d'Espagne. Ce vigoureux gentilhomme fut tué d'un coup d'arquebuse en 1563,, à l'âge de 19 ans. François er fils I, d'Adrien II, se trouva au siège de Ca- saleet de Trêves, et mourut en 1670. Lovis- François , duc de Bouflers, son arrière* petit-fils, naquit le 10 jan- vier 1644. Il fit ses premières armes au siège de Marsal, 1663, sous le nom de chevalier de Bouflers , servit tour a tour sous Condé, Turenne, Créqui, Luxembourg et Catinat, prit part a l'expéflition de Gigeri, en 1664; fit avec Turenne la campagne de 1672, eut, de l'aveu de ce grand homme, la meilleure part au gain de la bataille de Ensheim (1673), et se distingua dans toutes les campagnes d'AÎlema.- gne, depuis cette année jusqu'en 1678. Digitized by Google

BOC FRANCE. bou 171 philosophes à la mode. Sa mère, fem- trastes ne manquent pas dans cette vie. - Voilà le brillant auteur de tant de ma- me remarquable par sa beauté et son drigaux, le bel esprit fêté des plus élé- gants salons de l'époque transporté esprit, était la reine de cette rour si souvent célébrée par Voltaire. Le , jeune de Bouliers fut le protégé de Stanislas, qui lui assura en Lorraine sur une plage barbare et dirigeant une un bénéfice de quarante mille livres, colonie. Il y avait plus d'une raison pour que Bouliers fut un mauvais gou- madame de Bouflers ayant destiné, verneur; mais il montra dans cet em- ploi beaucoup de zèle et d'intelligence Félon l'usage, son fils cadet a l'état administrative. Il s'honora par son ecclésiastique. C'était, de tous les humanité envers les esclaves v dont il états, celui auquel il était le moins délivra un grand nombre, et qu'il dé- propre. Il le prouva bien en compo- fendit contre la cruauté des traitants. sant, au séminaire Saint-Sulpice, son Il forma des projets de voyages scienti- conte A'^1line ou la reine de Golconde, fiques dans 1 intérieur de l'Afrique, et ouvrage d'un esprit vif et galant, et envoya au ministère des plans bien conçus dont l'exécution eut été fé- d'une imagination voluptueuse. Au conde en heureux résultats. Cepen- dant cet exil commençait à être insup- reste, dans le temps, où il vivait, une portable au chevalier. Il fut rappelé pareille fantaisie cliez un séminariste en France et revint à Paris pour être n'était pas un scandale, et ne l'aurait pas empêché de rester dans l'église et reçu à l'Académie. On était en 1789. d*y faire son chemin : mais il se dé- goûta lui-même de cette profession. Il Eiî voyant cette date , on s'aperçoit n'y tenait plus qu'à cause du bénéfice que Bouflers aurait dû naître trente de quarante mille livres. Pour le con- ans plus tôt dans le dix-huitième siè- server en quittant la robe, il se fit cle. N'est-ce pas un contraste cho- chevalier de Malte, et ayant endossé quant de le voir siéger dans l'assem- l'habit bleu de l'ordre, il alla faire la blée constituante et prendre part aux guerre dans la Hesse, en 1761. Dans graves débats soulevés par la généra- la société de gentilshommes qui s'y tion nouvelle? De quelque manière trouvait réunie, il se distingua par sa qu'on juge l'émigration on aime mieux belle humeur, ses folles plaisanteries, le voir s'en aller rejoindre à l'étranger ses débauches et ses petits vers. Il se les débris d'une société à laquelle tout mit ensuite à voyager et courut par le rattachait, et accepter un asile à la la Suisse et l'Allemagne, se livrant, à cour du roi de Prusse, auquel d'ailleurs la faveur de l'incognito, à mille folies, il donna de sages conseils sur la poli- courant après les belles et emportant tique à suivre à l'égard de la révolu- de tous les lieux où il s'arrêtait, des tion française. Pourquoi Bouflers ne lettres d'amour et des portraits qu'il resta-t-il pas dans cette retraite, ou du avàît dessines lui-même. Car, pour moins pourquoi , à son retour en parler le langage du temps, il maniait France, vint-il solliciter avec un em- le crayon non moins que la lyre. Dans pressement qui allait bien mal à ce ses courses en Suisse, il vit Rousseau et s'arrêta quelque temps chez le vieux spirituel et noble seigneur d'autrefois, Voltaire, qui tourna pour lui en vers les faveurs du premier consul ? N'est- un de ses plus jolis compliments, et il pas triste de voir sous l'empire l'in- dont il grava le portrait a l'eau forte. génieux ami de Voltaire demander une En 1771, le chevalier retourna à l'ar- préfecture, et la demander en vain? mée: toujours ami du plaisir, toujours étourdi et prodigue, il acheva de dis- Au reste, la légèreté de Bouflers, que siper son m'en, et plusieurs années après, ses affaires étaient dans le plus les années n'avaient pas diminuée, mauvais état. Ce fut afin de pouvoir se tirer d'embarras, qu'il accepta la place l'empêchait de sentir ce qu'il y avait de gouverneur du Sénégal. Les con- de malheureux dans ces disparates de sa vie. Il se consola de l'état fort hum- ble où le laissait l'indifférence du pou- voir nouveau, en faisant de petits vers Digitized by Google

17* BOU L'UNIVERS. BOir qui n'excitaient plus les mêmes applau- tations savantes dont il est auteur. dissements qu'autrefois, mais qu'on écoutait encore avec plaisir, même Bougainyillb (Louis-Antoine de), dans le salon de madame de Staël, où frère du précédent, naquit à Paris , le il était reçu , parce que, après tout 11 novembre 1729. Après de bril- l'esprit plaît toujours et n'est jamais dédaigne que par la grossièreté ou la lantes études , il se fit , pour se con- former aux vœux de sa famille , rece- sottise. Un instant, sans doute à cause voir avocat au parlement. Mais sa du retour que les vicissitudes de sa vocation pour l'état militaire, vocation vie devaient lui faire faire sur lui- qui s'était déjà manifestée par ses même, Bouliers eut envie d'être grave. Il composa dans sa vieillesse un traité succès dans l'étude des sciences ma- du Libre arbitre, que peu de gens ont lu parce qu'il est fort ennuyeux. Cet thématiques, l'emporta bientôt. Peu effort n'eut pas de suite, et , dans ses de temps après, il fut reçu dans les derniers jours, Bouder s fut ce qu'il avait toujours été , un esprit frivole mousquetaires noirs , et entra , en Ïiquant et aimable. Il mourut en 1815. 1753, en qualité d'aide-major, dans le I y a une foule de vers charmants dans ses poésies , où l'on peut blâmer Enbataillon provincial de Picardie. d'ailleurs trop de jeux de mots , de 1754 , il devint aide de camp de Che- fleurs, de fadeurs et d'antithèses. Ce- vert, et fut la même année envoyé à pendant, après tout, il n'y aurait pas tant à rabattre des éloges que lui don- Londres, avec le titre de secrétaire nait Voltaire. Outre ses poésies fugiti- ves, on a de lui des lettres à sa mère d'ambassade. Deux ans après, il partit sur son voyage en Suisse, le Cœur, poème èrotique avec réponse de Fol- pour le Canada , en qualité d'aide de taire, un éloge de l'abbé Barthélémy et camp du marquis de Montcalm qui des contes. , Bouffons. Voyez Fous. venait d'être chargé de la défense de Bougainville (Jean-Pierre de), né à Paris, en 1722, fut admis , en 1745, cette colonie. Nommé, l'hiver suivant, à l'Académie des inscriptions , dont il commandant d'un détachement d'élite, devint secrétaire deux ans après , et à il alla, à la suite d'une marche forcée de l'Académie française , en 1754. Il près de soixante lieues, brûler au fond mourut à Loches , en 1763. On a de lui : une Traduction de l'Anti - Lu- du lac du Saint-Sacrement, une flottille crèce du cardinal de Polignac, en 2 vol. anglaise, au pied même du fort qui la in-8°, et en 1 vol. in-12; Parallèle de protégeait. Le 6 juin 1758, un corps l'expédition de Thamas Koulikhan dans les Indes, avec celle d'Alexan- de cinq mille Français se trouvait dre , 1752, in-8°; Droits des mé- poursuivi par une armée anglaise de tropoles grecques sur les colonies, vingt-quatre mille hommes ; Bougain- et les devoirs des colonies en- ville ouvrit et fit adopter l'avis d'at- vers leurs métropoles, Paris , 1745, in-12. C'est cet ouvrage qui lui avait tendre l'ennemi de pied ferme. En ouvert les portes de l'Académie des inscriptions, dont il devint plus tard moins de vingt - quatre heures un secrétaire perpétuel. Il a, en cette qualité , publié les Mémoires de cette camp retranché fut construit, et l'en- société savante, depuis le tome XVII fc nemi renversé fut oblieé de se re- jusqu'au XXIV e . Ces huit volumes con- tirer, après avoir perdu six mille tiennent un grand nombre de disser- hommes. Bougainville avait été blessé à la tête, à la fin de la dernière ac- tion. Le gouverneur , ne croyant pas pouvoir défendre plus longtemps la colonie, l'envoya demander des ren- forts à Paris. Bougainville retourna en Amérique, en 1759, avec le grade de colonel , mais sans avoir obtenu les secours qu'il demandait; et, le 10 septembre de la même année , la mort de Montcalm décida du sort de la colonie. Bougainville revint alors en Europe, et fut employé, en 1761, à l'armée d'Allemagne, en qualité d'aide de camp du général Choiseul-Stain- ville. Il s'y distingua tellement, que, Digitized by Google

BOU FRANCE. BOC 173 pour le récompenser d'une manière toujours cultivées , même pendant ses toute particulièrev leroilui fit présent expéditions militaires. La société royale de deux canons. La signature de la paix de Londres l'avait admis au nombre de le fît rentrer dans la vie civile ; mais ses membres, en 1755; il fut appelé, en son infatigable activité eut bientôt 1796, dans la section de géographie de besoin d'un nouvel aliment. Ses voya- l'Institut, et nommé quelque temps ges d'Amérique l'avaient mis en rela- après membre du Bureau des longi- tion avec dés armateurs de Saint- tudes. Il fit partie du sénat , lors de Malo ; il les engagea à aller fonder la création de ce corps , et mourut un établissement aux îles Malouines. en 1 81 1 , dans sa quatre-vingt-neuvième Ses conseils furent suivis ; les arma- année. teurs firent les frais de l'expédition Bougeant (Guillaume-Hyacinthe), ; il fit ceux de l'établissement, dont le né à Quimper, en 1690, entra de bonne roi lui donna le commandement, avec heure chez les jésuites , et professa le grade de capitaine de vaisseau. successivement les humanités et la Bougainville partit de Saint-Malo avec rhétorique dans plusieurs de leurs col- sa petite flotte, en 1763, mais à peine lèges. On lui doit un assez grand était-il de retour, que les Espagnols nombre d'ouvrages ; son Amusement réclamèrent la propriété des îles Ma- philosophique sur le langage des bê- louines. Le gouvernement français tes, Paris, 1739, in-12 , fit .beaucoup de bruit à l'époque où il parut: il fut crut devoir céder à cette réclamation, et Bougainville fut chargé de remet- plusieurs fois réimprimé et traduit en tre son établissement aux employés anglais et en allemand ; mais il lui at- tira de nombreuses vexations de la esgagnols, qui devaient lui rembour- ser les frais qu'il avait faits. Il partit, part de ses supérieurs, qui le punirent en 1766 , avec la frégate la Boudeuse Sar un long exil, de cet agréable ba- et la flûte VÊtoUe. C'est en revenant inage. Lors même que le P. Bougeant de cette expédition qu'il fit ce beau ne serait auteur que de ce seul ouvrage, voyage de découvertes qui a immor- on devrait encore le regarder avec rai- talisé son nom. De retour en France, son comme un des plus élégants écri- en 1769, il publia la relation de son vains du dix-huitième siècle; mais on Voyage autour du monde. Ce livre, lui doit en outre des productions d'un qui parut en 1771, 1 vol. in-4*, et fut ordre plus élevé, et qui sont pour lui réimprimé Tannée suivante, en 2 vol. des titres plus durables au souvenir et in-8°, eut un succès immense ; mais à l'estime de la postérité. Nous vou- déjà Bougainville s'était fait connaître lons parler de YHistoire du traité de comme savant et comme écrivain, par fVestphalie, 1744,2 vol. in-4°, et de son Traité du calcul intégral , pour l' Histoire des guerres et des négocia- servir de suite à Vanalyse des infi- niment petits , du marquis de l'Hos- tions qui ont précédé ce traité, Paris, pital, Paris , 1752, 2 vol. in-4°. Il fut 1727, B Ces deux histoires, quoi- Sromu, en 1779 , au grade de chef in-4 . 'escadre, et l'année suivante, à celui que l'on puisse encore leur adresser de maréchal de camp des armées de quelques reproches , sont regardées comme les meilleures qui aient été com- posées par un membre de l'ordre des terre. Il fut chargé, en 1790, du com- jésuites. Elles ont été plusieurs fois mandement de l'armée navale de réimprimées. Le P. Bougeant mourut Brest, et du soin d'y rétablir la dis- à Paris , en 1743. On dit que les per- cipline. Mais il jugea bientôt cette sécutions dont il fut l'objet , à l'occa- partie de sa mission au-dessus de ses sion de son Amusement philosophi- forces, et il donna sa démission. Il que, abrégèrent ses jours. avait servi son pays avec un grand Bougerel (Joseph), oratorien, né à éclat, pendant près de quarante ans Aix, en 1680, mort à Paris, en 1763, ; les dernières années de sa vie furent est auteur des ouvrages suivants : Mémoires pour servir à f histoire de consacrées aux sciences, qu'il avait Digitized by Google

174 BOU L'UNIVERS. plusieurs hommes illustres de Pro- les Français par leur présence : on ré- solut de les chasser. Le 12, ces posi- gence, Paris, 1752, in-12; Idée géo- graphiqueet historique de la France, tions inaccessibles, et dans lesquelles pour Cinstruction de la jeunesse, Pa- ris, 1747. 2 vol. in-12; f ie de Cas- l'ennemi se croyait à l'abri de tout dan- se?idi, Paris, 1737, in-12; Lettre sur Pierre Puget, sculpteur, peintre et ger, furent enlevées à la baïonnette. architecte, 1752, in-12. 11 a laissé en manuscrit une Bibliothèque des écri- Le 1\" novembre, à la sollicitation du vains de VOratoire . 2 vol. in-4°. bey de Constantine, les Arabes firent Tous ces ouvrages , fort recomman- dâmes éous le rapport des recherches une nouvelle attaque contre Bougie, et de l'érudition , sont , en général, mais ils furent repoussés. Depuis lors, écrits d'un style lourd et incorrect. les Arabes de la plaine se soumirent à Bouges (le P. Thomas), religieux la France , et sauf quelques attaques augustin de la province de Toulouse, des montagnards, la paix ne fut plus né en 1667, mourut en 1741. On lui troublée. doit, outre plusieurs ouvrages de théo- Boigouine (Simon), valet decham- logie , une Histoire ecclésiastique et civile de la ville et f/u diocèse de Carcas- bre de Louis XII, est auteur de plu sonne, avec les pièces justificatives et une notice ancienne et moderne de ce sieurs ouvrages qui doivent tout leur diocèse, Paris, 1741, in-4°. Cette his- toire, qui est recherchée, s'arrête en prix à la date et à la beauté de leur 1660. . impression. Le plus rare et le plus re- Bolgi e (Boudjeiah), port de PAlgé- cherché est celui nui a pour titre : rie, dans la province de Constantine, à 10 myriamètres E. d'Alger, à l'ouest VHomme juste et l'homme mondain, d'un golfe assez étendu, possédant une rade spacieuse et abritée, etoffrant une avec le jugement de Vûme dévote. Pa- relâche sûre. Cette place, qui nous as- ris, Ant. Vérard, 1508, in-4°. sure la possession des côtes orientales de l'Algérie, appartient à la France de- Bougueb (Pierre), l'un des géomè- puis 1833. Le 22 septembre 1833, une flottille sortit du port de Toulon ; elle tres qui se sont le plus distingués dans était commandée par le capitaine Par- les applications des sciences du calcul, seval-Deschênes, elle portait dix-huit naquit en 1698, au Croisic (Loire- cents hommes de débarquement, com- Inférieure). Son père, qui était pro- mandés par le général Trézel. Arrivée, fesseur d'hydrographie perfectionna le29,devant la plagede Bougie, elle fut , reçue à coups de canon : le feu supé- rieur des bâtiments eut bientôt éteint ses dispositions naissantes pour les celui de l'ennemi, et le débarquement s'effectua. Favorisés par un terrain sciences exactes; mais Bouguer eut coupé de rav ins et couvert de bois, les Arabes résistèrent avec acharnement. bientôt dépassé son maître, et rem- 11 fallut sept jours de combat pour les chasser de la ville, qu'ils disputèrent porta, en 1727, le prix fondé par maison à maison. Enfin , le 6 octo- l'Académie des sciences pour un Mé- bre , Bougie était purgée de tous les en- nemis, et mise sur un bon pied de défen- moire sur la mâture des vaisseaux; se. Cependant, les Arabes, campés sur les montagnes qui dominent la ville cette compagnie se l'associa en 1731. ne cessaient de menacer et d'inquiéter Il fut choisi , en 1736, avec Godin et de la Condamine, pour aller au Pérou déterminer la ligure de la terre. A son retour, Bouguer publia les résultats de ses opérations dans un savant ou- vrage intitulé : Théorie de la figure de la terre; Paris, 1749, in-4°. Sa Relation du voyage au Pérou se trouve dans les Mémoires de VAcadémie des sciences de l'année 1744. Elle est écrite avec moins d'éléçance que celle de la Condamine; mais elle est peut-être plus exacte. Bouguer travaillait beau- coup et avec peine : aussi ses ouvrages lui étaient si chers qu'il tenait plus à , leur réputation çju'à sa propre existence. Cette sensibilité extrême ae son amour- propre lui causa une foule de chagrins auxquels il succomba à l'âge de soixan- Digitized by Google

BOC FRANCE. 175 te- trois ans, en 1758. On a de lui plu- magistrat , le président Hénault. A sa sieurs ouvrages , outre ceux que nous mort , arrivée en 1746 , il eut pour suc- cesseur Voltaire, qui, dans son dis- avons cités. Les principaux sont : la cours de réception , disait de lui, « qu'il Construction du navire , 1746, in-4°; « faisait ressouvenir la France de cas Traité efoptique sur la gradation de « temps ouïes plus austères magistrats, fa lumière, 1760, in 4°; la Manœuvre « consommés comme lui dans l'étude des vaisseaux , 1757, in-4°; Traité « des lois , se délassaient des fatigues de la navigation, 1753 , in-4°. De la « de leur état dans les travaux de la Caille en a publié, après sa mort , une « littérature ; » et l'abbé d'Olivet, ré- pondant à Voltaire, ajoutait encore à Unseconde édition in-8°, etc. de ses cet éloge en disant : « Pendant que je principaux titres de gloire consiste • parle de talents universels et de con- « naissances sans homes , il est diffi- dans I invention de Y héliomètre, ins- « cile qu'on ne se rappelle pas l'idée de trumenta l'aide duquel on mesure de « votre prédécesseur. Ce fut un savant « du premier ordre , mais un savant petits angles avec une extrême préci- « poli , modeste , utile à ses amis , à sa « patrie, à lui-même. » Et ces louanges sion. C'est avec un héliomètre que sont loin d'être exagérées. On a peine *M. Bessel est parvenu à déterminer, à comprendre aujourd'hui les nobles pour la première fois , la distance si et laborieux loisirs de tous ces savants magistrats dont la France s'honore à longtemps inconnue d'une étoile fixe bon droit ; et on est surtout frappé d'étonnement à la vue des immenses à la terre ; nous pouvons donc reven- travaux du président Bonbier. Tout diquer, pour la mémoire de Bouguer, en remplissant avec une grande exac- titude les importants devoirs de sa une part dans l'honneur de ce beau charge, il trouvait le temps d'entrete- nir avec l'illustre Montfaucon une sa- résultat scientifique. vante correspondance, de composer Bouhier, ou Lantenât, marquisat ses excellents travaux critiques sur Cicéron , de les défendre contre Fro- en Bourgogne, à dix kilomètres ouest mageot dans la Lettre de maître ***, de Dijon. - bedeau de funiversité de***, à M. ***, docteur régent en la même université Bol hier ( Jean ) , président à mortier au iparlement de Dijon, ( 1738); il publiait des dissertations membre de l'Académie française , na- critiques et historiques , des recher- quit à Dijon le 16 mars 1*673. Son ches sur Hérodote, des traités sur père, conseiller au parlement de cette plusieurs points d'antiquités, et des antiquités de la Gaule eu particulier ; ville, le destina à suivre la même car- il expliquait des marbres antiques, traduisait en vers français le poème rière , et dirigea de bonne heure ses de Pétrone, un livre de Virgile, des études vers ce but. Doué d'heureuses épitres d'Ovide , des odes dllorace et d'Auacréon , des épigraroœes de Mar- dispositions que soutenait son aptitude tial, composait des mémoires sur la vie et les ouvrages de Montaigne, édi- au travail, Jean Bouhier à d'excel- tait le Supplément au journal de l'É- lentes études classiques joignit la con- toile, qu'il avait retrouvé daus les manuscrits de sa riche et précieuse naissance de plusieurs langues étran- bibliothèque. Nous ne parlerons pas d'une foule de traités particuliers de gères, de l'italien, de l'espagnol , et jurisprudence, dont un donna encore même de l'hébreu. Après avoir fait son droit à Orléans, il fut, en 1692, à l'âge de dix-neuf ans, reçu conseiller au parlement de Bourgogne ; et onze ans après, en 1704, il eu devint pré- sident à mortier. 11 consacra aux let- tres tous les loisirs que lui laissaient ses fonctions; et il acquit bientôt une telle réputation de science et d'érudi- tion, que l'Académie l'appela, en 1727, à la place laissée vacante par la mort de Malézieu , et qu'elle dérogea en sa faveur à ses reniements, qui exigeaient la résidence à Paris de tous les mem- bres autres que les évêques. Le prési- dent Bouhier fut reçu par un autre Digitized by Google

176 BOU L'UNIVERS. lieu à une vive polémique avec Fro- des jugements mieux motivés. Il s'en mageot; il nous suffira de citer son faut, néanmoins , de beaucoup que les remarquable commentaire sur les cou- tumes générales de Bourgogne , en 2 critiques aient eu raison de dire, comme vol. in-tol. On trouve de lui une foule ils l'ont fait, qn'il ne manquait à l'au- teur, pour écrire parfaitement, que de de lettres et de mémoires dans divers recueils , dans les Mémoires de FAca- savoir lui-même penser. En 1691, il démie des inscriptions, le Journal de donna au public, sous le titre de Pen- Trévoux, le Mercure, les Amamitates litterariœ de Schelhom, la Bibliothè- sées ingénieuses des anciens et des que r aisonnée la Bibliothèque italique, modernes , la partie de ses matériaux qui n'avait pas trouvé place dans son t précédent travail. Cette publication n'eut qu'un médiocre succès. Les Pen- etc. « Jurisprudence , philologie, criti- sées ingénieuses des Pères de l'Église, « que, langues savantes et étrangères, qu'il ut paraître en 1700, pour ré- «histoire ancienne et moderne, his- pondre au reproche qu'on lui faisait de négliger, pour l'étude des auteurs . « toire littéraire , traductions , élo- profanes , celle des écrivains sacrés ne firent que confirmer l'opinion éta- « quence et poésie, il remua tout, dit blie. Ses adversaires qui, il faut le « d'Alembert, il embrassa tout ; il fit dire, ne mettaient pas toujours les procédés de leur côte, renouvelèrent « ses preuves dans tous les genres, et, leurs attaques quand parut la Tra- duction du Nouveau Testament selon « dans la plupart , il fit des preuves la Vulgate, qu'il avait faite en société « distinguées et dignes de lui. » avec ses confrères Letellier et Besnier. Bouhours (Dominique), né à Pa- Comme il voulait s'en venger : « Gar- ris en 1638, entra à seize ans dans la « dez-vous-en bien, lui dit Boileau; ce compagnie de Jésus, professa avec « serait alors qu'ils auraient raison de succès les humanités à Paris et la rhé- « dire que vous n'avez pas entendu le torique à Tours, fut chargé de l'édu- « sens de votre original qui ne prêche cation de plusieurs jeunes gens de fa- • partout que le pardon des ennemis. » milles nobles , puis se lança dans la Nous avons encore de Bouhours, outre carrière des lettres. Ses Entretiens les ouvrages que nous venons de citer, dyAriste et d'Eugène, imprimés en une Histoire du grand maître d'Au- busson , des Fies de saint Ignace de 1671, eurent un grand succès. Ce sont Loyola et de saint François Xavier, six dissertations en forme de dialogues où il compare l'un à César et l'autre sur autant de sujets détachés. La se- à Alexandre, ainsi que divers opus- conde renferme d'excellentes choses cules. Ce jésuite, bel esprit et galant, sur le caractère de notre idiome et affectait de se partager entre le triple l'histoire de sa formation. Quatre ans culte de Dieu, des lettres et des dames. après, Bouhours fit paraître les Doutes Aussi, tandis que d'un côté les cen- sur la langue française, proposés à sures hardies du littérateur et le ton d'autorité dont elles étaient pronon- MM. de CAcadémiefrançaise par un cées lui suscitaient de nombreux en- nemis, de l'autre, la conduite parfois gentilhomme de province. La pensée légère du prêtre donnait à la médi- sance l'occasion de s'exercer largement y est , en général , juste et le style pi- à ses dépens. Madame de Sévigné fut quant. Ménage dit de l'auteur, « qu'un l'objet particulier de ses soins. « L'es- homme qui doutait si raisonnablement prit lui sort de tous côtés, » disait-elle. était bien capable de décider. » On Voltaire a donné à cet écrivain une trouve des observations également ju- place dans son Temple du Goût, où dicieuses , mai3 moins de méthode, dans les Nouvelles remarques sur la il le représente occupé à enregistrer langue française qui parurent l'année suivante. Elles portent , du reste , sur des difficultés grammaticales, dont la plupart ne font plus question aujour- d'hui. Bouhours publia, en 1688, la Manière de bien \"penser dans les ou- vrages d'esprit. On aimerait à trouver dans ce livre plus de fond , et surtout Digitized by Google

BOU FRANCE. BOU nf les négligences qui échappent au gé- nemi. Bouille, nommé alors colonel nie. Bouhours mourut à Paris, en 1702. acheva la campagne en cette qualité, C'est à lui qu'on a attribué ce mot et battit près d'Eimbuck , l'arrière* , original et sans doute apocryphe d'un garde du général Luckner, qui passa agonisant qui veut mourir en gram- plus tard au service de France. Il se mairien : * Je m'en vas ou je m'en distingua à l'affaire de Quedlinbourg; « vais; car l'un et l'autre se disent. » mais, atteint dans une charge d'un Les jésuites se montrèrent très- coup de sabre à la tête, il fut renversé fiers de l'avoir dans leurs rangs : les de cheval et fait prisonnier. Échangé jansénistes écrivirent contre lui et ne peu de mois après, il fut pourvu du laissèrent passer aucun de ses défauts, régiment de Vaston qui prit son , Il est jugé sévèrement, mais justement, nom et le porta jusqu'à la paix. Nom- par Barbier d'Aucour dans les Senti' mé gouverneur de la Guadeloupe , en ment* de Cléanthe ouvrage qui ser- 1768, et brigadier d'infanterie en , 1770, il obtint, en 1777, le gouver- vit de réponse aux Entretiens â'Ariste et d'Eugène, et que font remarquer nement général des Iles-du-Vent. La le goût , le bon sens et le bon stvle. guerre de l'indépendance éclata bien- Bouillabt (dom Jacques'), bené- tôt après; il y prit part, se signala dictin de la congrégation de Saint- d'abord en surprenant la Dominique; Maur, né à Meulan , diocèse de Char- concourut aussi aux tentatives faites très, en 1669, mort à Paris, en 1726, sur Sainte-Lucie, et recueillit les dé- est auteur d'une savante Histoire de bris des colonnes que l'on y avait si imprudemment engagées. Il fut plus Vabbaye de Saint-Germain des Prés, 1724, in-fol. heureux dans l'attaque de Tabago. BouiLLA.UD (Jean), professeur de Promu au grade de maréchal de camp, clinique à la faculté de médecine de le 27 octobre 1778, il s'avança sur Paris , né dans les environs d'Angou- cette île à la tête de quatre mille hom- léme , en 1796, a publié des Éléments mes, culbuta les Anglais , et leur en- de philosophie médicale , 1 vol. in-8°; leva cinquante-neuf pièces de canon, un Traité du rhumatisme, 2 vol. in- Il marcha ensuite sur Saint-Eustache, 8° la Clinique de la Charité , etc. , s'en empara , et restitua aux Hollan- ; 3 vol. in-8° ; et un grand nombre d'ar- dais trois millions de francs que leur ticles dans les Archives de médecine, retenait l'amiral Rodney. L'année sui- dans h Bibliothèque médicale, et dans vante, il attaqua Saint-Christophe, la Bévue médicale. Il a été l'éditeur emporta Briston-Hill , que l'ennemi du Traité des maladies du cœur et regardait comme imprenable; remit des gros vaisseaux, de R. J. Bertin. ensuite à la voile, descendit à Nevis Bouille (François-Claude-Amour, à Montserrat, se rendit maître de ces marquis de ), né à Clusel en Auvergne, îles , et triompha de tous les obstacles en 1739, entra au service dès 1753. Il qu'on lui opposa. Ces services lui va- lit ses premières armes dans le régi- lurent le grade de lieutenant général ment de Rohan-Rochefort , passa en- et l'ordre du Saint-Esprit , dont il fut suite dans les mousquetaires noirs, et décoré le 1 er janvier 1784. Le roi dési- fut nommé, à l'âge de seize ans, ca- rait acquitter les dettes qu'il avait con- fntaine de dragons. C'est en cette qua- tractées pendant la guerre: Bouillé s'y ité qu'il partit pour la guerra.de sept refusa , ne voulant pas faire peser de ans. Il assista à la prise de Rhinfeld , nouvelles charges sur l'État. Mais cet combattit à Bergheim, à Wildengen homme si désintéressé, si généreux, et à Langen-Salsa , où il fut blessé. Il tenait avec obstination aux privilèges contribua ensuite au eain de la bataille de sa caste; il devint intraitable dès de Grunberg, et fut chargé, en récom- qu'on les attaqua. Nommé à l'assem- pense des services qu'il avait rendus niée des notables , il fut inflexible sur dans cette rencontre, d'aller présen- ce qu'il appelait les lois fondamentales ter au roi les drapeaux enlevés à l'en- de la monarchie. De ces fonctions , il T. ni. 12* Livraison. (Dict. encyclop, etc.) 12 Digitized by Google

178 BOU L'UNIVERS. passa à celles de gouverneur des pro- la collection des Mémoires sur la ré- vinces d'Alsace, de Franche-Comté, volution publiée par MM. Berville et J>uis fut nommé général en chef de Barrière. 'armée de Meuse, Sarre et Moselle. Bouillet (Jean) , savant médecin, Ce fut pendant ce commandement né à Servian, près de Béziers, ec 1690, mort dans cette ville, en 1777 , a pu- qu'eut lieu par ses ordres, le massa- blié un grand nombre d'ouvrages , où , l'on reconnaît surtout un excellent cre des soldats du régiment de Châ- teau-Vieux et des habitants de Nancy qui avaient pris parti pour eux. Après praticien. II fut, avec de Mairan, l'un cette exécution. Louis XVI lui offrit des fondateurs de l'Académie de Bé- le bâton de maréchal de France, que ziers, dont , en qualité de secrétaire, Bouillé eut assez de pudeur pour il publia les Mémoires, sous le titre de: refuser. Initié ensuite aux projets d'é- liccueil de lettres , mémoires et au- vasion de Louis XVI, il disposa ses can- tres pièces, pour servir à l'histoire tonnements en conséquence , et atten- de l Académie de Béziers. Béziers , dait l'arrivée du roi à Dun-sur Meuse, 1736, in-4°. U était membre corres- lorsqu'il reçut la nouvelle de son ar- pondant de l'Académie des sciences, restation. Il rassembla aussitôt ce qu'il et l'on trouve de lui, dans le Recueil avait de troupes sous la main, et s'a- de cette société plusieurs travaux , vança sur Va rennes ; mais il n'arriva fort remarquables. pas à temps; Louis était parti depuis Bouilliard (Jacques), graveur cé- une heure, lorsqu'il atteignit cette lèbre, naquit à Versailles en 1744. Il ville. 11 ne lui resta plus dès lors qu'à s'adonna d'abord à la peinture; mais chercher son salut dans la fuite; il se une infirmité qui ne lui permettait pas retira à Luxembourg, d'où il écrivit à de se tenir longtemps debout l'engagea l'Assemblée une lettre remplie de me- à se livrer tout entier à la gravure. Il naces ridicules. Il se rendit ensuite à se fit principalement connaître par la Coblentz, puisa Pilnitz, à Prague, où publication de la fameuse collection il eut diverses conférences avec les du Palais-Royal. Plus tard il fut reçu souverains étrangers. Revenu à Aix- à l'Académie, et acquit, par ses tra- vaux , une fortune honorable. C'est la-Chapelle, il eut dans cette ville une un des artistes qui ont le plus contri- bué à la restauration de la gravure en entrevue avec le roi de Suède, qui lui offrit de commander sous ses ordres l'expédition qu'il voulait tenter en fa- France. Ses ouvrages les plus estimés veur de Louis XVI. Rouillé accepta, sont : Borée et Orythie, d'après Vin- cent: Apollon et Dapkné, d'après fournit les plans, les instructions pour opérer un débarquement sur les côtes Michel Vanloo, et quelques portraits. de Normandie; mais Gustave périt, Cet artiste estimable est mort en 1806. l'expédition fut abandonnée, et le mar- Bouillie.— Le gortt de la bouillie quis déçu n'eut plus qu'à rejoindre a étéautrelois beaucoup plus répandu 1 armée de Coudé , d'où il passa à celle qu'il ne Test aujourd'hui. On servait du duc d'York , avec laquelle il lit la ce mets comme un régal sur les meil- leures tables et même dans les mo- campagne de 1793. Il se réfugia l'an- nastères. Une charte de Charles le née suivante à Londres, où il mourut le 14 décembre 1800. Bouillé a laissé Chauve , de l'année 862 , accorde an- nuellement aux religieux de l'abbaye des mémoires sur la révolution fran- çaise, qui furent d'abord imprimés en de Saint-Denis cinq muids de pur fro- anglais, Londres, 1797, in-8°; traduits ment, pour faire de la bouillie aux fê- en allemand, Luxembourg, 1798, in-8°, tes de Noël et de Pâques. Fastrade imprimés en français sous ce titre : troisième abbé de Citeaux , écrivant au supérieur de l'unedes maisons de son Mémoires sur la résolution française, depuis son origine jusqu'à la retraite ordre, pour lui faire des reproches sur du duc de Brunswick, etc., Paris, son goût pour la bonne chère, lui dit: 1Ç01, 2 vol. in-12, et réimprimés dans « J'ai vu notre saint fondateur ne man- Digitized by Google

mbou FRANCE. bou « ger qu'avec scrupule une bouillie au Malgré cet anathème , et l'impression « miel et à l'huile qu'on lui avait servie non encore effacée qu'il a laissée chez « pour restaurer son estomac délabré. » quelques mères, les nourrices de \\il- Le goût que les Normands avaient lage continuent encore à donner de la pour la bouillie leur valut autrefois le bouillie aux petits enfants , sans qu'il sobriquet de boulieux. La Bruyère en rta|lte aucun des inconvénients Champier , médecin attaché à Fran- signalés par Gui Patin. çois er qui a publié en 1660 un traité Dans plusieurs provinces de France, 1, de Re cibaria. nous apprend que de notamment en» Franche - Comté , en Bresse et en Bourgogne , on fait avec son temps la bouillie avait pris à la cour une grande faveur auprès des de la farine de maïs une bouillie un dames et auprès des hommes mêmes peu épaisse que l'on appelle des gau- lesquels, selon l'expression de l'auteur, des et qui entre pour un tiers et quel- t redevenaient enfants par gourman- uefois pour moitié dans la nourriture dise. La bouillie était encore serv ie au a es gens de la campagne. En Bretagne dix-septième siècle sur les tables roya- c'est avec le sarrasin ou blé noir que les. Mademoiselle de Montpensier en l'on prépare la bouillie, l'un des princi- fournit dans ses Mémoires une preuve paux aliments des classes pauvres. qui contient sur l'enfance de Louis Bouillon, Bullio, ancienne ville XIV une anecdote assez singulière: de France capitale d'un duché du , « Monsieur, dit-elle, vint un jour dans même nom, qui fait aujourd'hui partie la chambre de la reine, comme elle du duché de Luxembourg. Son château, allait dîner avec le roi. Il trouva un situé sur un roc inaccessible, était de- poêlon de bouillie ; il en prit sur venu une prison d'état pendant le règne une assiette et l'ai la montrer au roi, de Napoléon. Îui lui dit de n'en point manger, Bouillon première maison de). ( lonsieiir dit qu'il en mangerait; le Voyez la Mark. roi répondit : « Gage que non.» La Bouillon (deuxième maison de). dispute s'émut ; le roi voulut lui ar- Voyez la Toub (maison de). racher l'assiette, la poussa, et jeta Bouillon (Marie-Anne Mancini, quelques gouttes de bouillie sur duchesse de), était la plus jeune des Monsieur, qui a la tête fort belle et nièces de Mazarin. Elle naquit à Borne, aime extrêmement sa chevelure. Cela en 1649 , de Michel-Laurent Mancini, le dépita; il ne fut pas maître du baron romain , et de Hiéronyme Ma- premier mouvement , et jeta l'as- zarini, sœur puînée du cardinal. Elle siette au nez du roi. » vint à Paris fort jeune; et avant l'âge Quoique la bouillie ait été de tout de quatorze ans, en 1662, elle épousa temps un mets recherché, il paraît que Godefroi de la Tour., duc de Bouillon. ce fut seulement vers le milieu duqum- Cette noble alliance, ou même l' hon- zième siècle que l'on commença à l'em- neur de s'être distinguée par l'origi- ployer comme aliment pour les enfants en bas âge. Un certain Jacobus de par- nalité et le tour naïf de son esprit* dans un siècle où l'esprit était chose tibus, qui vivait en 1464, écrivant presque vulgaire et à peine remarquée, contre les abus que les mères avaient n'eussent pas sufO pour lui conquérir introduits dans l'éducation de leurs une place parmi les femmes illustres enfants, signale comme tel cet usage de notre pays; mais elle se présente à de la bouillie, qu'il dit être tout nou- nous avec un titre qui a bien plus de veau , et particulièrement inconnu à valeur : elle fut la protectrice des geus toute l'antiquité. Gui Patin, qui avait de lettres; elle devina, elle encouragea aussi de la prévention contre cet ali- le talent de la Fontaine. La société, ment , le dénonce, en 1644, dans une au dix-septième siècle, était ainsi faite: lettre à Spon , comme une nourriture un auteur, quel que fut d'ailleurs sou visqueuse et grossière qui fait de la mérite, avait besoin d'un appui étran- , colle dans l'estomac des enfants . etc. ger par lui seul il ne pouvait à peu ; 12. GcDigitized by

180 BOU L'UNIVERS BOU près rien. Nous devons donc quelque de la duchesse de Bouillon est un rondeau contre les Métamorphoses reconnaissance à ceux qui ont aidé à de Benserade. On le trouve dans le commentaire de Saint-Marc sur Boi- l'enfantement de tant de chefs-d'œu- leau. vre; qui n'dnt pas permis que le génie Bouillon (G.), peintre et graveur, s'éteiçnk dans la souffrance et le dé- anefen pensionnaire de l'académie de sespoir; à ceux-là surtout qui sa- France a Rome, né à Thiviers (Dor- vaient, comme la duchesse de Bouil- dogne), en 1775, a publié, de 1810 à lon, mettre dans leurs bienfaits cette 1825, une magnifique collection de Gravures du musée des antiques, délicatesse qui ne laisse à l'obligé formant 3 vol. in -fol. qu'un doux sentiment de gratitude Bouillon (Rose) , l'une de ces hé- respectueuse. La duchesse de Bouillon roïnes auxquelles la révolution fit ou- fut pour la Fontaine bien plus qu'une blier la faiblesse et la timidité ordinaire protectrice; elle fut son amie dévouée. à leur sexe, entra, comme volontaire, C'est elle qui lui donna la première ce avec Julien Henri, son mari, dans charmant surnom de Fablier , mal à le sixième bataillon de la Haute- propos attribué à madame de la Sa- Saône. Elle supporta toutes les fati- gues et tous les dangers de la guerre, blière. La Fontaine avait pour elle jusqu'à la mort de son époux qui une affection toute paternelle : « Elle , « porte la joie partout , écrivait-il à perdit la vie à ses côtés à la bataille « l'ambassadeur d'Angleterre ; c'est de Limbach. La vue de Henri , bai- « un plaisir de la voir disputant, 5né dans son sang, loin de la distraire « grondant jouant et parlant de tout e ses devoirs de soldat, sembla au con- , traire avoir doublé son courage, et on ne cessa de la voir, tant que aura l'af- « avec tant d'esprit , que l'on ne sau- faire, parmi les plus acharnés à pour- suivre l'ennemi. Après cette journée, « roit s'en imaginer davantage. » Un elle obtint la permission de se retirer auprès de sa -vieille mère qu'elle avait père ne dirait pas mieux de son en- chargée du soin de ses deux enfants. Le gouvernement récompensa la con- tant préféré. Il paraît que la duchesse duite héroïque de cette femme par une pension de trois cents francs réver- de Bouillon prit parti pour Pradon sible sur sa famille. dans la lutte des Phêdres;ce ne fut Bouillon-Làgrànge (Edme-Jean- Baptiste) , né à Paris en 1764, com- pas injustice , mais erreur ; une er- mença de bonne heure à étudier la reur de goût que partagèrent long- pharmacie et la chimie, et, après avoir temps la plupart de ses contemporains. dirigé pendant quelques années une des meilleures pharmacies de la ca- Bayje , le grand critique, n'a-t-il pas écrit que les deux Phèdres étaient pitale , fut attaché comme pharma- deux belles tragédies. Une curiosité cien à la maison de l'empereur. Il fit en cette qualité les mémorables irréfléchie faillit devenir fatale à la campagnes d'Autriche et de Prusse, et se fit recevoir docteur en méde- duchesse de Bouillon ; elle avait eu le cine pendant qu'il remplissait ces malheur d'entretenir quelques rap- importantes fonctions. Il rédigea , en 1808 , un rapport sur les travaux an- ports avec la Brinvilliers , et fut nuels de la société de pharmacie , et décrétée par la chambre ardente, en rendit compte d'un procédé nouveau pour les préparations de l'éthiops 1680. On pense bien qu'elle n'eut pas martial (oxyde noir de fer). En 1813, de peine à démontrer qu'elle n'avait rien de commun avec les empoison- neurs. Louis XIV ne l'en exila pas moins pour quelque temps à Nérac. On la voit, en 1687, faire un voyage en Angleterre auprès de sa sœur, la fameuse duchesse de Mazarin; puis, en 1690, un autre voyage à Rome où son fils, le prince de Turenne, avait accompagné le cardinal de Bouillon. Depuis lors elle vécut dans une re- traite studieuse, au milieu de sa fa- mille et de ses amis jusqu'à sa mort, , en 1714. Le seul écrit que nous ayons

BOL FRANCE boit 181 il publia , sous les auspices du minis- femmes, 2 vol. in-12, et les Mères de tre de l'intérieur , un rapport très-dé- famille; les Contes aux enfants de taillé , indiquant les moyens de per- France, 2 vol. in-12, sont des ou- fectionnements que ses nombreuses vrages que les mères peuvent sans expériences lui avaient fait reconnaî- crainte mettre entre les mains de leurs tre, en répétant et en variant les pro- jeunes enfants. Il est fâcheux, tou- cédés employés par Achard , chimiste tefois, que le style de Bouilly soit, de Berlin pour extraire du sucre de en général , recherché et prétentieux , la betterave. M. Bouillon -Lagrange a et qu'il tombe trop souvent dans la fait un travail très-curieux sur le blan- sensiblerie, défaut qui Ta fait sur- chiment par la méthode de Berthollet, nommer le poète lacrymal. Ce litté- et il est parvenu à rendre facile à filer, rateur estimable est mort à Paris en le chanvre , converti en une espèce de 1840. coton très-blanc. Il a publié un grand Bouju (Jacques) , président au par- lement de Bretagne, né à Château- nombre d'ouvrages justement estimés, sur les différentes parties de la chi- neuf en Anjou , en 1515, mort à An- mie , et sur les applications de cette gers en 1578, avait composé, outre science à la pharmacie et aux arts in- plusieurs ouvrages , le Royal discours dustriels. des choses mémorables faites par les Bouilly (Jean-Nicolas) , né à Tours rois de France, jusquà Henri III. en 1761 , étudia le droit a l'université Cet ouvrage est mentionné dans la d'Orléans, et se fit ensuite recevoir Bibliothèque historique de la France; avocat au parlement de Paris ; mais il mais il n'a point été imprimé, et l'on quitta le barreau pour se livrer entiè- ignore s'il existe encore. rement à la littérature, lorsque le Boulàinvillebs ( le comte Henri de ) naquit à Saint-Saire , en Norman- siège de cette cour fut transporté à die (aujourd'hui département de la Troyes par le gouvernement. C'est alors qu'il fit la connaissance de Mira- Seine-Inférieure), en 1658, fit ses beau qui encouragea ses premiers es- études au collège de Juilly, et entra , dans la carrière militaire qu'il quitta sais. Après avoir exercé a Tours, en , 1793, des fonctions publiques, où il bientôt pour s'occuper uniquement des se fit remarquer par la modération de affaires de sa famille. La recherche sa conduite , il fut nommé membre de qu'il fut obligé de faire des anciens la commission chargée de rédiger un titres de sa maison, lui donna du goût plan d'éducation pour la jeunesse fran- pour les études historiques , et après çaise; mais il donna sa démission lors- avoir étudié l'histoire de ses ancêtres, qu'il fut question de soumettre cette il s'occupa de celle de son pays. Il commission aux investigations de la mourut a Paris , en 1722. Il avait police. C'est alors qu'il débuta dans la composé un grand nombre d'ouvrages, carrière dramatique. Les ouvrages de mais n'en avait publié aucun. Ceux Bouilly sont trop nombreux pour que Î[ui ont été imprimés, le furent par nous entreprenions de les citer ici; e soin de ses amis. Ce sont : Mémoi- nous dirons seulement que la plupart res présentés au duc d'Orléans , ré- gent de France, etc. , la Haye, 1727, eurent à leur apparition un succès de vogue, dû à l'intérêt et à la sagesse in-12; Histoire de îancien gouver- du plan qui en fait le principal mérite. nement de France , avec quatorze lettres historiques sur les parlements Bouilly ne fut pas moins heureux dans un autre genre ; on trouve dans tout ce ou états généraux , la Haye 1727, qu'il a écrit pour la jeunesse une dou- , 3 vol. in-8° : plusieurs fois réimprimés ceur et une pureté que l'on cherche depuis; État de la France, etc. , ex- en vain chez le plus grand nombre traits des mémoires dressés par ordre mades moralistes. Les Contes à de Louis XIV, par les intendants du fille, 2 vol. in -12; les Conseils à royaume pour le duc de Bourgogne, , ma fille, 2 vol. in -12; les Jeunes avec des mémoires sur l'ancien gou-

L'UNIVERS. Sirnement de cette monarchie jusqu'à un à un, et allait se dégradant de ugues Capet : cet ouvrage a eu un siècle en siècle... Tous les rois de la troisième race ont voulu son abais- grand nombre d'éditions; la meilleure sement, et travaillé, comme sur un est celle de Londres, 1752, 8 vol. in- plan formé d'avance, à la ruine des 12; Abrégé chronologique de ?his- lois primitives et de l'ancienne cons- toire de France, la Haye (Paris), titution de l'État; ce fut pour eux 1733, 3 vol. in-12; Mémoires pour la uue idée commune d'anéantir les noblesse de France, contre tes ducs grands seigneurs, de subjuguer la et pairs , in-12, sans date; Histoire nation, de rendre leur autorité ab- de la pairie de France et du parle- solue et le gouvernement despoti- ment de Paris, Londres, 1753, 2 que... Philippe - Auguste commença vol. in-12. On peut voir, dans la Bio- la destruction de la police des fiefs graphie universelle, les titres de ceux et des 'droits originels du baronnage de ses ouvrages qui sont restés ma- ; nuscrits. Philippe le Bel poursuivit ce projet Le comte de Boulainvillers étant le par la ruse et par la violence ; Louis représentant d'un système important sur l'histoire de France , nous devons XI l'avança près de son terme entrer ici dans quelques détails sur les Leur postérité est parvenue au but idées qu'il a émises dans ses ouvrages, qu'ils s'étaient proposé; mais, pour et qu'il a cherché à faire prévaloir. Partisan passionné de la noblesse et 1 atteindre pleinement , l'administra- tion du cardinal de Richelieu et le des privilèges qu'elle s'attribuait , il déplore partout , dans ses écrits , la règne de Louis XIV ont plus fait, en ruine du régime féodal. Mais c'est surtout dans son histoire de l'ancien un demi-siècle, que toutes les entre- gouvernement de la France qu'il a prises des rois antérieurs n'avaient formulé son système : « La conquête pu faire en douze cents ans. » « des Gaules, dit-il dans ce livre, est « le fondement de l'État français dans Tel est le système historique du « lequel nous vivons; c'est à elle qu'il comte de Boulainvillers : ce système « faut rapporter Tordre politique suivi est vrai; mais il est incomplet, et de- « depuis par la nation ; c'est de là que vait l'être. En effet, lorsqu'il parut, « nous avons reçu tous notre droit la question de l'origine des Francs «primordial.» C'est, en effet, de n'était pas, comme aujourd'hui, une la conquête des Gaules par les Francs question scientifique, c'était une ques- qu'il fait découler la domination et les privilèges des seigneurs féodaux tion toute politique qui se transfor- et des nobles , descendants des vain* queurs, la servitude et le misérable Dmait en celle-ci : yoù vient la diffé- état du peuple composé des des- cendants des Gaulois. 11 attribue la rence de condition de la noblesse et ruine du régime féodal à deux cau- du tiers êtatt Boulainvillers répondit ses : la première est l'affranchis- sement des serfs; la seconde, le hardiment : De la conquête ; et il pré» tendit que la conquête était' un droit : progrès « par lequel ces serfs s'élevè- rent, contre tout droit, dit-il, à la l'aristocratie accueillit cette solution condition de leurs anciens maîtres. avec enthousiasme ; le tiers état l'ac- Depuis six cents ans les roturiers cepta aussi, mais en niant le droit, esclaves, d'abord affranchis, puis qui n'était autre que celui du plus fort, anoblis par les rois , ont usurpé les et qui, par conséquent, avait dû s'é- emplois et les dignités de l'État, vanouir avec la force qui l'avait donné, tandis que la noblesse, héritière des tandis que , de leur côté , les rotu- privilèges delà conquête, les perdait riers, descendants des anciens Gau- lois , avaient recouvré, avec le pouvoir, le droit de réclamer l'héritage de leurs pères , et de chasser vers les forêts d'où ils étaient sortis, les descendants des ravisseurs. Cette opinion sur la conquête des Francs et sur ses con- séquences, acceptée par tous , nobles et roturiers, servit de base à tous les Digitized by Google

BOIT FRANCE. BOIT 183 travaux historiques qui précédèrent la in-12. C'est à tort qu'on a attribué à révolution. Sans doute, le système du comte de Boulainvillers est aujour- —cet auteur le Christianisme dévoilé. d'hui incomplet, puisqu'il ne tient Boulangers. Nous avons vu la compte que de l'élément germanique, parmi ceux dont s'est formée la natio- corporation des boarii ou bouchers nalité française; sans doute, cet his- torien ne rend point un compte survivre dans Paris à la puissance ro- exact de la marche qu'a suivie la so- ciété française; mais il faut prendre maine, s'adapter aux mœurs nouvelles son livre pour ce qu'il est, pour une protestation maladroite de la nohlesse créées par l'invasion des populations sentant sa fin prochaine, et croyant raviver sa puissance en arguant de son barbares, et subsister longtemps en- origine. core après l'avènement des temps Les Quatorze lettres historiques modernes. Il n'en fut pas de même de sur les parlements sont moins systé- matiques que Y Histoire de l'ancien la corporation des pistores ou boulan- gouvernement. L'auteur y a, par con- séquent, mieux rempli son cadre. Il y gers nombreux sous l'administration donne d'une manière complète l'his- ; toire des états généraux des quator- zième et quinzième siècles. « Ce tra- romaine, ils ne disparurent pas com- vail, dit M. Aug. Thierry, entièrement neuf pour l'époque, a depuis servi plètement après la conquête des Francs de base à beaucoup d'essais du même mais ils cessèrent de former une cor- genre; il n'a jamais été refait sur les poration. En effet, dans l'état de la sources avec un pareil développe- ment (*). » civilisation, ils n'étaient plus néces- Boulanger (Jean), graveur, né à saires; les produits de leur art étaient Amiens en 1607, peut être regardé, avec Morin , comme l'inventeur de devenus des objets de luxe, dont les la gravure au pointillé, genre bâtard riches seuls pouvaient se permettre que les Anglais ont adopté depuis, et qui faillit faire tomber Pecoie fran- l'usage. Quant aux pauvres, les fours çaise, dans le siècle dernier. Ses es- tampes sont des reproductions des ta- banaux étaient là , et ils devaient après bleaux de Raphaël , Léonard de Vinci, , Champagne, Mignard, etc. avoir payé au seigneur du lieu un droit Boulanger ( Nicolas -Antoine ) assez élevé, aller y cuire le pain néces- auteur de Y Antiquité dévoilée, ou- vrage posthume publié par le baron saire à la nourriture de leurs familles. d'Holbach, en 1766, et qui fit beau- coup de bruit à la fin du dix-huitième C'est seulement sous Philippe-Au- siècle, naquit à Paris, eu 1722, et y mourut en 1759. Boulanger avait aussi guste que l'on voit apparaître, pour la composé d'autres ouvrages qui, pu- bliés successivement , furent tous réu- première fois, la corporation des bou- nis avec le précédent, en 1790, et réimprimés en 8 vol. in-tr, ou 10 vol. langers, alors connus sous le nom de (*) Voyez les Considérations sur l'histoire talemeliers{*). Depuis longtemps, ceux de France, en tête des Récits des temps mérovingiens. de ces artisans qui étaient établis à Paris payaient au roi, pour l'exercice de leur profession, un droit nommé hautban, auquel n'étaient point assu- jettis ceux oui avaient été s'établir hors des murs de Paris, sur les terres des seigneurs ou des abbayes. En revan- che, ceux-ci ne pouvaient vendre leur fiain dans la ville que sur les étaux de a halle, au marché du samedi. Mais Philippe Auguste avant considérable- ment agrandi la ville et compris dans ? son enceinte une partie des faubourgs un grand nombre de boulangers fo- rains se trouvèrent ainsi de droit et de (*) m Tatemeliers, qu'on écrivait aussi lal- lemelliers ou taillemeiliers, paraît être la plus ancienne dénomination qu'où ait em- ployée en l'rance, pour désigner les bou- langers ; dès le quatorzième siècle oe dernier terme remplaça l'ancien , dont il serait dif- ficile de découvrir l'origine. » Depping t Livre des métiers , page 4 » note. Digitized by Google

184 BOU L'UNIVERS BOU fait les égaux de leurs anciens collè- mières années de leur exercice. Cette gues de la cité. Ceux-ci crurent voir là une atteinte portée à leurs droits; ils en uinéra t ton est suivie de l'article sui- réclamèrent, et Philippe-Auguste se contenta de diminuer le hautban qu'ils vant, le plus curieux de tous ces sta- lui devaient Mais cette faveur ne leur suffit pas; ils réclamèrent de nouveau tuts : et demandèrent des statuts gui les dis- tinguassent d'une manière m'en tran- h Quant li noviax talemeliers ara en chée des anciens boulangers forains. « tele manière fet quatre ans accom- Ces statuts leur furent enûn donnés sous le règne de saint Louis , et ils sont « plis, il prendra un nuef pot de terre, au nombre de ceux qui composent le livre des métiers d'Etienne Boileau. « et ara dedans li pot nois et nieu- Kous croyons devoir en citer ici quel- « les (*), et venra à la meson au mestre ques articles, dont les dispositions sont assez curieuses : « des talemelier, et ara avec lui li « cou st umier s et touz li talemelier, « Nuz ne puet estre talemeliers de « dans la banliue de Paris, se il n'a- « et li mestres vallet que l'on apele m« chate li os tiers du roi... «joindreSy et doiteil noviax talemeliers « Haubans est uns propres nons « livrer son pot et ses nois au mestre, « d'une coustume asise, par laquele il « et dire : Mestre, je ai fait et accom- fu establi ancienement que quicon- « pli mes quatre années; et li mestre « ques seroit haubaniers, qui seroit < doit demander au coustumiers se ce « plus frans, etjpaieroit mains de droi- « tures et de coustumes de la marchan- « est voirs ; et se il dit que ce est voirs « dise de son mestiers que cil qui ne « li mestre doit baillier au noviax ta- « seroit pas haubaniers. Haubanier « furent ancienement establi à un mui « lemeliersson pot et ses nois, et com- « de vin paier, et puis mis t. li bons « mander li qu'il les jète au mur, et « rois Phelippe cel mui de vin à vj sols « lors li noviax talemeliers doit jeter « parisis « son pot et ses nois et ses nieules au « Li talemelier qui sont haubanier « sont qui te du tonliu (*) des pors « mur de la meson le mestre, au de- « qu'il achat ent, et deceus qu'il reven- « dent por tant qu'il aient une fois man- « hors, et lors doivent li mestre, li « gié de leur bren (**) ; et si sont quite li «coustumiers, li noviax talemeliers, « talemelier du tonliu du tout li blé « qu'il achatent por leur cuire, et du « touz li autre talemelier et li vallet en- « pain qui vendent, fors que trois de- « trer en la meson au mestre , et li mes- ( « tre leur doit livrer feu et vin , et chas- « cun des talemelier, et li noviax, et « mies de pain que chascun taleme- « liers noviax et viez doit chascune li mestre vallet doivent chacun un « semaine au roy de tonliu. » « deniers au mestre des talemelier Vient ensuite l'énumération des « pour li vin et pour li feu qu'il livre. droits qui étaient dus par les nouveaux talemeuers pendant les quatre pre- « Li mestre des talemelier doit « faire à savoir au coustumiers, aus « talemelier , aus joindres que il , « viegnent à ce jour a sa meson , et il « i doivent venir ou envoier leur de- « niers au mestre des talemelier pour « li vin devant dit. » Cet article est d'autant plus re- marquable , que la coutume qu'il nous fait connaître est exceptionnelle , et n'a point d'analogue dans les diffé- rents statuts que nous a conservés le livre des métiers. En effet, la corpo- ration des talemeliers était la seule (*) Ton!i eu teloneunty et dans la basse qui eût un cérémonial particulier pour , latinité tonlegium. C'était l'impôt payé par la maîtrise. Il se pourrait, suivant les marchands pour stationner dans les M. Depping , que cet usage fût d'une haute antiquité, et remontât assez marches. Cependant le mot tontieu a quel- quefois une signification plus générale. (•*) Son ; ce mot est encore usité dans ce (*) Oublies ou feuilles légères de pain non sens en Normandie. levé; ncbulœ, dans la basse latinité. Digitized by Google

boc FRANCE. BOU 186 loin dans les fastes de la talemelerie lontairement par quelques aspirants à la maîtrise, elle tomba bientôt de en France ou en Gaule. Dans la suite, il tomba en désuétude cependant les nouveau en désuétude. Toutefois ; , boulangers de Paris n'en perdirent suivant Delamarre(*), le principe qui pas le souvenir , et , lorsqu'au dix- avait dicté cette disposition subsista septième siècle ils proposèrent un re- et le pot de romarin fut converti en glement à l'autorité publique , ils n'y un louis d'or, que les nouveaux mnt- om iront pas le pot d'installation des très continuèrent à payer à titre d'hom- mage au maître du métier, temps féodaux. Voici l'article de ce règlement qui contient cette disposi- Nous avons dit, dans l'article que nous tion : avons consacré à la corporation des bo u - «Seront tenus tous les nouveaux chers, que, dès le commencement delà « maistres, dans les trois premières troisième race, les rois avaient inféodé, « années après leur réception payer en faveur des grands officiers de leur , couronne , la plupart des justices des « chacune des dites années vingt-cinq « deniers de compte au grand pane- corporations. Les talmeliers ou boulan- « tier, à l'Épiphame, qui est le premier gers dépendaient du grand panetier. « dimanche d'après les Roys, et à « Li rois, disent les statuts recueil - « Pâques, vingt-deux deniers, et à la « lis par Étienne Boileau, a donné « saint Jean -Baptiste, cing deniers « à son mestre panetiers la mestrise « obole; et au bout des dites trois « des talmelier, tant corne il li plaira, « années , est tenu ledit nouveau « et la petite justice et les amendes « maistre boulanger, d'apporter, ledit « des talemelier et des joindres et « jour premier dimanche d'après les « des vallet, si corne des entrepresure « Roys, un pot neuf de terre verte ou. « de leur mestiers et des bateure sanz « de fayence, dans lequel il y aura un « romarin ayant sa racine entière , « sanc, et des clameur, hors mise la cla- « aux branches duquel romarin y aura « meurs de propriété. » Cette juridic- « des pois sucrez, oranges et autres tion subsista fort longtemps , malgré le conflit qui ne tarda pas à s'élever « fruits convenables, suivant le temps, entre elle et la prévôté de Paris, et « et ledit pot remply de pois sucrez , elle ne fut abolie qu'à l'époque où la « et sera ledit nouveau maistre as- charge? de grand panetier zut définiti- « sisté des jurez et anciens et des au- vement supprimée. « très maistres dudit mestier. Ce fait, Les talemeliers de Paris ne pou - « dira audit grand panetier : Maistre, vaient cuire tous les jours de l'année; « j'ay accomply mon temps; et ledit on peut voir dans les statuts -de leur « grand panetier doit demander aux communauté la liste des jours où il « jurez sMl est vray ; ce fait, prendra « l'avis des jurez et des anciens mais- leur était interdit d'exercer leur in- « très, si ledit pot est en la forme dustrie. Cette liste comprend tous les jours de fêtes reconnues par l'Église, « qu'il doit estre, et s'il est recevable; et les veilles de ces mêmes jours qui « et s'ils disent qu'ouy , ledit grand , devaient être consacrées au jeûne et à «panetier doit recevoir iceluy, et l'abstinence; en sorte que, pendant une « lu y en donner acte, et de là en avant grande partie de l'année, les habitants « n'est sujet que de payer chacun an « le bon dfenier , ainsi que les autres de Paris étaient privés de pain frais. C'était peut-être pour cette raison « maistres. » que, le samedi , le marché au gros Mais le temps où: de semblables pain se tenait aux halles, où les mar- chands forains pouvaient , ainsi que formalités pouvaient encore être ob- servées était irrévocablement passé ; nous l'avons dit , venir vendre leur le parlement, en ratifiant le règlement pain aussi bien que les talemeliers de proposé, laissa de côté la disposition Paris; ceux de Gonesse occupaient que nous venons de rapporter , et quoiqu'elle eût déjà été observée vo- (*) Traité de police , liv. v, tit. i», ch. 5. Digitized by Google

186 BOIT L'UNIVERS. BOU même une halle particulière. Ils Au moment où les corporation4 s\" fli- avaient tous , en outre , un autre rent abolies, en 1789 , il fallait, pour; privilège ; c'était celui d'exposer en vente, au parvis Notre-Dame, le être admis dans celle des boulangers pain qui leur restait du marché du , samedi. Mais ce privilège n'était point gratuit; les boulangers forains l'ache- avoir fait cinq ans d'apprentissage, taient au prix d'un tonlieu qu'ils quatre ans de compagnonnage, et pré- payaient aux religieuses de Long- champ depuis le jour de saint An- senter en outre un chef-d'œuvre. Les , 61s de maîtres étaient seuls exempts dré jusqu'à la fête de saint Denis, et de cette formalité. Le prix du brevet aux religieux de l'abbaye de Saint- Denis pendant le reste de l'année. était de quarante livres; celui de la , maîtrise, de neuf cents livres. Le statut des talemeliers de Paris Outre leur communauté civile, dont est le plus détaillé de tous ceux qui composent le registre d'Étienne nous avons analysé les statuts, les Boileau cependant on est étonné boulangers formaient encore , de ; même que toutes les autres corpora- de n'y trouver aucune prescription sur la qualité et sur le poids du pain. tions d'arts et métiers, une confrérie Cette omission pourrait peut-être s'expliquer, par cette considération ou association religieuse. Ils avaient que les produits de la talemelerie de Paris étaient encore un objet de luxe pour patron saint Pierre aux liens, à l'époque où ces statuts furent éta- blis. C'est en effet ce que semblerait dont la fête est désignée, d >ns le livre prouver la défense qui tut alors faite a ces artisans de fabriquer des pains des métiers, par la singulière épithète dont le prix dépassât deux deniers. Sans parler des fours banaux dont le de saint Pierre angoule aoust. peuple, dans certaines parties de la ville, dut encore longtemps faire usa- Les boulangers sont maintenant ge (*) , c'était aux marches du samedi et du dimanche que les pauvres de- soumis, dans chaque localité, à un rè- vaient faire leurs provisions , et là, le glement émané de l'autorité munici- pain se vendait au poids et de gré à gré. Ce fut seulement lorsque les bou- pale. Ceux de Paris sont les seuls qui langers purent exposer dans leurs boutiques du pain de toutes sorte de soient régis par un acte du gouver- poids et de qualités, que l'autorité pensa à leur prescrire des règles à cet nement. Cet acte est le décret du 19 égard. Une ordonnance rendue par vendémiaire an x. Philippe le Bel, en 1305, est le pre- Boulay ( César Égasse du), né à mier acte où l'on trouve de semblables prescriptions (**) Saint -Ellier, dans le bas Maine, au commencement du dix-septième siècle, fut successivement professeur d'hu- manités au collège de Navarre, gref- fier, recteur et historiographe de l'uni- versité de Paris; il mourut en 1678. On a de lui une Histoire de l'univer- sité de Paris , en latin, depuis 800 jusqu'en 1600, 6 vol. in-fol., 1665 et 1673. Cet ouvrage est moins une his- toire qu'un recueil de pièces curieuses concernant l'université. Crévier et tous les auteurs oui ont écrit sur le même sujet y ont abondamment puisé. De patronis quatuor nationum uni* versitatis, 1662, in-8°; Fondation dt l'université de Paris, par Charle- (*) Le foui\" banal du chapitre de Saint- magne, Paris, 1675, in-4°; Privilège Marcel subsistait encore en 1406 ; c'est alors de l'université de Paris, 1674 , in-4° ; seulement que les habitants du faubourg de Decanatu nationis gallicanse in furent d ispensés d'y cuire, en payant aux academia parisiensi, 1662, in-8°. chanoines une redevance qui ne fut abo- Boulay (Edmond du), héraut d'ar- lie qu'en 1675. Voyez Delamarre, Traité mes des ducs de Lorraine , né à Reims de police, liv. v, tit. xi. é à la fin du quinzième siècle, est au- (**) Delamare, Traité de police, liv. v, teur d'un grand nombre d'ouvrages en tit. xiii, ehap. 4. prose et en vers , la plupart sur des Digitized by Google - Xl

BOU FRANCE. snjets historiques. Parmi les princi- nir de la France tant que subsisterait paux , nous citerons : la Généalogie ce gouvernement, se montra-t-il l'un des ducs de Lorraine , Metz , 1547 ; la Vie et le trépas des ducs de Lorraine des plus zélés partisans de la révolution du 1 8 brumaire. Il refusa, quelquesjours Antoine et François, Metz, 1547, après , le ministère de la police, et fut in-4° ; le Voyage du duc Antoine vers appelé au conseil d'État en qualité de Vempereur Charles F, en 1 545, />owr traiter de la paix avec François /er président du comité de lééislatiori. , Après avoir été chargé, en I an x, de l'administration du contentieux des do- Paris, 1549, in-8°. IL est aussi l'auteur d'une moralité fort recherchée des maines nationaux, il reprit, en 1810, sa place de président du comité de lé- curieux, et intitulée: Combat de la chair et de l'esprit en rymefrançoise gislation. Boulay fut un des fonction- et par personnaiges Paris, 1549, naires qui , sous le despotisme impérial, , in-8° de 72 feuillets. surent conserver le plus d'indépen- Boula (N. du), canoniste, composa dance. Il s'opposa même avec assez une Histoire du droit public ecclésias- d'énergie à la mesure qui donna au pre- tiquefrançais, Londres (Paris), 1740, mier consul le titre d'empereur; dé- 1751, in-4°; ibid., 2 vol. in-12. fendit constamment l'institution du BOULAY DE LA MEUBTHE ( Ant.- jury, repoussa les prétentions du Jacques-Cl.-Jos.), naquit, en 1761 , h clergé et, lorsque le gouvernement et Chaumourey, près d'Epinal , départe- , ment de la Meurthe. Reçu avocat à le corps législatif se divisèrent en 1 8 1 3 il conseilla à Bonaparte de faire droit Nancv, il vint à Paris exercer cette aux justes réclamations des députés. profession, et il commençait déjà à Destitué en 1814, il reprit, ait retour s'y faire connaître avantageusement de l'tle d'Elbe, ses anciennes fonc- lorsque la révolution éclata. Patriote tions , augmentées de la direction de dévoué, il s'engagea, en 1792, dans la correspondance et de la comptabi-* un bataillon de volontaires de la Meur- lité au ministère de la justice. Il fut the, et se trou va à la bataille de Valmy. nommé alors ministre d'Etat -, mais il Après la campagne , il revint à Nancy, fut exilé à la seconde restauration, où il fut élu par ses concitoyens juge comme avant conspiré pour le retour au tribunal civil. Quoique républicain, de Napoléon. Il passa quatre années à Boulay n'avait point cette chaleur de l'étranger, et ne revint en France qu'en conviction , cette ardeur révolution- 1820. Administrateur intègre et désin- naire qui sauva la France en 1793; téressé, Boulay de la Meurthe sut; aussi fut-il alors destitué par un re- dans toutes les positions de sa vie présentant du peupleen mission ; frappé politique , se concilier l'estime gé- ensuite d'un mandat d'arrêt , et obligé nérale. de chercher un asile dans les bois, il ne Boulay-Paty (Pierre) naquit , en 1763, à Nantes, où il exerçait la pro- Eut en sortir qu'après le 9 thermidor, lepuis cette époque, il remplit suc- fession d'avocat, lorsqu'il fut appelé; cessivement les fonctions de président en 1789, à remplir successivement dif- et d'accusateur public au tribunal de férentes fonctions publiques. En 1798, il entra au Conseil des Cinq-Cents, Nancy, et fut élu ensuite , en l'an v, dont il fut nommé secrétaire l'année suivante. Membre de la commission député de son département au Conseil des Cinq-Cents. Boulay fit, dans cette assemblée, une énergîqne opposition de la marine et du commerce, il s'oc- aux projets royalistes soutenus par un cupa spécialement de la législation sur Srand nombre de députés. Il fut un ces matières. Son opinion fut très- in- es orateurs les plus influents de cette fluente, et on a de lui des rapports et législature, et personne peut-être ne des discours remarquables. Il prit une se montra plus péniblement affecté que part active à la révolution du 18 juin lui des vices de l'administration du 1799, qui contraignit la Réveillère- Directoire ; aussi , désespérant de l'ave- Lepeaux et Merlin a quitter lé Direc- Digitized by Google

188 BOU L'UNIVERS. BOU toire. Il fit aussi l'opposition la plus L'ébénisterie abandonne maintenant vive à la journée du 18 brumaire, et ce mauvais goût pour en revenir à ce- fut placé sur la liste des membres ex- lui que Boule avait mis en voçue ; mais clus. Mais sa disgrâce ne fut pas de il est à craindre que la manie des or- nements ne dégénère en profusion, et longue durée, car le gouvernement ne rende, dans un autre genre, le consulaire le nomma juge du même tribunal où il avait rempli les fonc- style moderne aussi mauvais que ce- tions de commissaire du Directoire. lui de l'empire. Nous devons aire ce- C'est en cette qualité que chargé de pendant que l'exposition de 1839 pré- , répondre au ministre de la justice sur sentait des meubles dans le genre de le projet du code de commerce, il lui Boule d'un goût parfait. (Voy. Ébb- adressa des observations qui ont beau- nistebie. ) Boulée (Etienne-Louis), architecte, coup servi à la rédaction de ce code et qui ont été imprimées sous ce titre : né à Paris le 12 février 1728, étudia à Observations sur le code de com- l'école deLejai, mais se forma surtout merce, adressées aux tribunaux. Lors d'après l'antique. Il commença une de la réorganisation de l'ordre judi- réattion contre le genre contourné et ciaire en 1811, il devint conseiller à mesguin de l'architecture de Louis XV, la cour impériale de Rennes. Doyen et doit surtout être signalé parmi de cette cour en 1828, ce fut lui qui ceux qui firent prévaloir les règles de rédigea les observations sur le projet l'architecture antique , et qui ramenè- de loi du titre des faillites. Il mourut rent le goût de la sévérité et de la no- en 1830. blesse, trop souvent négligées dans les constructions du dix-huitième siècle. Bodlayk (la), ancienne baronnie de Bourgogne (aujourd'hui départe- C'est tout à la fois par son enseigne- ment et par ses travaux que Boulée ment de Saone-et-Loire) , à vingt-deux kilomètres sud-ouest d'Autun érigée exerça une influence considérable. , Parmi ses élèves , nous citerons MM. en marquisat en 1720. Boulbon , ancienne vicomte de Pro- Brongniart , Chalerin , Durand , etc. Dans le nombre des monuments qui vence (aujourd'hui département des Bouches-du-Rhône) , à six kilomètres sont dus à ses plans , nous mention- nord-est de Tarascon érigée en comté nerons^ l'hôtel de Brunoy aux Champs- , en 1608. Elysées le château de Tassé à Cha- , Boule (André-Charles) , artiste , né ville, celui de Chanvri à Montmorency, à Paris en 1642, mort en 1732, devenu et celui du Péreux. Mais c'est surtout justement célèbre par le talent admi- dans ses projets et dans les manus- rable qu'il déploya dans la fabrication crits qu'il n'a pas \"eu le temps de réu- et dans l'ornementation des meubles. nir pour en former une œuvre com- A une science profonde du dessin il plète d'architecture, qu'éclate toute la joignait un excellent goût. Ses meubles puissance de son génie. Boulée est mort le 6 février 1799. sont ornés de bronzes de formes sévè- Boulènb , ville et seigneurie du res et élégantes, de mosaïques formées comtat Venaissin, à 7 kilomètres nord de bois de différentes couleurs, de cui- d'Avignon. vre et d'ivoire. Il fut nommé par Louis XIV graveur ordinaire du sceau, Boulenger (Jules-César), fils de Pierre Boulenger, naquit à Loudun en et il est qualifié, dans le brevet qui lui fut délivré, d'architecte, peintre, sculp- 1558, et mourut à Cahors en 1628, teur en mosaïque et inventeur de chif- après avoir donné en latin une His- fres. Le genre de Boule, espèce de toire de son temps, Lyon 1619, in- , style renaissance, fut remplacé à la fin fol.; elle commence à l'an 1559, et finit du dix-huitième siècle par un style en 1610. On a de lui en outre un grand , appelé grec , qui excluait tout orne- nombre de savants ouvrages , entre autres : De Jmperatore et imperio ment, et dont la roideur et le nu ab- solu étaient les caractères principaux. romano, Lyon 1618, in-fol.; De In- , Digitized by Google

Bou FRANCE. BOU 189 signibus gentilitiis ducum lotharingo- Les boulets incendiaires, faits avec rum, Pise, 1617, in-4°; et beaucoup une composition d'artifice renfermée d'opuscules imprimés d'abord séparé- ment , et réimprimés depuis dans les dans un sac de toile cordelé avec du antiquités grecques et romaines de menu cordage, pour leur donner pjus Graevius. de solidité, ont le diamètre des pièces Boulkngbb (Pierre), célèbre gram- de 24 et de 16. Pour qu'ils ne soient mairien , né à Troyes en Champagne, pas brisés par la force de la poudre, professa successivement la langue grec- on ne met qu'une petite charge dans 3ue et la langue latine à Loudun et la îéologie à l'université de Pi se. Il mou- le canon, et on enfonce sans refouler. rut dans cette ville en 1598. On a de Leur usage le plus essentiel est de ser- lui une Histoire de France, restée vir, dans les places assiégées, à éclai- manuscrite; de petits Traités de piété et un Discours imprimé en 1566. rer les travaux de l'ennemi. Boulet, projectile sphérique avec Les boulets rouges sont des boulets lequel on charge les canons. Sous le règne de Charles VI, vers l'an 1 385, on ordinaires qu'on fait rougir et qu'on se servait de boulets de grès, et ce fut seulement en 1400 qu'on leur substitua introduit dans une pièce de canon après les boulets en métal. Sous Louis XI, en 1470 , il y en avait en plomb et en qu'ils ont été chauffés au rouge clair. fonte de fer.* Depuis, on n'a plus em- ployé que ce dernier métal. Les bou- On employait d'abord les grilles pour lets sont pleins ou creux. Les boulets chauffer les boulets ; mais ce moyen pleins servent à détruire les batteries étant dangereux, lent et dispendieux et les remparts d'une ville assiégée, les retranchements de campagne, à porter on imagina les fourneaux à réverbère, le ravage dans les troupes enne- mies, etc. Les boulets creux sont prin- chauffés soit avec du bois , soit avec cipalement destinés à la défense des du charbon. Dans un fourneau à ré- côtes. verbère dont le feu est en train, un Les boulets creux ne sont autre boulet est rouge en trente minutes. chose que des obus sans culot que l'on ensabote pour les tirer, afin d'éviter Pendant que les boulets chauffent, on de casser leur fusée et de les faire éclater en sortant du canon. Les bou- met la poudre dans le canon, en pla- lets creux étaient autrefois des boîtes de fer longues d'environ deux calibres çant dessus d'abord un bouchon sec, et demi , et du diamètre du calibre de la pièce. Ces bottes renfermaient puis après une pelote de terre argi- des artifices, des balles, de la fer- raille, etc. Elles avaient une fusée en leuse pour l'enfoncer et la refouler cuivre entrant à vis dans un écrou, et ; chargée comme celle des bombes. on pointe la pièce, on l'amorce, après « Toutes les fois, dit Surirey de Saint- quoi deux canonniers prennent le bou- Remy, que l'on a fait l'épreuve de ces boulets creux, ils ont crevé en let avec une cuiller à deux manches, l'air, ou ils ne sont allés frapper la butte ou le blanc que par le travers , le portent à la volée de la pièce, l'y et non par leur pointe , ou les fusées introduisent, mettent du gazon ou un n'ont point pris , ou elles se sont éteintes, et leur effet, par conséquent, bouchon mouillé par-dessus , et l'en- est entièrement inutile. » foncent légèrement; ils se retirent aussitôt pour qu'on puisse mettre le feu promptement, et éviter le refroi- dissement du boulet. C'est au siège •de Stralsund, en 1675, que, pour la première fois en Europe, l'électeur de Brandebourg employa le tir à boulet rouge avec succès. Boulets messagers. On appelait ainsi des boulets creux doubles en plomb , dont on faisait usage pour donner des nouvelles dans une place assiégée ou dans un camp. Les boulets barrés ou ramés sont deux boulets joints par une barre de fer; ils sont destinés à couper les cor- dages et les manœuvres des vaisseaux, à déchirer les voiles, à briser les mâts, etc. Digitized by Google

190 Bor uimiviïps. On se servait aussi autrefois de bou- résoudre toutes les question* qui se lets coupés ou séparés, dont les deux rattachaient à l'état des personnes et moitiés se rejoignaient par une chaîne de fer de deux pieds. des biens, que la diversité de nos lois Bouliakne (Antoine), soldat à la et de nos coutumes rendait si difficiles 85e demi-brigade de ligne , né à Sa- baret (Ariege) , fit partie de l'expédi- —et si complexes. On connaît plu- Boullongne. tion d' Egypte, pendant laquelle il mérita la réputation de l'un des plus sieurs peintres de ce nom; le premier intrépides soldats de l'armée. Le 9 lé- vrier 1799, les Turcs, en grand nombre, est Louis Boullongne peintre du roi s'étaient retranchés dans une maison } d'où ils fusillaient nos troupes sans qu'il fût possible de répondre à leur membre de l'Académie, «qui chercha feu. Boulianne, irrité, s'avança jus- qu'à l'entrée de la maison , en brisa le goût des anciens, » selon d'Argen- la porte à coups de crosse de fusil renversa les barricades , et tomba at- ville , fit plusieurs tableaux pour Notre- teint d'un coup mortel : la maison fut aussitôt prise d'assaut. Dame de Paris, et mourut en 1674, à Boulliau (Ismael), astronome, né l'âge de soixante-cinq ans. à Loudun en 1605, mort à Paris en 1694. Les écrits de ce savant se font Bon BouLLorsGNE, son fils, qui na- remarquer par une érudition prodi- gieuse; on y trouvedes v ues ingénieuses quit à Paris en 1649, reçut de son père et nouvelles; mais ils fourmillent aussi les premières leçons de son art, et alla d'erreurs que Boulliau avouaitlui-même avec une franchise qui lui fait hon- ensuite étudier en Italie le Corrége, les neur. Boulliau , après avoir voyagé en Europe et dans le Levant , entra en Carraches, et surtout le Guide et le correspondance avec les savants les plus distingués de son époque ; et cette Dominiquin. Son tableau représentant circonstance n'a pas peu contribué à Hercule combattant les centaures et répandre son nom. Le nom tfévection, donné à Tune des inégalités du mou- les lapithes le fit recevoir à l'Académie vement de la lune, vient de lui; on en 1677. Il fut chargé, en 1702, de lui doit aussi une explication plausible de la cause des changements de lu- peiudre à fresque les chapelles de mière qu'on remarque dans certaines Saint-Jérôme et de Saint-Ambroise étoiles. dans l'église des Invalides. Il mourut Boi;llei*ois (Louis), jurisconsulte, en 1717. Il avait peint, outre les ou- né à Paris en 1680. Pendant près de soixante ans il exerça , avec beaucoup vrages que nous avons mentionnés, de distinction, la profession d'avo- plusieurs tableaux, et un certain nom- cat au parlement. C'était une des plus honorables réputations du bar- bre de plafonds pour Versailles et pour reau. Son Traité de la personnalité et de la réalité des lois, coutumes et Trianon. Cet artiste dessinait bien, et statuts (1766), lui mérite une place distinguée parmi nos jurisconsultes. son coloris était convenable. Il réussit On trouve dans ce livre la discussion également dans l'histoire et le portrait. la plus nette et la plus utile des ma- Ses élèves sont J. B. Santerre, L. Syl- tières les plus embrouillées de notre ancien droit. Il s'agissait, en effet, de vestre, J. Raoux, Cazes, Tournièrés, N. Bertin, Christophe, Dulin, Claude Verdot, le Clerc, etc. Louis, Geneviève et Madeleine Boul- longise, ses frères et sœurs, furentdes peintres moins distingués que lui. Tou- tefois Louis Boullongne, né en 1654, mort en 1733, est encore l'un des bons artistes de l'école française. Ses meil- leurs ouvrages sont les peintures de la chapelle de Versailles, surtout t An- nonciation et l'Assomption; on cite avec grands éloges sa Présentation de J. C. au temple, exécutée pour Notre- Dame de Paris. Il était premier peintre du roi. Boulogne, Gessoriacum et Bono- nia , ville de l'ancienne Picardie , avec titre de comté , bailliage et évêché suf- fragantde Reims, aujourd'hui chef-lieu de sous-préfecture du département du Digitized by Google

BOU FRANCE. mBOIT Pas-de-Calais, avec une population passèrent au fil de l'épée tous les de vingt mille huit cent cinquante-six habitants sans distinction d'âge ni habitants. de sexe , brillèrent tous les édifices et César ne parle pas de Gessoriacum; renversèrent les murailles. Ce ne fut le port où il s'embarqua pour son ex- pédition de Bretagne, et qu'il désigne qu'en 912, après le départ de ces bar- par l'expression de citerior portus, bares, que I on put commencer à re- est probablement celui d1 Ambleteuse9 lever les fortifications. Henri III , roi à trois lieues au nord de Boulogne (*). L'auteur le plus ancien chez qui l'on d'Angleterre,tentainutileraentdes'em- parer de Boulogne en 1347. Henri VIII trouve le nom de Gessoriacum est Pom- s'en rendit maître, en 1544, après un siège de six semaines; mais cinq ponius Mêla (**) ; après lui tous les écri- ans après, Édouard VI la rendit à la vains qui parlent des côtes septentrio- France, moyennant quatre cent mille nales de la Gaule, font mention de cette écus. Après la destruction de Thérouane ville (***). Quant au nom de Bononia, par Charles-Quint, en 1553, le siège ce fut d'abord celui d'un fort bâti au épiscopal qui se trouvaitdans cette ville, commencement de l'ère chrétienne, fut transporté à Boulogne , où il sub- au nord de Gessoriacum, de l'autre côté de VElna (aujourd'hui la Liane). sista jusqu'en 1789. Une communication fut établie par Le lecteur trouvera, dans l'article Drusus (****), au moyen d'un pont, en- suivant, l'histoire des grands événe- ments dont Boulogne fut le théâtre tre Gessoriacum et ce fort, où Cali- sous le consulat et dans les premières gula fit élever un phare célèbre qui années de l'empire. Disons seulement s'est conservé jusque sur la fin du ici que ces événements fuient pour cette ville une cause de progrès, et dix-septième siècle, sous le nom de contribuèrent beaucoup à la prospérité dont elle jouit aujourdhui. C'est, sans tour d'ordre, en latin, turris ardens^ doute, au souvenir de ces obligations et par corruption, turris ordansou or- que les habitants de Boulogne ont au drans. L'établissement Je ce phare, at- gouvernement de Napoléon, qu'il faut attribuer le choix fait de cette ville tirant les marins de ce côté de la Liane, par son neveu , le prince Louis Bona- la population de Gessoriacum les y parte, pour y essayer, en 1840, une suivit insensiblement; ce lieu fut bien- seconde tentative contre le gouverne- tôt abandonné; son nom disparut peu ment de juillet. à peu , et la ville n'en eut plus qu'uni seul , celui de. Bononia , d'où nous' Boulogne possède des tribunaux de avons fait Boulogne. première instance et de commerce, une direction des douanes , un syndi- Depuis cette époque jusqu'à nos jours, Boulogne fut plusieurs fois assié- cat maritime, des vice-consulats étran- gée; elle fut prise, en 292, par Constance gers, une école d'hydrographie de qua-; Chlore, sur les troupes de Carausius, trième classe, un collège communal qui s'en était emparé, après avoir une bibliothèque publique de vingt et ceint, dans la Grande-Bretagne, la cou- un mille volumes ; enfin , l'établisse- ronne impériale. ment des bains de mer de Boulogne jouit d'une grande célébrité. Les Normands, contre lesquels Char- lemagne y avait équipé une flotte Boulogne (camp de). Non loin de la en 811, la prirent d'assaut en 882, ville, à l'endroit peut-être d'où César (*) Cœsar, De Bell Gall, lib. v. Voyez effectua son passage en Angleterre s'élève une colonne en pierre, cons- Walckenaer, Geographiê ancienne des Gau- truite sur le modèle de la colonne tra- les, t. I, p. 418 el suiv. jane. Ce monument, commencé eq De m(**) situ orbis, liv. , ch. 4- 1803, mais seulement achevé vingt ans plus tard, rappelle le souvenir du camp (***) Voyez Pline, liv. nr,ch. 17 ; Ptolem. de Boulogne, où Napoléon, rassembla géogr. , liv. ti , ch. 8 Geogr. min. Insi- ; gn'um urbium, lib. vu , ch. a. (\"\")Flor. U>. x.ch. 1*. Digitized by Google

193 BOU LTJN 7ERS. BOU cent cinquante mille hommes, qu'un l'autre en 1797, lors du traité deCam- de ses plus beaux plans de campagne po-Formio, tous les esprits, remon- paraissait devoir infailliblement con- tant à la cause première de ces ligues duire à Londres. incessantes , se mirent à la recherche des moyens de transporter le théâtre Dès le début de la révolution , l'a- ristocratie anglaise s'appliqua sans re- de la guerre sur le sol anglais, qui lâche à nous susciter partout des en- avait été le véritable point de départ nemis. Son ancienne jalousie, aug- .de toutes les hostilités contre la mentée encore par la crainte qu'inspi- France. C'est dans ce but qu'après les raient nos principes d'égalité , la dé- campagnes d'Italie le Directoire avait cida à ne reculer devant aucune intri- nommé Napoléon général en chef de gue et devant aucun sacrifice pour l'armée d'Angleterre, et l'avait en- étouffer le réveil du peuple français. voyé en cette qualité sur les côtes de Néanmoins, conformément aux tra- l'Océan. ditions héréditaires de cette politique Déjà précédemment, en 1796 , le gé- néral Hoche, qui venait de pacifier la qui ne cessa jamais d'entretenir la di- vision sur le continent européen , elle Vendée, avait eu l'idée généreuse de eut, au commencement, la prudence porter du secours aux Irlandais révol- de ne pas descendre dans la lice. tés. Si ce projet avait réussi , l'Angle- terre à son tour aurait eu sa Vendée, Ayant besoin de tous ses bras pour le service de sa marine et de son com- et le peuple le plus malheureux de merce , qui , grâce au bouleversement l'Europe aurait brisé ses fers; mais du monde , allaient prendre une ex- une tempête furieuse assaillit IVscadre tension inouïe, l'Angleterre nous com- française, et la contraignit à regagner battit d'abord avec le sang des autres le port de Brest sans avoir pu tou- peuples, les soudoyant en apparence, cher le rivage de l'Irlande , d'où tant mais, en réalité, ne les payant qu'avec de victimes avaient salué nos soldats une partiede l'or que les bénéfices de son comme des libérateurs. Peu encouragé négoce leur avaient arraché.En un mot, par ce précédent , se sentant d'ailleurs elle employa contre la grande nation entraîné vers l'Égypte Bonaparte se , la même tactique qu'elle avait, un contenta alors d'inspecter les princi- siècle auparavant, essayée contre le paux ports de* l'Océan , et d'indiquer grand roi. C'étaient toujours la même Boulogne comme un point d'attaque ambition mercantile, le même machia- supérieur à celui de Calais. Jusque-là vélisme , les mêmes calculs d'argent on avait donné la préférence à Calais, si familiers à une caste oligarchique, qui ne se trouve qu'à sept lieues de aux yeux de laquelle l'or était le meil- la côte anglaise , tandis que Boulogne leur, sinon le seul moyen de gouver- en est distante de plus de neuf lieues; nement, et pour ainsi dire la clef de mais on avait négligé de tenir compte la domination universelle. du courant général de la marée gui De là ces coalitions de 1792, mais porte sur Douvres, avantage décisif surtout de 1793 et de 1798, dont l'An- pour le succès d'un débarquement. gleterre était l'âme, et dans les rangs Peu de temps après le départ de desquelles figuraient à peine quelques Bonaparte pour l'Orient, le Directoire soldats anglais car, pour ce qui con- adopta le système des petites expédi- ; cerne la guerre maritime, le cabinet tions, les seules qui lussent encore de Saint-James la menait à lut seul et possibles depuis l'éloignement d'une pour son propre compte, bien plus que partie de la flotte. Le 6 août 1798 , le général Humbert partit de Rochefort dans l'intérêt commun des alliés. La France ne fut pas un seul instant dupe a la tête de mille trente-deux hommes, de cette politique tortueuse. Aussi, montés sur deux frégates et un vais- une fois que la Prusse et l'Autriche seau, et, à la suite d'une traversée se furent avouées vaincues , l'une en pénible parvint à mettre pied à terre , 1796, à l'époque du traité de Bâle, en Irlande. Les succès qu*H y obtint Digitized by Googl


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